Certains diront que c'est une preuve supplémentaire que je mange à tous les râteliers. D'autres diront que, franchement, avec tout le sucre que je leur casse sur le dos, travailler là-bas pendant les vacances, c'est plutôt culotté ! Seulement voilà... premièrement, qui dirait non à quelques galions supplémentaires pour arrondir les fins de mois ? Et ensuite, lorsque le responsable du service est venu pour me débaucher à la fin de l'année scolaire, franchement, l'occasion était trop belle pour montrer à tous que : non, je ne suis pas juste bonne à réduire des fractures et apaiser les démangeaisons. Comme je ne cesse de le répéter : infirmière, c'est réducteur ! Après tout, je suis guérisseuse, moi, comme tout le monde ici !
Enfin, comme tout le monde... certains ici semblent aussi doués qu'un babouin avec une baguette magique. Je me demande si le manque de personnel n'a pas forcé Sainte-Mangouste à revoir à la baisse ses exigences en termes de compétences. Après quelques jours seulement, j'ai obtenu du médicomage en chef la responsabilité de m'occuper seule d'une partie du service. De cette façon, les autres employés peuvent se relayer sur leurs patients sans venir contaminer les miens de leurs bêtises. Pas question que je sois associée aux erreurs de soins des autres ; j'ai bien assez à faire avec mes propres imperfections sans avoir à ajouter celles des autres.
Voilà maintenant un mois et demi que je soigne les plaies, surveille l'extension des poisons, recherche les antidotes les plus pertinents, régule la température des corps et nettoie les blessures jour après jour, jusqu'à ce que les patients soient suffisamment remis pour être renvoyés à la maison. Parmi mes patients, j'ai même eu la surprise de reconnaître quelques visages connus ! Un élève de Serdaigle mordu par un gnome et dont la plaie s'était infectée faute de soins suffisants. Un autre de Gryffondor, habitué de l'infirmerie du château pour ses cascades sur le terrain de quidditch, qui avait cette fois décidé d'élever un Strangulot (tu parles d'une idée de génie...).
Depuis quelques jours toutefois, c'est plutôt le cas de monsieur Ackwood qui me préoccupe. D'après ses dires, il aurait été mordu par une accromentule dans la forêt de Puck’s Glen, ce qui est déjà un fait étonnant en soi, mais le plus étonnant, c'est que sa blessure semble s'aggraver de jour en jour. D'abord discrète bien que douloureuse, la blessure s'étend maintenant sur l'ensemble de son mollet, et sa peau prend une jolie couleur vert émeraude teintée de violet. Quant à l'odeur...
Pour la troisième fois de la semaine, je vais essayer de lui appliquer un anti-venin de mon cru ! Les deux précédents n'ont eu pour effet que de diminuer la douleur ; si celui-ci ne marche pas, je serai obligée de faire appel à un spécialiste en la matière, ce qui, très franchement, me fait chier ! Je suis presque sûre que sa morsure n'est en rien due à une accromentule... mais faute de preuve, je ne vais pas cuisiner le pauvre homme. S'il préfère mourir plutôt que dire la vérité, c'est qu'il doit avoir de sacrées bonnes raisons. J'irai peut-être faire un tour du côté de Puck's Glen prochainement... histoire de voir quel genre de bestioles y rôde.