Harry Potter RPG

Liste des messages de Anya Nikitovna

Anya Nikitovna

Femme

18 ans

Sang-mêlé

Russe

Solitude

Message publié le 14/03/2025 à 20:33

La nuit tombait sur Pré-au-Lard dans un silence feutré, engloutissant les ruelles pavées sous un ciel chargé d’étoiles mortes. L’hiver n’avait pas encore mordu, mais l’air portait déjà cette sécheresse mordante qui annonçait les premières gelées. La silhouette sombre d’Anya Nikitovna se détachait dans l’ombre des bâtisses, glissant entre les venelles désertes d’un pas mesuré, presque absent. Elle n’avait pas de destination précise, pas d’endroit où aller. Elle marchait pour s’éloigner, pour chasser la sensation suffocante des murs de Poudlard qui se refermaient sur elle. Elle détestait cette école. Tout ici lui semblait faussement chaleureux, artificiellement bienveillant. Les élèves riaient trop fort, s’inquiétaient de choses insignifiantes, se liaient avec une facilité déconcertante, comme si l’attachement n’était pas une faiblesse. Comme si l’amitié ne pouvait pas se retourner contre eux et leur arracher ce qu’ils avaient de plus précieux.

 

Elle n’avait jamais eu d’amis. Elle ne savait pas comment faire.
 

Sa seule famille était un père tombé au front, une mère enterrée sous les décombres d’un ministère en ruine, un frère disparu, peut-être mort, peut-être pire. Chaque soir, elle dormait dans un dortoir rempli de filles qui la regardaient comme une étrangère, une ombre figée dans un monde trop bruyant. Anya pressa le pas, longeant la lisière du village jusqu’à ce que la silhouette de la Cabane Hurlante se découpe dans l’obscurité. Un endroit abandonné. Un endroit aussi isolé qu’elle. La porte grinça lorsqu’elle la poussa, laissant derrière elle la lumière distante des lampadaires de Pré-au-Lard. L’odeur de poussière et de bois pourri s’engouffra dans ses narines, et elle inspira profondément, s’imprégnant de cette odeur de mort et d’abandon. Ici, personne ne viendrait la chercher. Elle referma la porte derrière elle. Les planches craquèrent sous ses pas lorsqu’elle traversa la pièce principale, passant un doigt sur les murs griffés, témoins silencieux de décennies de légendes et de rumeurs. On disait que cette maison était hantée, qu’elle résonnait des cris d’un loup-garou qui y avait vécu autrefois. Des histoires pour effrayer les premières années.
 

Elle n’avait jamais eu peur des histoires.
 

Anya s’accroupit près d’une vieille cheminée éteinte et déposa son sac à côté d’elle. Elle le fouilla distraitement, en tira un paquet de cigarettes moldues qu’elle avait échangé à un élève contre quelques mornilles. Ses doigts tremblaient légèrement lorsqu’elle porta l’une d’elles à ses lèvres et l’alluma d’un coup de baguette. Une première bouffée. Lentement, la fumée envahit ses poumons, brûla sa gorge, s’échappa en volutes pâles qui se dispersèrent dans l’air glacial. Elle fixa les flammes invisibles d’un feu qui ne brûlait pas. Pourquoi est-ce que tout lui semblait si lointain ? Le monde continuait de tourner sans elle. Chaque jour, elle assistait aux mêmes conversations vides, aux mêmes jeux d’adolescents insouciants. Elle ne savait pas comment être comme eux. Elle ne savait pas comment exister dans ce monde où l’on pouvait rire sans arrière-pensée.


Elle était seule. Et elle le resterait.

Ses mèches s’assombrirent d’elles-mêmes, et son regard se perdit dans le vide. Elle n’appartenait pas à cet endroit. Elle n’appartenait plus à la Russie non plus. Elle n’appartenait nulle part. Alors à quoi bon essayer ? Anya laissa échapper un rire sans joie, étranglé dans le silence, et écrasa sa cigarette contre le plancher. Personne ne viendrait la chercher. Personne ne l’attendait. Ce soir, la Cabane Hurlante était le seul endroit où elle se sentait réellement chez elle.


Piège de Crotales

Message publié le 02/03/2025 à 15:33

Le type fait le fier. Rien d'étonnant. Anya a pas souvenir d'un seul gars qu'ait pas ce genre de réflexe idiot. Même le cul sur une pierre glacée, même la gueule en sang. Pas un merci, juste un va te faire foutre à moitié craché dans l'air, des yeux noirs assassins. Ça lui suffit pour savoir qu'elle a tapé dans le mille. Elle bronche pas quand il s'énerve, quand il crache, elle bouge même pas d'un millimètre et reste à le braquer d'un regard sec.

- Ça me fait pas pitié, en tous cas, elle se contente de répondre à sa dernière question.

De là à lui faire plaisir ? Certainement pas. Que s'imaginait-il ? Anya n'avait jamais vu les horreurs de la guerre qu'au travers des photographies de presse, et ça avait amplement suffit à lui faire comprendre que la vue de corps entassés et dégoulinant d'un sang presque noir ne lui procurait aucun plaisir. Ça ne faisait que lui rappeler comme son frère avait pu subir précisément ce genre de chose, entre les mains des ukrainiens.

- Ils sont trop jeunes pour comprendre les conséquences de leurs actes. Elle marque un silence. Je ne parle pas de toi, Sasha, comme je t'ai dis tu me fais pas pitié. Je m'en tape des coups que tu peux prendre. C'est le sort réservé aux menteurs, et aux traitres. Elle crache. Je parle d'eux. Ce sont des gosses. Si on les prend à jouer à être des hommes comme ça ? On les renverra en Russie, sur le front, se battre contre d'autres gars comme toi. Ils finiront dans des boîtes, et ils auront plus que leurs mères et leurs sœurs pour les pleurer, si elles sont encore en vie.

Anya avait énoncé ça d'un ton détaché, comme ils discuteraient d'un sujet trivial comme la dernière révolution des gobelins, ou la guerre des géants du quatrième siècle.

- Alors tu diras rien, elle termine d'un ton ferme, sa poigne sur sa baguette raffermie, cette dernière un peu rehaussée comme pour lui rappeler qui était en position de force. Parce que t'es un menteur et un manipulateur, mais t'es pas un cafard, pas vrai Sasha Shevchen ?

L'ukrainien cumulait toutes les tares à ses yeux. Il avait été l'une des premières personnes à laquelle Anya s'était confié depuis son arrivée à Poudlard, la première réellement qui provienne de son pays. Tout ça pour découvrir qu'il ne provenait non seulement pas de son pays, mais qu'en prime il provenait du camp adverse. Tout ça pour qu'il lui vole ce qu'elle avait de plus précieux, et ne les lui rende pour une raison qui lui échappe encore à ce jour. De la pitié, peut-être. Elle détestait l'idée d'avoir pu faire pitié à Sasha Shevchen plus que tout autre chose. Menton dressé, elle le balaie du regard avec une haine fougueuse.

Il a l'air en peine. Il a l'air fatigué. Il a l'air triste et seul. Mais elle n'a pas pitié. La pitié est pour les faibles. La pitié est pour ceux qui mentent, qui volent. La pitié est pour les garçons comme Sasha qui ne savent pas même se défendre au milieu d'une école, et qui se retrouvent à rendre ceux qu'ils volent par crainte, ou par intérêt.


Piège de Crotales

Message publié le 15/02/2025 à 17:42

Les mois passaient. Rien n'évoluait. Ni la guerre qui continuait de ravager son pays et de les empêcher, elle et tous les autres, de rentrer ; ni son goût pour le territoire britannique ; ni son avis sur cette école et ses méthodes d'enseignement. Seule sa métamorphomagie semblait s'assagir à mesure que l'été se faisait plus lointain, emportant avec lui le visage porcin de McClay. Chaque cours était suivi avec la rigueur qu'on lui connaissait, et sur son temps libre Anya se rendait systématiquement dans la bibliothèque ou en salle d'études - lorsque la présence Lord Beckett se faisait trop joyeuse à son goût -, pour avancer ses devoirs ou les compléter de recherches approfondies. Elle estimait sans peine que son niveau allait à la baisse depuis qu'elle avait quitté les bancs rigides de Koldostoretv, et elle était parvenu à obtenir l'autorisation d'un professeur pour se rendre en réserve et s'instruire sur des sujets soi-disant plus avancés. Entendez par là que les précieuses têtes blondes de Poudlard ne trouvent pas dans leur programme ces exercices pouvant heurter la sensibilité de uns ou des autres.

Ce jour ne fait pas exception sur le planning rigoureux d'Anya, qui ne quitte la salle d'études que bien après l'ensemble de ses camarades, pour enfin rejoindre les cachots. La semi-obscurité permanente a quelque chose de serein, de même que le silence qui la drape naturellement entre les épaisses parois de pierre. Ses bottines noires, dont les lacets remontent jusqu'aux chevilles, n'échappent pas le son des souliers cirés des autres filles, ou pour certaines de leurs talons pas plus haut que cinq centimètres. Les Alison Carter ou autre Viviane Valcourt ne semblent pas réaliser combien leur apparat peut nuire à leurs facultés naturelles pour la course. Engoncé dans l'éternel pantalon d'uniforme noire, et une chemise parfaitement rentrée à l'intérieur, Anya s'était plus tôt délesté de sa cravate et de la veste aux couleurs de Serpentard, qu'elle avait enfoncé dans son sac. C'était peut-être la seule différence appréciable entre Poudlard et Koldostoretv, cette tolérance au sujet de l'uniforme en dehors des cours qui permettait de se relâcher pour étudier.

Anya se défait d'un geste de son chignon strict, son regard circulant d'une porte à l'autre sans y payer grande attention.

C'est alors que surviennent le claquement régulier de pas pressés, au fond du couloir, et tout droit dans sa direction. Ses yeux s'accrochent à la silhouette d'un gamin de peut-être treize, ou quatorze ans, qu'elle reconnait immédiatement. Anya ne se mêlait pas aux camarades russes qui peuplaient le château, mais elle connaissait chacun de leur visage ainsi que chacun de leur nom. Celui-ci se nommait Fridrik Ivanovitch, et c'était un quatrième année peu téméraire qui semblait suivre un groupe davantage qu'en faire partie. Ses yeux plantés sur Anya, il se fige brutalement comme s'il ne s'était pas attendu à tomber sur qui que ce soit, puis finalement il l'agrippe par la manche avec vigueur pour lui faire part de ce qu'il se passe, à toute vitesse, dans un russe catastrophé. Les autres ont coincés Sasha Shevchen. Ils sont en train de le tabasser dans une classe.

Stan a un couteau.

Sourcils froncés, Anya le suit presque malgré elle tandis qu'il l'entraine à sa suite, et elle jure à plusieurs reprises. Elle avait pris soin d'esquiver la route de Sasha Shevchen depuis octobre. S'était contenté d'informer les autres qu'il ne fallait pas lui parler, qu'il était un chien d'ukrainien, et ça avait été tout. Sans doute serait-ce allé plus loin s'il n'avait pas eu la jugeotte de lui rapporter ses affaires. Ces dernières ne quittaient plus jamais son dortoir, scellées dans le fond de son coffre personnel.

- Какого черта ты делаешь ? Vous foutez quoi ? Elle demande aussitôt entré dans la pièce. Son nez se plisse alors qu'une odeur métallique fait irruption. прекрати свою чушь, ты собираешься втянуть нас в беду. Arrêtez vos conneries, vous allez nous attirer de la merde.

Anya s'attire le regard des garçons, âgés de treize à quinze ans. Étant l'aîné de tous, ils avaient pour elle un respect qu'ils n'auraient habituellement pas eu pour une fille. Aussi tous se figèrent, bien que Stan dardait sur elle un regard mauvais.

- Это украинский пес, ему просто нужно умереть ! C'est un chien d'ukrainien, il a qu'à crever !
- Как ты думаешь, мы не выгоним тебя, когда увидим, что ты избил парня десять к одному ? Qu'est-ce que tu crois, qu'on va pas t'foutre à la porte si on voit que tu tabasses un gars à dix contre un ?
- Мне все равно ! J'm'en tape !
- Пусть это будет глупо. Lâche ça, débile.

D'un simple coup de baguette, Anya a désarmé Stan. Ils continuent de s'envoyer chier pendant plusieurs secondes avant que l'autre ne capitule en crachant aux pieds de Sasha et en jurant. 

- Убирайся ! Dégagez !

Ses copains n'ont visiblement pas plus envie que ça de se confronter à Anya, et plusieurs coulissent un regard terrifié vers l'ukrainien avant de suivre Stan vers la sortie. Bientôt, il ne reste plus que Shevchen et Anya dans l'étroite pièce, dont l'air semble saturé. De sang et de sueur. La sorcière n'hésite qu'une seconde avant de libérer le garçon de son entrave. Elle conserve une distance certaine entre eux, sa baguette toujours levée.

- Поэтому тебя выгнали с войны ? Вас вообще дразнят дети ? C'est pour ça que t'as été renvoyé de la guerre Shevchen ? Tu te fais rétamer même par des gosses ?


Ça vole sur des brindilles

Message publié le 16/12/2024 à 18:07

Les lèvres tendues, Anya ne réagit guère ni à Brooks, ni à Pope. Ce serait bien son dernier recours. Brièvement, elle fronce les sourcils à la réaction de Spike devant le départ de ses camarades, mais ne relève pas. Le comportement social de ses pairs britanniques n'a clairement rien de celui qu'elle connait de Koldostoretv. Le sujet ne l'intéresse que très peu, aussi se focalise t-elle plutôt sur les réponses apportées par le garçon au sujet de sa métamorphomagie. Des réponses qui par ailleurs, la prennent entièrement de court.

 

- Spécial c'est pas au-dessus, elle énonce fermement. C'est juste différent.

Personne a envie d'être différent. Pas là d'où elle vient. C'est le meilleur moyen de devenir une cible. Ici cependant, Anya n'a pas manqué remarquer l'étrange habitude de chacun de vouloir par tous les moyens se faire remarquer. Sortir du lot, pour ne pas faire partie de la masse. Pas d'unité, sur le territoire britannique. Un vaste paysage d'hommes et de femmes plus excentriques les uns que les autres, ne manquant ironiquement pas de lui sembler similaire en tous points. Son pays représentait une puissance unifiée, où celui des Royaumes Unis se montrait morcelé, incapable d'avancer dans une même direction sans qu'une majorité de son peuple ne se révolte pour le simple plaisir de se révolter, et de se faire remarquer.

- Je sais je suis pas normale. Mais d'habitude je maîtrise assez pour qu'on le devine pas. Je veux pas utiliser la métamorphose, et je veux pas qu'elle m'utilise non plus.

Son visage est brièvement agité d'une grimace. L'admission est terrible. Elle perd le contrôle. Le sait pertinemment. Ça la terrifie, au point d'être prête à partager l'information avec un garçon qu'elle ne connait assurément pas, et qui semble se complaire d'être une tare de la société, armé d'un don qui fait de lui quelqu'un de spécial. Que croit-elle ? Il n'aura aucune solution à lui apporter. Il aime sa métamorphomagie. S'en sert ouvertement, comme s'il devait en éprouver de la fierté. En rit. Ne voyait-il pas la malédiction que c'était ? En Russie, certains sorciers nommaient les métamorphomages des sans-visages. Ceux qui sont tout le monde à la fois, ceux qui ne sont personne.

Parfois, devant le miroir, Anya se demandait si ce qu'elle était naturellement n'était pas une tromperie en soit. Un visage qu'elle s'était créé de toute pièce.

- Je demanderai aux professeurs, elle conclut d'elle-même, ne laissant transparaitre aucune émotion malgré ses boucles rougeoyantes. Merci pour tes conseils, elle ajoute avec éducation.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 22:07

La culpabilité. C'est ce qui avait été le plus dur à avaler. Elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle-même, n'est-ce pas ? Eut-elle réfléchi en amont, elle n'aurait amené qu'une pochette vide avant de confronter Sasha. Sombre idiote. Anya avait beau n'avoir rien mangé de la journée, elle avait vomi tripes et boyaux dans le fond des toilettes à plusieurs reprises à son retour de la forêt interdite. Aucune âme ne s'était avancé à lui poser la moindre question quant à ce qui s'était passé le matin même. Un regard noir avait suffit à disperser les envies de quelques valeureux qui avaient semblé vouloir lui adresser la parole sur le chemin de la Grande Salle. Anya n'avait aucune envie de se montrer au dîner, mais elle estimait qu'une troisième absence à la table des serpentards commenceraient à éveiller des soupçons.

 

D'humeur massacrante, elle n'avait bien sûr touché aucun des aliments qu'elle avait empilé pêle-mêle dans son assiette. Elle se contentait de faire rouler certaines boulettes de viande du bout de sa fourchette, et de déplacer les aliments sans logique aucune. Vide. Elle se sentait vide. Vide et stupide. Profondément stupide de son propre manque de jugeotte. Profondément en colère aussi après Shevchen et sa foutue obsession pour l'Unificateur. Alors lorsque sa tête se dressa pour croiser le regard de l'ukrainien qui venait de pénétrer à l'intérieur de la large pièce, ce fut comme si un silence s'installait tout autour d'eux. Le brouhaha des élèves brusquement éteint, Anya ne décolla guère ses pupilles de la silhouette trapue du garçon, qui s'avança directement dans sa direction.

 

Un réflexe maladif voulu qu'elle porte la main à la poche de sa robe, comme pour chercher à se défendre d'une attaque. Là. Au milieu de tous les autres. Au nez et à la barbe de tous les professeurs. Mais malgré un cœur battant, elle se retint, tant l'idée était absurde. La pochette claqua vivement contre le bois, à quelques centimètres à peine de son assiette pleine, et elle ne la regarda même pas. Non son regard était relié à celui de l'ukrainien pour ne plus s'en décrocher. Elle ne s'en décrocha que lorsqu'il lui tourna le dos, mais resta longuement ciblé sur lui, comme incapable de même ciller. Puis, enfin, le bruit des élèves autour d'elle fut de nouveau présent, avec une puissance remarquable, et elle affaissa son attention sur ce qu'il avait apporté. Sa main attrapa la pochette avec vivacité.

 

Autour d'elle, quelques chuchotements glissés d'une oreille à l'autre. Là des regards qui trainaient sur ce qu'elle agrippait avec des jointures blanches. Le visage fermé, elle se leva brutalement et se décida à quitter la table. À quitter la pièce. Sans un regard vers Sasha Shevchen, ou quelqu'autre membre du clan rouge et or. Ses pas la menèrent au bas des escaliers, l'enfoncèrent dans les cachots, la laissèrent rejoindre la salle commune, puis le confinement de son dortoir entièrement désert. Là, elle jeta la pochette sur son bureau, l'ouvrit avec une précipitation terrible avant de feuilleter l'intégralité du contenu dans des gestes erratiques. Lorsqu'enfin elle trouva ce qu'elle cherchait, elle avait le visage inondé de larmes, et des couteaux qui lui transperçaient le cœur à répétition. Idiote. Idiote. Idiote.

- прощение, прощение, прощение. Pardon, pardon, pardon.

Elle n'adressait ses paroles à personne en particulier. Ses mèches avaient pris une teinte d'un bleu sombre abominable, et elle rassembla l'intégralité des photos pour les serrer contre sa poitrine, répétant son mantra avec une voix qui se brisait un peu plus à chaque instant. Bien avant qu'aucune des autres filles du dortoir n'ait reparu, Anya avait rangé l'intégralité de ses affaires, les avait scellé dans le fond de sa malle à l'aide d'un puissant sortilège. Les rideaux tirés autour de son lit, elle était demeuré assise, les yeux dans le vide, et les lèvres étirées en une ligne fine, chargée d'une haine viscéral. Sasha lui avait rendu ses possessions, et pourtant elle ne parvenait pas à ressentir autre chose que de la haine à son encontre.

 

De la haine pour s'être fait passer pour ce qu'il n'était pas.

De la haine pour avoir abusé d'une confiance qu'elle ne donnait à personne. De la haine pour avoir souillé les photographies de ses doigts sales
De la haine pour avoir posé les yeux sur une chose qu'elle tenait secrète, et qu'elle avait eu la stupidité d'étaler au grand jour.

De la haine pour elle-même, finalement, qu'elle enfonçait de ses ongles sous la chair d'une peau molle, pâle et absurdement fragile.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 18:28

Un nouveau juron lui déborda des lèvres alors que la réserve du garde-chasse lui coupait brutalement la route. Le temps qu'elle mit à contourner le problème, Sasha Shevchen avait disparu.

 

Maksim Nikitovitch avait enseigné à ses deux enfants l'art de la chasse. Il les emmené de nombreuses fois dans les profondeurs de forêts épaisses, loin de la ferveur urbaine de Moscou, et ils avaient occasionnellement campés plusieurs jours de rang, à se raconter des histoires au coin du feu. Jamais Mara ne manquait de rappeler à son époux comme Anya n'avait guère sa place dans ce genre d'activité, mais c'était bien la seule chose que Maksim ne concédait pas à sa femme. Traditionnaliste dans l'âme, il estimait que sa fille devait malgré tout être tout aussi capable de se défendre que de survivre en pleine nature.

 

Alors la jeune russe était armée d'autant de patience et de ruse lorsqu'il s'agissait de débusquer un gibier.


Les minutes s'écoulèrent. De sa furie ne persistèrent que quelques pointes orangées dont elle ne se formalisait plus depuis longtemps. Ses iris avaient repris leur teinte sombre originelle. Baguette en main, elle avait ralenti le pas jusque se faire complètement silencieuse, épiant chaque mouvement de branche, tournant la tête au moindre craquement. La furtivité dont elle faisait preuve restreignait l'ukrainien à faire de même, où qu'il soit. Ils s'étaient enfoncés assez loin entre des troncs de plus en plus épais. Elle estimait avoir dépassé les frontières du domaine de Poudlard depuis un petit moment, et il n'y avait plus autour d'eux la moindre barrière pour leur donner même la vague impression d'être encore sur le territoire de l'école.

 

Ils ne devaient sans doute leur immunité ponctuelle qu'à l'absence du garde-chasse, en mission à l'extérieur de Poudlard depuis déjà plusieurs jours.

Anya ne lâcherait rien sans avoir trouvé Sasha. Il détenait les seuls souvenirs qu'elle avait pu emmener de sa maison. Les derniers vestiges de sa famille. Il avait sans le savoir dévalisé les seuls objets de valeur qu'elle possédait, et pour ça elle ne lui pardonnerait jamais. Ne se pardonnait pas, déjà, de n'avoir pas pensé à les séparer des journaux dès qu'ils avaient commencé à se voir régulièrement pour les lire ensemble. Idiote. Son pas mesuré arpentait une mousse humide dont sortait parfois quelques insectes énormes qui courraient se réfugier dans le creux de souches dévorées par le temps, ou de roches affaissées à leurs pieds.

 

Des heures passèrent, et Anya maudissait presque que l'on soit un dimanche, et que rien ne force l'ukrainien à s'extirper de sa cachette. Quoi qu'elle était à peu près sûre que même la perspective d'une retenue avec un professeur ne suffirait pas Sasha à se montrer. Il était on-ne-peut-plus déterminé à décortiquer son dernier numéro de l'Unificateur. N'avait-il pas de foutu journal dans son foutu pays ? Devait-il dépendre de nouvelles d'un papier imprimé de l'autre côté de la frontière pour en apprendre plus sur les avancées de ses propres alliés ? Absurde. Il ne voulait que la priver de la seule chose qui la rattachait encore à sa patrie.

 

Ce n'est que tard, très tard dans la journée, qu'Anya consentit à abandonner. Le déjeuner était passé depuis longtemps, et la forêt s'assombrissait tant qu'elle en devenait plus dangereuse à chaque seconde. Il était évident que l'endroit n'était pas interdit pour rien, et elle n'était pas stupide au point de risquer sa vie pour des photographies. Que l'ukrainien crève pour ses précieux articles si ça lui chantait. Depuis un moment déjà, sa chevelure avait recouvré sa noirceur originelle. Elle leva sa baguette dans une direction aléatoire et ne lança qu'un sortilège, espérant que Sasha était là pour la voir, ou au moins l'entendre. Espérant qu'il resterait planqué des heures encore, jusque se faire dévorer par ce qui se terrait dans les alentours, quoi que ce fut.

- Abstergeo.
 

Un arbre prend le sortilège de plein fouet, et se trouve entaillé avec force, comme s'il avait été pourfendu d'une griffe monstrueuse. Une nuée d'oiseaux s'élèvent vers le ciel en pépiant bruyamment, et Anya les observe sombrement.

- Crève Schevchen, murmure t-elle simplement avant de repartir en direction du château.

 

Anya Nikitovna a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège du Balayage Tranchant
Difficulté
Résultat D20
19
Interprétation
Réussite
XP gagnée
3

Un arbre prend le sortilège de plein fouet, et se trouve entaillé avec force, comme s'il avait été pourfendu d'une griffe monstrueuse. Une nuée d'oiseaux s'élèvent vers le ciel en pépiant bruyamment, et Anya les observe sombrement.

- Crève Schevchen, murmure t-elle simplement avant de repartir en direction du château.

Autres résultats possibles

Un arbre est scindé en deux, la masse supérieure tombant lourdement sur le sol. Une nuée d'oiseaux s'élèvent vers le ciel en pépiant bruyamment, et Anya les observe sombrement.

- Crève Schevchen, murmure t-elle simplement avant de repartir en direction du château.
Le sortilège s'échoue sur un tronc épais, qui ne frisonne pas même un peu. Anya jure et crache au sol.

- Crève Schevchen, murmure t-elle simplement avant de repartir en direction du château.
Le silence pour seul accueil, et les yeux noirs d'Anya se pose sur sa baguette. Elle aurait du prononcer le sort dans sa langue maternelle, sans doute aurait-il eu plus d'effet. Elle jure et crache au sol.

- Crève Schevchen, murmure t-elle simplement avant de repartir en direction du château.

A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 16:14

- Yблюдок ! Bâtard !

Le juron s'était échappé des lèvres d'Anya en même temps qu'elle redressait sa baguette pour informuler un maléfice, qui s'échoua contre une porte close. Il n'en fallu guère plus pour la voir s'élancer après l'ukrainien. La fureur avait tissé des couleurs flamboyantes dans ses mèches, et ses pupilles s'étaient elles-même illuminées d'un incendie brûlant. Pourquoi avait-elle emporté cette pochette avec elle alors même qu'elle comptait confronter Sasha ? Idiote. Ses jambes la portaient rapidement, et elle ignorât les regards des élèves interloqués qui regardaient tour à tour le dos d'un ukrinien qui filait déjà vers le rez-de-chaussée. Habituellement d'une discrétion telle qu'on en venait à oublier sa présence, Anya était devenue la représentation même de la furie, jetée après le garçon avec une hargne qu'on ne lui connaissait guère.

 

Sa baguette au poing, elle courait vite. Pas assez pour rattraper le garçon cependant, dont elle peinait à garder la silhouette en vue. Elle n'abandonnerait pas cependant. Jamais. Il avait volé quelque chose de trop précieux pour ça. Aux numéros de l'Unificateur s'additionnaient des articles réclamés spécialement par courrier, dans lequel on retrouvait les en-tête de missions qu'elle savait menées par son père. La mention de conflits auxquels Pavel avait participé avec le reste de sa compagnie. Des photographies du ministère russe en ruine, souvenir funeste dans lequel sa mère avait péri. D'autres photographies, personnelles, qu'elle conservait dans des replis cachés, et sur lesquels on pouvait voir sa famille au complet, en des temps qui avaient été plus simples et plus heureux.

 

- Oстанавливаться мудак ! Arrête-toi connard !

L'ukrainien avait filé vers l'extérieur, mais il mettait tout en œuvre pour ne pas courir en ligne droite, empruntant des sentiers qui contournaient d'immenses bosquets, s'enfonçant toujours plus avant dans le parc glacé. À cette heure, il n'y avait guère de témoins pour les observer, seuls quelques oiseaux qui ne semblaient pas leur prêter la moindre attention. Dès lors qu'Anya eut un angle de tir, elle dressa sa baguette vers l'avant en beuglant :

- 3аморозить !
 

Le sortilège s'écrase sur un arbre, et Anya jure entre ses lèvres en accélérant brutalement.

- Ты мертв Шевчен ! T'es mort Shevchen !

 

Anya Nikitovna a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège de Stupéfixion
Difficulté
Résultat D20
6
Interprétation
Réussite
XP gagnée
10
Sasha est pétrifié, et Anya le rattrape en quelques secondes à peine pour récupérer d'un geste vif sa pochette, braquant sur lui un regard noir. Ou plutôt incendiaire.

- T'es mort Shevchen.

Elle crache par terre avant de détaler, très consciente de devoir d'abord mettre à l'abri son trésor avant d'imaginer mettre l'ukrainien à terre pour de bon. Il ne faudra qu'une poignée de secondes pour que Sasha reprenne possession de ses membres.

Autres résultats possibles

Sasha est pétrifié, et Anya le rattrape en quelques secondes à peine pour récupérer d'un geste vif sa pochette, braquant sur lui un regard noir. Ou plutôt incendiaire.

- T'es mort Shevchen.

Elle crache par terre avant de détaler, très consciente de devoir d'abord mettre à l'abri son trésor avant d'imaginer mettre l'ukrainien à terre pour de bon. Il faudra plusieurs longues minutes avant qu'il ne puisse reprendre possession de ses membres.

Le sortilège s'écrase sur un arbre, et Anya jure entre ses lèvres en accélérant brutalement.

- T'es mort Shevchen !

La baguette refuse de lui obéir, préférant lui envoyer une décharge dans tout le bras. Anya la jette au sol par réflexe, arrêtée dans sa course avec brutalité. Lorsqu'elle redresse la tête, l'ukrainien est complètement hors de vue.

- T'ES MORT SHEVCHEN ! Elle hurle. MORT !

A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 14:53

La réponse est aussi brève qu'inutile. Rien qu'elle n'aurait pu deviner d'elle-même. Pire, c'est déjà arrivé. Pour avoir déjà parcouru elle-même le numéro du jour sans voir la moindre mention à quelconque assaut, Anya ne peut être certaine de rien. Il existait plusieurs raisons pour l'état de taire certaines informations. Ne pas affoler les populations, ne pas abreuver une peur de l'ennemi, ne pas risquer mettre en péril l'image forte de la mère patrie. Aucune de ces raisons n'étaient de bon augure concernant le silence qui pesait sur cet assaut éventuel. À moins que Sasha ne mente de nouveau dans le seul but de prétendre détenir des informations, en échange de la lecture de son journal.

 

Anya ne pouvait guère accorder sa confiance à ce garçon, voilà la vérité. Quoi qu'il dise ne pourrait qu'être un tissu de mensonges destiné à obtenir ses faveurs. Tel fonctionnait Shevchen, et à présent qu'elle en avait connaissance, la seule chose à faire était plus qu'évidente.

 

- Это не. Это, вероятно, означает, что он потерпел неудачу. Мои соболезнования. Ça ne l'est pas. Ce qui signifie sans doute qu'il a échoué. Mes condoléances.

 

Le ton était ferme, absurdement ironique. Elle n'avait bien sûr aucune certitude de ce qu'elle pouvait bien avancer, comme elle n'avait aucune certitude que l'assaut ait véritablement existé. D'un geste sec elle ramena sa pochette contre elle, et se redressa de toute sa hauteur. Son mouvement fut accompagné de celui de l'ukrainien, comme s'il craignait une attaque subite. Sa baguette avait été tiré comme par réflexe, et les jointures de ses doigts étaient blanches. Sasha avait fait la guerre, devait-elle se rappeler. Sans doute saurait-il se battre plus durement qu'elle, de par cette simple expérience. Qu'il ait été du côté des faibles ou non.

- Никогда больше не пытайся со мной разговаривать и даже не смотри на меня. Нам больше нечего делать вместе. N'essaie plus jamais de m'adresser la parole, ou même de me regarder. Nous n'avons plus rien à faire ensemble.

 

Son instinct lui avait dit de reculer, mais elle se tenait pourtant fermement campé sur ses jambes, à quelques centimètres à peine du garçon. Il faisait bien une tête de plus qu'elle, mais elle refusait de se laisser impressionner. Il était hors de question cependant, de lui tourner le dos même une poignée de secondes. Alors Anya fit un pas vers le fond de la pièce et fit un signe du menton, désignant la porte.

 

- Убирайся. Tire toi.

 

Et de nouveau, elle cracha par terre. Ses mèches avaient pris des teintes rougeâtres qui dénotait d'une perte de contrôle dont elle n'avait pas vraiment conscience, focalisé sur le garçon.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 14:14

D'abord il prétend l'innocence, mais le regard qu'Anya braque sur lui semble lui faire comprendre que c'est loin d'être son idée la plus brillante. Elle se contente de l'observer avec une hargne brutale alors qu'il se justifie - mal -, quémande même, malgré les circonstances, à voir le dernier numéro. Le culot. Le silence les enveloppe tous les deux alors que les yeux noirs d'Anya ne quittent pas l'ukrainien, et elle se retient de cracher de nouveau. Une habitude hérité de son frère, que sa mère aurait déploré. Il la dégoûtait. De multiples façons. D'abord de représenter tout ce qu'elle haïssait en ce monde. Ensuite de l'avoir prise pour une imbécile, mentant ouvertement avant de carrément prétendre qu'elle n'avait pas saisi son stratagème idiot. Pire, il continuait de croire qu'il pouvait encore réclamer ses services.

 

Mais.

 

Dès qu'elle avait appris pour Shevchen, Anya avait pris soin de faire circuler l'information parmi ses anciens camarades. Le garçon ne pourrait plus tenter sa misérable initiative auprès de qui que ce soit de Koldostoretv, et les anciens élèves s'étaient accordés sur le fait de brûler chaque page après lecture pour éviter que l'ukrainien ne tombe sur des informations qui pourraient l'intéresser. Une décision qu'elle avait certes initiée, mais à laquelle elle n'adhérait pas elle-même. Autrement dit, elle était encore la seule en sa possession d'articles apparemment essentiels pour Sasha. Un levier dont elle mesurait la pleine puissance alors que l'autre venait d'échapper qu'un évènement important devait se tenir ces jours-ci.

 

- Какое событие ? Quel évènement ?
 

La réplique sonnait comme un ordre.

L'un comme l'autre était au sommet d'une tension particulière qui les tenaient droits sur leurs sièges, telles deux statuts particulièrement bien représentées. Anya se tenait prête à dégainer sa baguette à tout instant, plus que jamais consciente d'être en présence de l'ennemi. À présent qu'elle avait dévoilé savoir la vérité à son sujet, il n'existait plus la moindre raison pour Shevchen de jouer son rôle. Elle le revoit, installé sur la pelouse, demandant si les troupes Kazakhs étaient venus comme promis. Aux informations délivrées par Anya ce jour là, il n'avait eu qu'une réaction neutre, qu'elle voyait sous un nouveau jour. Elle avait pris sa distance pour une posture militaire, mais la vérité c'est qu'il devait s'être retenu de sauter de joie à la mention de la perte russe à Syzran.

 

Elle aurait du savoir. 

Il n'avait pas pu s'abonner au journal. N'avait-il fait que prétendre manquer d'argent, alors que c'était bien son identité qui posait problème pour accéder à l'Unificateur ? Il n'avait visiblement pas caché le fait d'être ukrainien auprès des autres élèves de Poudlard. Était-il le seul ? Anya avait observé l'ensemble des autres expatriés, et elle n'avait pas reconnu tous leurs visages. Koldostoretv avait compté des milliers d'étudiants, et il était difficile de se souvenir de chacune des personnes qu'elle avait pu croiser dans ses couloirs. Seule son enquête rapide auprès des quelques élèves arrivés en même temps qu'elle lui avait confirmé que Sasha était bel et bien le seul à provenir d'Ukraine. Une enquête qu'elle n'avait mené qu'une fois la vérité éclatée au grand jour.

Elle se sentait stupide.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 25/11/2024 à 20:53

Lorsqu'elle avait appris la vérité, Anya s'était sentie absurdement trahie. Elle ne s'était guère rapproché de Sasha, mais une certaine confiance s'était insallée dans leur réunion quotidienne autour de l'Unificateur. Anya savait que d'autres dans l'école lisait ce journal. Tous expatriés de Koldostoretv, comme elle. Il était évident que l'on ne quittait pas le pays sans tâcher d'y garder une attache quelconque. Mais elle n'avait jamais eu le sentiment qu'ils puissent y voir autre chose qu'un simple journal, comme son camarade Gryffondor. Il semblait aussi essentiel pour Sasha de lire les articles de l'Unificateur que de respirer. Cela trouvait un écho en elle.

 

Alors.

 

Lorsque la rumeur l'avait gagné, chuchotée par plusieurs filles de la salle commune à quelques mètres à peine, elle n'y avait d'abord pas cru. Ça ne pouvait simplement pas être. L'école n'avait jamais annoncé recevoir d'autres élèves que les survivants de Koldostoretv. Il n'avait jamais été question d'ukrainiens. La rumeur cependant, s'était avéré être un fait. Pur et simple, confirmé par le principal concerné à de nombreuses occasions, tant et si bien que les amies d'Alison Carter n'en référait plus comme du russe de Gryffondor ou du petit-ami d'Alison, mais comme de l'ukrainien. Anya n'en avait guère parlé à Sasha, qui continuait avec elle à converser en russe, et à feuilleter les pages de l'Unificateur. Chaque. Jour.

 

Elle s'était rappelé alors que certains ukrainiens parlaient le russe, chez eux, car beaucoup de traîtres à leur patrie étaient partis y vivre. Elle avait noté, méticuleusement, chaque inflexion, chaque mauvaise prononciation, chaque expression, et elle s'était questionné sur la raison qui poussait cet ukrainien à lire son journal chaque matin. À converser avec elle dans un russe imparfait, à continuer de lui faire croire qu'il était de son côté, alors qu'il avait vraisemblablement combattu dans les rangs du VAL, pour l'AMI. Plusieurs fois elle avait dardé sur lui des yeux noirs comme du charbon, et es mèches s'étaient assombries avec une brutalité qu'elle n'avait guère maîtrisé.

 

Sasha avait continué de mentir. Et elle n'avait rien dit.

L'ennemi, Nikita on l'observe d'abord. C'est ce que son père lui avait enseigné, et elle se demandait si ce n'était pas ce que le père de Sasha ne lui avait pas enseigné aussi.

 Elle avait appris plusieurs choses de ses observations. Sasha Shevchen prêtait toujours attention à plusieurs choses lorsqu'il entrait dans une pièce. Il mesurait d'un regard la distance qui le séparait de la prochaine sortie. Il cherchait ensuite les personnes dans la pièce qui semblait les plus en mesure d'imposer une menace. Puis il se focalisait sur la tâche qu'il avait à faire, pleinement, et avec une détermination militaire. Jamais il ne se détendait complètement, les épaules tendues, les yeux qui fuyaient avec régularité vers les points cités plus hauts comme pour s'assurer que leur présence n'avaient pas changées. Sasha ne savait pas porter son uniforme, et il ne semblait pas s'en formaliser, qu'importe le nombre de fois que des personnes pouvaient le lui signaler à mesure de sa journée. Il passait tout le temps qu'il ne passait pas en classe dehors, loin du château et de la surveillance constante de son personnel. Elle avait aussi appris qu'il mangeait comme quatre, qu'il suivait Alison Carter comme un chien, et qu'il peinait à formuler ses sorts en anglais quand les professeurs l'y forçaient car il ne semblait pas du tout désireux de le perfectionner.

Anya n'imaginait pas apprendre davantage de l'ukrainien, et elle avait décidé qu'aujourd'hui serait un bon jour pour le confronter. Elle n'avait guère répondu à sa salutation, pas plus qu'à sa question deux faits qu'il semblait prendre pour acquis car il l'avait docilement suivi jusque la salle de classe dans laquelle ils se retrouvaient quotidiennement. La sorcière s'installa comme à son habitude, mais lorsque le Gryffondor fit de même, attendant vraisemblablement qu'elle tire le numéro de l'Unificateur de sa pochette, elle resta simplement à le regarder. Un silence étrange les traversa tous les deux alors que dans leurs yeux se dessinaient une conjoncture nouvelle, presque tangible, d'un froid diablement mortel. Ce n'est qu'au bout de précieuses longues secondes qu'Anya, les doigts refermées sur sa baguette à l'intérieur de sa poche, aboya :

- Ты лжец, Саша Шевчен. Tu es un menteur, Sasha Shevchen

Pour ponctuer sa réplique, elle cracha dans la direction de l'ukrainien, et ses mèches semblèrent s'assombrir au même titre que son regard prenait un éclat dangereux.


Perdre prisme

Message publié le 21/11/2024 à 14:23

Anya ne peut s'empêcher de lever la tête alors que le professeur Pope souligne sa force, avec une fierté sans doute absurde aux yeux de ce dernier. C'est pour sa force qu'on la surnomme Nikita, dans son pays. C'est un nom d'homme. Un nom qu'elle ne devrait jamais porter. Si elle acquiesce lorsqu'il annonce avoir des exercices pour elle, son visage se ferme brutalement lorsqu'il fait mention d'une métamorphomagie qu'elle pourrait relâcher pour mieux maîtriser. Son mouvement de tête est pratiquement imperceptible, mais définitivement négatif. Les lèvres serrées en une ligne fine, elle darde un regard noir de charbon sur son professeur. Il bat en retraite en direction de sa bibliothèque, et c'est le soulagement qui s'installe sur les traits de la sorcière.

 

N'insistez pas, professeur, vous n'imaginez pas combien cette malédiction peut pèser.

 

Ses yeux s'affaissent sur la couverture des livres qu'il dépose sur le bureau, et elle hoche la tête avec la même monotonie qu'elle peut le faire en cours lorsqu'un professeur s'adresse à elle - un fait étonnamment rare, à croire que les élèves de Koldostoretv ont un talent pour se faire invisibles dans les salles de classe. Sa main se glisse le premier livre qu'elle récupère en le faisait simplement glisser pour en observer la quatrième de couverture. Bien sûr, son attention est toujours le directeur de Serdaigle, qui continue de parler devant elle. Anya déteste absolument tout de ce qu'il lui rappelle en énonçant que la métamorphomagie fait partie d'elle. C'est bien le problème, n'est-ce pas ? Née avec l'affliction, elle n'a aucun moyen de s'en débarrasser. Ne pourra jamais que se contenter de prétendre être comme tout le monde.

 

- Merci, professeur, elle énonce en récupérant le second livre pour serrer les deux contre sa poitrine.

Ses mèches violacées offrent un contraste saisissant avec sa mine sombre. Après un instant de silence à simplement observer le sorcier, dressée comme un i, elle prononce :

- Dans mon pays, la métamorphomagie c'est невезение. La poisse dans la famille. Une honte que l'on cherche à cacher aux voisins. J'ai habitué à combattre parce que c'est ça je connais. Ici c'est différent. J'ai vu. Spike Ryder se servait de sa métamorphomagie pour s'amuser à l'insu de ses camarades, sans honte aucune. Je comprends c'est différent. Mais je combats quand même, parce qu'un jour je vais rentrer dans mon pays vous savez. Là-bas, elle ne pourra pas se permettre d'arborer des boucles roses juste pour le fun. La seule utilité d'une telle affliction se trouvait dans l'armée, et l'on n'y acceptait que ceux qui savaient correctement canaliser le don.

Avec le même respect qu'elle aurait accordé aux enseignants de Koldostoretv, Anya hoche imperceptiblement la tête avant de prendre enfin congé.


Ça vole sur des brindilles

Message publié le 20/11/2024 à 14:19

La surprise est pratiquement imperceptible. Anya observe Spike emprunter chacun de ses traits, décide très rapidement qu'elle déteste l'idée que qui que ce soit puisse ainsi violer et voler son identité. Ses sourcils se fronces, ses lèvres se tendent. La mine n'est guère impressionnée. Relativement sévère, même, sans doute. Sévérité qui s'estompe dès lors que le Serpentard répond à sa demande, avec une précision à laquelle elle ne s'attendait certainement pas. En fait, Anya supposait qu'il allait en profiter pour l'abaisser. Lui prouver une fois encore combien elle avait raison ne jamais se tourner vers aucun de ses nouveaux camarades britanniques.

 

- J'ai toujours maîtrisé parfaitement, elle énonce en redressant le menton.

 

Très tôt, Anya avait compris que les modifications permanentes de son corps ne plaisaient à personne. Ni sous le toit familiale, ni en dehors. Il n'avait guère été facile de brider ces interventions chaotiques de sa propre magie, mais l'absence d'autre choix l'avait incité à rapidement compartimenter ses émotions, pour mieux résorber sa métamorphomagie. Un travail nauséeux qui lui avait souvent laissé l'impression de retourner le sang dans ses propres veines, ou de s'enfermer à l'intérieur de son corps pendant des heures. Un travail qui avait payé, car elle n'avait plus eu de débordement depuis ses sept ans. Jusque cet été.

 

- J'ai pas stressé. Être, avoir, aussi interchangeables que deux élèves de Poudlard à ses yeux. J'prends rien. L'agacement est évident sur ses traits pâles. Ses doigts s'accrochent à ses propres bras, et un instant elle regarde ailleurs. J'ai lu des potions peuvent aider. Pour calmer. La potion de clarté, de paix, ces trucs là. T'as déjà pris avant un match pour voir ?

 

Anya n'était pas stupide au point d'essayer un traitement à l'aveugle. Peut-être que ça marcherait, peut-être que ça ne ferait qu'empirer la situation. Peut-être que ça la rendrait incapable de maîtriser de nouveau sans l'aide de potions. Mais dernièrement, la sorcière se demandait si elle maîtriserait un jour tout court, et c'était une pensée terriblement angoissante. Comment pourrait-elle remettre un pied dans son pays avec cette incapacité ? Maigre, repliée sur elle-même, Anya plante un regard droit sur Spike Ryder, enviant presque violemment son apparente nonchalance avec sa propre métamorphomagie.

- Peut-être j'ai stressé un peu. Dur de pas stresser quand on sortait d'une guerre, et qu'on vous balançait dans une nouvelle pays, une nouvelle école, loin de tout ce que vous aviez toujours connu. Pourtant l'année dernière, elle n'avait eu aucun mal à maîtriser sa métamorphomagie, ou bien trop peu pour que ça n'éveille en elle la moindre véritable inquiétude. Mais c'est pas normal, parce que même quand je stresser, je maîtrise. J'suis pas faible. Elle hait ce mot. Version anglaise comme russe. Il a une sonorité affligeante. Elle le crache dans l'air avec hargne. Tes copains t'ont pas attendu, elle prévient, comme subitement consciente de le retenir là. C'est la plus longue conversation qu'elle a tenu avec un autre élève de Poudlard depuis Basil Banks, et elle se sent exposée.


Ça vole sur des brindilles

Message publié le 12/11/2024 à 13:56

Anya prend le partie de ne pas se retourner, ayant pourtant parfaitement entendu l'injonction à quelques pas derrière elle. Elle est forcée de s'arrêter pourtant, lorsque le garçon qui l'a hélé débarque à sa hauteur. Difficile de l'ignorer plus longtemps. La sorcière l'observe de son regard noir, priant intérieurement pour que le sommet de son crâne n'ait pas été gagné par l'orange vif qu'elle continue de percevoir sur ses pointes. C'est peine perdue. Spike, qu'elle n'a eu aucun mal à reconnaitre à présent qu'il est planté devant elle, étire une réplique dans l'air qui lui fait l'effet d'une douche glaciale. Amère, elle se pince les lèvres. Était-ce bien nécessaire qu'il se détache de son groupe de potes pour venir lui signaler que sa métamorphomagie partait en live ? Certainement pas.

 

Les mèches subitement nuancées de rose sur le crâne du camarade la font cependant ravaler son injure, ses lèvres s'étirant même brièvement de ce qui ressemblerait à s'y méprendre à un sourire amusé. Aucun garçon, en Russie, ne s'aviserait de faire ce genre de vanne. Ne serait-ce qu'à cause du sous-entendu d'un côté féminin en leur personne si naturellement virile. Une différence culturelle flagrante que venait de piétiner allègrement le joueur de Quidditch sans la moindre hésitation, et avec une insolence qui le poussait à prendre une pose absurde bien au-delà du conventionnel scandinave. Anya secoua la tête pour observer aux alentours mais l'ensemble du groupe dont Spike s'était extirpé ne semblait pas l'avoir attendu pour continuer leur chemin vers le château.

 

Dans son pays, on l'aurait arrêté pour moins que ça, mais dans celui-ci personne n'en avait rien à faire qu'un garçon eut un côté féminin. Anya avait vu certains garçons se promener main dans la main, dans les couloirs du château. D'autres s'embrasser entre les bosquets épais du parc. Parfois même, des filles. Ça lui avait d'abord laissé une impression étrange de voir tous ces britanniques commettre chaque jour aux yeux de tous ce qu'elle avait toujours pensé être un crime. Mais on finissait par s'y habituer. Ici, les filles ne devaient pas se montrer fortes en toutes circonstances, et les garçons pouvaient agir comme des enfants sans qu'on les réprimande de ne pas être des hommes. Parfois Anya trouvait tout ça absurde, d'autres fois elle y trouvait un élan de liberté auquel elle n'avait jamais vraiment pu goûter.

 

- T'es mieux en brune toi aussi, elle rétorque finalement, ne réalisant pas qu'elle vient de troquer le masculin pour le féminin.

 

Violemment concentrée, elle pousse ses mèches à reprendre leur teinte d'origine. Ce qui ne lui aurait habituellement aucun effort lui demande aujourd'hui des secondes entières et fort pénibles pendant lesquelles elle doit se focaliser sur la teinte précise qu'elle cherche à rendre à sa chevelure.

 

- Je savais pas il y avait d'autres métamorphomages à Poudlard, elle énonce. Prends considérablement sur elle avant de poser la question qui suit, presque à contre-cœur. Tu as déjà eu des problèmes avec ? Là tu maîtrise. Est-ce que des fois... tu maîtrise pas ?

 

Admettre perdre le contrôle, voilà bien la dernière chose qu'Anya désire. Elle n'a cependant jamais croisé un autre sorcier qui subisse cette même anomalie, pas depuis qu'elle est arrivée à Poudlard. C'est peut-être l'occasion de comprendre pour quelle raison tout part en vrille, depuis quelques temps. Sa métamorphomagie n'avait jamais débordé, jusque là. Pas à ce point. Mais à présent, c'était comme s'il s'agissait d'une casserole d'eau bouillante sur laquelle elle tentait vainement de maintenir un couvercle. Son regard pourtant, ne dénonçait nullement la crainte qui la dévorait depuis plusieurs semaines : celle de subir à jamais les aléas de ce qu'elle avait toujours considéré comme une malédiction.


L'insoutenable légèreté du silence

Message publié le 06/11/2024 à 16:00

La pierre permettait à la chaleur de demeurer enfermée à l'intérieur, bien qu'elle mette un temps incroyable à atteindre la bonne température. Dans les pièces inutilisées comme celle-ci, il valait ne pas l'attendre pour s'envelopper d'un enchantement corporel. Anya n'en avait pas esquissé, pourtant, se laisser transpercer par l'air glacial qui la faisait peu à peu se recroqueviller sur elle-même. Son regard perdu dans le vide, elle n'avait cure ni du silence, ni du froissement irrégulier des pages de journal que tournait Sasha. Il n'était guère surprenant de le voir si investi dans sa lecture. Lorsqu'elle avait reçu son premier numéro, plus d'un an auparavant, Anya s'était plongé à l'intérieur avec la même vivacité. Elle en avait décortiqué chaque information comme une affamée.

 

N'avait rien appris bien sûr de fascinant, mais les seuls entêtes dans sa langue natale, et les quelques avancées sur les lignes ennemis avaient suffit à lui servir de réconfort jusqu'au jour suivant, et celui d'après encore.

 

La voix de Sasha la rappelle à la réalité, et elle darde sur lui un œil presque absent avant de tranquillement hocher la tête. Il n'était pas si surprenant que le garçon n'ait pas encore touché sa pension. L'état venait en aide à ses pupilles, mais l'administration prenait son temps pour conclure chaque transaction. Les quelques lettres que plusieurs enfants cherchaient à faire parvenir en Russie étaient systématiquement interceptées, et leurs réponses parfois perdues quelque part au milieu de la manche pour Merlin sait quelle raison. L'Europe avait beau jouer son rôle de foyer d'accueil, elle n'en prenait pas moins un certain partie plutôt dérangeant qui la rendait méfiante même de gamins de la onzième à la dix-septième année. Alors Anya hausse les épaules pour toute réponse car bien sûr qu'elle voit. Ne sont-ils pas dans le même bateau ?

 

- Parle pas de ceux que tu connais pas, elle aboie brutalement en se redressant, pour mieux se lever et refermer le porte-document avec froideur.

 

Son frère n'aurait pas voulu qu'elle se batte, bien sûr, parce qu'il a toujours pensé comme leur père que sa place n'était pas sur un champ de bataille. À l'instar des autres femmes de leur pays. Il savait cependant son désir d'activement participer à l'effort de guerre, et il n'avait jamais manqué l'encourager à trouver d'autres manières de servir la nation. Anya savait que cela en passerait par des études acharnées, à Koldostoretv ou ailleurs, mais qu'ensuite elle se trouverait une place même en dernière ligne du conflit. C'était son devoir. C'est aussi ce que son père et sa mère auraient voulu. Comment osait-il remettre ça en question ? Comment osait-il lui rappeler comme tout le monde y meurt ?

 

Dressée sur ses souliers noirs, elle le fixe avec reproche, des mèches enflammées qui lui remontent jusqu'au sommet du crâne. 

 

- Je n'ai pas peur de mourir. Si c'est ce qui doit arriver, alors ce sera avec honneur. Comme mon père, comme ma mère, comme mon frère.

 

Son menton est relevé fièrement, la colère visible sur son visage pâle aussi lisse que celui d'une poupée. Le porte-document sous le bras, elle ne lui adresse pas un regard alors qu'elle s'en va sans plus de cérémonie.


L'insoutenable légèreté du silence

Message publié le 06/11/2024 à 15:05

- De l'état, fut sa seule réponse, acérée comme une lame.

 

L'évidence même, non ? C'est comme cela que survivait tous les nouveaux petits pensionnaires de Poudlard. Avec l'argent que l'état russe leur envoyait, en récompense de l'effort de guerre mené par les familles qu'ils avaient perdu. Anya avait la chance de bénéficier d'une rente plus importante que celle de certains camarades, en ce que son père avait été un officier. Ce n'était qu'un maigre revenu, qui suffisait toutefois à se payer la venue d'un journal chaque matin, entre autres choses. La mère patrie veillait sur ses expatriés, dans l'espoir d'un retour dès que les circonstances le permettront. Les garçons viendraient enfler les rangs de la milice, et les filles combleraient les postes qu'ils ne pourraient occuper pendant ce temps.

 

Anya se garda de rappeler à Sasha qu'elle ne l'avait aucunement invité à entrer dans la salle commune des serpentard, encore moins dans son dortoir. Encore heureux que tu m'attende dans la salle, qu'est-ce que tu t'imagine ? Semblait dire son regard alors qu'elle l'abandonnait pour s'engouffrer dans la large pièce de pierre froide orné des couleurs de sa maison. Elle n'accorda guère le moindre regard aux élèves présents, ou peut-être brièvement au groupe de filles de cinquième année qui gloussaient dans un coin. Alison Carter avait ce tique affligeant qui la voyait régulièrement passer les doigts dans sa frange, comme pour en arranger la tenue.

 

De l'autre côté de la pièce, Viviane et sa cour, qui semblaient en proie à la même maladie compulsive, les lèvres ornées de carmin planquées derrières des mains manucurées pour dissimuler des rires qui n'avaient rien ni de jolis, ni de sincères. Parfois, Anya avait la vaste impression de déambuler dans une immense pièce de théâtre dont on aurait omis de lui laisser le script. Là le déploiement d'un mystérieux coup de hanche, ici la conjugaison d'expressions vaines et de jurons millimétrés pour descendre quelque professeur, ou quelque élève accoutré de la mauvaise façon, ou ayant donné une réponse aberrante au dernier examen. Rien qui n'ait ni le moindre sens aux yeux d'Anya, ni vraiment d'intérêt non plus.

 

Pressée, elle gagna son dortoir, souleva le couvercle de la lourde malle, et en extirpa un porte-document d'une finesse exagéré pour ce qu'il contenait. Scellé d'un sortilège, il aurait en vérité du prendre plusieurs longs centimètres d'épaisseur. Elle le flanqua sous son bras avant de repartir comme elle est venue, quittant la salle commune sans avoir éveillé grande attention. L'an dernier, ses faits et gestes étaient épiés sans arrêt, mais il s'était avéré qu'il n'y avait rien à décortiquer ; Anya n'était qu'une élève pâle et maigrichonne qui plaçait toute son énergie dans ses études, et n'essayait jamais de socialiser.

 

Vlam.
 

Le paquet s'abattit sur la table occupée par Sasha, tandis que d'un coup de baguette elle allumait les torches au mur une à une. Le garçon était définitivement étrange, à se coucher dans la boue et la rosée, à rester plongé dans le noir. Anya ouvrit la pochette d'un seul geste avant d'en extirper un journal, qui en découvrit aussitôt un autre derrière. Il y avait tous les numéros depuis son arrivée sur le sol britannique ou presque ; il avait fallu plusieurs semaines avant qu'Anya ne puisse lancer l'abonnement, et recevoir ses premiers journaux. Une attente qui lui avait alors semblé interminable.  Les retrouvailles avec le vieux papier grisonnant de l'Unificateur étaient un moment privilégiées, comme un retour au pays.

 

À la table du petit déjeuner, en compagnie de son père, de sa mère, de son frère.

 

- C'est celui de ce matin. 

 

Anya s'installa sur le banc jouxtant celui de Sasha, croisant les bras sur sa poitrine. Elle paraissant d'autant plus fine à la lueur timide des flammes que dehors en plein soleil.

 

- Ils sont tous rangés dans l'ordre. Fais comme chez toi. Elle l'invita en s'enfonçant contre le mur juste derrière elle.

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