Liam ne perdit pas de temps : le chuintement du Protego encore dans l’air, il reprit l’angle et resserra sa ligne sur la main d’Alison. Son souffle se coupa net, son poignet fixa la trajectoire. Il chercha uniquement la prise, pas la personne. « Expelliarmus. » Le trait rouge partit, propre, sans débord.

Impact propre mais moins compact : la baguette sauta de sa main ou vola de biais à courte distance. Elle conservait ses moyens, mais devait rompre sa visée et récupérer avant de relancer.

La maison était calme, propre, prête. Rien ne manquait. Ce soir, ils exécuteraient le plan : provoquer, au laboratoire, une réaction incontrôlée qui tuerait leurs parents et passerait pour une erreur de manipulation.

Liam descendit au sous-sol. Il ouvrit les armoires, vérifia l’inventaire, puis agit sans hésiter. Il remplaça le flacon de stabilisant par un liquide inerte, incolore. Il desserra d’un quart de tour la valve de sûreté de l’alambic. Il raya, d’un trait fin, l’anneau de protection gravé sous le brûleur pour que le bouclier cède à la montée en température. Il glissa dans la caisse d’ingrédients une poudre très réactive à la chaleur, conditionnée dans le même type de sachet que l’additif habituel. Tout devait se confondre.

Il souleva ensuite la cloche de verre, posa un chiffon légèrement imbibé d’alcool sous l’établi, invisible si l’on ne se penchait pas. La flamme, en cas de débordement, trouverait de quoi s’emballer.

Il nettoya ses traces : poignées, robinets, bords des flacons. Il remit chaque objet exactement là où il l’avait pris. Le laboratoire présentait l’aspect d’une séance ordinaire, avec un seul détail qui comptait : la suite logique menait à une surpression, un embrasement, des fumées toxiques. L’heure convenait. Sa mère venait toujours “finir” quelque chose après le dîner. Son père passait systématiquement vérifier les montages avant de remonter. Deux présences, un même point d’impact.

Il remonta au rez-de-chaussée. Dans le couloir, l’odeur de cire se mêlait à celle de la pierre humide. Il se posta à l’endroit prévu, à portée de vue de l’escalier qui menait au laboratoire, assez loin pour qu’on n’associe pas sa présence à la pièce.

Il tourna la tête vers son frère. Sa voix se fit sifflement, sèche et basse, en fourchelangue :

— Tout est prêt, espérons que nous n'ayons pas à finir le travail manuellement... ma robe est neuve.

Liam pivota de quarante-cinq degrés, sans perdre un gramme d’appui, et verrouilla son angle sur Alison Carter. Sa main guida la baguette comme un compas, ligne droite sur le centre de masse, respiration brève, regard fixe. Il glissa d’un demi-pas pour dégager la voie des siens, puis abaissa l’épaule, mécanique froide enclenchée. « Everte Statum. » Le sort partit net, dans l’intention simple de rompre sa garde et d’ouvrir la suite.

Le sort pourrait atteindre Alison et la forcer à reculer, brisant sa visée et son angle ; elle doit se rétablir avant d’enchaîner. Toutefois, si elle parvient à opposer une défense opportune, l’impact sera absorbé et l’effet de renversement annulé — Liam n’obtiendra alors qu’une brève ouverture.

Liam se coula jusqu’au bord du chemin, dans l’ombre d’un muret bas, où le souffle des sorts passait encore sur l’air. Il prit l’angle, fixa un point au-delà des voiles, puis leva la baguette comme on enclenche un mécanisme. La joute avait commencé, et il n’attendait plus que l’ouverture : il préférait l’impact net à l’esbroufe.

Il visa Sasha sans détour. Un geste court, précis, presque clinique. « Brontaflux. » La vibration naquit dans le poignet, se comprima dans le bois, puis partit comme un verrou qu’on retire. Il n’éprouvait rien, sinon l’envie méthodique d’en finir proprement.

L’onde se compacta à la perfection et frappa en plein centre : souffle tonitruant, acouphènes assourdissants, équilibre pulvérisé. Le monde devenait blanc et lointain pendant de longues secondes ; toute coordination était mise en défaut, la garde impossible à tenir dans l’immédiat.

Suite à sa réussite critique, Liam prend la position de Sacha et se trouve donc en C2

Liam hocha lentement la tête, marquant l’acceptation muette du plan avant même que Lyle n’ait terminé. Son regard traversa la ligne tracée, évaluant en une fraction de seconde chaque position, chaque angle mort à surveiller. Sans un mot supplémentaire, il se glissa à l’extrémité droite de la formation, son foulard violet épousant parfaitement le poignet, comme un signal discret d’allégeance.

La terre meuble plissa sous ses bottes, mais il ajusta chacun de ses pas, calibrant la pression pour ne jamais trahir la moindre hésitation. Sa baguette, légère et froide dans sa main droite, resta immobile, prête à jaillir dans un geste sec et précis au premier signe d’attaque. Il n’éprouvait ni crainte ni excitation : seul importait l’efficacité.

Il coula un regard bref vers chacun de ses coéquipiers, sans y déceler de faiblesse apparente, si on oubliait l'inexpérience des plus jeunes. Puis, son attention se fixa sur le drapeau adverse, silhouette lointaine et promise. Le vent jouait dans les voiles fatiguées, mais Liam ne se laissait distraire ni par les ondoiements du tissu ni par l’agitation du monde alentour. Il attendit, immobile, la première occurrence de la stratégie, prêt à l’exécuter sans la moindre once de pitié.

Liam arriva sans un bruit, ses bottes de cuir sombre à peine perceptibles sur la terre détrempée. Il s’immobilisa un instant au seuil du terrain, le regard glacial glissant sur les caisses de bois fissurées et les draps fatigués. Il ne salua personne, ne chercha ni la professeure ni les rares élèves déjà présents. Il admit seulement l’espace dans son champ de vision, comme on note un état de fait, sans émotion ni jugement.

Il avança d’un pas mesuré, chaque mouvement calculé pour ne pas déclencher le moindre crissement ou lueur accidentelle. L’air humide glissa contre sa peau, mais il resta impassible, offrant à la brise la même indifférence qu’au monde extérieur. Sans un mot, il contourna les troncs et les haies rabougries, choisissant son chemin selon les angles tranchés que dictait son esprit méthodique.

Arrivé à quelques mètres d’Aingeal, il s’arrêta, jambe droite fléchie, bras le long du corps. Son regard se posa sur les lignes géométriques du terrain, comme pour en déchiffrer l’architecture avant même de recevoir les consignes. Il ne chercha pas à se mêler aux autres élèves. Dans son silence, il offrit à la forteresse de caisses et de bottes de foin une reconnaissance presque professionnelle : évaluer, comprendre, dompter. Il n’avait qu’un seul objectif, et celui-ci n’était pas le Tournoi : parfaire ses connaissances. Point.

Puis, immobile, Liam tourna légèrement la tête vers Flora, sans que son regard ne trahisse la moindre curiosité. Il croisa simplement son absence d’intérêt, et son attention revint aussitôt au terrain : toutes les pièces du dispositif devaient être intégrées dans son plan. Il attendit la suite avec la même froide détermination qui le poussait toujours en avant.