Il existe de nombreuses règles lorsqu'on est de bonne compagnie. La ponctualité, par exemple, obéit à de nombreuses conventions tacites pour lequelles il faut plusieurs années d'entrainment pour maitriser tous les aspects. Etre en avance était réservé aux désespérés et à ceux préparant une embuscade. Evidemment, plus la différence de statut entre la personne qu'on rencontrait et nous même était grande, plus celui ayant le plus faible statut se devrait d'attendre.

Etant à la tête de la très prestigieuse famille des Flint, il n'était pas question qu'Erebos attende une seule minute. Mais il ne pouvait pas être trop en retard non plus. La personne qu'il allait rencontrer avait le sang bleu - encore heureux, il ne se serait jamais montré dans son bar habituel, Sous la Coupe d'Hygie, avec autre chose qu'un Sang Pur. Emerenziana, évidemment il connaissait. Si ils s'étaient recontrés en Italie, Erebos aurait dû se montrer plus ponctuel. L'Angleterre, cependant, était son domaine. Peu importait que Jackson eu vécu en Angleterre ou non. Son nom ne faisait pas partie des registres d'ici.

Il espérait que cette rencontre allait être fertile. Il aurait accepté de toute manière, car il y avait des privilèges et des devoirs pour quiconque eut été de bonne compagnie. Mais il avait bon espoir qu'il ne s'agirait pas uniquement d'une rencontre cordiale. Emerenziana travaillait à la Ménagerie Magique. Ils avaient des intérêts en commun, les animaux rares et dangereux. L'un et l'autre pouvait s'en procurer, et l'un et l'autre connaissait des acheteurs. La question était de savoir quelle rareté, quelle dangerosité, et surtout si le Ministère risquaient de mettre son nez dans leurs affaires. Erebos avait graissé quelques pattes, mais l'expansion de son trafic nécéssitait une certaine prudence. 

En arrivant devant le bar, dont la devanture montrait une jeune femme à la langue fourchue buvant dans une coupe un liquide vert, Erebos tenta de répérer son rendez-vous. Cependant, et c'était bien pour cela qu'Erebos se rendait souvent là-bas, les vitres étaient teintés et il était quasiment impossible de voir quoi que se soit sans ouvrir la porte. Il tira donc la porte d'entrée, vérifiant sa montre par la même occasion.

Quinze minutes de retard, très exactement.

La ponctualité est quelque chose qui peut me mettre en rogne, mais étant donner l'importance de ce rendez-vous, je me dois d'attendre avec patience. En attendant, je peux observer ce lieu que je ne connaissait point avant d'y mettre mes pieds dedans pour la première fois. C'est une ambiance étrange... Je ne pense pas que je reviendrais ici pour mon envie personnel.

Mes pensées sont perturbées quand la porte d'entrée s'ouvre, je lève donc les yeux vers la personne qui entre dans le bar. Erebos Flint, héritier de la famille du même nom. Je lui pardonnerais son retard, ne préférant pas le mentionner étant donner l'importance de notre conversation à venir.

- Monsieur Erebos Flint.

Remettant en place le col de ma chemise - bien sûr que j'ai mis un costume - je me lève afin de saluer le sang-pur.

- Je suis ravi que vous ayez accepté cette rencontre. Souhaitez-vous boire quelque chose ? Je vous l'offre.

L'observant de mes yeux brillants, je stresse intérieurement au sujet que nous allons aborder et à la demande que je souhaite lui faire.

Emerenziana commençait par une bonne impression. Il était habillé comme se le doit un Sang Pur: avec élégance et finesse. Il faut à la fois n'avoir rien d'un moldu, et ne pas être trop excentrique, bien sûr. 

- Monsieur Erebos Flint.

- Ravi de vous recontrer, Monsieur Emerenziana.

Mais les mots qui suivirent détruisirent en quelques instants la bonne volonté que le costume d'Emerenziana lui avait garanti.

- Je suis ravi que vous ayez accepté cette rencontre. Souhaitez-vous boire quelque chose ? Je vous l'offre.

Qui pensait-il qu'il fut ? Un élève de Poudlard qui survivait sur l'argent de poche de ses parents ? C'était un grave insulte, même si déguisée, qu'on lui lançait. Flint payait pour les autres, et non l'inverse. Fallait donc t-il qu'il lui rappelle les règles de l'hospitalité ? 

- Je vous en pris. Le propriétaire me connait bien, il le mettra sur ma note.

Il n'y avait rien de plus vulgaire que de sortir des gallions. Mais peut-être qu'il faisait les choses différements, dans le Sud de l'Europe. Une autre définition de la sophistication.

Il fit un signe au serveur, qui saurait sans aucun doute sa commande. Il commençait toujours par un vin de prune dirigeable, qui lui permettait de relacher la tension sans risquer de perdre ses sens. Si la soirée se passait bien, alors un bon cognac ferait ensuite l'affaire. Ou même un whisky Pur-Feu.

- J'ai beaucoup entendu parlé de vous, Monsieur, entamma-t-il, tatant le terrain. C'est étonnant que nous ne nous soyons pas rencontré plus tôt, au vu de nos intérêts en commun.