



16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété
D'abord, un regard noir pour Gwen. Et puis, Sasha s'était éloigné sur la piste de danse, avec l'impression subite d'avoir des jambes en coton. Il s'était imaginé un refus sec, ou bien un refus moqueur, un refus outré, un refus froid, voire pourquoi pas une absence même de réponse. Et de tous les scénarios possibles, Alison avait opté pour l'impossible : elle avait accepté.
Le Gryffondor sentait son coeur se réveiller subitement, faisant battre à ses tempes un sang chaud au rythme inapproprié pour un slow, et il se demanda un instant s'il ne venait pas de faire une erreur capitale. Mais s'éloigner de la brochette le soulageait déjà, et il se concentra pour éviter de marcher sur les pieds d'Alison. Les odeurs de la jeune fille étaient pleinement perceptibles de nouveau. Elle s'était apprêtée, avec une robe mettant en valeur ses formes nouvellement acquises, mais Sasha évitait de trop baisser les yeux sur le corps en question. Il soutenait parfois son regard, parfois trouvait un point d'ancrage au loin, derrière elle - une absence de vision, réellement, puisqu'il n'y avait rien à voir au-delà.
- Toi non plus, t'es pas obligée de faire semblant.
Il avait mis une main sur la robe, au creux des reins d'Alison, espérant ne pas trop transpirer de ses paumes. Leur danse était quelque peu maladroite : ils étaient un peu raides, et les mouvements lents à laquelle la musique incitait n'étaient qu'une copie des autres couples, tout aussi peu habiles qu'eux, mais Sasha ne savait pas faire mieux. Il fronça les sourcils pour lui-même. Pourquoi était-il si empoté dès lors qu'il s'agissait d'Alison ?
- On manque un peu d'entraînement, tâcha-t-il de plaisanter en grimaçant un sourire pas très engageant. Tu rentres chez toi pour Noël ?
Il fallait bien qu'il posât une question, n'importe laquelle. Danser en silence était hautement embarrassant. Il réalisa qu'elle habitait à Pré-au-Lard. Elle rentrait n'importe quel week-end, si elle le voulait. Il s'humecta les lèvres.
- 'Fin j'veux dire, vous partez pas pour Noël ou quoi ?
Parce que moi je s'rai là, mais pourvu qu'elle pose pas la question. De ce qu'il avait entendu, les familles riches de Poudlard fêtaient Noël en Egypte, à New York ou à Tokyo. Les classes moyennes rentraient chez eux. Sasha était partagé entre la hâte d'être quelques temps libéré des cours et du regard des autres élèves, et la gêne que lui causait le fait que lui, comme les autres réfugiés, resteraient au château.
Ils tournèrent sur eux-mêmes, un peu plus tranquillement, se laissant porter. La robe d'Alison flottait, frôlait parfois les jambes de Sasha. Au détour d'une circonvolution, Sasha capta les regards d'un groupe de Serpentards goguenards - Lucian se tenait là, avec d'autres, et le Gryffondor leur réserva, à eux aussi, un regard dissuasif. Il finissait par les détester, ces Serpentards. Peut-être pour les provoquer, Sasha resserra sa prise, se rapprochant sensiblement d'Alison - leurs corps se touchaient maintenant, et c'était plus facile de suivre le mouvement, de guider la jeune fille - la forçant, en accélérant légèrement le mouvement, à s'accrocher davantage à lui. Ne pas réfléchir, ne pas réfléchir. Pour danser, pour se transformer.
Leurs souffles se percutaient presque, mais s'humectant les lèvres, Sasha préféra orienter son regard vers le main, prétextant se concentrer sur leur danse.
- Tu cherches toujours quelqu'un pour faire semblant ? Ou c'est pour de vrai maintenant qu'tu veux un prétendant ?
Il tâchait de garder un ton détaché, comme s'il prenait de ses nouvelles. Comme ça, pour savoir. De la part d'une vieille connaissance.
Mais au fond, il voyait bien, depuis leur séparation, comment Alison se comportait. Il avait beau ne pas vouloir l'observer, il avait vu le soin qu'elle mettait à plaire, à arranger sa frange, à serrer ses vêtements autour de ses formes, à mettre ce soir du rouge à lèvres, à lisser ses cheveux qui n'étaient pas comme ça quand on enlevait les enchantements, à rire aux blagues immatures de Ryder le fameux joueur de Quidditch pendant les cours de potions.
Son coeur battait fort, il n'aurait pas dû poser la question. C'était bien trop évident. Mais le mal était fait.