Sasha Shevchen
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
Plus le jour se couchait tôt, plus vite la Forêt Interdite paraissait menaçante. Les voix des grillons qui chantaient dans la douceur de l'été s'éteignaient peu à peu, laissant place à de sinistres craquements et crépitements. Chaque bourrasque de vent décrochait par dizaines des feuilles qui après de longs jours avaient cessé de lutter pour survivre. Alors elles cédaient enfin, acceptaient d'être vouées à rejoindre le poussière. Elles frôlaient les troncs d'un chuintement léger avant de tomber au sol - alors chacune d'elle tapotait une fois la terre, comme si un animal avait fait un pas à cet endroit-là, et tout voyageur aventureux était pris d'un frisson, se retournant en craignant une présence inaperçue, sous l'oeil attentif de quelque rapace dont on devinait, vers les cimes, la forme distincte : une silhouette au bec sévère et aux yeux perçants, dont le plumage sombre se fondrait bientôt avec la nuit, une fois que celle-ci serait complète. Pour l'heure, on distinguait encore les buissons ardents qui bordaient de petits sentiers formés par la mousse, là où la végétation rampante n'avait pas parfaitement recouvert les sols humides. Dans cette jungle bucolique, quelques pattes avaient formé là des traces boueuses : l'empreinte ici d'un cerf, là, celle d'un félin aux dimensions inquiétantes...
Des gouttes, enfin. Irrégulières. L'Ecosse était toujours humide à cette période de l'année ; et les arbres semblaient n'en avoir jamais fini de s'ébrouer pour laisser tomber des perles qui s'accrochaient aux feuillages bas.
Dans l'horizon, emporté par la brume, Poudlard avait disparu. A mesure que celui-ci s'épaississait, la Forêt en tous sens paraissait la même ; comme un labyrinthe aux miroirs infinis.
Entre deux troncs dénudés, une fouine avait commencé à sortir le bout de son nez ratatiné. Son petit minois gris s'éleva vers le ciel, la truffe frémissante tandis qu'elle humait l'air - à la recherche d'indices quant à son dîner prochain, peut-être. D'un pas léger, elle emprunta le pont formé par une grosse racine au-dessus d'un petit cours d'eau, s'apprêta à sauter de l'autre côté - quand soudain elle s'immobilisa, figée comme la pierre.
Un coup d'oeil d'un côté, puis d'un autre.
Prédateur, semblait crier ses yeux silencieux, comme deux billes alertes qui peinaient à trouver, dans leur environnement, celui dont elle sentait la présence sans l'avoir vu.
Et puis, soudain, un vrai bruit. Un craquement grossier, si indiscret que la fouine avait déjà disparu. Sasha eut un grognement de dépit.
Au bout du chemin, une petite tête rousse : un instant, il avait cru qu'il s'agissait d'Alison. Mais la fille avait tourné sa tête un instant et il avait vu un autre profil. Plus jeune. Elle reprit son chemin. Le froid commençait à l'envelopper.
Sasha la suivit.
Sans un bruit. Comme une ombre. Il avait cette expérience-là : celle de disparaître presque tout à fait. Généralement, seuls les animaux sentaient sa présence, à cause de leur flair, mais il arrivait parfois à se camoufler suffisamment pour rester tapi sans qu'aucun d'eux ne le détectât plusieurs minutes durant.
Suivre une gamine était un bon exercice.
Parfois, l'enfant se retournait, prise d'un frisson. Il savait que c'était son instinct qui parlait, et son instinct avait raison. Elle n'avait rien à faire ici, elle était suivie, et nul ne savait les intentions des créatures qui observaient sa marche timide. Pas même lui : où le conduirait-elle ? Ca n'avait pas beaucoup d'importance.
Ici, d'ailleurs, rien n'avait beaucoup d'importance.
Ce n'était ni bien ni mal, c'était ainsi.
Tsssss... Tssss...
Sasha et la jeune fille eurent le même réflexe : l'immobilité totale, le temps d'un instant. Elle tourna la tête la première vers le lit de la rivière - il préféra détourner lentement les yeux vers la créature qui avait émis un bruit, un mouvement brusque étant trop perceptible.
Alors, ils virent le serpent.
Il avait une tête énorme, plus gros que le poing de Sasha, et ses deux yeux étaient brillants d'un vert fluorescent dans la nuit. Son corps était couvert d'écailles noire qui luisaient d'humidité - on en devinait les reflets suintants à mesure que son corps se dressait en ondulant en sortant de la rivière.
Trois mètres au moins.
Le serpent s'éleva, fort de ce tronc musculeux qui le soutenait. Il se dressa tant qu'il était à la hauteur d'une petite fille et avec lenteur, ouvrit sa gueule. Ses mâchoires se désolidarisèrent, laissant apparaître une langue noire fendue : comme prise d'une vie propre, celle-ci ne cessait de gesticuler, vive et légère. Elle brassait l'air, ses pointes frémissantes.
Et puis le serpent fondit sur elle.
Ses crocs se plantèrent dans le tronc juste derrière. Il se redressa, émettant des sifflements furieux. Le serpent se retourna sur lui-même, son corps battant la rivière - mais nulle part, nulle part l'enfant n'était.
Chut, il dit avec ses doigts.
Ils étaient perchés. A près de cinq ou six mètres du sol. L'enfant n'avait pas dû apprécier le voyage : elle avait été happée par ses vêtements, par derrière, comme si la main de Sasha avait été la gueule d'un animal qui avait mordu ses vêtements et l'avait tractée avec brutalité. Secouée, les cheveux devant les yeux, elle avait fini par atterrir assise sur une branche.
Heureusement, la violence avec laquelle il l'avait emportée lui avait momentanément coupé le souffle ; Sasha tira sur sa capuche - dans l'autre sens, cette fois, et le visage de la petite rousse fut découvert : alors elle se découvrit assise sur une branche à califourchon. En face d'elle, pieds repliés sous lui et en équilibre contre le tronc, il y avait Sasha : son jean plein de boue, sa chemise mouillée, des feuilles emberlificotés dans la tignasse blonde qui faisait office de chevelure.
Et l'un de ses doigts marqués par une griffure noire était posé sur sa bouche.
Chut.
Il baissa les yeux avec lenteur. En bas, le serpent cherchait sa proie, encore. Il tournait entre les buissons. Et la nuit gagnait du terrain : le brouillard blanc devenait de plus en plus gris. Bientôt, il serait d'un noir aussi épais que le flot de la rivière, dans laquelle le Serpent disparaissait parfois.
Charlie Carter
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
— Lord Ribbit ? pourquoi son crapaud coasse à longueur de journée, sauf quand elle le cherche partout ? Charlie gonfle ses joues de contrariété, bien obligée d'aller plus loin dans la forêt interdite pour retrouver l'animal disparu derrière le brouillard. Loooooord ?! Sa voix s'élève et réveille les bestioles nocturnes encore endormies, et les diurnes bientôt au lit. La sorcière ignore l'austérité du climat écossais qu'elle connaît depuis toujours, un sous-pull OCQ entre sa brassière et sa chemise pour couper du vent. Elle fait vagabonder sa baguette de gauche à droite vers le sol, un faible halo lumineux au bout de celle-ci, incapable de se résoudre à abandonner Lord Ribbit en forêt interdite.
— J't'appellerai Sir Croissant du Marécage si tu t'montres, promis ! J'te donnerai des mouches au miel ! Je masserai tes verrues ! Allez, montre-toi ! sa langue claque doucement pour attirer le batracien qui reste muet. Plusieurs minutes s'écoulent, jusqu'à ce que Charlie ne remarque la brume opaque autour d'elle. Sa vision s'arrête à l'extrémité de son bras, occultée par un mur blanc angoissant. D'abord, la jeune élève revient en arrière, mais heurte une grosse racine et marche dans l'eau. Oh non. Elle grimace au premier chpouic de sa chaussure mouillée, incertaine finalement d'être du bon côté.
— Réfléchis Charlie, si y'avait un ruisseau tout à l'heure, on l'aurait vu. Certes. Alors la rousse change de direction et suit le sillon timide d'un chemin en se persuadant à haute voix d'avoir pris la bonne décision. Ta mère est exploratrice Charlie, t'as ça dans l'sang ! Mais son sang se glace vite, le corps parcouru de frissons difficiles à enfouir. Elle ne cherche plus Lord Ribbit ; elle cherche la sortie. Les autres Serdaigle remarqueront bientôt son absence à table, et sa sœur aussi, admettons. La sorcière sursaute au craquement des brindilles. Elle se retourne en brandissant une lueur faiblarde avant d'accélérer le pas, puis se stopper net.
Tsssss... Tssss...
Oh non, again. Ses jambes se liquéfient, les doigts serrés sur une baguette définitivement éteinte. Paralysée, Charlie peine à rassembler ses connaissances des serpents. "Fourchelang" surgit, inutile dans sa situation, et des méthodes vaines comme de faire fuir le rampant en tapant le sol avec un bâton- vraiment. Peut-être qu'en restant statique, il- aaaaaa- !
Son cri s'envole soudain, coupé par la violence d'une gueule immense qui emporte Charlie au moment où le serpent l'attaque. Quand elle se trouve assise sur une branche face à un sorcier quelques secondes plus tard, l'étudiante pense halluciner. Ses yeux quittent l'ordre silencieux du garçon et fixent le vide. Ils sont au-dessus de la brume, au milieu d'un arbre. Elle n'ose pas bouger mais sent bien son coeur frapper derrière ses côtes et sa respiration haleter tout bas en réalisant ce qu'il vient d'arriver. Les mains cramponnées à l'écorce, sa baguette demeure entre les phalanges de l'une d'elle, blanches d'émotions.
Charlie cogite. Comment l'a-t-il emmenée ici ?
Les questions se succèdent dans sa tête et agitent son regard et ses lèvres muettes. C'est Sasha l'Ukrainien de sixième année, n'est-ce pas ? Elle dévisage l'élève avec méfiance. Il cache un balai ? Des chaussures ensorcelées ? Il vole ? Il transplane ? Charlie hésite, ses jambes enveloppant le tronc nerveusement.
On dit qu'il est violent.
D'un geste lent, elle décide de répondre à l'une de ses interrogations en cherchant le tissu de sa robe, au niveau du dos. Manœuvre périlleuse, mais la Serdaigle parvient à tirer un pan, déchiré, comme dévoré. Son coeur rate un battement et ses yeux vérifient la distance du sol. Trop loin. Puis soudain- ribbit !Ribbit ! elle plaque sa main contre sa bouche, horrifiée d'avoir parlé, et surtout horrifiée de constater que son animal de compagnie se trouve toujours en bas, en proie au serpent. Alors, Charlie jette un regard sérieux à Sasha pour lui faire comprendre la gravité de la situation, et pointe sa baguette vers le brouillard.
— Wingardium Leviosa ! la formule, c'est oui, mais l'intention, c'est encore à travailler ! Lord Ribbit s'envole jusqu'à la cime de l'arbre où une chouette le prend en chasse dans les airs. ribbit !Ribbit ! La sorcière panique et manque de tomber en essayant de se mettre debout sur la branche.
Système
Maître du Jeu
Maître du Jeu
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
Charlie Carter a lancé un sortilège !
Sortilège utilisé : Wingardium Leviosa (Sortilège de Lévitation)
Difficulté du sortilège : 6
Modificateur de baguette : -2
Résultat du dé : 9 (9+0)
Réussite :
— Wingardium Leviosa ! la formule, c'est oui, mais l'intention, c'est encore à travailler ! Lord Ribbit s'envole jusqu'à la cime de l'arbre où une chouette le prend en chasse dans les airs. ribbit !Ribbit ! La sorcière panique et manque de tomber en essayant de se mettre debout sur la branche.
Autres résultats possibles
Réussite critique :
— Wingardium Leviosa ! un sortilège qu'elle maîtrise parfaitement, et élève une belle branche au-dessus de la brume. Attendez. Une branche ? Mais où est Lord Ribbit ? ribbit !Ribbit ! Trop tard, le serpent affamé se ferait bien un crapaud pour l'apéro.
Échec :
— Wingardium Leviosa ! son sortilège disparaît dans la brume et semble n'avoir jamais été prononcé. Charlie cherche autour d'elle le moyen de descendre sans oser croiser les yeux de Sasha. Problème, elle vient d'attirer l'attention du serpent qui envisage de s'enrouler à l'arbre.
Échec critique :
— Wingardium Leviosa ! son sortilège heurte la tête du serpent qui saute sous l'impulsion de la colère. Il dépasse la brume et atterrit quelques branches plus bas, à 3 mètres de Sasha et Charlie. Enroulé autour des branches, il progresse dans l'arbre vers eux.
Sasha Shevchen
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
- Chut ! Mais chut j'ai dit !
Un Sasha catastrophé, les yeux ronds d'indignation, s'évertuait à chuchoter avec énergie tout en tâchant de rester discret. Le pire là-dedans, c'était qu'il ne comprenait rien à ce que disait la petite fille qui gesticulait. Ribbit était sûrement encore un de ces mots écossais que le reste du monde ne partageait pas. Il n'était pas suffisant que le monde entier fisse l'effort de parler leur langue, ces fichus écossais inventaient des mots qui n'existaient pas en anglais !
- Mais arrête j'ai dit !
Sasha n'y tint plus. Mû par l'inquiétude d'attirer à eux non pas seulement l'Ombrelangue qui s'agaçait en bas, mais aussi d'autres animaux de la Forêt dont la réputation n'était pas volée, il se souleva, les pieds en équilibre précaire sur la branche, pour attraper brusquement la petite fille. Ce faisant, il lui colla fermement une main sur la bouche.
La gamine n'était pas calmée pour autant. Elle continua à gesticuler tout en criant des MMH-MMMH ! dont le son traversait fort malheureusement sa bouche fermée et les doigts - sales d'écorce humide et de boue - de Sasha. Evidemment, Mmh-mmmh était sûrement toujours ce mot absurde : Ribbit.
Elle pointa un index vers le ciel, et Sasha suivit son regard, pour apercevoir la créature qui battait des ailes sans vouloir quitter la cime d'un arbre voisin.
Une chouette. Bon, et alors ? C'était juste une chouette avec dans les serres...
- Un crapaud,grommela-t-il, son nez se froissant. Tout ça pour un crapaud ? Ah ben bravo !
C'était donc cela qu'elle avait fait s'envoler avec son malheureux Wingardium Leviosa. Sasha baissa la tête pour la fustiger du regard, ses propres cheveux en bataille lui donnant l'air d'une bête mal léchée. On s'en fichait d'un crapaud ! Au mieux, on le...
Tssss...
Le garçon pencha brusquement la tête de côté, avec la vivacité d'un félin ayant aperçu une proie. L'ombrelangue les avait entendus, bien sûr. Dans la brume qui s'épaississait, Sasha ne le distinguait plus et son coeur s'était mis à battre la chamade. Il avait resserré sa prise plus fermement sur la petite fille, comme pour lui faire comprendre que l'heure n'était plus aux jérémiades - sans penser qu'alors il lui faisait peut-être un peu mal.
Deux problèmes.
Si Sasha avait appris une chose à la guerre, c'était que quand on avait deux ennemis, la façon la plus efficace de procéder était de se débrouiller pour gérer un problème grâce à l'autre. Alors brusquement, il remit la gamine sur ses pieds et la tourna pour qu'elle lui fît face, leur visage à quelques centimètres l'un de l'autre. Il avait libéré sa bouche.
- Tu ne bouges pas. Tu ne cries pas. Tu me laisses faire, ordonna-t-il d'une voix grave, insensible aux grands yeux mouillés de la gamine - au visage pourtant étrangement familier.
Sasha la lâcha en priant pour qu'elle ne fît rien d'idiot, et il tira sa baguette en levant le nez vers la chouette.
- Bestia Domitus ! souffla-t-il.
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait.
Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure.
- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui pour mieux se concentrer sur le combat, pointant sa baguette sur la chouette.
Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage et un combat bref mais invraisemblable s'engagea : l'Ombrelangue referma ses crocs sur le vide, le rapace évitant de peu une mort certaine. La chouette virevolta autour de la tête du serpent, et fonça subitement, tête en avant : elle creva un oeil de l'Ombrelangue qui fit jaillir sa longue langue fendue avec un sifflement de douleur. Il se rétracta dans la brume et disparut, bientôt poursuivi pour une chouette féroce qui l'éloignerait d'ici.
- Fiou, c'était moins une, souffla Sasha, soulagé.
Système
Maître du Jeu
Maître du Jeu
,
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
Sasha Shevchen a lancé un sortilège !
Sortilège utilisé : Bestia Domitus (Sortilège de Domestication)
Difficulté du sortilège : 8
Modificateur de baguette : + 1
Résultat du dé : 20
Réussite critique :
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait.
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait.
Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure.
- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui pour mieux se concentrer sur le combat, pointant sa baguette sur la chouette.
Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage et un combat bref mais invraisemblable s'engagea : l'Ombrelangue referma ses crocs sur le vide, le rapace évitant de peu une mort certaine. La chouette virevolta autour de la tête du serpent, et fonça subitement, tête en avant : elle creva un oeil de l'Ombrelangue qui fit jaillir sa longue langue fendue avec un sifflement de douleur. Il se rétracta dans la brume et disparut, bientôt poursuivi pour une chouette féroce qui l'éloignerait d'ici.
- Fiou, c'était moins une, souffla Sasha, soulagé.
Autres résultats possibles
Réussite :
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait.
Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure.
- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui.
Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage : l'Ombrelangue n'eut qu'à ouvrir sa gueule béante et ses crocs se refermèrent avec violence sur le rapace. On entendit le pauvre animal gémir de douleur avant que le serpent ne l'engloutit entre ses deux mâchoires qui se décrochaient étrangement l'une de l'autre.
Gloups, déglutit Sasha.
Il tira la gamine vers lui.
- Monte sur mon dos, dépêche-toi, il lui intima tandis qu'il se retournait vers le tronc, avec l'intention de grimper un peu plus haut.
Si l'Ombrelangue persistait, il serait obligé de se transformer... songea-t-il le souffle court.
Échec :
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Mais au lieu de frapper la chouette, le maléfice frappa de plein fouet le crapaud.
Attaque l'ombrelangue ! répéta Sasha en son for intérieur, les doigts serrés autour de sa baguette.
- Croâ ? répondit mollement le crapaud avant d'être emporté par la chouette.
Les deux animaux disparurent instantanément dans la brume, tandis que la tête de l'Ombrelangue, énorme, émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels.
- Blyad ! jura Sasha.
Alors, il n'eut pas d'autre choix que de se transformer.
Échec critique :
Par une terrible coïncidence, au moment même où Sasha lança le sortilège, la branche se plia sous eux dans un craquement sinistre. Le garçon fut complètement déséquilibré, manquant de peu de tomber tout entier en emportant la gamine avec lui.
Alors, n'ayant plus d'autre choix et à cause des réflexes qui étaient les siens, Sasha se transforma.
Pendant ce temps, la chouette s'enfuyait à tire-d'ailes avec son butin entre les serres...
Charlie Carter
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
Charlie voudrait hurler, en vain, retenue captive par les grosses mains sales du sixième année. Elle craint de tomber, mais aussi de voir Lord Ribbit disparaître devant ses yeux horrifiés. Elle pointe le crapaud du doigt jusqu'à ce que l'Ukrainien ne comprenne enfin. Comme il lui ordonne fermement de rester immobile et qu'elle entend un sifflement distinctif sous ses pieds, la sorcière se fige, terrifiée d'imaginer le serpent surgir à leur niveau. Son regard rond et brillant suit le sortilège, les spirales du rapace, et la chute du crapaud qu'elle serre dans ses bras en le récupérant. Ribbit, murmure-t-elle, à demi-soulagée, l’œil désormais occupé par le combat qui fait rage entre les branches inférieures. Contre le tronc, la rousse se tient d'une main, ses cheveux emmêlés en lianes retombant de chaque côté de son visage barbouillé de boue.
— Oh non ! laisse échapper Charlie en sursautant quand la chouette évite les crochets du rampant et continue d'attaquer, ses serres en avant. Choquée d'assister à une scène aussi violente, elle arrête de respirer un moment, puis la brume avale les deux prédateurs et la pré-adolescente fixe Sasha. Mais ils vont mourir !
C'est une fin trop tragique pour la jeune Charlie qui ravale ses dernières pensées. On ne pourrait pas essayer de les séparer et de les sauver ? Elle garde Ribbit contre sa poitrine, le gonflement frénétique du crapaud en rythme avec le battement de son coeur.
Comme tout le monde à l'école, la benjamine Carter a déjà vu le Gryffondor en compagnie de sa sœur, et elle sait même ce qu'elle dit de lui dans son dos. ribbit ! Chut Lord Ribbit, on veut pas terminer en garniture pour pâté de dragon ! Sasha se coltine une réputation de briseur d'os sans émotions que Charlie peine à ignorer. Collée au tronc massif de l'arbre, elle envisage plusieurs manières de descendre avant de se souvenir qu'elle était perdue, et qu'un serpent à l’œil crevé rampe quelque-part en bas. Sa baguette défie vaillamment l'Ukrainien.
— Faut qu'on parle, Sasha Shevchen. Son bras tremble, certes, mais sous la manche, il n'y verrait rien. Elle fronce son nez, Charlie, incertaine de comment s'y prendre. ribbit ! T'as fait quoi pour qu'on s'retrouve là ?! T'as transpla- aaaah ! elle glisse, tente de se retenir à une branche voisine trop fine qui se brise, se voit chuter au ralenti et tombe finalement dans les étages inférieurs, une branche après l'autre, chahutée comme un bout de viande jusqu'à ce qu'une tentacule de filet du Diable ne la retienne, pliée en deux, et ne s'enroule à sa jambe avec vigueur. Sa baguette tombe. Son crapaud tombe. Sa cape se renverse, cachant son visage. Oh non !
Sasha Shevchen
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
Pendant quelques instants, Sasha eut peine à croire à la facilité avec laquelle il avait réussi à sauver le crapaud et leur propre peau avec un plan aussi erratique que celui-ci. Mais sa connivence avec le monde animal payait peut-être malgré tout, après des années à s’entraîner. La brume leur ayant caché la suite du combat, Sasha se laissa tomber accroupi, baguette toujours en main, le temps de faire retrouver à son cœur un rythme raisonnable.
- Mieux vaut eux que nous, se contenta-t-il de commenter au sujet de la mort prochaine d’au moins l’une des deux créatures.
Il ne lui venait même pas à l’esprit qu’un tel destin eût pu heurter les sentiments d’une si jeune fille : lui qui avait grandi dans la campagne savait que les animaux étaient destinés à mourir, pour la plupart, afin de faire le festin d’une autre créature – y compris lui-même. Il ne percevait pas même qu’on pût en être triste à l’âge de cette petite gamine qui l’appelait par son nom. Sasha tressaillit subitement.
- Hein ?!
Sasha décrocha sa mémoire en un « HUH » de surprise proprement ahuri pour scruter l’enfant avec des yeux ronds comme des soucoupes. Comment cette gamine qui lui arrivait à peine au-dessus du nombril pouvait-elle connaître son prénom ET son nom de famille ? Un moment, il la regarda comme si ce petit corps d’élève avait pu renfermer quelque vieille Baba Yaga sage prête à se transformer en un serpent pour le dévorer ou le récompenser de ses bonnes actions. Mais ce n’était tout simplement pas possible, alors il repoussa fermement les histoires de son enfance pour froncer les sourcils, suspicieux.
- Comment tu sais d’abord que…
Ils avaient parlé en même temps, s’étaient interrompus en même temps.
- Hé !
Avec un réflexe idiot, Sasha brassa le vide. C’était trop tard : l’enfant était tombée plus bas, et il la suivit des yeux avec embarras. Elle se prit une branche, puis une autre, avant de se retrouver la tête à l’envers avec sa robe sur elle. L’Ukrainien leva les yeux au ciel en voyant le crapaud et la baguette tombée plus bas.
L’univers visuel de cette enfant devait être bien sombre, à l’instant même. Sasha profita de ce que la vue lui avait été de nouveau dérobée pour descendre tranquillement d’une branche à l’autre, dans un silence feutré. En bas, les coassements du crapaud indiquaient qu’il avait survécu. Il faudrait aller le chercher, lui et la baguette de la petite fille, avant d’essayer de s’orienter pour retrouver le chemin du château. La brume était si épaisse que même pour Sasha, ce n’était pas si facile… En tout cas, pas sous cette forme-là.
Entre un index et un pouce, il saisit un pan de la robe de sorcière pour la soulever. Il découvrit un visage qui devenait tout rouge, mais il avait décidé de prendre son temps. Au moins, saisie ainsi, elle ne risquait plus de créer un autre problème. De son côté, elle le découvrit étrangement allongé sur le ventre, soutenu le long d’une branche voisine, comme si c’était là absolument naturel pour lui de trouver un peu de repos dans cette position, les chevilles croisées derrière lui pour assurer un minimum de stabilité.
- On t’appellerait pas Miss Catastrophe, par hasard ? grommela-t-il de son air bougon habituel. Gigote pas, sinon on en a pour une heure.
Sasha fit un signe du menton vers la plante qui avait saisie l’enfant par le pied.
- Dyavol'skiye silki, on appelle ça par chez moi. T’inquiète, elle va te lâcher bientôt.
Il accrocha le pan de la robe sur une petite branche voisine, pour qu’elle pût garder la vue dégagée, puis il croisa ses mains sous son menton pour faire reposer sa tête sur sa propre branche. A l’envers, la fille avait les mêmes cheveux roux qui dansaient sous sa tête qu’Alison Carter – mais c’était pour lui le seul lien lointain qu’il pouvait faire. Sasha resta longuement ainsi : il la regardait tranquillement, avec la même curiosité qu’une araignée attendait qu’un insecte fût enfin assez mûr dans sa toile.
- T’inquiète, on ira les retrouver après, ton Seigneur Kvakva et ta baguette. Comment tu sais comment j’m’appelle ? il finit par demander. Si tu me dis ce que tu sais, je te libère. Et après, tu montes sur mon dos et tu t’accroches à mes oreilles, ok ?
Charlie Carter
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
— Nan, on m'appelle "Miss trop-gentille", ou "trop bonne, trop conne", version Alison, retient Charlie derrière sa bouche pincée alors qu'elle se tortille sans réussir à dégager son mollet. D'ailleurs, la liane semble même progresser vers son genou et l'envelopper avec fermeté. Hein ?! elle se tord le cou pour observer ce que Sasha désigne par "Dyavol'skiye silki" et malgré la pénombre, elle reconnaît la plante en comprenant mieux les conseils que lui donne le garçon en face d'elle. D'ailleurs, comment peut-il être aussi détendu sur sa branche ? Un temps, Charlie paraît ahurie. Puis elle récite presque par coeur. C'est un filet du Diable ! Plus je résiste, plus elle va se resserrer. Mais Sasha, tu peux la repousser juste en faisant de la lumière, elle déteste la lumière ! S'te plaît ! À donner des ordres, elle ressemble davantage encore à Alison.
La petite Carter comprend rapidement les intentions du 6ème année qui s'amuse quasiment de la situation, bien trop à l'aise dans leur arbre. Quoi ?! Elle fronce son nez et se donne des airs de sa sœur en miniature pour la deuxième fois.
— Premièrement, c'est Lord Ribbit, et il va se faire manger si on le sauve pas ! Ensuite, tu confonds, c'est les épaules en anglais, pas les oreilles ! même inquiète, Charlie reste pragmatique et s'imagine mal accrochée au dos du Gryffondor, à tenir ses oreilles. La tête sérieuse de l'Ukrainien pourrait agacer l'étudiante de 3ème année, mais au lieu de ça, elle l'intrigue, provoquant mille questions à la Serdaigle curieuse. Qu'est-ce que tu faisais dans la forêt interdite déjà ? Moi je cherchais Lord Ribbit, et toi ? elle scrute Sasha avec une suspicion toute relative, incapable de réellement se méfier des gens.
Comme il résiste aussi durement que le filet du Diable qui coince sa jambe, Charlie gonfle ses joues un moment. C'est à dire qu'elle a tendance à trop parler. Trop en dire. Et se faire allumer par Alison ensuite. ribbit ! ribbit ! Son visage rouge cherche le batracien derrière la brume, en vain.
— Bon d'accord, capitule enfin l'élève et sa tignasse renversée. J'sais comment tu t'appelles parce que ma sœur fait semblant de sortir avec toi pour attirer des vieux riches de 7ème année. Même qu'elle fait semblant qu'vous couchez ensemble, mais j'sais que c'est pas vrai moi. Alison a jamais couché avec un garçon, sinon elle m'aurait raconté. Elle a promis. Un pacte comme un autre, passé entre les sœurs Carter après que Freya leur ait raconté sa première expérience pendant l'été avant celui-ci, en guise de prévention car Alison allait avoir 14 ans. Voilà Sasha Shevchen, j'ai trop parlé. Oublie c'que j'ai dit vers la fin. Et maintenant ?
Sasha Shevchen
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, le 27/09/2124
- Han-han. Nyet.
Sasha avait fait un lent signe négatif du visage. Décidément, la petite fille n'était pas le moins du monde effrayée par la situation. Sasha la trouvait bien plus courageuse que la plupart des élèves ici, qui, au lieu de s'aventurer dans la Forêt Interdite, y aurait abandonné leur animal de compagnie de peur de se salir les chaussures dans la boue. Alors qu'elle, elle était à peine affolée d'avoir failli être le dîner d'un Ombrelangue puis d'être suspendu par le pied par un filet du Diable.
- Je ferai de la lumière qu'au dernier moment, il expliqua. La lumière, ça attire tout un tas de bêtes, ici. A quoi crois-tu que sert une plante pareille, sinon à être le garde-manger de je sais pas quel animal ?
Effectivement, autour d'eux la brume était toujours là, mais elle s'était étrangement assombrie. Il semblait que les deux élèves étaient enveloppés dans une ouate sombre, comme un cocon humide et froid, et pourtant intimiste. La lumière avait tant décliné que les traits de leur visage allaient bientôt disparaître à leurs yeux, pour ne laisser que les contours de leurs silhouettes.
Face aux questions suivantes, Sasha resta tranquillement silencieux. Il avait l'avantage et le savait parfaitement. Il n'y avait pas de malice dans ses yeux. Il avait l'air juste d'attendre, à la manière d'un chat qui attend patiemment le retour de ses maîtres : un peu plus il s'endormirait là, dans le confort relatif de cette branche solide où reposait son menton sur ses mains striées de ses cicatrices noires et inélégantes.
Mais son regard se fit soudain plus alerte et il se redressa légèrement.
- Quoi ?! T'es la soeur d'Alison ?
Maintenant qu'elle le disait, c'était parfaitement évident. Pas seulement les cheveux roux, mais le petit air donneur de leçon quand elle lui expliquait comment s'appelait Lord Ribbit et qu'on disait les épaules, pas les oreilles. Avec un air bougon, Sasha reposa son menton sur ses mains.
Il n'était pas le moins du monde surpris par les raisons précises qu'évoquaient la gamine concernant sa soeur et leur présumée relation. Non, ce qui l'étonnait plus, c'était tout simplement qu'Alison eût une petite soeur et qu'il ne le sût même pas. Après tout, c'était vrai qu'ils n'échangeaient jamais sur leur vie personnelle, et il ne lui était pas venu à l'esprit que la Serpentard eut une quelconque vie qui la rendît plus humaine. Car jusqu'ici, il se l'était imaginée comme une fille unique choyée par deux parents trop bien habillés pour être innocents, qui l'auraient couverts de cadeaux et de compliments. Une espèce de poupée de porcelaine froide et méprisante, qui pleurait parfois.
Sasha haussa les sourcils après un silence, à regarder les mimiques expressives - tellement naturelles comparées à celles d'Alison - de la petite fille.
- T'es pas un peu trop jeune pour parler de ces choses-là, toi ? Et c'est quoi ton prénom ?
Il n'allait quand même pas l'appeler Miss Carter. Mais enfin, en attendant, Miss Carter posait un sérieux problème : apparemment, les deux filles semblaient partager beaucoup de leur vie personnelle et il pouvait bien sûr décemment craindre que...
De discrets bruits se firent entendre à leur droite et Sasha tourna vivement la tête.
Il replia ses jambes sous lui pour s'accroupir au bord de la branche, silencieusement. Elle se plia dangereusement, le rapprochant de la petite fille.
- Ecoute, petite soeur trop-gentille, ce que je sais, c'est que tu es beaucoup plus courageuse que ta soeur et que les autres élèves ici. Alors ce serait dommage que tu sois le dîner d'une araignée.
Il chuchotait, et ses yeux alertes ne quittaient pas ceux de la petite fille, à la manière d'un hypnotiseur. Etrangement, il avait l'impression d'avoir déjà fait ça : parler à une petite fille pour la convaincre. Et quand faire peur à la petite fille ne fonctionnait pas, il fallait jouer sur d'autres cordes. Une drôle de douleur lui tordit les entrailles, sourde et lointaine, mais il tâcha de se concentrer.
- Alors tu as droit à une réponse ou deux, mais seulement en échange de garder le secret. D'accord ?
Il attendit d'avoir au moins un mouvement de tête en guise de réponse. Quand il reprit la parole, c'était pour parler un peu plus bas encore, comme si les troncs étaient remplis de créatures trop curieuses qui auraient pu voler leur secret.
- Je viens ici parce que je suis pas tout à fait humain. Mon travail, c'est de faire en sorte que les monstres cachés n'aillent pas plus loin que la lisière de la Forêt. Tu vois ? Pour qu'ils n'attaquent pas le château et ses habitants.
D'un index, il désigna une direction, probablement celle du château, même s'il n'était pas certain que ce fut cette direction-là.
- Mais il n'y a qu'un monstre lui-même qui peut faire ce travail-là. Et pour que je puisse continuer à travailler, pour que les créatures de la Forêt n'envahissent pas les gens du château, les humains, hé bien il ne faut pas qu'il sache qui je suis vraiment. Tu comprends ?
Voilà longtemps qu'il n'avait pas inventé de conte. Il faisait ça souvent, quand il était plus jeune, mais il n'en avait plus eu l'occasion depuis longtemps. Ce qui était fort dommage, car il estimait s'être beaucoup amélioré depuis. Sasha vérifia qu'il avait bien toute l'attention de la petite fille.
- Alors, Oksana, il faut que tu dises à personne la vérité sur moi. Ni que je viens dans la forêt, ni que je suis une bête, ok ? A personne, et encore moins à ta soeur.
Il ne savait pas quel âge elle avait, au fond. Peut-être était-il trop tard pour qu'elle pût croire son histoire. Mais l'effrayer davantage ne marcherait pas et il le savait - sauf à la traumatiser, ce qu'au fond, Alison ne lui pardonnerait sûrement pas. Il capta la mimique dubitative de la petite fille, même à l'envers.
- Quoi, tu me crois pas ?
Il avait haussé les sourcils dans une expression qui paraissait sincèrement étonné, puis il haussa les épaules.
- Tant pis, tu verras toi-même. Il faut qu'on se dépêche, sinon le crapaud que t'as dans le ventre va réveiller toute la forêt. Je vais allumer la lumière et me mettre en dessous de toi. Et toi, tu te rappelles : tu t'accroches à mes oreilles, insista-t-il, sans un sourire. Mais pas trop fort, s't'euh plait.
Sasha fit apparaître sa baguette magique dans sa main. Mais une fois qu'il l'agita, faisant apparaître une faible lumière au bout du morceau de bois, qui éclaira leur deux visage, il coinça la baguette en travers de sa bouche. Et alors qu'il la bloquait avec ses dents, il se laissa tomber subitement, vers la branche d'en-dessous la petite fille, tandis que déjà, le Filet du Diable relâchait doucement sa prise.
Ce qui atterrit sur la branche d'en dessous n'avait plus rien d'un garçon de sixième année. Des pattes souples et velues s'ancrèrent dans la branche qui ploya légèrement sous le poids de la bête, à l'aide de longues griffes plantées dans le bois. Dans la brume, on distinguait surtout sa silhouette trapue et la longue queue suspendue, qui s'agitait lentement, trahissant une impatience animale, et les tâches sombres d'un pelage marbré. De Sasha, il ne restait qu'une seule chose : deux yeux verts bougons qui fixaient de potentiels prédateurs dans la brume, et des traces noires discrètes entre son pelage marbré.