Harry Potter RPG
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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Bibliothèque, Mercredi 27 Septembre 2124

Au moment exact où le bibliothécaire parla, Sasha sut que ce serait compliqué. Il ne se l'expliquait pas : il voyait juste très bien, dans ce regard bon enfant, ces petites tapes dans ces mains, toutes guillerettes, et ce petit sourire léger, qu'ils n'allaient pas s'entendre. Le Gryffondor retint son souffle, interdit, jetant seulement quelques oeillades autour de lui : subitement la bibliothèque changeait complètement d'atmosphère. D'un endroit austère elle devenait soudain quelque chose de plus convivial, semblable à un grand salon de thé où les murmures des conversations réchauffaient les grandes rangées d'étagères. Le regard de Sasha fut attiré par le gramophone qui lévita vers eux, et il ne put s'empêcher de rentrer légèrement la tête entre les épaules comme si un tel objet lui donnait des frissons. Puis il dévisagea le bibliothécaire.

 

- De... De danseurs ? il répéta comme s'il n'était pas sûr d'avoir bien compris.

 

Sasha avait un tout petit espoir : des fois, les anglais utilisaient un mot pour un autre. Par exemple, il avait vite entendu que chick ne désignait pas les poussins, mais... les filles. Alors peut-être que par danseur, mister Beckett voulait dire nettoyeur ou quelque chose de ce genre.

Il l'espérait.

Il suppliait intérieurement les Dieux Ukrainiens, anglais, et tous les autres qui pussent exister.

(Pas les Russes. Il fallait quand même pas pousser. Plutôt danser que de supplier un Russe.)

 

Un rire derrière Sasha le tira de son mutisme. 

 

- Heu... Le bal ?

 

Il savait ce qu'était un bal, même s'il n'avait jamais été à un autre bal que celui qui se tenait dans son village, où on chantait des chansons paillardes et où les adultes finissaient complètement ivres. Mais Sasha se doutait bien que le Bal de Poudlard ne ressemblerait pas à ça. Il imaginait quelque chose de très solennel, avec des centaines d'étudiants silencieux qui regardaient un spectacle avant d'avoir le droit de boire un jus de citrouille. La perspective de devoir danser dans ces conditions lui donna envie de se transformer sur le champ et fuir le plus loin possible du château.

Mais à la place, Sasha secoua la tête en un signe négatif, le visage fermé.

 

- Non, je sais pas danser, mister.

 

Devant l'air surpris du bibliothécaire, Sasha fit un pas en arrière, instinctivement. On entendit quelques élèves pouffer non loin d'eux, témoins heureux sûrement de cette scène incongrue où l'Ukrainien casseur de nez avait peur d'un pas de danse. Ce dernier sentait une confusion nerveuse monter en lui, à mesure que ce destin irrémédiable approchait. Il secoua de nouveau la tête, plus frénétiquement.

 

- Moi, dépoussiérer les bouquins anciens, ça me va très bien, affirma-t-il - non sans faire la liste, intérieurement, de toutes les injures dans sa langue d'origine qu'il aurait pu réserver à l'intention de mister Brooks. Je peux laver par terre, aussi. Ré-étiqueter les vieux livres. Nettoyer les joints des murs entre chaque pierre à la brosse à dents. Ou les toilettes. Ca me dérange pas.

 

Bon, Sasha aurait bien évité de se porter volontaire pour ce genre de tâches, mais dans des circonstances si désespérées, récurer les chiottes pendant plusieurs après-midis toutes entières n'était pas une sentence si lourde. Et tout ça pour un pauvre nez cassé ! Poudlard était une école bien plus cruelle qu'il ne s'y était attendu.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124

Le félin avait légèrement ployé sous le poids qui avait subitement chuté sur son dos. Il lui fallut quelques secondes pour s'adapter, retrouver son équilibre pour que la petite fille ne glissât pas sur son pelage. Comme un être organique nouvellement créé, après des instants d'inconfort, ils trouvèrent une sorte de synergie : elle avait resserré ses genoux autour de ses reins, et allongé son corps vers l'avant relativement naturellement.

 

A la question de savoir si c'était bien lui, Sasha n'avait pu répondre : une fois transformé, ses mâchoires, sa langue, même sa gorge n'étaient plus pareils et il ne lui était plus possible d'articuler. Même ses pensées étaient différentes ; il comprenait parfaitement, avec un discernement presque plus aigu, ce que disait Charlie.

 

Charlie.

 

C'était un joli prénom. C'était doux quand il l'avait répété dans sa tête, et finalement, c'était sur un détail comme celui-ci qu'il décidait de lui faire confiance.

 

Charlie donc, avait saisi ses oreilles. Par réflexe, il les avait faites frémir, mais finalement il s'habitua à cette drôle de prise. C'était la première fois qu'il portait un humain sur son dos : Charlie était lourde, mais ses muscles les soutenaient bien tous les deux. Certes, il ne pourrait pas sauter aussi loin, ni courir aussi vite, mais quand il avança, ses omoplates roulant entre les bras de la petite fille et ses griffes se plantant stratégiquement pour équilibrer sa prise, il prit une assurance pour aller un peu plus vite. Il sentit Charlie s'accrocher plus fermement, puis plus fermement encore quand il sauta sur la branche inférieure, puis sur la suivante, avec des hoquets parfois de surprise. Les atterrissages étaient certes un peu brutaux, mais Charlie rebondissait sur ses flancs et ils repartaient de plus belle.

 

Tout en bas de l'arbre, les pattes du grand félin s'enfonçaient dans la mousse aux pieds des arbres dans un silence presque absolu. Il louvoyait entre les buissons, grimpait avec aisance sur un rocher sur lequel il s'arrêta quelques instants, le temps de baisser la tête en avant. Son museau humide et frémissant huma la pierre.

 

Le humus, Charlie, la fouine, Charlie, les relents âcres d'un groupe d'insectes, Charlie... et de l'amphibien. Les moustaches de Sasha frémirent.

 

- Raô, fit-il dans un grondement guttural, étrange de profondeur et de discordance avec l'environnement : on aurait dit un bruitage provenant de la jungle là où les bruits de l'Ecosse se cantonnaient aux grillons et au vent dans les feuilles mortes.

 

Evidemment, Charlie ne pouvait pas comprendre. Elle empestait, brouillant ses pistes olfactives avec ses odeurs de shampooing, de peau humaine, et toutes les touches qu'elle apportait avec elle, y compris celle de graisses provenant du dîner de Poudlard et même quelqu'odeur qui lui rappelait Alison. Mais il pouvait quand même discerner l'odeur de Ribbit qui était passé par là.

 

La baguette, elle, fut très simple à trouver. Elle avait roulé au bord de la rivière, là où les odeurs les avaient amenés, et Sasha se baissa pour que Charlie pût tendre la main et l'attraper sans glisser. Il en profita pour s'allonger quelques instants, pour reposer ses pattes un peu endoloris par l'effort inhabituelle. Puis il étira soudain sa mâchoire dans un grand bâillement, dévoilant une longue série de crocs pointus, sa longue langue passant rapidement ensuite sur ses babines avant de retrouver une expression plus calme.

 

- Raaaaô.

 

Il se redressa lorsqu'elle eût récupéré sa baguette, puis ils avancèrent encore, le long de l'eau. C'était par là que l'odeur s'en allait. Ribbit avait dû être attiré par l'eau. Il étaiit vraisemblablement dissimulé quelque part sous un buisson, terrorisé par les malheureuses aventures qu'il avait vécu. Aussi Sasha prenait-il son temps : il approchait son museau des plantes, reniflant ici et là, poussant parfois un gros soupir qui, vu sa cage thoracique énorme, provoquait un souffle chaud et grave qui soulevait les feuilles mortes. Ils déambulèrent ainsi longuement, et Sasha ne réfléchissait plus vraiment, porté par son esprit animal - dans lequel Poudlard s'effaçait peu à peu, ainsi que tous les soucis du château et des nouvelles du front qui venaient au compte-goutte.

Quelques insectes fuyaient à leur approche, et d'autres amphibiens plongeaient dans l'eau avec de discrets plouf! qui résonnaient à leurs oreilles. Le son du vent chuintait aux oreilles du félin, d'une manière si différente de lorsqu'il était sous sa forme humaine qu'il avait l'impression que les bourrasques étaient chargés de chuchotements.

D'autres chuintements provenaient d'ici et là, des ultrasons qu'il ne percevait que sous cette forme. D'ailleurs, qu'entendait-il ?

 

Il releva subitement la tête.

 

Oublié, Seigneur Kvakva, quelque chose de beaucoup plus intéressant était à portée.

Sasha avança en baissant le dos, presque à ras du sol. Contourna rapidement un tronc malgré la charge inconvenante de Charlie sur son dos, puis il s'immobilisa. Un rongeur passa si vite qu'il n'eut que le temps d'abattre un patte - sur la terre. Le lapin fila devant eux, indemne. En une impulsion, Sasha s'élança à sa suite, emportant avec lui tout son poids qui retomba avec lourdeur devant un arbre - juste en dessous, la queue du lapin venait de disparaître dans son terrier. Le félin plongea le museau dedans - l'odeur, AH, L'ODEUR ! Et les petits couinements tout au fond !

Il ressortit le museau, y inséra sa patte. Ses griffes mordirent la terre, sans succès.

 

- RRRRRrrrrrrrrrrrrrr... gronda-t-il, mâchoire fermée.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124

La réalité était confuse, et pourtant parfaitement claire : l'odeur du lapin était forte, il y avait peut-être même plusieurs petits au fond de ce terrier : il le devinait par la chaleur des effluves qui en émanaient, par cette odeur musquée qui se mélangeait à la fragrance des feuilles mortes humides qu'il écrasait sous ses grosses pattes. Mais au-delà de l'excitation que provoquaient en lui toutes ces senteurs alléchantes, il entendait les cris étranges qui venaient d'au-dessus de lui : Arrête Sasha. Sasha. Redeviens Sasha.

 

Mais il était parfaitement Sasha, protestait son esprit : ces grosses pattes velues striées de cicatrices noires, ces griffes qui se plantaient dans la terre et la balafraient, ce grondement guttural qui faisait vibrer tout son corps, c'était bien Sasha.

 

Il savait pourtant ce que Charlie voulait dire : elle voulait la version humaine, que ses griffes meurtrières se rétractent, que ses dents rétrécissent, que sa colonne se rigidifie et que sa queue disparaisse.

 

Alors, quand elle tomba devant lui, à contrecoeur, il s'exécuta. Le grondement du fond de ses entrailles devint moins intense, et son corps vêtu d'un jean et d'une chemise épaisse et humide, apparut subitement sous dans un pull à fermerture éclair restée ouverte qui tinta quand il bougea. Ses mains aux ongles incrustés de terre se dégagèrent tandis qu'il émettait un soupir. Son jean était trempé aux genoux et il accusa un instant les douleurs qu'avait laissé pendant plusieurs longues minutes le poids d'une gamine de 13 ans et demi sur son dos.

Pendant quelques instants, son esprit ne retrouva pas tout de suite le chemin des mots. Les odeurs alléchantes s'évanouissaient, et il cherchait à ne pas les perdre - pourtant elles disparurent, comme de l'eau qu'il aurait voulu tenir entre ses doigts. Sa vision s'assombrit - soudain il réalisa qu'ils étaient dans une nuit épaisse. La brume n'était plus un écran gris, mais un écran noir opaque, qui les enveloppait au pied d'un arbre mort, sinistre. Que fichait-il là avec une enfant ? Ils étaient partis beaucoup trop loin.

 

- Blyad, croassa-t-il, la voix enrouée, et il jeta à Charlie un regard hagard en basculant sur son séant.

 

Bizarrement, il pensa à sa mère, qui l'aurait grondé d'avoir émis un tel juron. Avec l'humidité qui avait imprégné une partie de ses vêtements, le froid lui mordait soudain les membres et il frissonna. Pauvre gamine, où l'avait-il emmenée ?

 

- Quoi ? 

Les mots de Charlie faisaient enfin à peu près sens. Elle avait posé une question, un peu plus tôt. C'était entré dans son esprit sans qu'il avait pu y répondre. Il se passa une main sur le visage, qu'il frotta un peu sèchement, comme pour se faire violence. 

 

- Les monstres des cauchemars, il se souvint soudain et il ramena ses jambes sous lui, prêt à se relever. Ca m'connaît, figure-toi.

 

C'était bien qu'il lui parlât d'autre chose que de cette foutue nuit qui ne lui inspirait soudain rien qui vaille. Si elle n'était pas en mesure de se rendre compte du danger dans lequel ils se trouvaient, autant continuer à parler comme si de rien n'était. Pour l'occuper, elle. Et peut-être lui, aussi.

 

- T'auras qu'à penser que t'as un léopard dans tes cauchemars pour te défendre, ok ?

 

Mais à la place de la réponse de Charlie, cli-clic, entendirent-ils discrètement.

 

Sasha se figea. Il leva lentement les yeux, et ils purent voir le bout d'une patte pointue et velue qui se posait sur le tronc au-dessus.

 

Oups. Une Acromentule.

 

Une autre patte s'allongea pour approcher, et bientôt ils virent le début d'une tête d'arachnée. Immense. Elle était pourvue de deux grosses mandibules noires et frémissantes, de quatre yeux dont deux plus gros que les autres, parfaitement lisses et sans pupille : pourtant Sasha eut la certitude que les quatre yeux les fixaient intensément. Le garçon déglutit, et il se leva doucement pour faire disparaître Charlie sous lui. Elle se retrouva bloquée sous ses vêtements humides - et légèrement transpirants, mais au moins, elle était protégée par son corps. Charlie gémissait. De fatigue, de protestation ou de terreur, il ne savait pas : lui-même ne pouvait détacher ses yeux de l'insecte immense. Beaucoup trop immense.

 

Allons, ce n'était qu'une bête, comme une autre. Mais même en léopard, la taille de cette araignée l'aurait effrayé. Il ne se serait jamais aventuré à attaquer une créature trois ou quatre fois plus grosse que lui comme celle-ci - surtout sans l'appel d'un sang juteux entre ses crocs comme récompense à la clé.

Une drôle de langueur s'était emparée de lui, mais il se cramponna contre l'arbre et Charlie pour qu'elle n'eût pas l'idée de s'enfuir - déclenchant alors certainement l'instinct de chasseuse de l'acromentule. De son autre main libre, il parvint à retrouver sa baguette. Il suffisait de la manipuler, comme la chouette. Mais elle était bien plus grosse qu'une chouette.

 

- B-bestia Domitus, s'entendit-il dire d'une voix blanche. 

 

De la pointe de sa baguette s'échappa un fin jet de vapeur, qui frappa la tête de l'acromentule de plein fouet. Elle eut un mouvement de recul, ses pattes tintèrent, désordonnées, quand elle bougea sous la confusion. Mais bientôt, elle sembla retrouver ses esprits. 

 

AIors, elle continua vers eux sa descente, indifférente au sort qu'il avait essayé de jeter. Sasha esquissa un geste pour s'extirper, mais trop tard : l'acromentule fit un mouvement de balancier avec son corps et envoyer vers eux un large filet visqueux, plein de filaments blancs qui les englua tous les deux contre l'arbre, incapables de bouger. 

 

 

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124

Sasha avait senti la masse de Charlie disparaître entre lui et le tronc, lui laissant légèrement plus d'espace. Un moment, il paniqua légèrement : elle allait s'enfuir ! Il aurait voulu la retenir, mais ses bras et son torse étaient coincés dans la toile.

 

- Charlie ! glapit-il à voix basse, persuadé que la fin de la petite fille était proche si elle s'enfuyait.

 

Mais la petite fille était rudement intelligente : non seulement elle s'était glissée hors de sa robe pour s'échapper de sa prison, mais en plus elle trouva un sortilège à sa portée pour tâcher de ralentir la bête. Sasha jura à voix basse. Il fallait qu'il prît le relais. Et si Charlie avait pu se libérer en se glissant dans ses vêtements...

 

Sasha s'accroupit en gigotant, faisant des efforts pour se désolidariser de ses propres vêtements. A demi-humide, ils lui collaient chaudement à la peau, mais il parvint à glisser sur ses genoux, laissant au-dessus de lui son pull et sa chemise. Il tomba à quatre pattes à côté de la petite fille épuisée, torse nu. Il lui sembla que le froid dévorait sa peau humide et un frisson parcourut son dos. Sasha était musclé, mais tout comme ses mains, sa poitrine, son dos et ses épaules étaient par endroits striées de longues lacérations noires et anciennes, mal cicatrisées. Mais à cet instant, ça n'avait aucune importance : si Charlie mourait dans la Forêt Interdite, les agents du château auraient tôt fait de retrouver... leurs vêtements ensemble. Qu'est-ce qu'ils allaient s'imaginer ? Il faudrait revenir nettoyer ça, songea-t-il étrangement, comme pour se détourner, avec ces considérations techniques, du vrai danger qui aurait paralysé sa pensée autrement.

 

- Charlie, accroche-toi. Accroche-toi à moi, ok ?

 

Au-dessus, la créature avançait au ralenti, savamment influencée par le sortilège lancé par la petite fille. Sasha jeta un coup d'oeil vers elle, et constata avec une boule au ventre qu'elle avait ses quatre yeux fixés sur sa toile qui bougeait encore légèrement quand lui-même se mouvait, son jean encore à demi-accroché. Quand ils sortiraient, l'Acromentule aurait deux choix : les poursuivre, ou bien capturer ce qu'elle penserait être dans la toile, à savoir un tas de vêtements. Or, Sasha était suffisamment dans la peau d'un chasseur pour savoir que ce qui l'attirerait, ce serait ce qui gigoterait le plus : il faudrait donc dissimuler leur propre mouvement... Et au contraire activer celui de la toile. Sasha resserra ses doigts sur sa baguette, prêt à agir, mais Charlie n'avait pas bougé.

 

- Charlie ?

 

Il fut obligé de la secouer avec un peu de fermeté, comme il la voyait étrangement fermer les yeux. Blyad, le sortilège avait dû l'épuiser au point qu'elle frôlat l'inconscient. Il secoua son épaule un peu plus fort encore.

 

- Charlie ! Accroche-toi vite ! la pressa-t-il.

 

Sasha la prit contre lui, contre son torse, priant pour qu'elle eût le réflexe de le prendre dans ses bras. Enfin, il sentit les doigts froids de Charlie se croiser dans son dos, et ses jambes s'arrimer à ses hanches. Alors, il agita sa baguette, pour jouer leur dernière chance d'échapper au prédateur.

 

Il attrapa son pull pour le secouer vivement un instant, tandis que de son autre main, il agita sa baguette.

 

- Atramento !

 

 

De la baguette de Sasha jaillit un nuage d'encre épais, sous lequel ils se glissèrent, en même temps que le pull de Sasha tremblotait encore dans la toile, captivant suffisamment l'attention de l'Acromentule. 

 

Alors, dissimulé dans les ombres, Charlie sentit la peau de Sasha se garnir de son pelage, son torse s'arrondir, son cou s'épaissir... La toile de l'araignée colla un peu à la jambe de Sasha tandis qu'il se transformait, et il y laissa une touffe de poils en s'en arrachant.

 

Alors, ils jaillirent hors de leur cachette pour détaler dans la nuit.

 

 

L'instinct de survie du léopard reprit immédiatement le dessus. L'adrénaline inonda ses veines, et son acuité visuelle et olfactive l'orientèrent immédiatement vers le chemin qu'ils avaient pris pour venir ici. Sasha galopa ventre à terre, en prenant garde à ne pas trop frôler le sol pour ne pas que Charlie fusse percutée par une racine, même si le voyage devait être rude pour elle.

 

Lancé à pleine allure, il ne lui fallut que quelques minutes pour atteindre la lisière. Soudain, la brume parsemée d'arbres et de buissons laissa place à la brume sans obstacle, et sous ses pattes griffues défilait l'herbe verte du parc. Bientôt, ils atteindraient l'allée de gravillons, mais...

 

- Raowhrrk !

 

Il trébucha avec un couinement, car Charlie venait de le lâcher, probablement d'épuisement. Il roula lui-même dans la terre, s'empressa de faire demi-tour pour revenir près d'elle. Il dérapa dans l'herbe - et instantanément reprit sa forme humaine.

 

Encore une fois, l'obscurité, les sens désorientés, le froid qui lui mordit la peau. Il avait le souffle court.

 

- Charlie !

 

Elle chouinait.

 

- Charlie, on y est presque. Viens. Viens là.

 

Il la reprit dans ses bras, s'efforça de la remettre debout. Elle chancelait, alors il la souleva de terre pour la tenir contre lui. Son propre coeur battait douloureusement à ses tempes, le pressant d'échapper encore au danger même s'il devait être loin, maintenant. Au moins, elle lui tenait chaud. Sa peau à nue le transirait de froid s'ils restaient ici. Les températures nocturnes frôlaient le négatif.

Alors il se remit à trotter, avec cette lenteur terrible de ses jambes humaines, pour atteindre l'allée de gravillons, et bientôt, ses pieds gravirent les escaliers de pierre. Mais Charlie était lourde, et lui-même venait de se fatiguer terriblement à cause de ce sprint chargé. La tête lui tournait. Alors il reposa la petite fille sur les marches, le temps de reprendre son souffle. Des appliques de part et d'autre de la grosse porte en bois surmontaient des bougies magiques qui jetaient des lueurs orange, les éclairant enfin un peu, eux et la brume, d'une lumière diffuse.

 

- On y est, glapit-il entre deux respirations sifflantes. Tu vas pouvoir rentrer jusqu'à ta salle commune, Charlie ? Ou je te ramène ?

 

S'ils croisaient quelqu'un, il était dans la merde. Gravement. Mais il n'avait plus l'énergie que de les traîner jusqu'à leurs dortoirs respectifs, certainement pas de lancer de nouveaux sortilèges. Mais il était probablement aussi perdu qu'elle. Il s'agissait juste de ne pas le montrer, pour ne pas l'effrayer davantage.

 

- Charlie ?

 

Elle tremblait. Elle avait les larmes aux yeux. Il ne savait pas quoi faire, et la culpabilité lui nouait l'estomac. Il déglutit. Il tremblait aussi, de froid. Alors il appliqua ses mains sur les épaules de la gamine, pour les lui frotter un peu, dans l'espoir de la réchauffer.

 

- Ca va aller, Charlie. On retournera trouver ton crapaud quand il fera jour. Ok ?

 

Il s'accroupit pour être à sa hauteur, sur la marche inférieure à celle sur laquelle elle s'était retrouvée assise, inconscient de sa propre apparence - des feuilles dans les cheveux, son torse abimé de ces lacérations noires et disgracieuses - probablement repoussante. Ses yeux, étrangement, étaient exactement ceux de la panthère : des pupilles rondes et vertes comme les feuilles qui fonçaient à l'automne.

 

- Charlie, il faut que ça reste notre secret, d'accord ? Personne nous croira, et on sera punis tous les deux très sévèrement si quelqu'un sait qu'on a été dans la forêt. Tu diras rien, ok ? 

 

Il déglutit, cligna de ses yeux épuisés.

 

- Charlie... ? 

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
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Serre n•2, Lundi 02 Octobre 2124

Le cours n'avait pas encore commencé que Sasha avait rouvert les yeux, troublé dans sa recherche vaine d'un peu de quiétude au soleil à cause des discussions dont certaines subtilités lui échappaient. Enfin, pas au point de ne pas saisir les allusions qui le concernaient lui, ainsi qu'Alison et leur supposée activité sexuelle. Etrangement, il ne s'en sentait pas plus que cela offusqué : il avait juste rempli ses poumons d'air, gonflant la poitrine, histoire d'être prêt si Ryan franchissait la ligne invisible qui déclencherait son courroux, qui avait moins à voir avec le respect que l'on accordait à Alison qu'avec les allusions avec les Russes et les Ukrainiens qui, ce jour, n'avaient pas encore émergé dans les discussions. Sasha s'en félicitait : peut-être que Ryan et ses copains avaient compris qu'il valait mieux éviter ce terrain-là avec lui. C'était d'ailleurs sur cette réflexion que le Gryffondor avait sagement suivi Alison au fond de la classe pour rejoindre leur plan de travail - en dessous duquel Alison jugea bon de cacher une petite provision pour plus tard.

 

- Mais je suis caaal...

 

La fin du mot s'était évanoui au fond de sa gorge. Son envie de protester contre les suppositions d'Alison concernant son état intérieur avait fondu comme neige au soleil quand elle avait eu cette subite idée absurde d'ouvrir sa robe devant lui pour lui présenter sa poitrine. Il n'avait pas d'autre choix que de regarder, non ? Trop tard, de toute façon. Sasha ouvrit la bouche en haussant les sourcils, l'air de réfléchir deux minutes - mais il constata vite qu'il ne trouverait rien de pertinent dans son cerveau à cet instant et referma les lèvres aussitôt.

 

- Mmh.

 

Silence. Sasha fut pris d'un frisson et il s'ébroua brièvement.

 

- Ouais, tâcha-t-il d'approuver avec un air convaincu.

 

Il mima une grande inspiration, puis une grande expiration. Aussi incroyable que cela pût lui paraître, la stratégie fonctionna : Alison sembla satisfaite, et elle se plongea dans les directives que la professeure donnait pour qu'ils débutassent le travail. Sasha attendit derrière elle, hébété quelques secondes, avant de retrouver ses esprits.

 

- ... cinq plantes par groupe, à classer en fonction de la taille des bourgeons. Commencez par leur préparer un petit nid que vous chaufferez avec des galets tiédis à l'aide d'un petit Calidum ! claironnait-elle.

 

Il régnait dans l'air une petite odeur de fraise dont il ne savait plus si elle provenait d'Alison ou des fleurs, mais Sasha se concentra sur l'ordre implicite simple qui était donné : ramasser des galets. Alors il partit en quête des grands bacs où étaient stockés les galets en question. Déjà, quelques élèves se pressaient pour en ramasser quelques uns. Sasha empila les siens en tendant son pull devant lui.

 

- Hé Sasha, t'as cru qu'il fallait construire un barrage ou quoi ?

 

Des élèves pouffèrent de rire, faisant redescendre Sasha du nuage où il s'était drôlement perdu dans ses pensées.

 

- Quoi ?

- Ben laisses-en pour les autres, hé !

 

Il baissa les yeux sur son pull et constata qu'effectivement il l'avait tant rempli que celui-ci formait un gros sac lourd et rempli. Il haussa les épaules en décidant de les emporter quand même, le bout de sa cravate enfouie dans les pierres disparaissant dans son chargement.

 

- Arrête il va les revendre au marché de Pré-au-Lard le pauvre ! entendit-il dans son dos, et les ricanements reprirent.

 

Sasha sentit revenir sa haine pour le groupe de Serpentard, mais il s'efforça de serrer les dents pour revenir à pas lourd vers leur plan de travail. Il versa les galets qui s'empilèrent brusquement dans un coin, non loin des trois premières orchidées qu'Alison avait choisie. De petites étiquettes plantées dans leur pot indiquait les couleurs prédites pour les fleurs et le garçon avait bien évidemment pris le soin de laisser Alison se charger de tels détails esthétiques. Son pull accusait désormais une légère déformation, mais il avait l'air de n'avoir rien remarqué.

 

- Ils m'énervent, il dit subitement. J'suis plus trop calme.

 

Bon, il se maîtrisait quand même. Mais un peu d'aide ne faisait jamais de mal, non ?

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

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Serre n•2, Lundi 02 Octobre 2124

Sasha n'avait encore jamais entendu le mot weirdo, mais il en saisit malgré tout approximativement le sens, ses épaules se tassant tandis qu'il renfonça ses mains dans ses poches - qu'elle se débrouille avec ses fleurs si Madame avait les talents de ses ambitions. Il laissa promener son regard morne sur le reste de la classe : pour une fois, on les oubliait peu à peu, principalement parce que les discussions sur les orchidées allaient bon train et que les élèves étaient inquiets de mal faire. Ils se concentraient maintenant sur leurs propres nids, tandis qu'Alison annonçait qu'elle ne voulait pas être transparente.

Sasha haussa les sourcils en lui jetant un coup d'oeil.

 

Comment ça, ne pas être transparente ? C'était une maladie magique, ça ? Par défaut, ne pas poser la question. Les propos sur le père d'Alison l'avaient dissuadé de toute façon de poursuivre dans cette direction, pour mieux se concentrer sur l'essentiel : couvrir ses petites sorties nocturnes, dont il craignait que récemment, elles eussent été remarquées.

 

En effet, sortir des salles communes n'était pas excessivement difficile. Ce qui l'était davantage, c'était bien sûr de déjouer la surveillance des portraits qui ne dormaient pas ainsi que les rondes du personnel. Mais sous sa forme animale, l'exercice était presque pour lui un entraînement un peu trop facile : sa vitesse et la trace olfactive des surveillants lui permettaient d'emprunter régulièrement des chemins différents sans jamais se faire prendre pour atteindre une sortie ; et même si un portrait l'apercevait, il ne verrait qu'une ombre furtive et féline, sans pouvoir reconnaître l'élève en question pour le dénoncer. La traversée du parc était encore plus simple : dans la nuit, Sasha se fondait totalement.

 

Mais les erreurs survenaient toujours quand l'on se sentait trop en confiance, et même si Sasha le savait, il avait fini par en commettre une. Une nuit au cours des jours précédents, il s'était aventuré dans les cachots sous sa forme animale - principalement attiré par les odeurs de cuisine, parce qu'à cause d'une nouvelle retenue à la bibliothèque, il était arrivé trop tard au dîner pour profiter des principaux plats et manger à sa faim. Il n'avait eu dans l'idée que de voler une petite carcasse de poulet - ou peut-être bien le rôti auquel la table des Serpentards n'avait pas touché - quand il s'était retrouvé, à l'entrée des cuisines, nez à nez avec...

 

- AAAAAH ! UN ANIMAAAL SAUVAAAAGE !

 

Sasha avait glissé sur ses coussinets pour freiner sa progression et exécuter un demi-tour instinctif. En quelques bonds, il avala les escaliers pour remonter vers le hall, mais Peeves, dénudé de toutes les frictions du monde réel, traversa les murs et les palliers pour le retrouver en train de gratter de ses griffes maladroites le loquet de la grosse porte extérieure. Un coup de patte un peu plus virulent le vit sauter et la porte s'entrouvrir suffisamment pour que Sasha y coinça son museau, puis son cou, et enfin son corps tout entier pour détaler dans la nuit.

 

Cette fois, Peeves ne l'avait pas suivi. Un fantôme pouvait-il s'éloigner tant que cela des lieux où il était mort ? Probablement pas. Son fantôme devait s'affaiblir, ou bien Peeves avait peur des autres fantômes qu'il pouvait rencontrer à l'extérieur. Toujours était-il que Sasha avait passé la presque intégralité de la nuit dehors, craignant de se retrouver de nouveau face au fantôme s'il revenait trop tôt. Mais pendant toute cette journée, il n'avait cessé de penser aux conséquences de cette rencontre : Peeves allait-il parler de l'animal qu'il avait vu à la Direction ? Et le croirait-on ? Y allait-il avoir une enquête pour découvrir qui était l'animagus en question ?

Et s'il était pris, que se passerait-il quand le personnel saurait qu'il se transformait en cette bête sauvage ? On lui interdirait certainement ses escapades. Pire, on lui interdirait ses transformations sans surveillance. Personne ne devait savoir.

Mais... Il était trop tard. Charlie savait.

 

Aussi, quand entre un sortilège et une apparition de la professeure, Alison lui demanda s'il voyait quelqu'un, Sasha pensa immédiatement à la petite soeur rousse. Ses oreilles se mirent à rougir, tandis qu'il s'intéressa brusquement à la préparation d'un second nid pour la deuxième orchidée, le temps que l'enseignante s'éloignât vers la paillasse suivante - décidément, elle avait décidé de les suivre de près, ce jour-là.

 

- Ben... c'est à dire que ça m'arrive de... De croiser quelqu'un, pourquoi ?

 

Charlie avait-elle cafté ? Etait-ce pour cela qu'Alison posait la question ? Sasha se mordit la lèvre en sélectionnant au hasard d'autres galets. Il essayait de réfléchir à toute allure : si Alison savait, pour Charlie, il valait mieux éviter de mentir. Mais s'il se faisait des idées, alors il ne devait pas vendre Charlie à son tour.

 

- Mais pas souvent, hein, il précisa précipitamment, à voix basse. Et puis, rarement des petites, elles ont trop peur de sortir, tu vois. Elles sont sages !

 

Parce que les petites filles, elles, devaient rester en sécurité dans leur dortoir, et d'ailleurs si on en trouvait une la nuit dans une forêt interdite, on ne jouerait pas à la suivre en filature comme un ennemi ; pas du tout, on la ramènerait immédiatement en sécurité au château, comme un homme responsable, et ce bien avant que la situation ne pusse devenir dangereuse.

Sasha sentit une bouffé de culpabilité l'envahir, et il eut l'impression qu'il était devenu cramoisi au niveau des oreilles et du cou. A la hâte, après avoir rassemblé ses galets, il sortit lui aussi sa baguette pour imiter Alison, histoire de s'occuper les mains, l'esprit, et celui d'Alison si possible.

 

- Calidum.

 

Le sortilège fonctionna correctement, et Sasha plaça la seconde orchidée au centre du nid improvisé, faisant mine d'être concentré sur sa tâche. 

 

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Sasha Shevchen

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Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Serre n•2, Lundi 02 Octobre 2124

Sasha avait haussé un sourcil, interloqué par la question étrange d'Alison.

 

- Hum, ben... J'sais pas, douze ans ?

 

Il n'avait aucune idée de l'âge de Charlie. Lui avait-elle dit ? Peut-être. Ses souvenirs de la nuit où il avait trouvé la petite Carter étaient confus, mélangés avec mille sensations et la seule chose qui lui revenait facilement en mémoire, c'étaient ces odeurs multiples qu'il avait senti sur elle et dont certaines lui avaient rappelé Alison elle-même. Pourquoi son cerveau animal ne se souvenait-il jamais des choses importantes ?

Il sentait son coeur battre la chamade : c'était sûr, Alison savait. Sinon, elle ne lui aurait jamais demandé jusqu'où il allait, non ? Peut-être que Charlie lui avait dit qu'elle l'avait rencontré la nuit, sans lui en dire plus. Sasha secoua la tête.

 

- Ah non mais pas loin. Pas loin du tout. Genre dans le parc, quoi, rarement plus loin ! Comme tout le monde tu vois ?

 

Il haussa les épaules en pinçant les lèvres, histoire de rattraper les prochains mots qui lui étaient venus à l'esprit et qui mentionnaient la Forêt Interdite. Il ne pouvait pas mentir, au cas où elle savait déjà. Mais Alison semblait s'être désintéressée de lui. Avec un peu de chance elle ne relèverait pas qu'il n'y avait justement pas tout le monde qui sortait la nuit. Avec un soupir de dépit, il lâcha un dernier galet vers l'une des orchidées pour obéir et s'en aller chercher deux autres pots de fleur. Il préférait vachement ça : quand elle donnait des ordres, plutôt que quand elle lui posait des questions. Il s'en sortait beaucoup mieux sur les exercices pratiques qu'à l'oral - ça c'était clair, songea-t-il les mains enfoncées dans les poches tandis qu'il s'immobilisa devant la rangée d'orchidées pleines de boutons. Il n'avait strictement aucune idée de la couleur à choisir. Et il n'avait pas non plus la tête à ça. Un élève lui parla à sa droite et il mit un moment avant de réaliser ce que le garçon était en train de lui dire.

Il tourna la tête vers lui : c'était un petit roux qui avait sagement décidé de garder un mètre de distance avec l'ukrainien. Derrière l'élève, deux filles se tenaient, comme mal cachées derrière lui, jetant vers Sasha des oeillades intéressées. Le Gryffondor les regarda tour à tour.

 

- Tu m'suis ? aboya-t-il vers le Serpentard.

 

Ce dernier eut un mouvement de recul et un petit sourire mauvais. Ca lui rappelait encore les garçons avec Dmitri quand il était gosse. Cette fois c'était sûr : Alison et lui avaient réussi à se mettre la classe à dos et un nouveau nez cassé ne suffirait pas.

 

- Tu m'as suivi ? Quand ça ? répéta-t-il plus agressivement, comme il n'obtenait pas de réponse.

 

L'une des filles plaqua une de ses mains contre sa bouche.

 

- T'as vu comment il réagit ? lui glissa sa voisine en faisant une moue dégoûtée, comme si Sasha était incapable de les entendre. C'est vrai qu'c'est une brute. Comment elle peut lui faire confiance pour choisir les bonnes couleurs ?

 

Sasha lui jeta un coup d'oeil mais ne réagit pas. Il serrait les dents à s'en faire mal aux mâchoires, tâchant de se concentrer sur le Serpentard qui avait perdu un peu de son sourire et avait tant de mal à trouver une réponse.

 

- P'tet bien, finit-il par laisser entendre d'une voix geignarde. Et bientôt tout le monde va l'savoir.

 

Sasha haussa les sourcils, interrogateur. Comment avait-il pu être aussi aveugle ? Il était généralement sur ses gardes, mais quand il se promenait avec la main d'Alison dans la sienne, il était vrai qu'il devenait tête en l'air. Devant l'air dépité de Sasha, le Serpentard retrouva son sourire qui s'élargit en fendant un champ de tâches de rousseur moins élégant que celui qui décoraient les visages des Carter.

 

- Et pourquoi ?

- Dis donc la fouine, tu t'dépèches d'en ramener une ?! entendit-on un peu plus loin - le binôme du Serpentard qui tenait le crachoir à Sasha s'impatientait effectivement.

- Parce que tu dis pas qu'c'est faux, fit-il comme s'il n'avait pas entendu.

- Ben c'est faux.

- Trop tard !

 

Le Serpentard hoqueta en un rire si désagréable que Sasha n'avait qu'envie de le gifler. Mais il ne pouvait décemment pas se retrouver en retenue systématiquement, sinon il ne repasserait jamais rapidement en sixième année comme il l'espérait.

 

- Pourquoi ils t'appellent La Fouine. T'aimes fouiner ?

 

Le Serpentard se tortilla d'une drôle de manière, toujours avec ce sourire étrange. Il avait l'air de jubiler à avoir cette conversation saugrenue, tandis que les deux filles avaient fini par les contourner pour aller choisir des orchidées en prenant garde à ne pas s'approcher trop près de l'Ukrainien, mais il voyait bien qu'elles traînaient pour suivre leur conversation.

 

- Ouais, finit par admettre le petit roux. Et j'suis le meilleur pour faire passer les rumeurs.

 

Cette fois, Sasha comprit l'attitude bizarre du garçon, et ne put empêcher une grimace.

 

- Qu'est-ce tu veux ? il gronda en baissant la voix, espérant que les filles ne l'entendraient pas - et aussitôt les yeux du petit roux flamboyèrent.

- S'tu me ramènes un de ses sous-vêtements, j'dis que vous baisez comme des bêtes. Que j'vous ai vus et entendus.

- Tsss, siffla Sasha, mais c'était à son tour d'avoir un petit sourire en coin sans joie, et cette fois il se pencha vers le Serpentard pour lui faire une confidence. J'vais t'ramener beaucoup mieux. Et tu verras que t'auras pas besoin de mentir : on baise comme des bêtes et t'auras la preuve en échantillon.

 

La Fouine entrouvrit la bouche, dans un mélange d'espoir et d'étonnement, tandis que Sasha lui faisait un clin d'oeil en retournant vers les pots. Il les sélectionna au hasard.

 

 

 

 

 

- On a un problème chef, annonça Sasha très sérieusement en déposant Rose Chewing-Gum et Bleu Néon sur le plan de travail devant lui. Il y a des élèves qui mettent en doute notre... Hum. Relation.

 

Fini, les oreilles rouges : le Gryffondor semblait avoir complètement oublié leur précédente conversation. Il avait même l'air d'avoir trouvé une nouvelle assurance tandis qu'il poursuivit :

 

- T'inquiète pas, je nous ai fait gagner du temps, mais il va falloir être plus convaincants les jours prochains.

 

Sasha se concentra sur les pierres devant lui, préparant un troisième nid sans paraître se rendre compte de la posture froide d'Alison.

 

- Je te propose qu'on disparaisse ensemble dans un placard une fois de temps en temps. Et si tu veux, j'peux te prêter un pull pour dormir.

 

Il décocha un regard vers la Serpentard retranchée derrière sa frange. Il eut l'air déçu que sa proposition ne fisse pas mouche. C'était pourtant un truc de couple, de dormir avec les vêtements de l'autre, non ? Mais Alison paraissait froide comme la pierre. Qu'est-ce qui lui prenait tout à coup ? Sasha lui donna un petit coup de coude, comme pour la réveiller.

 

- Dis donc, Lu'eńka - et le mot roula dans la bouche de Sasha plus légèrement et naturellement que de l'anglais. T'as perdu ta langue ?

 

Mais la plaisanterie ne lui attira visiblement aucune indulgence de la jeune fille, aussi le Gryffondor se renfrogna-t-il à son tour en se préoccupant de ses pierres, de nouveau.

 

- Ben quoi, tu voulais un surnom ukrainien, non ?

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Sasha Shevchen

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Gryffondor
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Sur les marches qui mènent à la porte principale., Dimanche 08 Octobre 2124

J'arrête tout.

 

Ca voulait dire quoi, au juste ? Alison arrêtait ses efforts pour qu'ils ressemblassent à un couple ? Ou elle arrêtait totalement le deal ? Ou bien c'était une de ces expressions anglaises qu'il avait du mal à comprendre, comme quand ses voisins de chambrée disaient qu'ils prendraient a rain check concernant les devoirs ? Sasha avait mis à peu près un mois à comprendre qu'il n'y avait rien de littéral dans cette expression, et il avait régulièrement des expériences similaires avec cette langue dont il avait pourtant vite maîtrisé, au demeurant, les formes les plus argotiques.

Toujours était-il que sur le moment, il n'avait pas osé poser la question à la Serpentard. Après s'être renfrogné dans le silence à son tour, Sasha s'était résolument convaincu qu'Alison lui en voulait simplement pour des sottises : parce qu'il avait mal choisi les couleurs des orchidées, par exemple. Après tout, elle-même lui avait dit qu'il était coupable par défaut, même s'il ne savait pas pourquoi.

 

Malgré tout, les jours qui avaient suivi, Sasha s'était surpris à s'inquiéter de temps à autre. Le deal pouvait-il faire partie du tout ? Non, non, elle avait dit ça comme ça, c'était juste une formule pour dire qu'elle boudait. Systématiquement, il repoussait soigneusement la désagréable pensée en se concentrant sur autre chose. Son dîner, par exemple. Mais assis à la table des Gryffondors, il n'avait pu s'empêcher de jeter un oeil vers la table des Serpentards, où Alison ne se montrait guère. Encore sa lubie de sauter les repas.

 

Comme leur absence de nouveaux échanges ne pouvait lui permettre de trancher véritablement, Sasha avait fini par décider une bonne fois pour toutes ce soir-là, en dévorant des crevettes, qu'il fallait continuer à investir dans le projet qui devait consister à lui faire accéder aux cours de sixième année intégralement. Il n'y avait bien sûr pas que l'intérêt des cours qui le poussait à poursuivre ce but : il craignait que s'il ne validait pas les cours de sixième année à la fin de l'année, on ne le considérât pas comme majeur à 17 ans, comme les autres. Et tant qu'il était mineur ou considéré comme tel, les adultes décidaient de son destin - et surtout de sa présence au château, loin de là où il devait être. Aussi décida-t-il de ne pas remonter à la salle commune, histoire d'enfin donner à la Fouine ce qu'elle rêvait d'avoir sans le savoir.

Le Serpentard l'avait en effet déjà croisé deux fois depuis le cours de Botanique, et commençait à craindre que Sasha ne fisse juste traîner l'échéance - au risque de perdre la primeur de cette information visiblement capitale pour les cinquième années : Sasha et Alison ne formaient pas un vrai couple.

Demain au plus tard, il lui donnerait ce qu'il devait.

 

 

 

 

 

 

L'air était frais. Chaque soir, il devenait un peu plus froid, au point qu'au coeur de la forêt, des flaques s'étaient gelées, déjà, à cause des températures nocturnes qui chutaient en Ecosse bien plus tôt qu'en Ukraine. Sous sa forme animale, Sasha ne redoutait pas vraiment les surfaces glacées. Il les préférait même à cette pluie battante qu'il avait dû subir à l'aller, avant de recevoir le couvert des arbres. Il avait vagabondé assez longuement, dès la tombée de la nuit. Ce qui était bien, lorsqu'il était transformé, c'était que son esprit ne s'attachait plus à s'inquiéter outre mesure ni du passé, ni de l'avenir. Tout était instantanément important : ce mulot qui couinait sous un buisson, le vent qui chuintait dans les feuilles, une goutte qui tombait sur son pelage. L'effet apaisant de sa propre langue rugueuse sur ses pattes quand il se nettoyait par automatisme après s'être tâché de résine en grimpant un sapin malade. Et puis les odeurs, ah !, les humains ordinaires ne savaient ce à quoi ils n'avaient pas accès. Les sécrétions des insectes sous l'écorce poivrée qu'il grattait avec ses griffes ; les senteurs terreuses des champignons qui poussaient dans la mousse suave ; l'odeur fraîche de l'eau qui bruissait dans son lit sauvage, où un rongeur avait laissé la marque de ses phéromones, auxquelles se mélangeaient les effluves âcres d'un...

 

... crapaud.

 

 

 

 

 

 

Plif, plof, plif, plof.

 

La pluie avait cessé, mais Sasha avait retrouvé sa forme humaine et traversait dans la nuit la pelouse inondée et boueuse qui le ramenait vers les portes du château, son pull drôlement roulé en boule dans ses bras. Sa chemise était humide et ses cheveux trempés au point qu'ils gouttaient sur son visage et ses épaules - signe qu'il n'avait pas dû vraiment pouvoir s'abriter avant la fin de l'averse. A l'extérieur du château, de grosses torches appliquées sur les murs de pierre sombre éclairaient le parc, lui-même baigné de la lueur blanche qu'offrait une Lune presque pleine entre deux nuages épais. Certaines grandes fenêtres du rez-de-chaussée et des étages étaient encore colorés par les lustres montés de bougies, aux lueurs chaudes et vacillantes, qui indiquaient que Poudlard ne s'était pas encore tout à fait endormi. Il ne devait pas être très tard, encore. Il n'aurait qu'à monter directement dans les étages, et il prétexterait avoir dû sortir en catastrophe après avoir oublié quelque chose d'important dehors.

 

Plof-plif.

 

Sasha s'était immobilisé subitement à la vue d'une silhouette assise sur les marches. Son coeur s'était mis à battre durement mais se calma aussitôt : ce n'était qu'une élève à la longue chevelure rousse détachée. Il s'élança en avant.

 

- Alis...

 

Sa voix mourut tandis qu'il ralentit aussitôt l'allure. Idiot. Alison ne sortirait jamais par un temps pareil : elle ne se montrerait sûrement pas en pyjama. Mais finalement, il jugea que ce n'était pas une mauvaise nouvelle. Il soupira en s'approchant des marches, et bientôt la lumière des torches l'inonda lui aussi, réchauffant même vaguement la chemise mouillée qui lui collait à la peau.

 

- Charlie ? C'est marrant, parce que j'allais justement monter te...

 

Il s'interrompit de nouveau en s'immobilisant devant la petite fille recroquevillée sur les marches. Un instant, il la revit quand il l'avait ramenée ici après une nuit qui avait dû être la pire qu'elle avait dû vivre ici - du moins, c'était ce que Sasha s'imaginait. Après ça, elle n'aurait sûrement plus jamais voulu ressortir la nuit et se retrouver là, surtout par un temps pareil. Et les marches de l'escalier sur lesquelles elle était assise qui étaient trempées.

 

- Qu'est-ce qui se passe ? il demanda, quelques marches sous elle.

 

Mais Charlie restait derrière un rideau de cheveux roux, beaucoup plus sauvages et entortillés que ceux d'Alison. Décidément, les filles étaient jamais claires. A moins que ce ne fut spécifiquement les Carter.

Sasha exécuta un pas pour grimper, puis il s'accroupit pour poser un genou sur la marche suivante, tendant son pull roulé en boule devant lui.

 

- Hé, il souffla. Regarde qui j'ai ram'né.

 

Dans l'amoncellement de tissu épais et usé, un gros crapaud était tassé, à demi caché par une capuche dont il ne voulait pas sortir, terrifié par le voyage qui venait d'être le sien. Sasha haussa les épaules avant de se laisser tomber séant sur la marche en dessous de Charlie.

 

- Enfin, j'suis pas sûr que c'est lui en fait... Mais il ressemble nan ? A l'odeur, on aurait dit...

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Sasha Shevchen

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Sur les marches qui mènent à la porte principale., Dimanche 08 Octobre 2124

Sasha avait fini par déposer son pull en boule sur les marches - quand bien même il était un peu déçu de s'être trompé de crapaud. Il ferait l'affaire quand même, s'était-il dit, avant d'assister, l'air désemparé, aux grosses larmes qui noyaient le visage de Charlie.

 

Mais le chagrin de la petite fille secouée par les sanglots était pour lui beaucoup moins impressionnant qu'Alison et ses remontrances glacées. Sasha afficha une simple grimace désolée, et il lui avait tendu un bras avant même qu'elle se pendît à son cou. Le geste lui semblait tout naturel, comme celui de refermer ses bras sur son corps de fille miniature, de l'accueillir même s'ils étaient tous les deux à moitié trempés. Au contraire de ces moments où il avait approché Alison, Sasha ne se sentait pas comme un ours hirsute au contact de Charlie, ou comme une créature odieuse dont les autres élèves de Poudlard ne voulaient pas s'approcher. Mais quand la petite fille gémit sur son épaule, mouillant sa joue de ses larmes salées, un flot brutal de souvenirs l'envahit - et il ne put rien faire d'autre que la serrer contre lui un peu plus fort.

 

Un instant, sous les lumières vacillantes des torches et les quelques gouttes qui fuyaient les rebords des fenêtres pour s'écraser autour d'eux, Sasha resta le souffle coupé, les yeux grand ouverts. Son coeur battait la chamade, à tel point qu'il lui semblait que les propos de Charlie ne voulaient plus rien dire.

 

Il hoqueta.

 

Aussitôt, comme elle s'écartait, se reprit. Fit mine de s'essuyer la joue d'une revers de manche, s'essuya le nez en même temps. Quelques gestes pour gagner quelques secondes, le temps que tous les mots prissent leur sens dans sa tête. Puis ses yeux verts croisèrent ceux, encore tous remplis de larmes, de la petite fille à la marque rouge sur la joue, et malgré la découverte piteuse que représentait la trace de la dispute, il s'efforça d'avoir un sourire rassurant.

 

- C'est pas ta faute Charlie, c'est moi qui lui ai dit que j'sortais la nuit, dit-il en haussant les épaules, l'air résigné.

 

Il passa le revers de l'index sur la joue de la petite fille, là où la trace rouge s'étendait, et son sourire se transforma en une grimace brève, comme s'il était pris d'un frisson.

 

- C'est moi qui suis désolé. Ca aurait pas dû retomber sur toi.

 

Il fronça les sourcils et sa main retomba sur la pierre froide et humide. Le silence les enveloppa tous les deux quelques secondes pendant lesquelles il pinça les lèvres. Le vent aux rafales discrètes secouait de temps à autre les grands arbres près de l'allée, donnant l'impression que les végétaux s'ébrouaient après la pluie, pour se débarrasser du surplus de gouttes laissées par l'averse. L'air était saturé des odeurs du gazon humide, et le château demeurait froid et silencieux. A être assis là, sur les grosses marches centenaires, Sasha avait l'impression que Charlie et lui étaient soudain aussi minuscules que des fourmis insignifiantes.

 

En réalité, la possibilité qu'on pût le virer de Poudlard ne lui était pas vraiment venue à l'esprit. Il avait imaginé bien des sanctions - d'une nuit passée pendu par les pieds dans les cachots du château au redoublement de sa sixième année, en passant par les odieux cours de danse du bibliothécaire en guise de retenue - mais il n'avait jamais réalisé qu'on pouvait tout aussi bien le mettre à la porte.

Ca ne pouvait pas être une bonne nouvelle. Un instant fugace, il s'était dit qu'il serait alors libre de s'envoler vers l'Ukraine - mais c'était une chimère et il le savait bien. S'il était viré de Poudlard, il serait envoyé, au mieux, dans un collège de moldus ; et au pire, dans une institution réservée aux sorciers délinquants. Ni l'une ni l'autre de ses alternatives n'étaient alléchantes, et aucune des deux ne lui permettrait probablement facilement de se transformer la nuit venue pour soulager ses drôles de pulsions animales.

Comment n'avait-il pas pu réaliser qu'on pouvait le virer ?

 

- T'es pas bête, il murmura comme pour lui-même. T'es même vachement plus intelligente que moi.

 

Sasha finit par secouer le tête, comme pour retrouver pied dans la réalité. Charlie était toujours là, à le regarder avec des yeux mi-interrogateurs, mi-désespérés, et il ne put s'empêcher de sourire de nouveau devant la naïveté de la petite fille. C'était étrange, de sourire sincèrement. Il lui semblait que ça n'était pas arrivé depuis des années. Les traits de son visage s'étiraient d'une façon qui lui était presque douloureuse.

Il frictionna ses mains contre les épaules de Charlie.

 

- T'inquiète, je vais aller lui parler. Avant qu'elle aille voir la direction demain. J'suis sûr que j'vais pouvoir la convaincre. Ou presque sûr. Ok ? Comment tu fais pour la voir, toi, tu vas dans la salle commune des Serpentards ?

 

Il jeta un coup d'oeil, instinctivement, vers les fenêtres basses qui faisaient office de puits de lumière pour les cachots et donc, s'imaginait-il, la salle commune des Serpentards. Son regard revint à la petite fille.

 

- Alison t'a donné le mot de passe ? il souffla à voix basse. Tu crois que tu pourrais me faire rentrer chez les Serpentards sous ma forme animale ? Ou bien on la fait venir dans un endroit isolé ?

 

Sasha fronça les sourcils, haussa les épaules.

 

- Si t'as un plan meilleur que le mien vas-y, c'est toi le cerveau de l'équipe ! Bon. Un gros câlin pour effacer cette mauvaise dispute et après on y va, ok ?

 

Il aurait pu dire une dernière minute du film avant d'aller se coucher, ou bien une dernière cuillère d'épinards avant le dessert que son encouragement n'aurait pas sonné différemment. Et d'un geste il l'entoura de nouveau de ses bras, pour l'étreindre contre son torse trapu.

Il la serra fort.

Aussitôt, la sensation qu'il avait ressenti plus tôt rejaillit presque comme si quelqu'un avait appuyé sur un interrupteur à l'intérieur de ses entrailles : son coeur qui se remettait à battre follement, sa poitrine qui s'écrasait d'une douleur sourde à lui en couper le souffle, à tel point que Sasha devait fermer les yeux pour ne pas oublier de respirer.

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Sur les marches qui mènent à la porte principale., Dimanche 08 Octobre 2124

Sasha n'avait eu le temps que d'ouvrir les yeux pour voir en face de lui l'éclat lumineux qui jaillissait de la baguette magique d'Alison. Le sortilège le percuta en pleine poitrine et même si l'impact n'était pas douloureux, le choc le fit basculer brutalement en arrière et il s'étala dans les marches avec un glapissement de surprise. Il se hâta de rouler pour se remettre debout, comme pris d'un réflexe - ses sens lui hurlaient de se transformer et de courir, son coeur tambourinait à ses tempes, mais non, non, tu es à Poudlard, se raisonna-t-il, les joues rouges et la respiration haletante.

Les cris de Charlie le rappelaient à l'instant présent - saugrenu et étrange.

 

Un animal.

 

Voilà, elle savait. Et à la façon dont elle le disait, c'était évident : elle trouvait cela dégoûtant.

 

 

Dans les longues heures qu'il passait étendu dans le parc ou dans les arbres, à profiter du soleil sur son visage humain ou félin pour fermer les yeux indolemment comme il aimait le faire, il s'était parfois imaginé qu'un jour, il rencontrerait une fille, avec des belles formes comme celles d'Anya Niktalova, mais avec l'intelligence d'une ukrainienne, le sourire d'une chanteuse américaine et la gentillesse enveloppante de sa propre mère. Et cette fille-là s'étendrait dans l'herbe avec lui, et quand elle apprendrait qu'il était à demi une créature prédatrice et sanguinaire, elle le cajolerait quand même.

 

Mais quel con il était.

 

 

Sasha ne pensa pas à riposter - sa baguette était dans son pull de toute façon. Il serra les dents - ces coups-là, on ne pouvait que les encaisser. Il avait levé les mains - des paumes incrustées de petites égratignures héritées de sa chute dans les escaliers qui n'étaient rien à côté des balafres noires qu'elle avait déjà vu de toute façon. A quoi bon les cacher, maintenant qu'il savait ce qu'elle pensait de lui ?

 

- O-k, il articula lentement, et ces deux syllabes lui coupèrent les lèvres en passant la barrière de sa bouche.

 

Malgré les protestations de Charlie, il capitulait en soutenant le regard furieux d'Alison, en dépit aussi du gouffre noir qui semblait se creuser dans sa poitrine et menaçait d'anéantir ses entrailles. Il aurait peut-être réagi pareil, à sa place.

 

- Laisse, Charlie, ta soeur peut pas compr...

 

Il s'interrompit, ses yeux subitement attirés par une fenêtre qui venait de s'éclairer non loin de la grande porte.

 

- Chut ! souffla-t-il. Mais taisez-vous !

 

Une deuxième fenêtre s'alluma, un peu plus près. Le coeur de Sasha se remit à tambouriner dans sa poitrine. Alors soudain, il se jeta sur son pull pour en extraire sa baguette - puis il jeta le vêtement en boule dans les fourrés à côté de l'escalier.

 

- Collaporta ! s'écria-t-il.

 

 

Le sortilège frappa la grande porte de Poudlard et un léger bruit de succion se fit entendre - désagréable, mais caractéristique d'un sortilège de scellement qui avait à peu près fonctionné : le double-battant du château était particulièrement imposant et Sasha doutait que cela ne tînt plus de quelques secondes. Précieuses, malgré tout.

 

 

- Si on nous trouve ici, on aura tous des ennuis, ok ? Alors on se tire. J'connais d'autres endroits pour entrer dans le château en faisant le tour. Vite !

 

En deux enjambées, il grimpa les marches pour attraper la main de la petite fille - mais si l'on pouvait s'attendre à ce que Charlie coopérât, ce n'était pas le cas de la grande soeur.

 

- Alison !

 

Sasha la supplia du regard - une seule et unique seconde. Au-delà, il ne pouvait pas attendre. Alors il lâcha Charlie pour attraper la grande soeur par le coude - le bras qui tenait sa baguette - et l'embarquer brutalement en la poussant devant lui. Il plaqua son autre main sur la bouche de la jeune fille.

 

Ils dévalèrent les escaliers, trébuchèrent et manquèrent de tomber, mais se rétablirent dans les gravillons humides aux pieds des vieilles marches.

 

- Psst, par ici ! indiqua Sasha à Charlie.

 

Ils longèrent le grand mur froid. L'ombre d'une petite fille qui courait maladroitement à cause de ses chaussons s'étirait devant eux, ainsi que celle étrange d'un monstre à quatre pieds et deux têtes - dont l'une n'avait pas l'air de franchement apprécier le voyage. Ils coururent néanmoins jusqu'à l'angle, Sasha veillant à ce qu'ils marchassent tous dans les copeaux de bois qui couvraient les plates bandes, histoire de ne pas laisser la trace de leurs pas dans la boue. Puis ils contournèrent la courbe de la tour Est et cette fois, privés de la lumière des torches, ils furent engloutis par une obscurité presque totale.

Sasha progressait un peu à l'aveugle, peu dérangé par la noirceur fraîche de la nuit - mais il percuta vite la silhouette de Charlie qui s'était figée après quelques pas dans l'obscurité.

Il ne pouvait guère la réconforter : Alison résistait entre ses mains - mais Sasha avait bien derrière lui bien des entraînements qui rendaient les efforts de la jeune fille inutiles. La proximité de leurs corps, d'une nature si différente de leurs baisers factices, lui arracha un soupir.

 

- J'vais t'lâcher, grogna-t-il à son oreille. Mais tu fais pas d'bruit, ok ? Parce qu'avec la trace de tes doigts sur ta soeur, t'es autant dans la merde que moi. Ok ? il répéta.

 

Il attendit un signe d'assentiment quelconque avant de la relâcher précautionneusement, prêt à l'empêcher de crier ou de s'enfuir si l'envie lui prenait.

Peu à peu, leurs yeux s'habituaient à l'obscurité : on devinait maintenant le contour des visages et des corps entre des arbustes qui les frôlaient de caresses iirégulières, poussés par le vent. Sasha scrutait Alison.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Sur les marches qui mènent à la porte principale., Dimanche 08 Octobre 2124

Les yeux de Sasha allaient de l'une à l'autre, tel le regard d'un chat suivant une balle de ping-pong. De temps à autre, il jetait quand même un regard en arrière : à ce moment, quelqu'un avait dû réussir à ouvrir la porte - en espérant que cette personne crût seulement que la porte avait gonflé avec la pluie, comme chez lui quand il faisait trop mauvais temps et qu'il fallait donner des coups de pied dans la porte du garage pour pouvoir sortir les balais. Avaient-ils laissé derrière eux des indices ? Que dirait-il si quelqu'un retrouvait son pull ?

La conversation étrange la ramena à écouter les propos des deux filles.

 

- Heu, c'est pas vrai hein, la plupart du temps j'suis tout seul, le parc est vide la n... essaya-t-il de caser, mais les filles parlaient vachement plus vite que lui et il laissa tomber. J'suis là, hein.

 

Mais quelles pipelettes. Enfin...

 

- Alison !

 

Il s'était insurgé, en essayant toutefois de garder la voix basse, les sourcils froncés en une expression exaspéré. Par réflexe, il avait ramené Charlie près de lui d'une main sur son épaule. Il faudrait quand même pas qu'Alison se mît à lui maquiller l'autre joue.

 

- Arrête de crier, tu veux vraiment qu'on nous trouve ou quoi ? Et puis, comment tu parles à ta soeur ? Elle a dit qu'elle sortirait plus le soir, ça te suffit pas ? Tu devrais déjà être contente que j'étais là pour m'occuper d'elle quand elle l'a fait, même si c'est vrai que j'aurais dû la ramener tout de suite plutôt que de jouer avec elle.

 

Il y eut un silence chargé d'accusations réciproques. Visiblement, Alison ne s'attendait pas à ce qu'il reconnût son erreur. Mais Sasha n'arrivait pas à décrypter l'expression de son visage : pourquoi n'était-elle pas toujours pas satisfaite ? A la place, il avait l'impression qu'elle avait eu un mouvement de recul dégoûté, même s'il avait peu d'indices dans l'obscurité quant à l'expression du visage de la jeune fille. Il comprenait qu'elle le trouvât repoussant, mais pourquoi se mettait-elle dans une colère pareille ?

 

- Charlie a rien fait de mal. Si elle sort la nuit, c'est probablement parce que personne d'autre s'occupe d'elle à ce moment-là, tu vois, grommela-t-il un peu vexé du mouvement de recul d'Alison, qui enfonçait dans sa poitrine les fléchettes qu'elle avait planté plutôt de ses mots accusateurs. Espèce d'animal. Au pire, j'pourrai surveiller moi-même le parc pour le vérifier et te tenir au courant si je l'ai vue elle ou un autre élève. De toute façon il faudra que je sorte, je pourrai pas faire autrement ! Je...

 

Il chercha ses mots un instant. Mais rien ne paraissait tout à fait approprié. D'une main, il balaya l'air en détournant le regard, puis son bras retomba le long de son corps. Il déglutit et sa main sur l'épaule de Charlie se serra un peu, involontairement, bien qu'il s'adressa à Alison.

 

- Je... J'en ai besoin, tu comprends ? C'est pas ma faute, c'est... C'est plus fort que moi, croassa-t-il d'une voix blême.

 

Mais il savait déjà qu'elle ne comprendrait pas. Pas vu la façon dont elle l'avait regardé, un peu plus tôt. Tes pulsions, là. Il scella ses lèvres en un pincement amer, à la pensée soudaine que même s'il se sortait de cette situation épineuse, il n'aurait plus jamais l'autorisation de s'approcher de Charlie. Ce n'était pas tout à fait juste. Et en même temps, c'était sûrement mieux pour la petite, se raisonna-t-il avec dépit. Mais quel deal accepterait Alison pour au moins ne pas le dénoncer ? Que pouvait-elle bien tirer de tout ça ?

Une drôle de pensée lui traversa tout à coup l'esprit.

 

Mais bien sûr. Il y avait un malentendu. Il comprenait, maintenant. Evidemment, les querelles entre soeurs. C'était parfaitement logique. Pourquoi ne l'avait-il pas compris plutôt ? Ca n'avait pas tant à voir avec sa forme animale, finalement. Une bouffée d'espoir lui emplit la poitrine.

 

- Attends...

 

Un voile de stupéfaction avait habillé le visage de Sasha, qui se vit même dans la nuit à ses yeux arrondis comme des soucoupes.

 

- T'es... T'es pas jalouse de ta soeur, quand même ?

 

Silence.

 

- Parce que si c'est ça, heu... Bon, j'peux... On peut sûrement trouver un arrangement, tu vois.

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Sasha Shevchen

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Bon, hé bien ce n'était visiblement pas ça. Au moment où il croyait enfin avoir une solution, la situation se montrait encore plus désespérée. Sasha avait pris la tête de la compagnie, en s'imaginant déjà toutes les conséquences de ce qu'il se passerait lorsqu'Alison annoncerait qu'il rôdait comme un prédateur autour du château toutes les nuits et qu'il n'avait pas ramené Charlie directement quand il l'avait rencontrée. Il avait entendu dire que l'un des élèves de Russie, lui aussi revenu de la guerre, avait été isolé dans une chambre à part en plus d'avoir été fait prisonnier d'un sceau magique. Serait-ce le sort que lui réserverait le Ministère, à lui aussi ? Est-ce qu'on pouvait l'empêcher à tout jamais d'être la bête qu'il devenait la nuit ?

 

Ces pensées lui donnaient le vertige, et il lui semblait que l'énergie le quittait. A quoi bon fuir les professeurs, maintenant qu'il était fichu ?

 

- Charlie, non !

 

Il n'avait eu d'autre choix que de suivre les deux soeurs quand la plus petite des deux avait pris la fuite. Pour une fois, il était d'accord avec Alison.

 

- Qu'est-ce qu'y te prend !

 

Sasha s'était courbé pour passer sous les branches, mais il jeta tout de même un regard en arrière. Aucune lumière ne s'approchait. Le couvert des arbres leur dissimulait maintenant une grande partie du château, et la boue noyait leurs chaussures. Il pesta à voix basse sur les traces qu'ils laissaient. Il faudrait repasser pour les effacer. Un petit sortilège d'oblitération suffirait, s'il avait le temps de s'appliquer pour ne laisser aucun indice. Mais pour l'heure, il ne fallait pas perdre Charlie de vue.

 

Heureusement, la petite avait enfin décidé de freiner des quatre fers et les deux autres adolescents en firent autant. Sasha attrapa le premier tronc venu pour s'y appuyer, prêt à repartir s'ils étaient poursuivis. Mais le silence répondit aux échanges de deux soeurs, charriant seulement les cliquetis des branches autour d'eux.

 

- Quoi ?

 

Le garçon les regarda tour à tour, puis ses yeux se fixèrent sur Alison et sa frange décoiffée.

 

- Tu croyais QUOI ?! répéta-t-il, outré.

 

C'était bien la première fois qu'il était si en colère contre Alison. Sur l'instant, il lui semblait que c'était pire que d'être intolérante envers les animagus.

 

- Quel genre de type est-ce que tu crois que je suis ? Pour toi les Ukrainiens sont des pédophiles, c'est ça ?! Tu crois la propagande russe maintenant ?

 

Il s'efforçait de ne pas crier, mais il avait pointé un index dans une direction aléatoire, censée désigner la Russie et ses méchants dirigeants qui tordaient la vérité pour les faire passer pour des sauvages. Mais Charlie le pressait encore, et il sentait bien, à la voix tremblante de celle-ci, que des trois, c'était elle qui vivait le plus mal la dispute. Alors il laissa retomber sa main le long de son corps, non sans un dernier regard déçu pour Alison.

 

Sasha soupira.

 

Il lui suffisait de se transformer.

 

Un instant, Sasha se sentit comme quand il devait faire pipi dans les toilettes lors de sa toute première année à l'école : s'il y avait un autre petit garçon à côté de lui, il n'arrivait pas à faire pipi. C'était idiot.

 

Alors il préféra regarder ailleurs histoire d'échapper à leurs yeux rivés sur lui. Il fit quelques pas en fermant les paupières - le processus était devenu simple, avec le temps. Il lui suffisait de se rappeler les sensations qu'il avait lorsqu'il était félin : le sol froid et dur sous ses coussinets, les milles odeurs qui chatouillaient son museau, l'air qui flattait agréablement sa fourrure...

 

... subitement ses vêtements fusionnèrent avec sa peau tandis qu'il se courbait en avant, des poils apparaissant sur toute la surface de son corps quand ses pattes avant touchèrent le sol. Sa poitrine enfla et s'arrondit, des griffes poussèrent et s'ancrèrent dans le sol en même temps que son visage s'allongeait bizarrement...

 

Pour laisser place à un léopard énorme, plus gros qu'un chien, aux pattes massives. Pourtant, en hauteur, il ne dépassait pas le coude de Charlie derrière laquelle, pris d'une pudeur subite, il était parti se cacher. Il frotta son corps à ses jambes sans réfléchir, à la recherche d'une forme de protection maintenant qu'il ne pouvait plus rien dire pour sa défense. Sa tête apparut derrière la petite rousse - une gueule massive surmontée d'oreilles tâchetées de noir.

 

De Sasha l'adolescent, il ne restait plus que deux yeux verts dont les pupilles fixaient Alison, guettant sa réaction.

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Sasha Shevchen

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Sur les marches qui mènent à la porte principale., Dimanche 08 Octobre 2124

Soudain, les voix des deux filles le surplombaient. Se mélangeaient à des sons parasites, plus aigus et discrets, que l'oreille humaine ne pouvait pas détecter. Il remua d'ailleurs une oreille, la tournant légèrement vers le château, lorsqu'il capta un bruit lointain - mais ce n'était qu'une fenêtre au troisième étage dont l'espagnolette grinçait quand quelqu'un avait dû l'ouvrir pour aérer une pièce. L'attention de la panthère revint à Alison et Charlie. Sasha avait fini par s'asseoir, et son corps trapu avait cette posture tranquille qui tranchait avec son allure intimidante : il était une masse de muscles dotée de griffes et de dents si tranchantes que les pointes de ses longues canines se dévoilaient lorsqu'il bougeait le museau. Et de la créature émanait un grondement régulier, des vibrations gutturales et profondes : Sasha ronronnait depuis que Charlie s'était mis à le caresser entre les oreilles.

 

Il n'aurait certainement pu décrire cette sensation une fois redevenu humain : son crâne, son museau, ses moustaches et ses babines étaient extrêmement sensibles lorsqu'il était sous cette forme, et leur stimulation provoquait une sensation relaxante qu'il ne maîtrisait pas vraiment. Cela lui déclencha un baillement bref mais terrible : il dévoila des dents et énormes et une longue langue qui s'enroula avant de refermer sa gueule avec un claquement sonore.

 

Sasha se sentait soudain beaucoup plus détaché de la situation. Alison lui semblait beaucoup moins méprisante et insultante - mais c'était peut-être parce que malgré la nuit, il la voyait désormais beaucoup mieux. Il distinguait les traits fins de son visage, son expression contenue malgré ses bras croisés. Les yeux de Sasha continuaient de la fixer même pendant que Charlie s'adressait à lui : la voix de la benjamine était une musique douce à ses oreilles, et pour tout signe d'acquiescement, il se contenta de cligner doucement des yeux.

 

La panthère se leva lourdement pour repartir, non sans frôler une dernière fois les jambes frêles de Charlie : pas trop fort ; avec sa carrure, il l'aurait aisément renversée. Puis il se faufila doucement dans les ronces, ses pattes étonnamment silencieuses tandis qu'il quittait le chemin - et leur champ de vision. La seconde suivante, il n'y avait plus aucune trace d'une telle créature, si bien qu'on eût pu croire qu'elle n'avait jamais existé.

 

 

 

Sasha, lui, se laissait fondre dans son environnement minéral et végétal. Se glissait entre les racines à pas de fauve, contournait les troncs en résistant à l'envie d'y planter ses griffes pour soulager ses bouillonnements intérieurs. 

Alison pouvait bien ramener Charlie. Il y veillerait de loin, certainement, avant de contourner le château dans l'espoir de récupérer le vêtement laissé à proximité du grand escalier.

 

Mais pour cette nuit, il avait eu son lot de confrontations humaines. Il serait bien mieux dans sa peau de félin, à tout oublier sinon les mouvements et les odeurs de la forêt.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

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Serre de préparation, Dimanche 15 Octobre 2124

Il avait bien entendu le balbutiement d'Alison. Elle était gênée et il en profita pour la regarder d'autant plus - comme s'il avait voulu pousser à bout cet embarrassement qu'il faisait naître en elle très visiblement - un peu en miroir de ce qu'elle produisait chez lui en cet instant. Elle voulait jouer ? Il pouvait jouer.

Ainsi donc, Mademoiselle voulait avoir tout l'air d'une fille qui se faisait sauter tous les soirs, mais elle devenait toute hésitante à l'approche d'un garçon comme lui. Il avait du mal à décider si c'était toute la gente masculine qui lui faisait cet effet, ou bien lui personnellement.

 

Sasha la regarda néanmoins s'éloigner sans insister, restant une main appuyée sur l'établi avec une frustration qu'il ressentait de ses mâchoires serrées à son pantalon encombré, mais il ne regretta pas un instant son geste : maintenant Alison savait. S'il trouvait qu'elle se faisait trop remarquer, il pouvait donc tout à fait entrer dans son jeu et elle se rétractait presque instantanément. Ca commençait à être trop compliqué pour lui.

 

Il tâcha d'inspirer et d'expirer lentement. Il avait soudain tant de mal à se concentrer. Alison avait resserré la cravate, enfermant son col près de sa peau suintante. Elle avait aussi frôlé son pantalon, et il était presque sûr qu'elle avait senti la protubérance qu'il ne maîtrisait guère. Il s'en sentait à demi-honteux. Pour l'autre moitié, il ne savait pas ce que c'était : une espèce d'espoir, de revendication, peut-être, qu'elle avait décidé de laisser lettre morte.

 

Pourtant, malgré la chaleur ambiante, les derniers mots d'Alison lui firent l'effet d'une douche glacée.

 

- Quoi ?

 

Il fronça les sourcils et son visage se peignit d'une grimace désabusée.

 

- J'aime pas Anya Nikitovna ! rétorqua-t-il d'une voix qu'il aurait voulu plus nonchalante, moins alarmée, mais c'était trop tard.

 

Certes, il avait passé des moments étranges auprès d'elle. Elle était russe, mais elle avait une attitude mature, qui la montrait sous un jour profondément féminin à ses yeux et qu'il ne s'expliquait pas. Elle avait beau représenter tout ce qu'elle détestait, il avait le souvenir de ses poils qui s'étaient dressés sur ses bras quand elle l'avait frôlé en ouvrant les pages de son dossier remplis de journaux. Il voulait pourtant s'appliquer à la détester, maintenant plus que jamais ; mais quand il pensait à elle, c'était son regard profond et sévère, devant lequel il se sentait minuscule, et ses courbes suggestives qu'elle arborait sans même y penser qui s'imposaient à son esprit. Il se morigéna intérieurement : c'était comme si son corps le trahissait avec ces sensations de désir pour une femme du camp adverse.

 

- J'l'ai manipulée, il décréta sur un ton vindicatif. J'lui ai fait croire que j'étais russe et j'l'ai faite sortir tous les matins pour qu'elle m'apporte ses petites coupures de journal. Ses journaux russes dans lesquels il y a les nouvelles du front, et j'ai même vu les membres de sa famille sur ses petites photos idiotes, des gens laids qui sont morts à la guerre et c'est bien fait pour eux !

 

Il avait persiflé plus qu'il avait parlé, comme si de la bile avait envahi sa bouche, et il s'en voulait de vomir ces paroles-là subitement, dont il savait très bien qu'elles n'étaient pas tout à fait raisonnable. Surtout, il savait parfaitement qu'Alison ne pouvait pas comprendre. Mais il ne pouvait pas s'en empêcher. C'était comme si ces mots avaient tourné en pensée comme en vase clos dans sa tête depuis des jours, et qu'enfin quelqu'un avait ouvert une valve : désormais, ils s'échappaient comme une fuite irréparable.

 

- Et j'l'ai pas baisée, si c'est que tu t'demandes. Si j'l'avais fait ça aurait été pour me soulager comme un chien.

 

Dans sa main s'écrasa subitement une motte de terre et de plastique et il baissa les yeux : sans s'en rendre compte, il avait saisi un pot dans lequel une plante naissante peinait à sortir du terreau noir. Le pot avait été littéralement broyé par sa poigne furieuse, et fâché, Sasha s'en débarrassa d'un geste rageur sur l'établi. Il renfonça ses mains dans ses poches et s'éloigna de quelques pas.

 

La serre n'était pas très grande ; mais suffisamment pour qu'on pût y arranger plusieurs établis les uns à la suite des autres, pour pouvoir travailler à la chaîne, avec de grandes surfaces. La plupart des plantes matures étaient proprement organisées le long des parois de verre, là où elles bénéficieraient d'un maximum de lumière. Sasha circula, laissant le lierre lui caresser parfois les épaules tandis que ses yeux ne voyaient rien des gros bourgeons qui menaçaient d'éclore, odieusement indifférents à ses tracas.

 

Ce n'était pas bien, ce qu'il avait dit. Puis Alison n'avait rien à voir là-dedans. Oui mais c'était elle qui amenait une russe dans la conversation.

Des voix dans la tête de Sasha se disputaient. L'une d'entre elles faisait sournoisement la liste des choses obscènes qu'il pouvait faire à Anya pour la punir s'il la trouvait isolée. Mais c'était son érection qui le faisait penser comme ça. Il le savait bien. Il revint sur ses pas, bougons. Alison était toujours là, avec ses jambes nues, ses bras nus. Il fallait qu'il pensât à autre chose. Pourquoi était-il venu ici, déjà ?

 

- Tu sais mieux c'que tu veux pour le deal, maintenant ? il gronda. Si tu veux qu'je parle à un mec en particulier pour lui dire que t'es un bon coup, je peux.

 

Oui, Alison Carter. Qui est le type pour qui tu fais tout ça ?

Car si elle ne voulait pas aller plus loin avec lui, c'était qu'il y en avait un autre. Non ?

Dis-nous qui.

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Sasha expira un soupir, ses épaules semblèrent s'affasser. Elle savait pas mieux. C'était sûr qu'il venait de tout gâcher, en même temps. A peine s'était-il mis en colère qu'il le regrettait aussitôt. Le regard sombre, il se tourna vers l'établi. Ses doigts jouèrent pensivement avec une bille d'engrais. Il la faisait rouler sous son index. Dans un sens, dans l'autre, en l'observant sans la voir, la mine déconfite.

Il n'avait pas eu un coup d'oeil pour les fleurs et il haussa les épaules. Clairement, les orchidées étaient le cadet de ses soucis. Alison les aimait et il aurait pu en prendre soin juste pour cette raison-là, mais à quoi servait d'être loyal à Alison si elle décidait de rompre le deal ? Il lui jeta un regard vexé.

 

- J'raconterai jamais un truc pareil à Charlie, rétorqua-t-il sombrement, sur la défensive. En même temps moi j'l'aurais jamais giflée non plus.

 

Il avait parlé tout bas, comme à lui-même, incertain qu'elle eût pu ou non entendre ce dernier commentaire.

 

Se raccrocher à l'image de la petite fille aux cheveux sauvages l'apaisait au moins un peu. S'il n'avait aucune idée de ce qui se tramait chez les Carter, il sentait que la tension entre les deux soeurs ne datait clairement pas de la sortie de Charlie dans la Forêt Interdite. Ce qui voulait dire qu'elles avaient leurs propres histoires, desquelles il restait étranger. Comme une peluche neutre, témoin privilégié sur une étagère des disputes familiales. Paradoxalement, cette faille qu'il percevait était comme une preuve que, tout sauvage qu'il était, Alison ne pouvait pas l'empêcher de voir Charlie à l'occasion : parce que parfaite, elle ne l'était pas. Alors comment aurait-elle pu interdire cela au prétexte que lui ne correspondait pas à l'idéal qu'elle se faisait d'une fréquentation pour elle ou pour Charlie ?

Sasha étira ses lèvres en une moue lasse, abandonna la bille sur le plan de travail en la faisant rouler une dernière fois, un peu plus loin. La bille percuta un pot encore intact avant de s'immobiliser, et le garçon releva les yeux.

 

- Si je m'assure qu'ils y croient, sans que t'aies rien à faire. Ca fonctionne ou ça fonctionne pas ?

 

Ses yeux étaient redevenus neutres. Malgré la chaleur qui gardait ses joues rouges et la lisière de ses cheveux vaguement suintante, la colère ne semblait plus l'animer. Ses jambes lui semblaient engourdies, et il demeurait dans son corps un vague écho de la convoitise que lui avait inspiré la proximité du corps féminin d'Alison.

 

Ce serait probablement sa dernière proposition. Il n'avait plus d'autres cartes en main. N'avait-il pas déjà assez supplié ?

 

- Si tu veux tu peux réfléchir. Je peux m'en aller, si tu préfères ça, et tu me dis plus tard.

 

Il ne savait, lui, où il irait. Peut-être se perdre aléatoirement vers le fond du parc, puis la forêt. Guetter les crapaux un à un au bord du ruisseau, en espérant que l'un d'entre eux lui rappelât quelque chose. Alors il pourrait aller voir Charlie pour lui montrer sa trouvaille.

 

Histoire de rencontrer quelqu'un qui serait content de le voir, pour une fois.

 

Comme elle tardait à répondre, il prit de lui-même la direction de la sortie. Mais une fois la poignée sur la porte, il jeta un coup d'oeil en arrière.

 

- J'fais pas ça aux filles. J'ai dit ça comme ça.

 

Une vague de fraîcheur s'engouffra dans la serre lorsqu'il ouvrit la porte.

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Sasha Shevchen

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Boutique OCQ, Samedi 16 Décembre 2124

- Ah, fit-il, la voix légèrement déçue.

 

Sasha s'en retourna au sac de Vifs d'Or, en resserra la fermeture pour éviter d'en perdre un autre. Il s'accroupit pour observer ce qu'il y avait au bas de l'étagère, pour y trouver des affiches enroulées sur elle-même. Probablement les versions miniatures de celles qui étaient exposées à côté du comptoir, dont les protagonistes baillaient en attendant d'avoir un public digne de ce nom avant d'enfourcher leur balai et faire leur numéro impressionnant.

 

- Heu, ouais, ouais.

 

Chez toi. Bon, elle avait donc deviné. Il ne servait à rien de se cacher. Et chez lui, il s'était intéressé au Quidditch, en effet. Comme tous les gamins sorciers, probablement. Mais alors qu'accroupi, il s'intéressait à la grosse malle remplie de morceaux de cuir - une étiquette indiquait : Enchanté pour une meilleure prise du manche. Prix et fixation sur votre balai à déterminer en fonction de la taille et du modèle - il jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule pour observer la gérante.

 

- Hum... Carter comme vous ? demanda-t-il d'une petite voix.

 

L'envie de donner une image de valeur à la jeune femme se disputait à la nécessité d'être honnête. Sa mère n'aimait pas qu'il mentît, et il ne savait pas pourquoi il pensait à elle subitement. Peut-être parce que Freya avait cette autorité naturelle malgré sa gentillesse, qui lui rappelait un peu les manières de sa propre famille.

Alors il finit par secouer le nez de gauche à droite.

 

- Désolé. Mais je me renseignerai. Chez moi la star, c'est Yuriy Zaitsev. Vous connaissez ? On l'appelle la... Tornade, en anglais je crois. Il joue dans l'équipe nationale bulgare, mais c'est un ukrainien à l'origine !

 

Il n'avait pas pu s'empêcher de préciser. Il fallait dire que les joueurs de Quidditch ukrainiens célèbres à l'international étaient aussi rares que des hyppogriffes roses, et l'équipe nationale de son pays faisait figure d'amateurs maladroits lors des rencontres internationales. Sasha baissa la tête sur la grosse malle aux morceaux de cuir. Il se mit à essayer de les regrouper en fonction des tailles et des motifs, mais il y en avait beaucoup et il fronça les sourcils. L'instant suivant, cependant, son visage s'éclaira.

 

- Vous l'avez sûrement déjà vu, c'est celui qui se met des flammes vertes sur la tête à chaque fois qu'il attrape un Vif d'Or !

 

Le monde du Quidditch était aussi un monde de spectacle. Sasha se souvenait des soirées à commenter les résultats de la gazette sportive à laquelle était abonné son voisin sorcier du village, Bohdan, sur lesquelles de grandes images représentaient les joueurs en pleine action. Ils lisaient à voix haute des paragraphes entiers des descriptions, en particulier quand Yuriy mettait fin à un match de façon toujours spectaculaire. Alors Bohdan montait sur son lit en imitant l'action, clamant qu'il serait lui aussi un jour un joueur professionnel, et Sasha riait aux éclats parce que Bohdan avait le vertige dès qu'ils montaient pour marcher en funambule sur les barrières avec lesquelles les moldus enfermaient leurs vaches.

 

- J'connais pas trop mal les équipes roumaines, polonaises et turques. Mais j'ai quand même quelques notions des autres équipes avec le dernier championnat du monde il y a deux ans.

 

Ca, c'était quand il était dans son tout premier camp sur le terrain des Veilleurs de l'Aube, avec d'autres jeunes comme lui, qui ne trouvaient pas le sommeil une fois tassés dans leurs tentes savamment masquées dans le paysage. Jusque tard dans la nuit, laissés seuls avec les perspectives terrifiantes du lendemain, ils s'occupaient en discutant à bâtons rompus des résultats des matchs. Finalement, deux de ses camarades de fortune avaient fini par se fâcher au sujet de ce qu'il fallait ou non soutenir la Lettonie plutôt que l'Irlande, et le sujet du Quidditch avait été évité pour les jours suivants.

Finalement, c'était peut-être dommage que les matchs de Poudlard fussent annulés cette année ; peut-être que cela lui aurait mis du baume au coeur. Ou pas. Il haussa les épaules comme pour lui-même, et continua à organiser les cuirs pour occuper ses mains un peu fébriles.

 

- Ils viennent à quelle heure, vos employés ?

 

Sasha jeta un coup d'oeil vers la porte, vaguement inquiet soudain de voir débarquer d'autres élèves de Poudlard qui travailleraient déjà ici. Peut-être que bien d'autres élèves plus mordus de Quidditch que lui s'étaient présentés des semaines plus tôt. C'était clair qu'ils étaleraient alors leur science et qu'on verrait que lui n'avait qu'une connaissance superficielle. Et si c'était pour vivre ici les mêmes regards qu'il avait à Poudlard...

Il baissa les yeux vers le travail qu'on ne lui avait pas donné, silencieux subitement.

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Saï Don
Message publié Samedi 08 Février 2025 à 08:00

Deb, créature sauvage du Morbihan, 

Est apparue un jour dans mes contacts Discord

A la manière d'un pirate qui aborde

Avec un sourire, des blagues, et sans accent.

 

Avec elle, tel un compagnon de pillage

Un Stitch criait que je ne les reverrai pas

J'ai eu peur, mais heureusement Deb était là

Sereine et les pieds nus plantés sur le rivage.

 

Elle faisait genre elle aussi était Serpentard !

Elle aussi pouvait se moquer, et dépouiller

Le premier venu qui se laisserait duper !

Tout en brillant dans le ciel breton comme un phare.

 

J'ai décidé d'embarquer, le temps a passé

Les mauvais vents et les monstres de la mer

Nous les avons combattus, vaillantes et fières

Gardant Stitch sous contrôle et après nous la paix

 

Ce fut un périple parsemé d'aventures

Mais je n'ai jamais vu le serpent annoncé

Mais la bravoure d'une Gryffondor ignorée

Et la bonté d'une Pouffy, je vous l'assure

 

Alors certes si vous ajoutez un accent

Elle peut ruer bien aussi fort qu'un caribou

Mais j'empêcherai que vous rendiez coup pour coup

Car je veux garder ma Pouffy du Morbihan.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

Gryffondor
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Bibliothèque, Mercredi 27 Septembre 2124

Sasha avait planté ses talons dans le sol quand le bibliothécaire l'avait saisi par les épaules aussi sûrement qu'un âne enfonçait ses sabots dans la boue lorsqu'il refusait d'avancer. Malheureusement, l'enthousiasme de Beckett eut raison de sa posture et il se sentit propulsé en avant, jetant vers l'arrière quelques regards absolument désespérés : mais des quelques élèves regroupés dans des poufs, il n'obtint pas la moindre aide sinon des rires à peine dissimulés.

 

Le pire était que la séance de danse n'était pas prévue en privé : le bureau de monsieur Beckett n'était autre qu'un gros comptoir d'angle en bois massif qui croulait sous divers objets, parchemins et ouvrages, offert à la vue de tous les élèves - et autres personnels - qui avaient décidé de fréquenter l'endroit à cet instant-là. Sasha ne put s'empêcher d'offrir un regard de supplication silencieuse au bibliothécaire ; mais, imperméable à sa détresse et plongé dans sa propre démonstration, ce dernier n'y fit guère attention.

 

- Non mais vous savez moi l'art c'est pas trop mon...

 

Sa voix s'éteignit dans un soupir affligé, ses yeux examinant la posture étrange du danseur improvisé : Beckett tremblait comme un arbre qu'on aurait secoué, toutes ses branches et ses feuilles remuant frénétiquement. Un peu plus et Sasha aurait pu voir les gouttes et les fruits se décrocher pour s'écraser par terre.

 

Alors, n'écoutant que son courage qui ne lui disait rien qui vaille, Sasha sortit les mains de ses poches - à contrecoeur, striées de balafres noires, mais à demi enfoncées dans ses manches, pour les laisser retomber le long de son corps. Il lui semblait que la bibliothèque était devenue étrangement silencieuse, comme si les bouquins eux-mêmes retenaient leur souffle pour savoir ce qu'il allait faire.

 

Mollement, Sasha secoua un peu les mains.

 

Il rencontra le regard du bibliothécaire et comprit que ce n'était pas suffisant. Alors il secoua un peu le buste et les épaules, dans une pâle imitation de Beckett. Des élèves pouffèrent de rire un peu loin, et cette fois Sasha s'épargna la contorsion (et la déconvenue) de se retourner pour les voir se moquer de lui. Mais un nouveau regard avec le professeur de danse l'informait que ce n'était toujours pas suffisant.

 

Alors, Sasha prit une grande inspiration, comme s'il allait se jeter à l'eau. Et puis il fit ce qui lui semblait le plus instinctif et qui devait (peut-être, ou pas) ressembler à l'exercice demandé : il s'ébroua brutalement. Ses cheveux volèrent autour de son visage, tout son corps fut pris d'une série de spasmes, secouant ses vêtements lâches sur lui comme un pelage bigarré - d'une façon fort peu naturelle pour un humain.

 

L'instant suivant, il était revenu à son apparence habituelle - ses cheveux juste complètement dérangés, ses yeux attentifs pour savoir s'il était débarrassé de ce premier exercice.

 

- J'suis vraiment pas sûr, Sir, il chuchota comme une supplication, implorant du regard l'abandon de cette punition.

 

Mais bizarrement, les rires s'étaient arrêtés dans son dos. Ils ne tarderaient pas à reprendre, c'était évident : tout le monde attendait la suite.

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

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Boutique OCQ, Samedi 16 Décembre 2124

Au moins une chose était sûre : il ne s'était pas trompé de famille : la jeune femme qui était apparue devant ses yeux avait le visage couvert de tâches de rousseur et la chevelure aussi flamboyante qu'Alison et Charlie. Avec - heureusement, songea Sasha - des traits dont émanaient effectivement la spontanéité et la gentillesse de la benjamine et moins la sévérité de la cadette.

 

- Hhuummm... Bon-jour... Mais je viens pas pour acheter.

 

Sasha cligna de ses yeux arrondis par la surprise. Derrière le comptoir qui le cachait à demi, il avait rassemblé ses doigts pour les assembler machinalement, comme pour s'aider à se concentrer. Le regard de Freya et son naturel épanoui étaient si loin de ce à quoi il s'était attendu qu'il se sentait soudain intimidé. Peut-être était-il insuffisamment civilisé, au fond, et que c'était là le problème que les autres avaient perçu. Mais il n'avait pas encore dit son dernier mot et il s'humecta les lèvres en s'efforçant de soutenir le regard de la rousse.

 

- Je m'appelle Sasha, élève en sixième année à Poudlard, et je cherche du travail.

 

Il avait fait de son mieux pour masquer son accent, en articulant lentement, tout en se demandant si Alison ou Charlie avaient pu prononcer son nom dans leur famille. De toute façon, il était trop tard pour revenir en arrière. Comme il vit, à peine perceptiblement, l'expression de la jeune femme changer, il reprit subitement une inspiration pour enchaîner :

 

- Je peux faire plein de choses que les autres ont pas envie de faire ! Tant pis pour l'accent. Je peux nettoyer les sols et déneiger le trottoir, et...

 

Les yeux de Sasha se promenèrent désespérément autour de la jeune femme - repérèrent les listes de commandes et d'adresses griffonnées sur des morceaux de parchemin, les pots de cire formant une pyramide à côté de son épaule.

 

- ... et recompter des articles pour les mettre dans des boîtes ou cirer des balais et livrer des trucs ou aller faire des courses. Ou aller distribuer des publicités ou coller des affiches, puis je sais bien réparer les machines qui marchent pas. Je me lève tôt et j'suis disponible toutes les vacances de Noël tous les jours, et...

 

Depuis la rue, les éclats de voix d'une conversation leur parvinrent, annonçant que la rue allait doucement commencer à s'animer malgré le froid qui dissuadait encore les lève-tards de s'aventurer dehors. Mais ces bruits, troublés par les secousses discrètes d'un Cognard un peu trop enthousiaste de démontrer ses fonctions malgré les sangles qui le retenaient fermement dans son coffret de cuir, semblaient subitement souligner l'embarras du garçon dont les joues s'étaient peu à peu empourprées. Pourquoi était-ce encore plus compliqué face à une Carter ? Les Carter brouillaient tout.

Sasha réalisa soudain que son coeur battait à tout rompre. C'était sûrement la dernière boutique à laquelle il oserait se présenter pour aujourd'hui. Si ça ne fonctionnait pas...

 

- J'peux faire un essai gratuit, il ajouta précipitamment avant qu'elle ouvrit la bouche, comme si c'était sa dernière chance de produire un argument convaincant.

 

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Sasha Shevchen

16 ans Sang-Mêlé·e Ukrainienne Notoriété

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Boutique OCQ, Samedi 16 Décembre 2124

C'était un samedi matin orné d'un soleil froid, qui jetait sur la Grand Rue de Pré-au-Lard une clarté glacée semblable aux gelées de janvier - sauf que les décorations de Noël ornaient les devantures des magasins, des bougies réchauffant artificiellement le coeur des passants qui se presseraient bientôt pour poursuivre leurs emplettes avant les célébrations de fin d'année. Une neige épaisse était tombée pendant la nuit, mais la rue était déjà dégagée. Les trottoirs étaient flanqués de bordures de neige empilée, à demi-boueuse, qui disparaîtrait bientôt sous les bottes des promeneurs, encore rares à cette heure-ci. Il devait être près de 8h, et à cette heure, Pré-au-Lard était surtout animée des commerçants qui déneigeaient de quelques coups de baguettes devant leur devanture, mettant en place ici et là les animations qui rendraient attractive leur boutique pour la journée. Leurs gestes rapides trahissaient à la fois l'habitude de ces mouvements répétés chaque matin sur les derniers jours autant que l'urgence que tout fût prêt à cette époque de l'année.

 

A priori, Sasha avait pensé que c'était le meilleur moment pour les aborder : pas encore dans le feu de l'action à répondre aux exigences des clients, ni harassés après une journée intense de travail. Pourtant, il lui semblait désormais qu'il avait mal calculé : les réponses qu'on lui avait faites étaient brusques, lapidaires. Ils ne voulaient rien avoir à faire avec lui. Sasha avait tenté de varier sa présentation, avant de finir par enfoncer les mains dans ses poches - les sortir, les laisser dans ses poches, telle était toujours une question insoluble car les deux induisaient toujours un résultat négatif. Quant à savoir ce que son allure et son accent trahissaient de son origine et de son histoire, et de la façon dont cela influençait les interactions qu'il avait, il préférait ne pas trop y penser. Il avait poursuivi son chemin sur le trottoir, le nez à contempler le bout de ses baskets qui avançaient l'une après l'autre.

 

Peut-être qu'on voyait qu'il était pauvre, comme il avait cru qu'Alison l'avait remarqué. Peut-être qu'il ne parlait pas si bien anglais. Peut-être que ce n'était tout simplement pas le bon moment, pas la bonne solution. Ou bien il y avait un problème avec lui.

 

Cette question devenait plus récurrente à mesure qu'il évoluait à Poudlard. Presque la moitié de l'année s'était écoulée, et le bilan de ses réussites étaient bien maigres, tant sur le plan académique que social. Pas un ami à l'horizon. Ou peut-être Charlie Carter, mais Sasha n'assumait pas beaucoup qu'une petite fille de treize ans fusse la seule personne qui l'eût trouvé fréquentable.

 

Carter.

 

Comme dans Owen Carter Quidditch, ces grandes lettres qui s'alignaient au-dessus du n°76.

 

Sasha s'arrêta pour relever le nez devant la façade qui paraissait encore endormie.

 

Il n'ignorait pas qu'il y avait un lien entre les soeurs Carter et cette boutique, tout simplement parce que les férus de Quidditch avaient plusieurs fois mentionné l'endroit pendant les cours de Vol - qu'il suivait, Merlin merci, avec les 6ème années, car Sasha était meilleur dans cette pratique qu'en potions ou en botanique. On disait que les Carter tenaient une marque de renom, que les balais de la boutique étaient fabriqués à la main et faisaient concurrence à des balais de notoriété internationale.

 

Evidemment, il y avait pensé. Mais en raison de sa non-relation avec Alison, il avait soigneusement évité de s'y présenter.

 

Sauf que si personne ne voulait de lui... Le reste des Carter était peut-être davantage comme Charlie que comme Alison. Que perdait-il à tenter ?

 

Après un coup d'oeil autour de lui - comme si quelqu'un avait eu l'idée saugrenue de le suivre à Pré-au-Lard un week-end, Sasha poussa la porte.

 

Une petite clochette émit un bruit discret, et puis il se retrouva dans un environnement plutôt chaud. Des étagères regorgeaient de produits en tous genre d'un côté, des balais s'alignaient de l'autre. Des décorations suspendues étaient soigneusement disposées, faisant certainement rêver les jeunes enfants par cette liberté incroyable qu'offrait d'échapper à la gravité terrestre en enfourchant un morceau de bois. Sasha se hâta de remettre les mains dans ses poches : non pas pour les cacher, mais parce qu'il avait l'impression que sa carrure un peu large et ses mains maladroites auraient sûrement tôt fait de détruire les choses délicates qui étaient si proprement organisées à ses yeux.

 

Le comptoir était vide. Sasha se trouvait là, seul, dans la boutique, avec ses baskets mouillées par la neige et ses cheveux décoiffés. Après quelques secondes, il se décida à avancer un peu plus, pour aller jusqu'à la banque où se presseraient les clients dans quelques heures, et osa sortir un index pour appuyer sur la petite clochette.

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Sasha Shevchen

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Boutique OCQ, Samedi 16 Décembre 2124

Sasha avait suivi des yeux les déplacements et les gestes machinaux de la jeune femme. Les décorations lumineuses et les animations des objets donnaient à l’endroit une joyeuseté qui créait un cocon dans lequel il pivota, faisant vaguement vaquer son regard le nez en l’air vers les minuscules balais qui parcouraient le plafond comme autant d’étoiles filantes. Bientôt, il baissa les yeux pour regarder de nouveau la gérante tandis que son visage se décomposait.

 

Les parents ou le directeur de maison.

 

-    J’peux demander une autorisation à mon directeur de maison !

 

Que le directeur de maison en question acceptât relevait d’une autre incertitude, mais il pouvait toujours demander. Il s’humecta les lèvres, fit disparaître ses mains dans ses poches en passant d’un pied sur l’autre.

 

-    Heu, ouais, j’suis nouveau. Depuis septembre.

 

Sasha ne savait pas s’il devait développer. Le fait de ne pas avoir déjà reçu une réponse négative était plutôt encourageant, mais la jolie rousse avait visiblement d’autres préoccupations en tête. Machinalement, l’ukrainien se remit à observer autour de lui. Il se dévissa le cou pour jeter un œil vers l’arrière-boutique silencieuse. Était-elle seule ici ? Ça ne pouvait être la mère d’Alison, elle était beaucoup trop jeune. (Et jolie, l’a-t-on déjà dit ?) Donc c’était une sœur, ou une tante. Il ne parvenait pas vraiment à lui donner un âge. Peut-être suffisamment jeune pour qu’elle se fût effectivement attendue à l’avoir déjà croisé dans les murs du château…. Donc qu’elle avait au moins 17 ans quand il en aurait eu 11. Elle devait donc avoir à peine plus de 20 ans. Sasha prit une inspiration, puis il alla lui aussi vers une étagère, choisie un peu au hasard. Des figurines animées s’étaient entassées dans un coin à force de mouvements enchantés répétés et il les réaligna pour rendre l’exposition plus agréable à l’œil.

 

-    Heu… ça doit être chargé avec Noël.

 

Ben oui, dourak, se morigéna-t-il, mais il n’avait rien trouvé de mieux à dire. Un faux vif d’or s’éleva d’un sac voisin et il l’attrapa en un réflexe soudain pour le replonger dans son sac d’appartenance. Quelle idée de vendre autant de choses enchantées. Est-ce qu’elle n’en perdait pas la moitié à chaque fois que quelqu’un ouvrait la porte ?

 

-    Il y a des voleurs ? Je peux surveiller, aussi. Vous êtes toute seule ?

 

Il se retourna vers la gérante et sentit ses joues s’empourprer de nouveau, et il se hâta de désigner d'un geste du menton la boutique qui les entourait.

 

-    J’veux dire, pour gérer tout ça, quoi.

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- Oh, waouh.

 

C'était donc le père des Carter qui avait emmené sa famille dans le Quidditch, à commencer par la gérante qui connaissait si bien les noms des joueurs de toutes les équipes, y compris celle de Bulgarie, que Sasha en resta un bref instant bouche bée. L'exercice que la jeune femme s'imposait avait l'air drôle, mais ça devait nécessiter une sacrée passion pour rester constamment à jour. Une pensée lui traversa l'esprit - le père d'Alison, celui qui n'aurait sûrement pas voulu qu'elle déboutonnât sa chemise pour attirer les garçons dans une serre de botanique, n'était donc autre qu'un grand joueur professionnel de Quidditch. Voilà pourquoi Charlie voulait qu'il surveillât Alison en son absence : sûrement qu'Owen Carter parcourait le monde pour jouer encore de grands matchs, ou peut-être même pour dénicher les nouveaux talents pour une équipe nationale ou une autre. Sasha se l'imaginait grand, habillé comme un sorcier d'affaire avec de grandes robes noires et une petite sorcière qui lui courait après en prenant des notes et en lui annonçant qui il allait rencontrer à son prochain rendez-vous.

 

Les images s'effacèrent de son esprit et le garçon reporta son regard sur les derniers morceaux de cuir qu'il arrangeait, avant de se lever à son tour à cause du ton solennel qu'elle prenait. Dans un geste nerveux, il épousseta son pantalon - alors que pour une fois, il n'était pas sali - pour se concentrer sur ce qu'elle avait à dire, les yeux fixés sur elle comme un félin aurait braqué son regard sur un objet qui avait bougé de façon inattendue.

 

- Ah.

 

Il avait eu du mal à masquer sa déception. Dans les premières idées qui l'avaient amené à arpenter la Grand Rue de Pré-au-Lard ce matin, il s'était imaginé pouvoir faire ne serait-ce que quelques mornilles sur les premiers jours des vacances. Mais vu les refus qu'il avait essuyé avant d'entrer chez OCQ, la proposition de miss Carter faisait figure de miracle. Alors il secoua subitement la tête de haut en bas.

 

- Oui oui, ça me va, se dépêcha-t-il de répondre, tâchant de faire bonne figure. Puis ça m'laissera le temps de réviser les équipes, alors.

 

L'interruption de Madame Forbes le sauva d'une conversation conclusive qu'il n'aurait pas su mener élégamment de toute façon.

 

- Gryffondor. J'vais aller voir mon directeur lundi.

 

Madame Forbes s'avançait dans la boutique d'un pas pressé, revêtue d'une grosse fourrure dans lequel son long cou disparaissait, et elle posa sur Sasha un regard absent.

 

- Bon, j'vous laisse travailler alors, déclara-t-il avant de s'effacer vers la sortie, désireux de s'échapper lui aussi même s'il aurait aimé continuer à rester au chaud à ranger la boutique.

 

Même gratuitement, songea-t-il étrangement tandis qu'il ouvrait la porte - déclenchant de nouveau le tintement. Alors avant de disparaître, il lança par-dessus son épaule.

 

- Et si jamais Noël c'est compliqué et vous avez b'soin d'aide appelez-moi hein ! Votre soeur saura m'trouver on s'connait !

 

Il referma la porte à la hâte et sa silhouette disparut derrière le rideau de fausse neige.

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Salle de Potions, Lundi 18 Décembre 2124

Le lundi à midi, monsieur Brooks devait terminer son cours avec les 4ème années.

Non pas que l'emploi du temps du professeur de potions intéressât Sasha d'une manière ou d'une autre... Sauf que voilà, cette fois, il avait besoin de lui parler. Un tel besoin qu'il avait même exceptionnellement retardé sa course à la Grande Salle, prenant le risque odieux de laisser tous les morceaux de poulet aux autres. A la place, et comme le lundi matin il n'avait pas cours, il avait soigneusement réfléchi à ce qu'il allait dire. Bien qu'il n'était pas du genre très soigneux, cette fois il avait décidé de se préparer : il avait collecté les différentes notes obtenues dans les matières - quelqu'un lui avait dit que ce serait important, et il avait même rédigé une petite lettre sur un parchemin, qui disait quelque chose comme ceci :

 

 

Cher mister Brooks,

Sir,

 

Je souhaite vous demander officiellement l'autorisation de pouvoir travailler à Pré-au-Lard à côté de mes études à Poudlard. Ce serait seulement le dimanche. C'est important pour moi de pouvoir gagner un peu d'argent pendant les week-ends ou les vacances quand les autres seront dans leur famille.

 

Très respectueusement,

 

Sasha Shevchen, 6ème année.

 

 

A la bibliothèque où il était allé rédiger sa lettre, une autre sixième année Serdaigle, très timide et disparaissant à moitié derrière un rideau de cheveux noirs, avait accepté de corriger ses fautes d'orthographe. Après avoir recopié proprement la version sans faute, il avait fallu attendre jusqu'à la fin de la matinée. Il avait bien essayé de réviser pour le test que le professeur d'Histoire de la Magie leur réservait pour le lendemain, Sasha n'avait pas réussi à se concentrer. Il s'en était donc allé rejoindre les cachots pour attendre devant la porte de la salle de Potions pendant vingt bonnes minutes. De l'autre côté du panneau de bois, on entendait la voix grave du Directeur de Gryffondor qui donnait ses instructions - Tournez 15 fois dans le sens inverse des aiguilles d'une montre ! - et quelques murmures provenant des élèves. Les cachots étaient légèrement humides, et Sasha ne pouvait s'empêcher de jeter régulièrement des coups d'oeil vers le couloir : au fond de la coursive, il y avait l'entrée des quartiers privés des Serpentards. Il ne s'en était plus approché ces derniers temps, et il redoutait de voir l'une ou l'autre des Serpentards qu'il connaissait en devant s'expliquer quant aux raisons qui l'amenaient là.

 

Heureusement, la fin du cours arriva sans que la moindre souris traversât le couloir, et bientôt la porte s'ouvrit pour déverser un flot d'élèves. Aucun d'eux ne lui prêtèrent la moindre attention, et bientôt, la salle de classe était redevenue silencieuse. Sasha osa entrer d'un seul pas. Monsieur Brooks était en train d'observer une potion dans une fiole qu'il tenait à hauteur d'yeux, assis sur son bureau, une plume en main. Sûrement pour noter le travail des quatrième années. Sasha s'éclaircit la gorge, puis il toqua à la porte ouverte.

 

- M'sieur Brooks ? J'peux vous parler une minute ?

 

Il attendit d'avoir un signe d'assentiment avant de s'avancer et de rejoindre le bureau qui séparer alors l'élève et le professeur. Sasha roulait des épaules inconsciemment, trahissant sa gêne, mais il finit par s'humecter les lèvres et se lancer.

 

- Voilà, j'vous ai apporté mes notes, puis une lettre. Comme vous êtes mon directeur de maison, j'voulais savoir si vous pouviez me donner une autorisation pour travailler de temps en temps à Pré-au-Lard.

 

Il déposa les documents sur le bureau, devant lui, à côté des fioles qui s'alignaient proprement, toutes remplies d'un liquide rosâtre dont la teinte variait d'un contenant à l'autre. Sasha était incapable de dire ce dont il s'agissait. Les Potions n'étaient clairement pas son point fort, mais il espérait que ses notes en Soins aux Créatures Magiques notamment pouvaient démontrer qu'il pouvait travailler correctement.

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Sasha Shevchen

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Salle de classe de Métamorphose, Samedi 03 Février 2125

Sasha avait fusillé Ferguson du regard. Il ne connaissait pas ce type - sauf à avoir croisé sa gueule d'imbécile ici et là dans les couloirs sans lui prêter grande attention. Mais visiblement, son attention à lui aussi avait été attirée par Alison Carter, même si cette dernière semblait avoir jeté son dévolu sur Spike - un des Serpentards avec qui il avait eu cours, qui débordait d'arrogance à cause de ses performances au Quidditch. L'ukrainien crevait d'envie d'intervenir pour remettre le Poufsouffle à sa place, mais il rongea son frein en silence, ses yeux mauvais allant de l'un des prétendants d'Alison à l'autre.

 

Heureusement, l'intervention du professeur l'arracha un instant à ses réflexions pour l'affecter... A l'atelier concernant l'offensive. Parfait. Avec Julian et Ambrose. Moins parfait. Une pointe de déception lui picota les entrailles : ce ne serait peut-être pas aujourd'hui qu'il pourrait directement se mesurer à l'un de ses concurrents. Avec un soupir discret, toutefois, il s'exécuta pour aller vers l'atelier où des mannequins enchantés se dressaient, leur tête sans visage semblant les narguer avant même que ne commençât l'exercice. Sasha se dirigea vers le premier des mannequins pour lui faire face. Il lui semblait que celui-ci frémissait... A moins que ce ne fût son imagination ?

 

Il avait déjà sorti sa baguette, près à intervenir dès le top départ. Il n'avait pas besoin des cinq minutes de réflexion. Sur un vrai champ de bataille, vous ne les aviez pas. Mais cela, dans ce groupe d'élèves, il était le seul à le savoir pour l'avoir vécu. Certes, Sasha n'était pas meilleur sorcier, ni sur le papier ni en pratique que ses camarades, mais il avait conscience que toute sa force résidait dans son mental : son expérience était un atout, et le sang qui battait à ses oreilles une autre : naturellement, l'adrénaline venait à lui en situation de combat, amenant une forme de clarté à son esprit, une concentration qui n'était que parasitée par les regards qu'il avait envie de lancer à l'atelier voisin.

 

Mais il ne fallait pas. Il était là pour faire ses preuves.

 

Alors, dès que les cinq minutes se furent écoulées, Sasha dressa sa baguette.

 

- Gelata, annonça-t-il avec un mouvement ferme du poignet, en direction du sol.

 

Un fin jet vaporeux s'écrasa aux pieds du mannequin, touchant autour toute la surface en pierre. Le faux adversaire se mit à gigoter sur place en tâchant de garder son équilibre. Il soulevait un pied puis l'autre en essayant vainement de s'y arracher. Sasha en profita pour jeter un coup d'oeil vers Ambrose et Julian, histoire de voir le niveau qu'ils avaient.