Et il s'active, les chaussures trempées par la pluie, souhaitant trouver un endroit où s’abriter. Quelle idée de s’aventurer ici par ce temps…  Évidemment, transplaner pourrait être une option pour éviter les cheveux dégoulinants et les gouttes de pluie chatouilleuses au creux de son dos, mais le besoin que Lesley ressent de se dépenser est bien trop fort. Longtemps, il s'est posé des questions sur son avenir, sur ses envies depuis qu’on a lâché sa main et qu'il avance seul. Il n'a pas stoppé ses études pour autant. Depuis son plus jeune âge, depuis sa première rentrée à Poudlard, il ne rêve que d’une chose : enseigner les cours de Soins aux Créatures Magiques. Et malgré les crises de larmes, les doutes, les angoisses de se découvrir seul, les difficultés à apprendre qui il est réellement, il n'a jamais rien lâché et aujourd’hui, son rêve est sur le point de se réaliser.

Alors non, il ne se promène pas sous la pluie pour ajouter un côté dramatique comme dans ces films à l’eau de rose où l’homme se rend compte de ses nombreuses erreurs. Non, il s’entretient, il court, il saute, il s’étire parce qu’il n’y a rien de mieux pour se sentir heureux et libre. Les endorphines, c'est bon pour la santé. Et si vous voulez tout savoir, sa rupture a été douloureuse. Sa relation durait depuis sa sixième année à Poudlard et s’est terminée il y a quelques mois : un adultère impardonnable qu’elle lui a avoué alors qu'il venait tout juste de la demander en mariage. Quelle ironie. Il pourrait se poser et réfléchir à un éventuel pardon, mais Lesley n'a plus le temps pour ça désormais. Sa vie sentimentale est entre parenthèses et ces dernières ne risquent pas de se fermer de sitôt.

Parce que bientôt, il fera sa toute première rentrée à Poudlard en tant que grande personne, en tant que professeur. Il ignore ce que lui réserve l’avenir là-bas, mais il sait qu'il est sur le bon chemin : l’envie de partager ce qu'il sait, d’aider ces sorciers en herbe à s’épanouir et à s’intéresser à un cours qui pourrait leur sembler barbant au premier abord. Il ne veut pas avoir la prétention de dire qu'il saura les faire changer d’avis par sa seule force de persuasion, mais il a assez confiance en lui pour savoir qu'il peut attirer leur attention d'une façon ou d'une autre.

Il appréhende un peu aussi, il paraît que Poudlard n’est plus vraiment l'école qu’elle était à l’époque où il y étudiait. Une ambiance tendue, des élèves qui se mettent des bâtons dans les roues même s’ils sont de la même maison… Il ne perd pas espoir, tout n’est peut-être pas encore perdu. On ne peut pas reprocher à ces enfants d’avoir l’esprit de compétition. Néanmoins, on peut leur apprendre à s’en servir intelligemment.

Il n’était qu’un simple spectateur de cette compétition, mais que faisait-il réellement là après la défaite des Anglais face à la Norvège ? Il y croyait pourtant, avait peut-être un peu parié aussi, beaucoup… Quoiqu’il en soit, la rancœur était bien présente et si Lesley ne voulait montrer aucune préférence aujourd’hui, il ne pouvait s’empêcher de penser intérieurement que la victoire du Japon serait une belle vengeance personnelle. Même si ça ne rembourserait évidemment pas les Gallions perdus. Ça aussi ça lui restera longtemps coincé en travers de sa gorge. Ça lui apprendra à trop vouloir se montrer fier et à ne jamais vouloir lâcher le morceau. Peut-être qu’un jour, il apprendra de ses erreurs. Mais ce jour n’est pas encore arrivé, on le sait bien.

D’un pas lent et assuré, il passe de tentes en tentes, ses yeux balayant chaque recoin pour y découvrir des fanions aux couleurs des deux équipes, des enfants qui courent, rient, s’amusent, des parents heureux, mais épuisés au vu des cratères sous leurs yeux. Ils remarquent les parieurs au loin, un sourire en coin, sachant pertinemment qu’il n’irait pas parier sa fierté dans ce match. En regardant d’un point de vue neutre, la Norvège avait autant de chance que le Japon de l’emporter. Pourquoi aller encore dépenser inutilement des Gallions pour satisfaire un ego qui en a déjà assez pris pour son grade ces derniers jours.

En réalité, cette petite escapade était une manière pour lui de se changer les idées, de reprendre des forces et penser à autre chose qu’à la rentrée qui l’attendait. Plus que quelques jours et il franchirait à nouveau les portes de Poudlard après près de dix ans sans y avoir mis les pieds. Au début, il était dans un état d’excitation inégalable, mais plus la date approchait, plus l’appréhension prenait le dessus, mais il paraît que c’est toujours comme ça quand on commence un nouveau travail. Autant être tout à fait franc, cette coupe du monde tombait à pic et il avait bien l’intention d’en profiter.

Les mains dans les poches, il s’apprête à regagner sa tente pour se préparer pour la grande finale. L’insouciance au bord des rétines qui pourraient presque se teindre en rose tant la joie et l'épanouissement se dessinent devant lui. Un sentiment de légèreté qui lui permet d’oublier les tracas quotidiens qui l’empêchent parfois d’exister pleinement. Se plonger dans le sport a toujours été son remède miracle. Peut-être qu’il devrait se mettre au Quidditch d’ailleurs. Avec lui, l’Angleterre atteindrait peut-être la finale. Sur un mal entendu, ça pourrait marcher. Ah, les rêves éveillés de Mister Bowers.

Il n’avait pas hésité avant d’accepter de se rendre à la réunion organisée par Aingeal. Avant le jour de la rentrée, il ne savait même pas qu’elle travaillait à Poudlard. Il l’avait connue il y a bien des années, amie de son ex lorsqu’elles étaient à l’école, il avait eu l’occasion de la connaître un peu, de la croiser, mais jamais ils n’avaient été au-delà de la simple rencontre de courtoisie. Il faut dire qu’à l’époque, Lesley n’avait d’yeux que pour sa petite amie, les autres n’existaient pas vraiment. Ils n’avaient donc jamais vraiment connu de véritables amitiés ou d’autres amours. Il se rendait compte aujourd’hui de tout ce qu’il avait perdu, mais s’était promis d’avancer et de ne pas regretter. À bientôt 27 ans, il avait encore un long chemin à parcourir, de nouvelles rencontres à faire. Mais aujourd’hui, il n’était pas vraiment là pour ça.

Il marche d’un pas assuré dans les couloirs de l’école, saluant au passage quelques élèves, prenant également le temps de s’arrêter pour répondre à quelques questions de cours. Il stoppe également quelques bagarres, l’air exaspéré de constater que la rumeur disait vrai : décidément, l’ambiance à Poudlard n’est pas au beau fixe et les élèves semblent avoir besoin de se défouler. Et sans Quidditch, ça allait être un sacré défi. 
C’est la raison pour laquelle il saluait grandement l’idée du club d’Aingeal et était très enthousiaste à l’idée d’aider Poudlard à retrouver sa bonne humeur sans perdre la compétition. Oui, c’est possible et il fera en sorte de mettre sa pédagogie en avant pour qu’il y ait des résultats. Dans cet enthousiasme, il ouvre la porte de la salle où il avait rendez-vous.

Levant un sourcil, ses commissures de lèvres se fendent rapidement en un sourire qui le représentait bien : Hello ! Sur le même ton avec un air plaisantin, parce que c’était ainsi qu’il était. Je suis ravi que tu aies proposé cette idée, dehors, Poudlard commence à avoir une sale réputation. Si ça continue, les effectifs vont vraiment diminuer. C’était déjà peut-être le cas, chez les élèves comme les professeurs, sinon pourquoi lui avoir demandé d’occuper également le poste de Directeur de Poufsouffle dès sa première année ? En entendant d’autres éventuels professeurs, il se permet de sortir un peu du contexte. Comment vas-tu depuis tout ce temps ? Elle avait un peu changé, mais pas tant que ça finalement. Les quelques années en plus la rendaient seulement moins adolescente.
 

Plongé dans ses pensées, il s'occupait des Fléreurs avec une douceur presque mécanique. Ses gestes étaient lents, presque fluides, comme s'il baignait dans une rêverie silencieuse. Un sourire léger flottait sur ses lèvres, un sourire né de ses pensées vagabondes, loin des préoccupations du quotidien. Il caressait doucement la fourrure de l’un des Fléreurs, ces créatures au pelage soyeux et aux yeux pleins de curiosité. Le ciel au-dessus de lui restait d’un gris constant, semblant peser légèrement sur ses épaules, mais cela ne le perturbait guère. Le vent, presque imperceptible, n'arrivait même pas à perturber la sérénité dans laquelle il baignait.

Il entendait les pas réguliers derrière lui, un bruit léger, mais familier. Une présence qui aurait dû éveiller son attention, mais il n’y prête aucune importance. Loin de se douter qu'il n’était plus seul, il poursuivait ses gestes, concentré sur le soin des Fléreurs. Ses pensées dérivaient sans cesse, comme des nuages dans ce ciel sans fin, laissant l'instant s’étirer lentement autour de lui. Il aurait pu rester là, seul avec ses créatures et son sourire, ignorant tout de ce qui se passait dans son dos. Pourtant, une nouvelle présence se tenait à quelques pas de lui, mais il n'en avait pas conscience. Un étrange calme régnait, comme si le monde autour de lui l’invitait à oublier tout ce qui pourrait briser cette tranquillité fragile. 

En levant enfin les yeux, il remarque que l'élève ne faisait pas davantage attention à lui, captivée par ces créatures, à l'aise, qui vivaient leur vie comme si elles avaient vécu ici depuis leur naissance. Il reste quelques instants, faisant semblant de ne pas l'avoir vue, le regard et l'attention apportés uniquement à ces créatures. 

Mais au bout de quelques minutes, difficile de continuer à ignorer, parce que ce n'était pas son genre, mais aussi parce que la situation allait finir par être étrange si l'un des deux ne brisait pas la glace. Alors il se déplace d'un pas lent pour ne pas faire fuir les Bêtes, ça vous intéresserait peut-être de les nourrir, Tegan ? Il avait pris pour habitude de ne jamais appeler les élèves par leur nom de famille en dehors des cours. Ça pouvait paraître étrange, mais c'est ainsi qu'il voulait fonctionner, faire la différence entre les cours et le reste, tout en gardant une certaine distance - évidemment. Peut-être que son peu d'expérience et son âge y étaient pour quelque chose, mais pour le moment ça fonctionnait plutôt bien. Ils n'ont pas encore eu leur repas. Elle se montrait captivée, autant la faire participer. Il ramasse alors le sac de nourriture à ses pieds et le tend à l'élève. À ce son, certains fléreurs commencent à ouvrir les yeux, à se redresser, prêt à accueillir leur repas tant attendu.

Les baskets frôlent le sol d’un pas rapide. Il n’est pas en retard, mais il n’est pas en avance non plus. Sa main referme le haut de son manteau pour ne pas laisser passer le vent. Il le sait, il aurait dû mettre une écharpe, mais il avait sous-estimé ce mois de février. Il était souvent ainsi, à se doter d’un optimisme dont lui seul avait le secret. Pour lui, février représentait la fin de l’hiver et l’approche du printemps. Il en oublierait presque qu’il se trouvait en Écosse ; il avait plus de chances de se retrouver sous la pluie à cette période de l’année. Mais quand on s’appelle Lesley Bowers, on ne suit pas vraiment les codes : on fait les choses instinctivement, et parfois de manière impulsive. Qui a dit que tous les Poufsouffle appréciaient le confort ?

Lui se laissait porter par le vent. Ses nombreuses déceptions dans la vie, et notamment sa vie amoureuse désastreuse, lui avaient donné envie de voir le monde d’un œil nouveau. Parce que les ruptures, ce n’étaient pas juste la douleur, la tristesse et la colère : elles représentaient aussi un renouveau, une volonté de vivre indépendamment des autres et de vivre pour soi. Et il ne l’avouerait jamais, mais il adorait ça. Une fois la douleur dépassée, les choses étaient bien plus agréables. Bien sûr, il lui arrivait de se sentir seul, d’y repenser, mais finalement, le négatif avait fini par surplomber le positif. Elle était partie, l’avait trompé… Tant pis pour elle.

Ce n’était pas pour elle qu’il rejoignait Aingeal aujourd’hui. Certes, elles avaient été amies, mais il s’était décidé à nouer des liens avec les gens, et Aingeal était la seule personne qu’il connaissait à Poudlard, celle avec qui il s’était immédiatement senti à l’aise. Alors, quand il pousse la porte des Trois Balais, c’est bien elle qu’il cherche activement du regard. Le bar est bondé : des élèves, des adultes, des personnes désireuses de profiter d’une bièraubeurre ou d’un whisky pur malt, selon leurs objectifs.

Il ne lui faut pas longtemps pour la trouver. Assise avec une grâce dont elle seule a le secret. Presque immédiatement, un sourire apparaît à la commissure de ses lèvres tandis qu’il s’avance vers la table. Quel endroit parfait pour se retrouver dans le calme et la sérénité. Petite boutade avant un clin d’œil à sa collègue. Tu as pu commander ? Il déboutonne son long manteau noir et le pose délicatement sur le dossier de la chaise avant de s’y installer, retroussant ses manches par habitude. Le regard posé sur la carte : Le cocktail maison me tente bien. Il aurait pu se contenter d’une boisson chaude pour se réchauffer, mais après tout, pourquoi pas ? Il referme la carte, certain de son choix, et relève la tête vers Aingeal. Il ne pouvait pas le nier : tout en elle était resplendissant, de la racine de ses cheveux jusqu’à la pointe de ses pieds – du moins, il le devinait, puisqu’il ne s’était pas amusé à regarder sous la table. Ça va, tu n’as pas trop attendu ? C’était peut-être la première chose qu’il aurait pu dire en arrivant, mais sa maladresse en avait décidé autrement. Mais après tout, on le répète : il n’était pas en retard.

Ils sont rapidement rejoints par d’autres professeurs de l’école, de plusieurs générations, ce qui n’était pas plus mal finalement. Chacun pourrait apporter un petit plus et en équipe, ce sera bien plus solide. Lesley n’a pas été mal accueilli pour sa première année en tant que professeur, mais le fait d’avoir quelques connaissances l’avait aidé à s’adapter rapidement à son équipe. Le fait qu’il ait vécu à Poudlard pendant sept ans y était également pour quelque chose. Je prendrais également un thé s’il-vous-plait, un sourire sur les lèvres, ravi que quelqu’un avait pensé à ramener à manger, Lesley n’est pas Poufsouffle pour rien, n’est-ce pas ? Il ne se fait pas prier pour prendre un petit gâteau en remerciant son collègue d’un signe de tête chaleureux.

Je pense que ce qui leur ferait du bien, c’est un voyage, un beau voyage tu vois, se retrouver dans un endroit qui ne leur est pas familier pourrait resserrer certains liens. Évidemment, il sait que ce ne serait pas LA solution, mais ça pourrait y contribuer. Et puis il se proposerait pour accompagner, les voyages, il adore ça, ça lui libère l’esprit, même avec des adolescents qu’il faut canaliser. Lesley n’était pas s’en savoir que pour rapprocher les gens, il fallait les mettre dans un endroit neutre, où ils découvriraient les mêmes choses en même temps. Et tu peux évidemment compter sur moi si tu as besoin d’aide. Bowers sourit à la Serpentard pour sceller cette affirmation. Il aurait pu vouloir se montrer spectateur, aider de loin, le temps de bien connaître son job et tout le tralala, mais ce n’était pas sa façon d’être. Il avait besoin de se sentir utile et d’être présent en cas de besoin, d’autant plus que ce club ne pouvait qu’apporter du bien à l’école, sauf s’ils échouaient totalement. Il était même certain que des élèves se montreraient particulièrement enthousiastes à cette idée. Tout le monde n’aime pas le chaos et la compétition. En arrivant ici, en acceptant ce poste, il savait à quoi s’attendre, il savait que la réputation de l’école allait finir par subir ce capharnaüm. Il était hors de question qu’il les regarde faire sans rien faire. L’une de ses plus grandes qualités étaient sa force de persuasion, peut-être que ça lui servira là aussi.

Lesley observe les fléreurs se dégourdir les pattes après être restés adorables durant son cours. Le dernier élève venait de quitter l’enclos, et avec lui, l’agitation du cours. Il reste un instant immobile, les mains appuyées sur la barrière, laissant échapper un soupir qu’il ne s’était pas permis devant ses élèves. Ils sont bien mignons, mais particulièrement épuisants. Il aurait largement préféré qu'ils s'investissent en posant des questions sur le cours plutôt qu'en discutant entre-eux des bruits de couloirs. Ça avait valu quelques minutes de remontage de bretelles qu'il aurait préféré éviter.
Le ciel d’un gris profond pesait sur le parc de Poudlard, étouffant les bruits habituels du château. Le vent portait un air froid, mordant, mais vivifiant. Il relève le col de sa veste jaune, sentant l’humidité s’accrocher à ses joues. Il savait que la pluie n’était pas loin, mais il n’était pas pressé de regagner les murs de pierre. La faim l’y mènerait peut-être.

Les fléreurs, habitués à son silence, s’étaient étirés avant de somnoler, leurs grandes oreilles frémissant au moindre bruissement des feuilles mortes. Il sourit en les observant. Leur présence était un ancrage, un rappel qu’il était à sa place ici. Il n’en avait jamais réellement douté à vrai dire. Il avait eu une boule au creux de l’estomac durant les premiers jours, mais ça s’était dissipé. Il repense aux longues soirées passées à préparer ses cours, à parcourir la réserve de la bibliothèque, à échanger avec ses collègues. Il voulait faire plus que simplement enseigner. Il voulait laisser une trace, transmettre quelque chose qui resterait en eux bien après leur passage à Poudlard, notamment avec le WAC. Mais certains jours, le poids de cette ambition lui semblait écrasant, peut-être n’était-ce qu’une question d’adaptation ?

Il passe une main dans ses cheveux, fixant l’orée de la Forêt Interdite. Cet endroit avait toujours eu un effet apaisant sur lui. Loin de l’agitation des couloirs, loin des attentes implicites. Juste la nature et lui. Ce n’était pas pour rien qu’il avait choisi les créatures magiques.
Le vent se lève le faisant frissonner juste un peu, mais pas assez pour qu’il se décide à rentrer. Pour l’instant, simplement laisser sa tête se vider et se remplir d’énergie avant de la dépenser ailleurs à nouveau. Ce sera son automatisme désormais, son rituel de fin de journée.
 

Un léger haussement d’épaules avant de s’adosser au dossier de sa chaise. Si elle n’avait pas eu l’impression d’attendre une éternité, tout était parfait. Il n’était pas du genre à être en retard, mais il n’était pas non plus celui qui arrivait en avance. Toujours pile à l’heure, et c’était bien suffisant. Bien que dotée d’une grande patience – une de ses qualités –, attendre quelqu’un sans rien faire avait le don de lui faire taper du pied. Faire les cent pas, adresser des sourires polis – voire hypocrites – aux passants, ce n’était vraiment pas son truc. 

Ni trop sage, ni trop audacieux, c’est tout à fait moi, qu'il dit un sourire naissant aux commissures des lèvres. Il passe commande auprès d’un serveur avant de se tourner de nouveau vers Aingeal, les mains jointes devant lui, légèrement avancé sur la table. Son rire vibre face à la spontanéité de son interlocutrice. Tu n’y vas pas par quatre chemins. Et il appréciait cet aspect de sa personnalité. Pourquoi perdre du temps en banalités quand on pouvait aller droit au but ? Avait-il réellement un élève préféré ? En toute honnêteté, il avait quelques affinités avec certains, mais ne s’était jamais posé la question. C’est sans doute pour cette raison qu’il laisse planer un court silence, laissant le brouhaha alentour remplir l’espace. L'école n'est plus vraiment pareil, pourtant, elle me plaît. Il n’était pas arrivé sans être au courant des divers événements qui avaient secoué Poudlard : les élèves qui s’entretuaient, l’Obscurus, et tout ce qui aurait pu le faire hésiter en apprenant ces sombres histoires. Pourtant, il était là, plein d’espoir et d’envie de faire bouger les choses. Hors de question pour lui de rester les bras croisés et de détourner le regard. Je suis comme un caméléon, je m’adapte à la perfection.

En réalité, l'Ancien Poufsouffle ressentait le besoin de sortir d’un quotidien devenu trop morne, de cette solitude qui l’avait habité bien trop longtemps, qui lui avait fait perde tout ce qu'il était. Se consacrer entièrement à Poudlard lui avait permis de reprendre pied et de réapprendre à vivre par lui-même. Ça faisait un bien fou. Il prend un instant pour réfléchir avant de se pencher légèrement vers Aingeal, comme s’il s’apprêtait à lui confier un secret. J’aime autant les fortes têtes que les studieux, sa voix n'est plus qu'un murmure se fondant presque dans les conversations environnantes. Mais j’ai un plus pour la curiosité et l’avidité de savoir de la petite Howcraft. Et je ne dis pas ça parce qu’elle est de ma maison. Loin de lui l’idée de favoriser les Poufsouffle. Cela dit, j'apprécie aussi ceux qui tentent de me faire tourner en bourrique, c'est mon côté téméraire. Il rit de nouveau avant de se redresser pour laisser le serveur poser leurs boissons devant eux. Il n’avait pas réellement de favori, simplement des élèves qui se démarquaient plus que d’autres, qui lui rappelaient celui qu’il avait été à leur âge. Et la Professeure Aisling a-t-elle un favori après ce temps à enseigner ? 

Dans le même temps, une question naissait à l'intérieur de lui : était-elle réellement ici pour faire un bilan de mi-année ? Il n’y avait pas lieu de s’inquiéter de son intégration, il se sentait mieux ici qu’ailleurs. Et comment va la vie ? Il parlait de manière générale. Qu’avait-elle fait après Poudlard ? Ils ne s’étaient pas vraiment côtoyés à l’époque, mais il la connaissait malgré tout, un peu, à travers ce que son ex lui avait raconté d’elle. Il se souvenait encore du jour de la rentrée : apercevoir un visage familier l’avait tout de même quelque peu rassuré.

La célébration ne fut que de courte durée. Derrière les acclamations majoritaires et les quelques déceptions, se cache une atrocité que l'on ne voit pas encore, mais qui peut déjà s'entendre et se ressentir. Lesley ne traîne pas pour quitter le stade dans le but d'évacuer, comme tout le monde, avant qu'il n'y ait des blessés, voire pire. Mais ce qui s'offre à lui est bien pire que ce qu'il attendait. Lui qui pensait qu'une menace proférait sans action, il avait eu tort. L'attaque était déjà bien entamée, des sorcières et sorciers à terre, morts ou vivants, il n'en savait rien, mais son instinct lui intimait d'aider.
À quelques pas de lui, des membres du ministère et quelques supporters se dépêchaient de tenter de dissiper le feudeymon qui menacer du tout brûler sur son passage. Pendant un court instant, Lesley hésite à prendre part au sortilège, mais il fallait prendre soin de ceux qui avaient été touchés. Il s'approche, s'agenouille, vérifie que le pouls bat encore sur les personnes à proximité de lui.

Il entame son aide pour l'évacuation en relevant ceux qui semblaient hâte à se déplacer en premier lieu. Des hommes, des femmes, des enfants qui voulaient simplement profiter d'un événement tant attendu en cette belle soirée d'été. Allez, venez avec moi, il ne faut pas rester ici. Avec sa voix dure mais rassurante, il ne lui faut pas attendre longtemps pour que les pauvres blessés s'exécutent et s'accrochent à lui, et entre eux. La marche est difficile, mettre un pied devant l'autre n'a jamais parut si compliqué. Se faufiler entre les sorciers qui tentent - en vain souvent - de lancer le contre-sort du Feudeymon, éviter les sorciers paniqués qui ont perdu la tête, tout devient un véritable capharnaüm. Au loin, le jeune professeur aperçoit un autre groupe de sorciers en train d'en évacuer d'autres. Des médicomages sont déjà sur place pour aider ceux qui ne peuvent pas se déplacer, qui sont inconscients ou même pire encore. Parce que oui, bien que dotée d'un optimisme sans précédent, Lesley sait pertinemment qu'il y a des pertes ce soir, il ne veut même pas savoir le nombre exact. Pour le moment, sa seule préoccupation, c'est les autres.

Le cours venait tout juste de s’achever, marquant la fin de la matinée. Lesley allait enfin pouvoir profiter d’une pause bien méritée avant d’attaquer ses leçons de l’après-midi. Il savait que capter l’attention des élèves en fin de journée relevait souvent du défi, mais cela ne l’empêchait pas de redoubler d’efforts pour éveiller leur curiosité. Pour lui, l’apprentissage devait rester un plaisir, jamais une corvée. La leçon du matin, consacrée aux hippogriffes, avait visiblement suscité de l’intérêt. Certes, la partie théorique n’était jamais la plus palpitante - ça, il l'avait bien compris - mais elle restait essentielle pour préparer les élèves au jour où ils se retrouveraient face à l’une de ces créatures majestueuses.

Un léger soupir s’échappe de ses lèvres alors qu’il rassemblait ses affaires, déjà projeté vers le reste de la journée. Pourtant, un détail lui échappait encore. Une élève, restée discrètement en retrait, n’avait pas quitté la classe. Ce n’est que lorsqu’elle prend la parole qu’il s’aperçoit de sa présence. Son cœur a un sursaut, une légère accélération qu’il s’efforce de masquer pour ne pas la mettre mal à l’aise. À la place, il lui offre un sourire chaleureux, prêt à écouter ce qu’elle avait à lui dire. Et sa question accentue son sourire. Il y discerne une réelle curiosité, exactement ce qu’il recherchait lorsqu’il avait passé la porte de la salle de classe.

Intéressant. Il laisse quelques secondes dans le vent, le temps de ranger ses dernières affaires dans son sac. Amanda n’était pas l’élève la plus loquace de ses cours, mais elle avait le don d’attiser sa curiosité. Ses camarades étaient sans doute déjà passés à autre chose, mais elle, étirait encore les minutes pour satisfaire sa curiosité.
Il se tourne ensuite complètement vers elle, s’appuyant sur le bureau d’un geste détendu. D’un mouvement machinal, il relève les manches de sa chemise jaune avant de croiser les bras. Puisque vous en parlez, Amanda, je vous retourne la question : pensez-vous pouvoir grimper sur le dos d’un hippogriffe qui n’a aucune idée de qui vous êtes ? Il comprenait parfaitement cette impatience, cette envie de brûler les étapes. Comment vous vous y prendrez ? Après tout, lorsqu’une passion s’emparait d’eux, les jeunes sorciers faisaient souvent preuve d’un courage et d’une détermination remarquable. Mais face à une créature aussi fière et imprévisible qu’un hippogriffe, l’audace seule ne suffisait pas. Aussi, il attend une réponse concrète de la part de son élève, observant ses réactions avec curiosité. Comment comptait-elle s’y prendre, la prochaine fois, pour approcher et monter sur le dos de l’animal sans risquer de froisser son orgueil ?