Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Vestiaires du terrain de Quidditch, Jeudi 05 Octobre 2124 (
Message publié Samedi 09 Novembre 2024 à 15:03
)
Lyle avait serré les dents, mutique. Malgré l'inconfort - et l'humiliation - il s'était forcé à soutenir le regard furieux de Ryder. Un type sacrément impulsif, pour un Serpentard. Lyle avait glissé une main dans sa poche, au cas où il avait besoin de recourir à sa baguette, mais son interlocuteur se calma tout seul. Le Serdaigle se détendit sans quitter la porte que son dos semblait désormais soutenir. Pendant que l'autre poursuivait, Lyle prenait soin de remettre son col correctement. Il pinça les lèvres, et secoua la tête en un signe négatif.
- Au temps pour moi, j'ai cru que tu te servirais de tes neurones deux secondes pour autre chose que pour te défendre. J'aurais dû me douter qu'ils t'ont pas donné ce poste-là dans l'équipe pour rien, siffla-t-il.
Ce n'était pourtant pas dans ses habitudes de persifler comme un Serpentard, mais se laisser faire n'était pas non plus une option. Les Serdaigles avaient la réputation d'être doux, mais c'était sans compter qu'ils étaient souvent relativement individualistes, et Lyle faisaient parti de ceux-là. Après son col, il replaça correctement ses manches.
- Visiblement, tu as raison, je me suis trompé d'interlocuteur, c'est pas avec toi qu'on peut discuter des problèmes du Quidditch en ce moment.
Il essayait de garder un ton décontracté, mais le fait était qu'il avait été un peu bousculé par les actes de Ryder. Lyle se détacha de la porte, pour laisser le passage au Serpentard, non sans un regard sévère. Il sortit sa baguette pour déverrouiller silencieusement le loquet, et la porte s'ouvrit d'elle-même, grinçant légèrement.
- Je ne te retiens donc pas.
Lyle croisa les bras, baguette toujours en main. Mais avant que l'autre disparût, il ne put s'empêcher d'ajouter :
- Mais si tu veux être Capitaine un jour, va falloir apprendre à s'inquiéter de ce qui se passe dans ton équipe plutôt que de regarder uniquement le bout de ton propre manche.
Par la porte ouverte, la rumeur du vent chuintant sur l'herbe humide du terrain de Quidditch se fit entendre, chariant avec elle les conversations lointaines.
Finalement, en l'absence de Percy, Lyle n'avait probablement plus rien à voir avec les Serpentards.
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Dans les couloirs, Mardi 31 Octobre 2124 (
Message publié Vendredi 21 Février 2025 à 21:22
)
Si ça n'avait été parce que le deal était toujours en suspens, Sasha n'aurait certainement pas mis les pieds à la soirée d'Halloween. Tout le monde parlait de cet évènement depuis plus d'une semaine ; les filles spéculaient sur les plus belles tenues qui seraient portées, les garçons préparaient les farces les plus gores dont ils étaient capables. Et rien que d'entendre leurs conversations, le Gryffondor n'avait qu'une idée : disparaître loin de ces pelletées d'imbéciles.
Oui mais voilà, il y avait le deal. Alison ne l'avait pas brisé officiellement, et tant qu'il n'était pas officiellement terminé, Sasha s'était dit qu'il y avait encore une possibilité de le sauver. Après tout, vu les dernières séances en Potions, il se rendait bien compte qu'elle était sa seule chance de se rattraper dans cette matière-là : laissé sans binôme, il ratait tous ses mélanges : dosages imprécis, manque de délicatesse dans les rotations, feu trop attisé ; bref, il passait littéralement à côté des subtilités de l'art des potionnistes.
Bien sûr, c'était seulement pour cela qu'il voulait maintenir le deal.
Et peut-être un poil parce qu'il aurait l'air ridicule s'il était plaqué par une fille de cinquième année, et qu'il tenait à son honneur.
Mais rien d'autre.
Enfin, peut-être encore un petit peu aussi parce que Charlie l'avait chargé de surveiller Alison pour qu'elle ne fît rien de contraire à ce que son père aurait voulu, et qu'il aimait bien Charlie, il était donc logique qu'il tînt la promesse qu'il n'avait pas faite.
Mais c'était tout.
Et peut-être un tout petit peu quand même parce que, quand il s'était glissé entre les cuisses de la jeune fille, il avait senti toutes les possibilités que la proximité de leurs deux corps engendraient. La chaleur. La moiteur. La sensation de soif intense. L'envie d'être plus près. De sentir. De toucher. De goûter. De mordre.
A part ça, donc, c'était vraiment que pour le cours de potions.
Sasha s'était rendu tardivement à la soirée, histoire de ne pas être parmi les premiers. Il n'avait pas pris la peine de se déguiser : il n'en voyait pas l'intérêt. Les autres Gryffondors qui s'étaient maquillés s'étaient peinturlurés d'un faux sang qu'il ne trouvait même pas réaliste. Le vrai sang était plus visqueux, il dégoulinait partout sans que vous ne puissiez décider qu'il resterait là, sur une fausse coupure sur la tempe. Mais cela, les élèves de Poudlard ne pouvait pas le savoir.
Lorsqu'il s'était glissé dans la Grande Salle, il avait d'abord été époustouflé par les décorations : c'était sa première soirée officielle dans cette école, et il était resté bouche bée devant les énormes citrouilles qui volaient au-dessus d'eux, les fantômes qui dansaient en vire-voltant au milieu de la piste de danse, et les milliers de bougies aux flammes tressautantes, qui diffusaient une lueur chaude partout dans la pièce. Les buffets ne cessaient de se remplir de mets décorés de mille façons : bonbons en forme de mygales qui couraient véritablement sur les nappes, citrouilles ouvertes sur des vers et autres insectes grillés et salés, ou encore gâteaux à la crème de cerise qui dégoulinait comme du sang quand vous en découpiez une part. Ce fut bien évidemment par là que Sasha s'égara d'abord : pour une fois, davantage pour se donner contenance en mangeant et en buvant quelque chose que par véritablement faim.
Un long moment, il observa les groupes d'élèves qui s'amusaient en chahutant et en dansant, et il ne parvenait pas à trouver Alison. Peut-être qu'elle n'était pas venue, finalement. Son imagination galopa : elle s'était déjà éclipsée avec un autre garçon. Ou bien, elle avait rejoint les dortoirs parce qu'elle avait cru qu'elle ne viendrait pas.
Mais au bout d'un moment, à la faveur d'un rire qu'il reconnut à sa droite - un rire de la brochette - il scruta un groupe de filles et enfin, la reconnut. Alison était si méconnaissable qu'il laissa l'araignée qu'il avait saisie s'échapper d'entre ses doigts le temps de l'observer : ses longs cheveux roux étaient complètement blancs, son teint tout à fait pâle comme de la porcelaine et ses lèvres noires paraissaient plus charnues que d'ordinaire. Elle portait une jolie robe qui dénudait ses genoux, et - seule preuve qu'il s'agissait bien d'Alison - elle portait régulièrement ses doigts à sa frange blanche pour la replacer. Sasha fourra une poignée de vers grillés dans sa bouche sans détacher ses yeux de la silhouette monochrome.
Si la Serpentard l'avait remarqué, elle n'en montra jamais la moindre trace. Le projet qu'il avait conçu devant tout le monde s'était évanoui dans l'esprit de Sasha : il n'oserait jamais. Pas sans qu'elle lui eût donné au moins un signe qu'elle était heureuse de le voir. Et s'il faisait ça, et qu'il gâchait sa soirée ? Elle avait l'air de s'amuser. D'être heureuse.
Quand la soirée toucha à sa fin, il avait décidé de prendre son temps. Probablement de la suivre à distance jusqu'à ce qu'elle eût rejoint son dortoir, à la manière d'un chat qui aime bien observer, lascivement, la danse inatteignable mais élégante des poissons du fond du bassin.
Mais la brochette ne prît pas la direction des dortoirs, mais d'une aile du premier étage. Alors il prit lui aussi la direction de l'aile du premier étage, à distance. Pour une fois, le personnel de Poudlard avait décidé de lâcher un peu de bride, et se promener la nuit dans ces couloirs noirs lui changeaient des visites qu'il en avait fait sous forme animale : il avait l'impression de n'y rien voir, et les filles devant lui avaient fini par se mettre à courir en criant, effrayée par il ne savait quoi.
Il risquait de perdre sa trace.
A l'angle d'un couloir sombre, Sasha changea de forme. Ses pattes légères se mirent à trotter silencieusement sur la pierre froide. La vue lui revenait : les angles de couloirs se dessinaient nettement, et surtout les odeurs lui parvenaient subitement. La poussière. Là, la trace olfactive de quelques rongeurs qui profitaient de la faible présence humaine dans l'aile défendue. Mais surtout, les humaines qui étaient passées par là.
Sasha reconnaissait désormais sans peine l'odeur d'Alison maintenant qu'il l'avait approchée de si près. Sous sa forme animale, il en avait une perception plus précise ; il s'y mélangeait les effluves des produits qu'elle utilisait à des odeurs sécrétées plus naturellement par sa peau, exhalée par sa respiration. C'était une signature et son odorat avait été entraîné à cela : repérer sa trace n'en était que plus aisée.
Or, Alison s'éloignait de son groupe d'amies. Il la suivit. Un autre garçon aussi. Sasha l'effraya aisément à l'angle d'un couloir : un Poufsouffle de cinquième année qui crût voir le fantôme d'un molosse et qui détala en faisant demi-tour, en prenant ses jambes à son cou. Très bien.
Au bout d'un moment, Alison s'était égarée. Prévisible. Les Carter s'égaraient-elles toutes si aisément ?
- Devine.
Il avait repris forme humaine, et quand Alison se retourna, elle se retrouva face à lui : si près qu'elle faillit le percuter, mais il ne bougea pas. Dans la pénombre, ils se devinaient seulement l'un et l'autre, grâce à la Lune qui éclairaient le parc, laissant transparaître quelques rayons blancs par les hautes fenêtres du couloir voisin.
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Devant et dans la salle de potions, Jeudi 21 Septembre 2124 (
Message publié Samedi 09 Novembre 2024 à 16:00
)
Sasha ouvrit grand les yeux, fixant l'emplacement vide où s'était tenu, l'instant précédent, un chaudron plein d'un liquide rose. Alison n'eut pas l'air tant affolée que ça, passant déjà à l'étape suivante qui consistait... A remplacer le chaudron par un autre. Il la regarda faire, hébété, jusqu'à être interrompu par le professeur.
Ca, il s'y était attendu. Sasha fronça le nez, se consolant de la vision tout de même satisfaisante de voir le Serpentard qui couinait toujours s'échapper vers l'infirmerie avec, même, une aide pour trouver son chemin. Ces anglais, c'étaient de vraies fillettes. Certes, c'était un cours raté, il en avait bien conscience, mais ce serait aussi désormais clair pour les cinquième années qu'il n'était pas de bon ton de venir se frotter à lui - et encore moins de le désigner comme un Russe.
Pendant le petit tour que le professeur fit réaliser à Alison, Sasha resta silencieux, la regardant exécuter le petit numéro, non sans une pointe de peine pour elle : probablement qu'il y était pour quelque chose dans le sort qu'elle était en train de subir. En ce qui le concernait, il ne se sentait pas plus que cela humilié : des sanctions idiotes, il en avait vécues d'autres, et des bien pires que celles-ci. Alors il s'exécuta, non sans un dernier coup d'oeil d'avertissement aux deux Serpentards devant lui qui avaient le bon goût, cette fois, de rester silencieux.
Regarder la pierre sombre et froide des cachots, les mains sur la tête et pendant près d'une heure, c'était certes long. Mais Sasha prenait l'exercice plutôt tranquillement : il avait glissé ses doigts les uns dans les autres, pour maintenir sans efforts ses paumes sur ses cheveux, et par moments ses yeux se fermaient, presque somnolent, et il était obligé régulièrement de prendre une grande inspiration pour se réveiller, histoire de ne pas risquer de faiblir et s'endormir sur place. C'était le genre d'exercice qui lui rappelait un peu ceux, stupides, qu'on lui faisait parfois faire pendant son entraînement, quand il s'était engagé auprès des Veilleurs : attendre immobile dans un bain d'eau froide, tenir suspendu par les mains à une échelle le plus longtemps possible, et toutes ces joyeusetés qu'ils avaient tant critiqué avec les camarades qui avaient eu la même idée folle que lui : s'engager beaucoup trop tôt dans leur vie. Il lui venait de ces souvenirs une drôle de nostalgie. Aussi, même s'il glissait de temps à autre un regard vers Alison, le temps passa pour lui visiblement plus vite que pour elle : il devinait dans ses traits la consternation et la rougeur, si bien qu'à un moment, il crut même qu'elle allait abandonner. Pourrait-elle faire une chose stupide et faible, comme se retourner et se mettre à pleurer que ce n'était pas elle, mais lui qui était à l'origine de tous leurs problèmes ?
Sasha regarda le mur, avant de jeter de nouveau un coup d'oeil vers Alison. Cette fois-ci, il la regarda longtemps, attendant patiemment le moment où elle jetterait elle aussi un regard vers lui. Au bout d'un moment, cela arriva effectivement. Leurs regards se croisèrent, et Sasha se rendit compte qu'il ne savait pas comment l'encourager : l'expression de son visage resta figé. Il se contenta de soutenir le regard de la jeune fille, de la façon la plus neutre possible, pour qu'elle ne détournât pas immédiatement ses propres yeux. Alors, il bougea lentement le poignet : le reflet de sa montre dessina une tâche qui courut vers Alison, qui s'éloigna aussitôt. Il recommença en suivant la tâche du regard, pour qu'elle en fît autant. Est-ce qu'elle l'avait enfin vue ? Il haussa les sourcils en une question.
Puis, comme elle fronçait les siens mais qu'elle avait suivi des yeux la tâche dorée qui courait sur la pierre, il actionna de nouveau son poignet. Une longue fois, puis deux fois plus rapidement. Trois fois rapidement. Une fois rapidement, une fois longue, deux fois rapidement.
Il savait bien qu'il n'avait aucune chance qu'elle comprît ce qu'il était en train de faire. Mais enfin, ça l'occupait. L'heure d'attente était presque terminée.
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Bibliothèque de Poudlard, Vendredi 15 Septembre 2124 (
Message publié Dimanche 10 Novembre 2024 à 13:48
)
Avec lenteur, Lyle redressa la tête et referma le livre. Cette fois-ci, sans retenir la page d'un index impatient.
- Mh-mh, avait-il seulement émis.
Il croisa les bras sur sa poitrine pour se laisser aller contre le dossier de sa chaise, ses yeux gris épiant avec plus d'intérêt la jeune femme devant lui. Il avait une envie subite d'envoyer un courrier à Oswald, de lui demander si la maison Valcourt était si importante que cela à soigner dans ses relations - il le ferait peut-être, un peu plus tard. Il y avait tout de même de fortes chances qu'elle bluffât : les Serpentards étaient bien connus pour cela. Il l'écouta tout de même attentivement. Elle avait l'air de savoir parfaitement ce qu'elle faisait et pour son âge, ce qui l'impressionnait.
Puis il s'installa un silence. Lyle posa doucement les yeux sur la couverture du livre ("Incendia Sempiterna : L'Essence des Feudeymons et des Feux Envoûtés" par Margaret Drockfuss, deuxième édition) avant de revenir à son observation de la jeune femme. Il laissait à dessein le temps s'écouler, installer entre eux un malaise palpable - mais qu'ils étaient bien capables de tous les deux supporter, ce qui en disait long sur leurs caractères respectifs : deux prédateurs, prêts à patienter longuement pour saisir l'instant précis.
Un sourire en coin éclaira discrètement le visage de Lyle.
- C'est un livre pour lequel il faut une autorisation spéciale, expliqua-t-il d'une voix calme. J'ai accès à la réserve grâce à la lettre de recommandation de mon directeur de maison - un privilège que lui enviait un certain nombre de ses camarades aux écharpes bleues et bronzes.
Pourtant, il ne montra pas signe d'une fierté quelconque ; comme s'il n'en avait pas besoin. Tout parlait déjà pour lui : sa tenue, cet accès, ses plans pour le futur, sa tranquillité d'esprit.
- J'ai très bien vu ce que tu viens de faire, finit-il par ajouter dans ce silence qui s'étirait entre les rangées d'étagères comme un serpent silencieux, inquiétant. Il va falloir revoir tes techniques pour être un peu plus élégamment manipulatrice : évidemment que rencontrer LordOldmore m'intéresse.
Gary Oldmore n'était nul autre que l'Ambassadeur de la Magie Britannique à Paris. Lyle connaissait les noms de la plupart des ambassadeurs, en tout cas dans les grands pays qui comptaient. Souvent issus de familles nobles - et Oldmore ne faisait pas exception - il était particulièrement difficile de se rapprocher de leurs cercles privés : généralement, cela se faisait soit par le sang, soit par de hautes fonctions administratives. Les Sorensen n'étaient pas exactement de l'aristocratie britannique, à cause de leurs origines nordiques, mais ils avaient bâti une réputation - ou plutôt, Oswald avait bâti cette réputation à partir de sa carrière brillante, qui rejaillissait sur Lyle. Mais serait-ce suffisant pour atteindre Oldmore ; Lyle en doutait.
Il s'humecta délicatement les lèvres, avant de croiser les mains sur le livre qui avait attiré l'attention de Viviane : inutile qu'elle continuât à s'intéresser à cette couverture.
- Tu as toute mon attention. Quel service puis-je te rendre pour être introduit auprès de... Gary, comme tu l'appelles si familièrement ? Si ça te fait plaisir que je porte un costume, pourquoi pas. Mais réfléchis bien ; je ne suis pas sûr que ce soit à cet endroit que je te serai le plus utile. Mais si c'est ça que tu veux...
Il avait parlé avec la bienveillance de celui qui joue aux échecs contre quelqu'un de moins expérimenté.
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Au fond du couloir du troisième étage, à droite après la salle d'Histoire de la Magie, Lundi 18 Septembre 2124 (
Message publié Samedi 16 Novembre 2024 à 13:18
)
Katherine avait croisé les mains devant elle, sur le bureau. Ses doigts s'entrelaçaient au-dessus d'un dossier dont la couverture indiquait le nom de l'enfant. Absorbée par son observation méticuleuse du russe, elle avait plissé les yeux, le buste légèrement en avant.
Certes, l'attitude de Nikolaï Polyanski était irréprochable. S'il se montrait toujours aussi obéissant et direct, il serait en effet un sujet d'étude qui ne l'agacerait guère. Pourtant, le doute et la méfiance devaient subsister : il avait visiblement subi un endoctrinement profond et même avec le sceau, on n'était pas à l'abri qu'il utilisât tout simplement ce qu'il avait sous la main pour faire rendre gorge à qui que ce fût qu'il jugerait comme du camp ennemi. Et un meurtre entre enfants issus de la guerre à Poudlard, cela ferait tâche pour le Ministère de la Magie.
Aux précautions qu'elle envisagerait de prendre à ce sujet, elle entendait déjà geindre ses collègues ("Oh Kate, ce n'est qu'un enfant !") mais Madame Dennison en avait vu d'autres, des enfants : les camps qu'elle avait vus pendant son séjour à Kaboul, certes remplis de bambins moldus, l'avait définitivement convaincu qu'on pouvait facilement endoctriner un enfant pour aller se faire exploser en mille morceaux sur le parvis d'un aéroport à l'autre bout du monde. Alors, que pouvait-on faire avec un enfant sorcier ?
Katherine acquiesça avec lenteur aux propos du garçon, mais elle n'avait pu empêcher une légère grimace.
- Votre anglais est très mauvais, remarqua-t-elle de sa voix sèche. Nous devrons travailler cela ensemble à l'oral et à l'écrit. Je parle Russe moi-même, aussi je pourrais vous aider si vous cherchez vos mots. Je vous aiderai d'ailleurs chaque soir à faire vos devoirs afin que vous amélioriez vos résultats rapidement.
Tout en parlant, Katherine avait ouvert le dossier sous ses doigts. A l'intérieur, seulement des pages vides d'un papier de parchemin fin, élégant. La femme s'empara d'une plume dans un pot à plume et en trempa la pointe dans un pot d'encre.
Botanique : médiocre, Vol : médiocre, Anglais et toutes les autres matières : catastrophique, écrivit-elle d'une petite écriture serrée.
- Je regarderai ensuite. D'abord, j'ai d'autres questions et quelques recommandations, monsieur Polyanski.
Elle n'avait en effet pas un intérêt particulier pour le sceau qui avait été appliqué à Nikolaï. Comme ce n'était pas son travail, elle le trouverait mal fait de toutes les façons. Autant remettre cette insatisfaction à plus tard.
A la place, elle poursuivit :
- Parlez-vous d'autres langues que le russe et l'anglais ? Des dialectes, par exemple. Savez-vous correctement lire des cartes ? Seriez-vous capable de me montrer, par exemple, d'où vous venez sur une carte de la Russie ? Ou bien d'identifier des lieux précis par lesquels vous seriez passé avant d'arriver ici ?
Certainement que le Ministère désapprouverait un tel interrogatoire, si tôt dans l'année. Katherine n'avait pas de temps à perdre, cela étant dit. A mesure qu'il répondait, elle notait soigneusement ses réponses et parfois des commentaires de son propre cru.
- Nourrissez-vous quelconque sentiment de colère, de haine, ou d'autres émotions fortes à l'égard des personnes que vous rencontrez à l'école, monsieur Polyanski ?
Chaque fois qu'elle s'interrompait dans l'écriture, elle relevait vers l'enfant des yeux perçants, comme pour lire les expressions de son visage : mais le russe était aussi imperméable qu'une vitre blindée. Elle se pencha un peu plus, pour poursuivre à voix moins forte, mais parfaitement intelligible tant elle prenait soin de détacher correctement ses mots.
- Nourrissez-vous quelconque sentiment de colère, de déception, ou de tristesse à l'égard de souvenirs récents ou anciens, qui vous reviendraient en mémoire ? La nuit, par exemple ? Vous arrive-t-il d'être pris de pulsions de violence ? D'avoir une forte envie subite de faire du mal à quelqu'un, même à vous-même ?
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Serre n•2, Lundi 02 Octobre 2124 (
Message publié Vendredi 27 Décembre 2024 à 10:39
)
- Croire à quoi ? il avait demandé bêtement.
Sasha avait baissé les yeux sur le jeu de mains rapide d'Alison qui arrangeait sa cravate, un peu déçu de ne pas avoir droit à une nouvelle séance de respiration guidée. Evidemment, les yeux et les commentaires des autres Serpentards les accompagnaient dans chacun de leurs mouvements. Sasha ne s'expliquait pas la fascination que le groupe de 5ème années avait pour le couple fallacieux qu'ils formaient, Alison et lui. S'il s'était dit les premiers jours que ce n'était qu'un jeu d'adolescents curieux des intrigues amoureuses - à défaut d'avoir plus intéressant avec quoi s'occuper - désormais plus le temps passait, et plus il avait l'impression que l'attention qu'on leur portait devenait une obsession. Un peu comme quand les copains et lui avaient vu Dmitri manger un escargot à l'école quand il était petit : de camarade un peu bizarre, il était vite devenu le bouc émissaire de la classe et les efforts de tous les autres élèves pour l'humilier histoire d'être en haut de la hiérarchie sociale. Ces drôles de souvenirs lui semblaient émerger d'un autre monde, d'une autre vie ancienne et partiellement oubliée. Toujours était-il que l'attention croissante des Serpentards envers leur binôme l'inquiétait plus qu'il ne voulait l'admettre.
Alors, quand Alison soudain frôla son pantalon de sa main avant de s'accroupir jusqu'à disparaître sous leur plan de travail, Sasha sentit soudain son corps s'engourdir d'une paralysie étrange. Ses yeux s'arrondirent et il eut l'air tout aussi étonné que ceux qui les regardaient. Certes il fallait donner le change : il lui traversa l'esprit qu'il pouvait sourire histoire de crâner, mais ça n'aurait certainement pas l'air naturel dans l'état où il était. Alors il serra les dents en renvoyant des regards courroucés, priant pour qu'Alison se relevât le plus vite possible. Heureusement, l'arrivée de la professeure détourna l'attention et il se sentit soulagé quand la rousse réapparut à ses côté. Pendant qu'elle déplaçait ici et là des galets, lui se chargea de lui en faire passer d'autres, non sans sentir une tension confuse dans tout son corps. Il déglutit.
- Des p'tits noms, c'est vraiment ça qui compte pour toi là maintenant ?
Il avait grondé à voix basse, les mâchoires serrées et les sourcils froncés, tout en jetant des regards autour d'eux, dissuasifs, à l'attention de quiconque s'intéressait à leur conversation. Les odeurs des orchidées, même encore au stade de boutons, diffusaient des odeurs douces et florales, dont s'enchantaient les filles du premier rang avec force d'exclamations joviales. Sasha profitait du brouhaha général pour poursuivre, jetant ses mots en direction de l'épaule d'Alison, qu'il surplombait.
- Tu nous fais trop remarquer, poursuivit-il d'un ton péremptoire.
Non, il n'était pas détendu du tout.
Il ne voyait pas le visage de la jeune femme, mais seulement ses cheveux qui dansaient à quelques centimètres de lui tandis qu'elle composait un premier nid, formant un cercle avec des pierres autour de la plante à l'étiquette Honey. La rousseur lumineuse et l'odeur d'un shampooing féminin lui parurent familières. Charlie piquait-elle parfois les cosmétiques d'Alison ?
- Qu'est-ce qu'il dirait ton père s'il te voyait, hein, bougonna-t-il, espérant faire mouche, cette fois.
Sûrement qu'il dirait qu'elle ne devait pas traîner avec des animaux de son espèce, en premier lieu. Mais ce n'était pas lui qui forçait Alison à avoir un tel comportement. Et en l'absence du père en question, n'était-ce pas lui qui devait la rappeler à l'ordre ?
Il soupira, un instant soulagé de sentir la tension qui s'évaporait de son corps, le laissant plus à même de lui aussi construire un second nid à côté du premier, qui ressembla vite à une forteresse. La professeure était passée devant eux, posant les yeux sur leurs premières réalisations. Au soulagement de Sasha, elle ne trouva pour le moment rien à redire à leurs premiers gestes et elle s'éloigna. Le Gryffondor put reprendre ses messes basses.
- Au fait, souffla-t-il. J'vais avoir besoin d'un petit service.
Il croisa le regard irrité d'Alison. Pas favorable.
- Enfin pas vraiment un service. C'est juste ; si quelqu'un te demande, un professeur ou quoi. Tu peux dire que je viens te voir la nuit des fois ?
Il tâcha d'avoir l'air neutre. D'avoir une voix parfaitement innocente. Ce n'était qu'une formalité. Ou, enfin, elle devrait le croire.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Bibliothèque de Poudlard, Vendredi 15 Septembre 2124 (
Message publié Dimanche 17 Novembre 2024 à 19:45
)
Tout en l'écoutant, Lyle détaillait le visage de la jeune femme. Il n'arrivait pas à se décider pour savoir s'il la trouvait ou non jolie : d'un côté elle avait les traits fins et élégants de bonne famille : une bouche parfaitement dessinée, des yeux maquillés avec discrétion mais délicatesse, des cheveux dociles. D'une certaine manière, elle renvoyait le même genre d'image que lui : soigné, appartenant à une classe sociale élevée. Mais d'un autre côté, quelque chose chez elle lui semblait désagréable : ce nez fin lui donnait une attitude hautaine, les mimiques qui agitaient le sourire de la jeune fille trahissaient des cachotteries qu'il ne parvenait à déchiffrer : était-elle seulement embarrassée ou bien jouait-elle un autre jeu ?
Si le trouble se lut un instant dans les yeux gris habituellement sans vie de Lyle, il se reprit rapidement en croisant les bras sur sa poitrine, se laissant aller sur son dossier de nouveau, comme s'il se laissait le temps de la réflexion. Alors même que c'était tout décidé : il ne pouvait laisser passer une opportunité de cette ampleur.
Il finit par acquiescer avec lenteur.
- Ca m'a l'air d'un deal équitable, en effet.
Pourquoi une gamine comme elle cacherait-elle quoique ce fut de dangereux pour lui ? Il ne lui servirait à rien d'être paranoïaque avant l'heure. Ce n'était qu'une enfant qui faisait un caprice auprès de sa famille pour être prise en photo avec le beau garçon de l'école. Lyle n'ignorait certainement pas les regards qui pesaient sur lui depuis la sixième année, quand il avait subitement grandi et qu'on se visage était devenu si angulaire. En quelques mois à peine, même sa voix avait changé, ce à quoi il n'avait guère prêté attention - au départ en tout cas. Car bien vite, ses yeux n'avaient plus cessé de surprendre des regards féminins. Quelques unes de ses amies de Serdaigle avaient commencé à bafouiller à son contact et progressivement, s'étaient éloignées de lui. Un bien étrange phénomène ; et comment pouvait-on en vouloir à Viviane Valcourt d'y succomber elle aussi ?
En d'autres circonstances, il l'aurait méprisée pour un tel enfantillage de gosse trop gâtée, mais on ne pouvait mépriser une famille qui lui proposait de déjeuner avec Lord Oldmore - il ne pouvait pas se décider, dans sa tête, à l'appeler lui aussi Gary, c'était beaucoup trop familier - et il n'avait eu aucun problème de conscience à mettre de côté ses jugements habituels pour accorder cette faveur pour être dans les bonnes grâces de l'Ambassade britannique, à Paris.
- Tout me paraît limpide, annonça-t-il avec tranquillité ; même si ce n'était pas tout à fait vrai.
Il avait une chose qui le chiffonnait : était-il possible que le lieu du shooting soit une pure coïncidence, ou bien bluffait-elle dans l'espoir de le faire venir. Un instant les yeux de Lyle se durcirent et ses sourcils blonds se froncèrent, vaguement menaçants.
- Je veux être informé de tout changement de programme avant notre départ, afin de pouvoir me rétracter si les conditions de notre deal ne sont pas respectées.
Lyle ajouta rapidement un sourire qui adoucit son visage, à dessein.
- Mais je dis ça juste au cas où, je te fais confiance, bien sûr.
C'était bien connu : on pouvait toujours se fier, de façon aveugle, aux Serpentards.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 27 Novembre 2024 à 17:01
)
Sasha bouscula un élève, puis un autre, tenant la pochette serré contre sa poitrine. Le souffle court, il détalait à toute allure. Ses jambes avalèrent, quatre à quatre, les escaliers qui conduisaient au rez-de-chaussée, puis ses baskets crissèrent au sol tandis qu'il dérapait vers la sortie.
Un grand saut pour passer les dernières marches qui amenaient au parc, et il atterrit dans les gravillons en faisant peur à une nuée de pigeons ainsi qu'un autre groupe d'élèves. Dehors, un vent désagréable cingla son visage, mais Sasha ne ralentit pas pour autant. Il changeait irrégulièrement de direction, pour éviter un sort qui aurait pu le mettre à terre - car cette garce l'avait poursuivi jusqu'ici.
Sur le moment, il avait cru qu'elle abandonnerait, mais les insultes pleuvant dans son dos lui avaient indiqué le contraire, à sa grande surprise. Après tout, ce n'étaient que de simples numéros d'un journal dont les autres Russes avaient certainement la copie, qu'il avait volé. Pourquoi s'acharnait-elle autant, sinon pour le plaisir de se faire la peau d'un Ukrainien ? Il ne pouvait pas lui en vouloir ; si un Russe lui en avait fait autant, il se serait peut-être battu avec la même hargne.
Sasha emprunta un sentier entre deux bosquets - il se rapprochait dangereusement de la Forêt Interdite, mais il en avait bien moins peur que les autres élèves. Anya Nikitovna oserait-elle le suivre dans un environnement si imprévisible ? Ils en étaient encore à une cinquantaine de mètres toutefois, au moins.
Sur un tronc à sa gauche éclata soudain un morceau d'écorce percuté par un sortilège, et Sasha eut un hoquet de stupeur. Par réflexe, il fit un détour dans la direction opposée. Ses jambes le portaient par cette espèce de réflexe automatique de la fuite, l'adrénaline faisant battre à ses tempes un flot de sang ravageur - et étrangement, c'était à la fois terrassant et bon.
Mais il ne pouvait pas se permettre de perdre les documents qu'il gardait désormais jalousement contre lui. Il ne voulait pas faire de mal à Anya, au fond : elle n'avait pas elle-même participé à la guerre, elle en était bien trop loin, comme une bonne petite fille Russe tenue loin du combat. Elle l'avait dit elle-même. En revanche, ce qu'elle détenait était beaucoup trop important pour lui - et si son pays lui envoyait de l'argent, elle n'aurait qu'à se payer une deuxième édition du dernier numéro si elle y tenait tant.
Alors, dès qu'il passa devant le gros tas de bûches de bois que conservait près du bosquet le garde-chasse, Sasha osa un instant ralentir et se retourner.
- Padasno !s'écria Sasha - la version slave du sortilège de Descente.
De sa baguette jaillit un rapide trait bleu qui vint percuter la montagne de bois. Celle-ci s'écroula à moitié, les bûches roulant subitement entre Sasha et Anya pour entraver la course de cette dernière. Ce n'était certes pas suffisant pour blesser la Russe, mais cela faisait gagner quelques précieuses secondes à Sasha maintenant qu'elle devait ralentir et contourner cet obstacle.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Devant et dans la salle de potions, Jeudi 21 Septembre 2124 (
Message publié Mercredi 20 Novembre 2024 à 20:39
)
Devant le professeur, Sasha était plutôt serein. Les enseignants de Poudlard avaient les punitions légères à son goût. Certes, il n'aimait pas le regard des autres et les humiliations ; mais cette fois-ci, avoir emporté avec lui le nez d'un autre garçon compensait suffisamment pour qu'il se sentît plutôt tranquille face à Mister Brooks. Il jetait de temps à autre un coup d'oeil vers Alison. Elle avait le nez et le blanc des yeux rouges. Est-ce qu'elle avait vraiment pleuré pour une simple punition ?
Sasha évita de lever les yeux au ciel et se reconcentra sur le professeur. Il avait mis ses mains dans ses poches. Lui aussi avait mal aux bras, aux épaules en particulier, mais Veles irait tondre les nuages le jour où il l'admettrait.
- Ok, Sir, fut le seul commentaire de Sasha à l'attention de Brooks - et lorsque ce dernier leur indiqua la porte, il en prit la direction à la suite d'Alison d'un pas tranquille.
Le couloir froid qui courait entre les cachots les accueillit d'un silence lugubre. Les flammes qui ornaient régulièrement la pierre pour maintenir une luminosité tamisée ne parvenaient pas à chasser l'humidité et l'austérité des lieux. Alison avait le pas vif - à cause du froid ou d'autre chose, qu'en savait-il ?
Sasha pressa le pas pour ne pas se laisser distancer. Accéléra même jusqu'à la dépasser un peu, histoire de pouvoir lui parler tout en jetant des coups d'oeil vers son visage fermé - si c'était possible. Il ne savait pas pourquoi, mais ces rougeurs autour des traits juvéniles d'Alison attiraient son regard d'une manière insolite. Comme lorsqu'on voit, pour la première fois, une chenille aux couleurs fluorescentes : anormale, repoussant et fascinant à la fois. Sauf qu'il ne pouvait décemment pas la scruter de façon trop évidente. De toutes façons, les lueurs vacillantes des cachots ne lui permettaient pas, comme dans la salle de classe, d'apercevoir les détails qu'il avait entrevus plus tôt.
- T'as dit qu'il fallait que je m'assois pour manger avec toi des fois. Je fais ça maintenant ou il faut pas ?
Il avait toujours ses mains dans ses poches. Sasha ralentit soudain l'allure, fronçant le nez à la vue de ce qui les attendaient en haut d'une volée d'escaliers censée les ramener dans le hall : la brochette était là, attendant patiemment le dernier petit morceau au caramel qui la complèterait.
(Il faisait faim. Il fallait dire qu'au bout des cachots, à droite avant l'escalier, il y avait le chemin qui conduisait aux cuisines, et il remontait par le couloir une odeur de jambon grillé qui lui tordit l'estomac. Il en aurait jappé d'envie, mais ça n'aurait pas été correct.)
Sasha avait ralenti plus encore : les morceaux de viande s'étaient toutes retournées pour scruter leur arrivée avec force de chuchotements scandalisés, qu'elles cachaient mal derrière leurs petites mains délicates. Le Gryffondor ne put s'empêcher de glisser plus près d'Alison pour parler à voix basse.
- Tu devrais pas leur montrer que t'as pleuré, il gronda doucement, comme s'il n'avait pas eu besoin de bouger les lèvres pour s'exprimer, comme un ronronnement à peine perceptible dans l'allée des cachots.
Puis, comme on aurait refermé la visière d'une armure pour être mieux protégé, Sasha enfonça ses mains encore plus profondément dans ses poches et carra les épaules, y rentrant légèrement la tête, le visage fermé. La grande blonde le regardait avec une lèvre légèrement soulevée par la répugnance et pour lui signaler qu'il avait remarqué cette déformation disgracieuse de son visage, Sasha la fusilla du regard en s'arrêtant au bas des marches.
Il attendrait qu'Alison débutât l'ascension avant de suivre. Hors de question de s'approcher de ce chapelet-là de bonne volonté.
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Devant et dans la salle de potions, Jeudi 21 Septembre 2124 (
Message publié Samedi 23 Novembre 2024 à 14:48
)
Passée la surprise et le léger sursaut dû à l'assaut d'Alison dans sa poche, Sasha avait eu l'impression que la main de la Serpentard était minuscule dans la sienne. Il n'osait plus vraiment bouger. Avait-il toujours les doigts aussi moites ? Est-ce qu'elle tremblait ou il se faisait des films ? Tant d'émotion pour une simple retenue, vraiment, Sasha se demandait dans quel genre d'univers enchanté Alison avait pu grandir pour être autant bousculée pour si peu.
Devant les filles, il resta aussi silencieux et morne qu'une bûche de bois devant la cheminée, comme s'il n'avait d'autre possibilité que d'attendre son destin fatal. Sa seule réaction fut de décocher lentement un regard vers Alison après le mot sauvage.
Heureusement, cette dernière emporta le Gryffondor avant qu'il n'eût le temps de dire quoique ce fut, parce qu'enfin une émotion pouvait se lire sur son visage : malgré le baiser (hypocrite) qu'il venait de recevoir, une surprise catastrophée, ou quelque chose de ce goût, avait agrandi ses yeux et entrouvert ses lèvres. Comment ça, on n'a pas faim ?!
Bougon, Sasha suivit néanmoins la jeune fille, le coeur déchiré à chaque mètre qui s'ajoutait inéluctablement entre lui et les tranches de jambon grillé qu'il comptait empiler dans son assiette.
- Ben j'espère qu'il va en rester, maugréa-t-il.
Alison gardait sa main dans la sienne, un peu bizarrement. Et le silence qu'ils se traînèrent jusqu'à l'angle du couloir lui sembla inconfortable - tandis que son cerveau, lui, traitait avec lenteur les informations qu'Alison avait donné à ses amies. Quand elle lâcha sa main subitement, il fit disparaître la sienne rapidement pour la remettre à sa place : dans sa poche, où on ne pourrait plus la voir. Il haussa les épaules.
- Ben maintenant tu sais, il grommela, renfrogné. Pourquoi, ça change quelque chose ?
C'était correct de faire semblant de sortir avec un Russe, mais pas un Ukrainien ? semblèrent brûler d'ajouter ses prunelles susceptibles ; mais en face, Sasha rencontra surtout une parfaite indifférence. Savait-elle au moins ce qui existait en dehors de son Royaume ? Autant laisser tomber.
Elle était prête à partir, de toute façon. Pour sa part, il resta planté là, interdit.
Silence.
- Que vingt minutes ? Ca fait pas un peu...
Ses yeux allèrent de droite à gauche, comme si c'était évident. Visiblement, ça ne l'était pas. Il baissa la voix pour poursuivre.
- ... Un peu bâclé, quoi ?
Le crépitement des torches qui bordaient le couloir meublèrent le silence suivant. Une série de cavaliers et leurs cheveux trottaient dans un tableau au-dessus de leurs têtes, passant et repassant entre des champs jaunis par les blés, le cliquetis des armures lointaines couvrant ici la rumeur des élèves qui s'entassaient dans la Grande Salle pour dévorer les plats.
Le visage de Sasha s'illumina.
- Je vais aller directement aux cuisines, il dit comme s'il avait eu une révélation. On n'a qu'à manger là-bas, comme ça on peut prendre le temps, ça les laissera s'imaginer quelque chose d'un peu moins... un peu moins...
Merde, le mot lui venait pas. Le seul mot qui lui venait était celui qu'elle avait prononcé elle-même : sauvage. Mais ce n'était pas ça qu'il cherchait.
- Un peu moins... Tu vois quoi.
De toute évidence elle ne voyait pas, parce qu'Alison voyait des choses qui n'existaient pas dans son monde à lui, et inversement. Comme par exemple des choses pour lesquelles il était perpétuellement coupable et dont lui n'avait jamais entendu parler. Il perdit patience.
- Ben sale, quoi !
Le cliquetis des armures s'apaisa : le commandant en chef des armées avait décidé d'une halte. Les soldats attendaient dans le silence, leurs drapeaux flottant au vent, et le silence sembla incongru au Gryffondor qui fit claquer sa langue sur son palais. Leurs conversations de sourd ne lui semblaient qu'être une preuve supplémentaire, s'il en fallait une, qu'ils ne pouvaient pas se comprendre.
- Enfin moi j'm'en fous après tout, puis au pire ça entretiendra ta réputation exotique de te taper un sauvage, hein. Donc tu fais comme tu veux, moi j'vais chercher quelque chose à me mettre sous la dent.
Sans autre forme de procès, Sasha tourna les talons et s'éloigna dans une autre de ces longues galeries de Poudlard, au décor enchanteur. Poudlard était un drôle de labyrinthe dont il avait fini par comprendre le plan principal, mais où il subsistait tout un tas de recoins qui n'attendaient que d'être explorés. Il avait d'ailleurs entendu dire qu'on pouvait atteindre les cuisines par les deux entrées des cachots, de part et d'autre des couloirs qui encerclaient la Grande Salle. Même s'il ne trouvait pas de quoi manger tranquillement, cette exploration ne lui apporterait que des informations importantes pour le reste de l'année ici, et il n'aurait pas perdu son temps à risquer l'inanition pour la réputation d'une fille qui le traitait de sauvage.
Sasha s'enfonça dans le couloir d'un pas étrangement léger et rapide malgré sa carrure trapue. On aurait dit un chasseur longeant les murs, espérant être le seul à capter la proie qui se tapirait à l'angle du corridor suivant.
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Au fond du couloir du troisième étage, à droite après la salle d'Histoire de la Magie, Lundi 18 Septembre 2124 (
Message publié Lundi 25 Novembre 2024 à 12:47
)
- Han-han, faisait madame Dennison pour manifester son intérêt pour les réponses du garçon tandis qu'elle notait d'une écriture rapide.
La pointe de sa plume, avec sa vivacité, rappelait le bec rapide d'une poule traquant toutes les petites graines et insectes desquels se délecter dans une terre riche.
Madame Dennison s'interrompit dans son écriture assez subitement, pour relever le regard vers Nikolaï ; et dans les yeux de la femme, on eût cru voir un éclat d'exaltation.
- Je vois que vous avez parfaitement conscience des enjeux liés aux informations que vous possédez, déclara-t-elle avec un sourire entendu.
D'une certaine manière, elle apprenait là ce qu'elle souhaitait : l'obéissance de Nikolaï s'arrêtait là où commençait sa loyauté pour sa patrie. Quel bon soldat, songea-t-elle avec une nostalgie douce-amère. Et puis, elle se remit à noter.
- Han-han.
La plume semblait picorer par elle-même.
- Bien, très bien le sport, approuva-t-elle avec un signe de tête et d'une voix légèrement absente - ou plutôt, préoccupée par d'autres choses. Je vais mettre cela dans votre dossier. Ils apprécieront.
Katherine se garda bien de définir de qui elle parlait. Ca n'avait pour le moment pas beaucoup d'importance - pour le garçon, en tout cas.
Si l'accent britannique de la femme évoquait un raffinement particulier, on percevait dans sa voix le souffle et le craquement d'un âge qui lui avait fait perdre en fraîcheur. Son timbre évoquait celui d'un violoncelle dont les cordes usées étaient activées par un archer dont la mèche rugueuse se serait rigidifiée avec le temps pour donner des sons plein de crépitements discrets, et pourtant doux comme le grain d'un parchemin usé.
- Quelle est votre compréhension des raisons pour lesquelles vous êtes ici, monsieur Polyanski ? reprit-elle.
Arrivée au terme de ses notes, elle posa momentanément sa plume, avant de croiser les bras sur sa poitrine. L'éclat brillant de ses yeux était toujours là, comme s'il avait chaviré de l'exaltation à une curiosité tranquille, prête à s'éveiller de nouveau. Quand elle se penchait, comme pour mieux examiner le garçon devant elle, ses cheveux impeccablement lisses tanguèrent avec elle ; un peu comme si des vagues dansaient autour de Nikolaï, phare dressé au milieu d'un océan dont il ne connaissait rien. Pauvre enfant, aurait-on pu penser, mais Katherine ne pensait jamais comme la masse, et c'était bien cela qui lui avait valu d'aller si loin dans sa carrière.
- Vous comptez retourner à la guerre, monsieur Polyanski ?
La question ne sonnait pas comme interrogative. C'était plutôt une évidence avancée, et pour la ponctuer elle s'affubla d'un sourire légèrement douloureux.
- C'est normal. Que diraient vos parents, si vous ne nourrissiez pas ce souhait ? Ils auront honte de vous, n'est-ce pas ?questionna-t-elle d'une voix un peu plus douce, les sourcils froncés pour partager cette terrible situation que devait être celle de Nikolaï.
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Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Lundi 25 Novembre 2024 à 13:39
)
C'était vite devenu un rituel.
Pour la troisième fois, depuis la rentrée, Sasha profitait de ce que la plupart des élèves fissent la grasse matinée pour se glisser dans les cachots après sa sortie matinale, et attendre qu'Anya Nikitovna sortît à son tour pour lui montrer les journaux qu'elle faisait venir de Russie. Il était encore trop tôt - en tout cas il l'espérait - pour qu'elle s'inquiétât de ce qu'il ne fût toujours pas en mesure de prendre lui-même un abonnement. Tant qu'il le pourrait, il profiterait de la situation pour avoir ces informations gratuitement, même si elles étaient tronquées, lui semblait-il.
Il trouvait bien sûr porte close en arrivant devant l'entrée de la salle commune des Serpentards. Ce matin-là, ses chaussures étaient encore mouillées ainsi que le bas de son pantalon, mais il n'en avait cure. A la place de la tenue réglementaire qu'il devait mettre la semaine, il avait enfilé un sweatshirt dont la capuche grise reposait en partie sur l'arrière de son crâne, laissant juste apparaître ses tempes presque rousses.
Il n'eut à attendre que quelques minutes, les mains dans les poches, adossés à la pierre, pour qu'enfin quelqu'un sortît. Il se détacha du mur aussitôt pour se retrouver face à...
... une grande blonde dont la bouche semblait indéfiniment faire une moue de dégoût.
Merde, un bout de brochette.
- Sasha ? Qu'est-ce tu fais là ?
- Tu veux pas aller chercher quelqu'un pour moi ? Please, ajouta-t-il avec lenteur, ainsi qu'une autre élève de cinquième année le lui avait appris.
Please Alison, il fallait dire quand il demandait un ustensile. Dans le cas de ce dimanche matin, l'astuce aurait mieux fonctionné s'il s'était souvenu du prénom de la fille ; malheureusement, si Alison l'avait prononcé devant lui, il n'en avait fichtrement aucun souvenir. Peut-être Maddie ? Ou Carolina. Ou aucune des deux. Dans le doute, s'abstenir.
- Tu veux voir Alison ?
- Nan, pas elle. Anya.
Blondasse ouvrit de grands yeux, appliqua une main sur sa poitrine. Quoi, au'est-ce qu'il avait dit, encore ?
- Anya Nikitovna. Tu la connais pas ? il la pressa avec un soupir agacé.
- Tu sors avec Anya ?! dit-elle, et sa bouche parut encore plus dégoûtée maintenant qu'elle s'était ouverte en un "O" de protestation.
- Hein ?! Mais nan ! J'ai besoin qu'elle m'apporte un truc, c'est tout !
Blondasse croisa les bras sur sa poitrine, l'air suspicieux.
- Qu'elle t'apporte quoi ?
Sasha pencha doucement la tête de côté, les lèvres pincées. Il s'efforça de ne pas répondre une obscénité.
- Des... De la lecture.
- De la lecture.
- C'est ça. En cyrillique, tu vois.
- En russe, quoi.
Sasha souffla par le nez un soupir dépité.
- Oui, si tu veux.
- Mais j'croyais que t'étais pas Russe.
- Oui, ben non, mais...
Blondasse haussa les sourcils, croyant enfin avoir coincé Sasha la main dans le sac. Ce dernier s'humecta les lèvres, et puis contre toute attente il déclara.
- Bon tu vas m'la chercher ou j'te plaque contre le mur et je gueule dans l'escalier qu't'essaies de m'embrasser dans le dos d'Alison ?
Cette fois, l'argument fit mouche. Blondasse recula d'un pas, interloquée, avant de faire demi-tour vers la porte de la salle commune, le nez froissé.
- C'serait même pas crédible, moi j'sortirai jamais avec une brute comme toi, elle rétorqua - mais, comme si elle avait pu avoir peur des conséquences d'avoir avoué une telle chose, elle descendit les escaliers quatre à quatre pour disparaître.
Au bout d'un moment qui parut interminable, la porte se rouvrit. Et cette fois, il vit immédiatement la silhouette d'Anya. Ses longs cheveux bouclés et sauvages, sa démarche chaloupée. Instinctivement, il carra les épaules, histoire de se tenir droit ; mais son visage resta fermé.
- J'espère je te réveille pas, il dit comme préambule.
Ce n'était pas comme s'il venait prendre des nouvelles d'elle, de toute façon. Elle savait parfaitement pourquoi il venait. Sasha se hâta de longer le couloir pour aller dans l'un des cachots voisins - celui où par deux fois déjà, ils s'étaient retrouvés pour qu'il pusse consulter le journal auquel elle était abonnée.
- Tu as le dernier numéro ? il demanda par dessus son épaule en entrant dans la salle d'un pas pressé.
Son impatience était visible : malgré ses mains dans ses poches, il se hâta de passer entre les tables pour aller s'asseoir au même endroit que la dernière fois, le souffle court. Et même assis, il ne cessait de gigoter. Seulement alors il fit apparaître ses mains, se les passa sur le visage. Ses lèvres, ses joues et son cou avaient rougi d'une drôle de façon.
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A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124 (
Message publié Lundi 25 Novembre 2024 à 18:50
)
Plus le jour se couchait tôt, plus vite la Forêt Interdite paraissait menaçante. Les voix des grillons qui chantaient dans la douceur de l'été s'éteignaient peu à peu, laissant place à de sinistres craquements et crépitements. Chaque bourrasque de vent décrochait par dizaines des feuilles qui après de longs jours avaient cessé de lutter pour survivre. Alors elles cédaient enfin, acceptaient d'être vouées à rejoindre le poussière. Elles frôlaient les troncs d'un chuintement léger avant de tomber au sol - alors chacune d'elle tapotait une fois la terre, comme si un animal avait fait un pas à cet endroit-là, et tout voyageur aventureux était pris d'un frisson, se retournant en craignant une présence inaperçue, sous l'oeil attentif de quelque rapace dont on devinait, vers les cimes, la forme distincte : une silhouette au bec sévère et aux yeux perçants, dont le plumage sombre se fondrait bientôt avec la nuit, une fois que celle-ci serait complète. Pour l'heure, on distinguait encore les buissons ardents qui bordaient de petits sentiers formés par la mousse, là où la végétation rampante n'avait pas parfaitement recouvert les sols humides. Dans cette jungle bucolique, quelques pattes avaient formé là des traces boueuses : l'empreinte ici d'un cerf, là, celle d'un félin aux dimensions inquiétantes...
Des gouttes, enfin. Irrégulières. L'Ecosse était toujours humide à cette période de l'année ; et les arbres semblaient n'en avoir jamais fini de s'ébrouer pour laisser tomber des perles qui s'accrochaient aux feuillages bas.
Dans l'horizon, emporté par la brume, Poudlard avait disparu. A mesure que celui-ci s'épaississait, la Forêt en tous sens paraissait la même ; comme un labyrinthe aux miroirs infinis.
Entre deux troncs dénudés, une fouine avait commencé à sortir le bout de son nez ratatiné. Son petit minois gris s'éleva vers le ciel, la truffe frémissante tandis qu'elle humait l'air - à la recherche d'indices quant à son dîner prochain, peut-être. D'un pas léger, elle emprunta le pont formé par une grosse racine au-dessus d'un petit cours d'eau, s'apprêta à sauter de l'autre côté - quand soudain elle s'immobilisa, figée comme la pierre.
Un coup d'oeil d'un côté, puis d'un autre.
Prédateur, semblait crier ses yeux silencieux, comme deux billes alertes qui peinaient à trouver, dans leur environnement, celui dont elle sentait la présence sans l'avoir vu.
Et puis, soudain, un vrai bruit. Un craquement grossier, si indiscret que la fouine avait déjà disparu. Sasha eut un grognement de dépit.
Au bout du chemin, une petite tête rousse : un instant, il avait cru qu'il s'agissait d'Alison. Mais la fille avait tourné sa tête un instant et il avait vu un autre profil. Plus jeune. Elle reprit son chemin. Le froid commençait à l'envelopper.
Sasha la suivit.
Sans un bruit. Comme une ombre. Il avait cette expérience-là : celle de disparaître presque tout à fait. Généralement, seuls les animaux sentaient sa présence, à cause de leur flair, mais il arrivait parfois à se camoufler suffisamment pour rester tapi sans qu'aucun d'eux ne le détectât plusieurs minutes durant.
Suivre une gamine était un bon exercice.
Parfois, l'enfant se retournait, prise d'un frisson. Il savait que c'était son instinct qui parlait, et son instinct avait raison. Elle n'avait rien à faire ici, elle était suivie, et nul ne savait les intentions des créatures qui observaient sa marche timide. Pas même lui : où le conduirait-elle ? Ca n'avait pas beaucoup d'importance.
Ici, d'ailleurs, rien n'avait beaucoup d'importance.
Ce n'était ni bien ni mal, c'était ainsi.
Tsssss... Tssss...
Sasha et la jeune fille eurent le même réflexe : l'immobilité totale, le temps d'un instant. Elle tourna la tête la première vers le lit de la rivière - il préféra détourner lentement les yeux vers la créature qui avait émis un bruit, un mouvement brusque étant trop perceptible.
Alors, ils virent le serpent.
Il avait une tête énorme, plus gros que le poing de Sasha, et ses deux yeux étaient brillants d'un vert fluorescent dans la nuit. Son corps était couvert d'écailles noire qui luisaient d'humidité - on en devinait les reflets suintants à mesure que son corps se dressait en ondulant en sortant de la rivière.
Trois mètres au moins.
Le serpent s'éleva, fort de ce tronc musculeux qui le soutenait. Il se dressa tant qu'il était à la hauteur d'une petite fille et avec lenteur, ouvrit sa gueule. Ses mâchoires se désolidarisèrent, laissant apparaître une langue noire fendue : comme prise d'une vie propre, celle-ci ne cessait de gesticuler, vive et légère. Elle brassait l'air, ses pointes frémissantes.
Et puis le serpent fondit sur elle.
Ses crocs se plantèrent dans le tronc juste derrière. Il se redressa, émettant des sifflements furieux. Le serpent se retourna sur lui-même, son corps battant la rivière - mais nulle part, nulle part l'enfant n'était.
Chut, il dit avec ses doigts.
Ils étaient perchés. A près de cinq ou six mètres du sol. L'enfant n'avait pas dû apprécier le voyage : elle avait été happée par ses vêtements, par derrière, comme si la main de Sasha avait été la gueule d'un animal qui avait mordu ses vêtements et l'avait tractée avec brutalité. Secouée, les cheveux devant les yeux, elle avait fini par atterrir assise sur une branche.
Heureusement, la violence avec laquelle il l'avait emportée lui avait momentanément coupé le souffle ; Sasha tira sur sa capuche - dans l'autre sens, cette fois, et le visage de la petite rousse fut découvert : alors elle se découvrit assise sur une branche à califourchon. En face d'elle, pieds repliés sous lui et en équilibre contre le tronc, il y avait Sasha : son jean plein de boue, sa chemise mouillée, des feuilles emberlificotés dans la tignasse blonde qui faisait office de chevelure.
Et l'un de ses doigts marqués par une griffure noire était posé sur sa bouche.
Chut.
Il baissa les yeux avec lenteur. En bas, le serpent cherchait sa proie, encore. Il tournait entre les buissons. Et la nuit gagnait du terrain : le brouillard blanc devenait de plus en plus gris. Bientôt, il serait d'un noir aussi épais que le flot de la rivière, dans laquelle le Serpent disparaissait parfois.
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Bibliothèque, Mercredi 27 Septembre 2124 (
Message publié Lundi 25 Novembre 2024 à 21:50
)
Avec Mister Brooks, Sasha avait cru s'en tirer à bon compte en terminant avec succès le philtre de paix, sous les directives précautionneuses d'Alison ; mais c'était sans compter sur la fourberie d'un professeur qui savait garder dans ses poches quelques cartes joker. Aussi, quand à la fin du cours la Serpentard s'en était allée, plutôt satisfaite, le Gryffondor s'était éloigné, bougon, avec la promesse d'une retenue supplémentaire.
Car c'était là le cadeau qui lui avait été fait par Mister Brooks : une retenue avec un certain Mister Bartholomew Beckett (avait-on idée d'être affublé d'un tel prénom ?), avec lequel il avait rendez-vous l'après-midi suivant, dans la bibliothèque.
Lieu maudit.
Ce fut ce qu'il pensa en premier lieu. Sasha n'avait jamais mis les pieds dans la bibliothèque auparavant.
Ou plutôt : Sasha n'avait jamais mis les pieds dans une bibliothèque, aussi incroyable que cela pusse paraître. Et il avait repoussé le plus longtemps possible l'idée d'entrer dans celle-ci.
Il resta planté, d'abord, au milieu de l'entrée de celle-ci. C'était une grande allée intimidante, bordée de tables flanquées chacune d'une lampe à la lueur douce et bleutée. De chaque côté se dressaient de très hautes étagères alignées en rayonnages sombres et surchargés d'ouvrages : des vieux, des récents, flambants de couleurs ou taciturnes. Dans un angle, de grands casiers contenaient une multitude de gros parchemins soigneusement entassés, triés et annotés avec de petites étiquettes qui pendaient au-dessus du bureau de l'entrée comme les mobiles au-dessus d'un berceau. Quelques élèves parcouraient les rayonnages, d'autres grattaient sur un parchemin, assis à une table. Un silence respectueux n'était perturbé que par quelques discussions à voix basse, de temps à autre, tant et si bien que Sasha avait l'impression d'être dans une cathédrale peuplée de meubles venus prier. Une fille pouffa non loin de Sasha, et cela l'arracha à sa contemplation interdite. Sac sur l'épaule, il se décida à se rendre vers le bureau de l'entrée. Déjà, quelques groupes d'élèves commençaient à sortir car l'heure du dîner approchait. Sasha devrait se retenir, à son grand désespoir, d'aller dévorer les beignets de crevette que l'on servirait ce soir.
L'homme derrière le bureau avait un visage avenant. Un peu trop pour être innocent du goût de Sasha. De toute façon, un type qui vivait au milieu des livres ne pouvaient qu'être empli d'un savoir dont il ne pouvait qu'abuser, non ? Le Gryffondor tâcha de prendre une inspiration, comme pour chasser ses inquiétudes, et se remémora les recommandations d'Alison.
- Bonjour, mister Beckett, il dit soigneusement malgré son accent qui trahissait fortement ses origines slaves. Je suis Sasha Shevchen, sixième année à Gryffondor, sir.
Le soin de cette annonce tranchait dlleurs avec son apparence : sa cravate était nouée de travers, le bas de pantalon était tâché de poussière et ses cheveux en bataille comme ses cernes lui donnaient l'air de venir de sortir du lit. Mais avec une assurance rigide, il tendit un morceau de parchemin à l'homme aux cheveux gris.
- C'est un mot de Mister Brooks. Il m'a envoyé en retenue, hum...
Sasha jeta un coup d'oeil autour de lui, comme s'il avait oublié où il se trouvait et qu'il se rappelait soudain l'étrangeté de cet endroit où tout le monde s'efforçait de faire silence.
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Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Mardi 26 Novembre 2024 à 13:54
)
Sasha s'était pétrifié. Les yeux alertes, fixés sur le visage d'Anya - des traits doux devenus durs comme de la pierre - et les mains sur ses genoux, les doigts sertis dans son jean comme l'adrénaline était brusquement monté en lui, ses lèvres seules bougèrent, tentant le tout pour le tout.
- О чем ты говоришь ? il dit. (De quoi tu parles ?)
Il aurait voulu que le ton fût comme si de rien n'était, mais sa voix était blanche, même légèrement hostile malgré lui.
De toute façon, le crachat ne laissa aucune place à l'interprétation : il n'était pas des leurs, et elle l'avait découvert.
Sasha resta tranquillement assis. Ses yeux se posèrent seulement brièvement sur la tache sombre de salive qui avait percuté le sol. Elle avait eu l'élégance de ne pas lui cracher directement dessus. Le silence était de plomb, pesait sur le cachot comme si le château au-dessus soudain pesait plus lourd, menaçait de les ensevelir là, dans ce mutisme. Pour une fois, Sasha souhaita qu'ils fussent interrompus.
Lorsqu'il avait lu les numéros précédents, seul avec elle, il avait maintes fois tourné la tête vers la porte. Pas seulement parce que c'était la seule sortie ; mais aussi parce qu'il ne souhaitait pas qu'on découvrît l'instant suspendu - et interdit - auquel il se donnait accès. Il n'était pas question de partager les journaux d'Anya avec les autres élèves. Ce n'était pas pour Alison qu'il s'inquiétait, mais bien pour cet étrange sentiment jaloux, qu'il ne s'expliquait pas à lui-même.
Sauf qu'un tel cirque ne pouvait pas continuer, et Sasha le savait très bien.
Toujours immobile, il pinça les lèvres. Finit par hausser brièvement les épaules.
- Да. Я солгал. Но мне нужно знать.(Oui. J'ai menti. Mais j'ai besoin de savoir.)
Sasha serra les dents. Maintenant, la balle était dans son camp et elle le savait. Il ne se mettrait pas à genoux devant une Russe pour la supplier. Mais pourtant il était resté là plutôt que de partir immédiatement après avoir été découvert. C'était pourtant ce qu'il s'était dit : quand elle saurait, il disparaîtrait, se ferait oublier. Il n'y avait pas beaucoup - voire pas du tout - d'ukrainiens à Poudlard. S'il se faisait trop remarquer, il était assez certain qu'un petit groupe de russes avec un peu de ressentiment ne serait que trop heureux de le passer à tabac en bonne et due forme.
Mais donc, il était encore là. Il s'humecta les lèvres au terme d'une inspiration censée lui donner du courage.
- Только сегодня. Это последний номер.(Juste aujourd'hui. Ce dernier numéro.)
Il ne supplierait pas, se répétait-il en son for intérieur. Mais par Mokosh, que donnerait-il pour savoir ?
- В эти дни должно было произойти важное событие. Я просто хочу знать, говорят ли они об этом. Это для... Чтобы получать новости от меня. И после сегодняшнего дня я больше никогда не приду. Хорошо ?(Il aurait dû y avoir un évènement important ces jours-ci. Je veux juste savoir s'ils en parlent. C'est pour.. Pour avoir des nouvelles des miens. Et après aujourd'hui, je viens plus jamais. Ok ?)
Sasha serra un peu plus les doigts sur son jean. Il en avait mal à la peau en dessous, mais il fallait au moins ça pour l'empêcher de s'énerver.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Serre n•2, Lundi 02 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 27 Novembre 2024 à 10:49
)
Lorsqu'il avait ouvert les yeux, le matin suivant, Sasha avait été assailli par les images troubles d'une nuit à demi-passée dans la forêt, non dans l'état tranquille qui était le sien habituellement lorsqu'il se transformait pour goûter un peu la liberté d'être animal, mais dans une course folle où il traînait sous lui une petite fille qui n'avait rien demandé mais avait chuté dans l'herbe noyée de brume.
Un moment, il tâcha de repousser ses souvenirs comme un mauvais rêve, mais quand sa conscience s'éveilla totalement, il fut forcé de constater que ce n'était guère le fruit de son imagination, mais quelque chose qui s'était réellement produit.Blyad, avait-il juré en sortant de son lit, sautant à toute vitesse dans un jean parce que les cours reprenaient ce matin et que les autres élèves n'avaient pas jugé bon de le réveiller : il était seul dans la chambre de son dortoir. Ses compagnons de chambrée ne le trahissaient pas pour ses absences nocturnes, mais ils n'en faisaient guère plus pour lui. Non sans d'abord passer ses mains dans ses cheveux pour les épousseter - histoire de les débarrasser sommairement de quelques traces de la forêt restée dans ses mèches - Sasha se mit à chercher frénétiquement de quoi se mettre quelque chose sur le dos. Ses pensées étaient tout aussi désorganisées que son sac plein de vêtements roulés en boule. Avec un pull et une chemise en moins.Avec la soeur d'Alison et sa promesse à tenir à la place. Avec ses yeux noyés de larmes et la paume de sa main sur le front.
Le geste avait été si doux qu'il en avait fermé les yeux, accroupi sur les marches. Il aurait voulu être léopard à ce moment-là : il savait qu'alors son état d'esprit aurait pu être suffisamment détaché de tous les tracas du monde pour être concentré sur l'instant. Mais il avait été parfaitement conscient, et peut-être suffisamment conscient pour avoir l'impression de ressentir encore la chaleur de la main de Charlie entre ses yeux, de longues heures de sommeil plus tard.
En-dehors de cette rencontre nocturne qui avait clos le week-end, Sasha avait passé la moitié de ces derniers jours à explorer le château et ses environs, curieux au fond de cet environnement nouveau ; et l'autre moitié à maugréer dans sa barbe qu'il avait sûrement pas peur des Russes, que les Russes il en faisait qu'une bouchée, même qu'il mettrait sur leur carcasse du coulis de framboise comme sur les côtes de porc qu'ils servaient à Poudlard pour leur croquer les os et les broyer entre ses dents comme de vulgaires rats des champs tombés entre les crocs d'un chat sauvage, et que s'il avait voulu il aurait déjà cassé les gueules de ceux qui se tapissaient bien au chaud autour d'elle.
Et autres joyeusetés de ce genre.
Il fallait donc au moins cette rencontre avec Charlie, son crapaud et la promesse qu'elle lui avait demandé pour qu'il cessât enfin d'en vouloir à Alison et de ruminer comme un bovin dépité de son sort.
Le matin, il put se présenter à temps avec les sixième années en cours de métamorphose, où il se débrouillait plutôt correctement - si tant était qu'on le laissait formuler ses sorts dans sa langue d'origine, ce à quoi rechignaient un peu certains professeurs. D’aucuns répétaient à Sasha que les formules latines étaient plus subtiles et plus puissantes. Sasha y mettait du sien en formulant ses versions slaves dans les variations les plus puissantes possibles, histoire de leur donner tort devant les autres élèves de la classe. Et ainsi, s'il y avait des Russes, qu'ils fussent tous bien informés qu'il les transformerait avec aisance en bûche de Noël si l'envie lui prenait. (Parce que, rappelons, il n'avait sûrement pas peur d'eux.)
Au déjeuner, Sasha n'avait pas cherché Alison, mais plus la journée passait, plus il sentait son estomac se rappeler à lui dans des contorsions étranges. Ce n'était pas vraiment lié à l'excitation de revoir sa fausse petite amie, non : il s'agissait d'encaisser ses récriminations. Car cette fois, il avait vraiment quelque chose à se reprocher. Si Charlie n'avait pas tenu sa promesse, elle se fâcherait parce qu'il avait emmené sa petite soeur promener plutôt que de la ramener au château, risquant littéralement sa vie. Aussi avait-il l'impression que la journée passait trop vite et que ce cours de botanique de l'après-midi courait vers lui sans qu'il pût y échapper. Par précaution, n'ayant aucune envie de risquer de nouveau une privation de repas pour les caprices, Sasha prit soin de dévorer tout ce qu'il pouvait avant de prendre la direction des serres.
Dehors, le temps était exceptionnellement clément : un soleil radieux se montrait régulièrement entre deux colonnes de nuages qui soutenait un ciel frais mais engageant. Sur le chemin, il décida donc d'un plan ingénieux : il ferait comme si de rien n'était et avec un peu de chance, tout irait bien.
Lorsque Sasha se présenta à l'entrée des serres, la plupart des élèves étaient déjà là. Les cinquième année étaient rudement ponctuels, trouvait-il, tandis qu'il se présentait à l'entrée - les mains dans les poches de sa robe de sorcier et bien sûr, son noeud de cravate de travers.
La brochette bien évidemment était entièrement constituée, dans les premiers rangs de ceux qui attendaient de pouvoir entrer, lorsque la professeure leur ouvrirait la petite porte qui leur permettrait de se réfugier à l'intérieur. Sasha doubla la longue file, déclenchant sur son passage quelque silence, puis quelques murmures parmi les Serpentards. Evidemment, puisque leur dernière rencontre s'était soldée par l'envoi de l'un d'entre eux à l'infirmerie. Sasha ne se cacherait certainement pas pour cela. Il passa devant eux avec indifférence - sa seule intention étant de reprendre son poste aux côtés de la petite rousse qui lui servait de patte blanche à montrer aux professeurs. Sasha la rejoignit et, ignorant la brochette du mieux qu'il savait le faire, se pencha sur Alison. Lui colla un baiser un peu plus lent que celui de leur dernier cours, histoire de s'appliquer un peu même s'il avait le naturel d'un automate, puis il lui prit la main pour la mettre dans sa poche à lui, d'une manière un peu brusque, un peu autoritaire - le coeur battant à tout rompre, s'attendant à ce qu'à tout instant la jeune fille lui collât une gifle bien méritée.
Mais rien de cela n'arrivât.
Une bouffée d'espoir l'inonda : Alison n'avait pas l'air au courant (ou alors elle cachait parfaitement son courroux), mister Brooks avait trouvé qu'ils avaient fait du bon travail. Encore une ou deux séances de Potions sur ce registre-là, puis la même chose en Botanique, et il pourrait bientôt demander à retourner être à plein temps avec les sixième année. (Pour la Divination, les cours n'avaient pas encore commencé, mais il suffirait de prouver à la première séance qu'il était un voyant de premier ordre, ce qu'il n'était pas, bien sûr, pour faire en sorte que le professeur de Divination approuvât qu'il fusse au plus vite auprès des 6ème année). Car quitte à perdre tant de mois à Poudlard, au moins qu'ils fussent les plus productifs possibles. Il avait davantage d'espoir d'apprendre des choses utiles à la guerre en sixième année qu'en cinquième. Par exemple, les sixième année travaillaient de vraies potions médicinales, comme la potion de régénération sanguine, et manipulaient des plantes dangereuses comme les Baies d'Epine Mortelle, avec lesquelles on pouvait fabriquer des pièges et de petites armes létales. Des sujets bien plus intéressants que...
- ... les magnifiques Orchidées Explosives ! claironnait la professeur, qui avait surgi avec une bonne humeur qui donna instantanément à Sasha l'envie d'aller dormir au soleil - alors il ferma les yeux. Ces magnifiques fleurs - je suis sûre que vous en avez déjà vu, on en décore la Grande Salle à Noël pour ceux qui voudront m'accompagner en décembre !
Quelques exclamations enthousiastes d'un petit duo de filles se firent entendre, vantant la beauté de ces fleurs multicolores et exotiques, qui hypnotisaient ceux qui en voyaient pour la première fois. Sasha se demanda juste si ces plantes mangeaient les mouches. (Auquel cas, ce serait pratique.)
- Pour l'instant, reprit la professeure, celles-ci sont à une étape de développement de leurs premiers boutons, que nous allons devoir faire grossir à l'aide d'un sort de chaleur dé-li-cat pour qu'elles puissent être prêtes exactement quand nous le souhaiterons. Il nous en faudra une première fournée pour Halloween, et nous garderons les fleurs les plus tardives pour les décorations de Noël. Evidemment, comme leur nom l'indique, tout le défi est de les faire grandir sans les brusquer. Sinon, elles explosent. Et que se passe-t-il si elles explosent ?
L'une des deux enthousiastes leva la main en se dandinant comme si elle avait très envie de faire pipi.
- Oui Jenny ?
- Les Orchidées Explosives rejettent des spores irritants dans un nuage coloré, et ces spores au contact de la peau créent des plaques irritantes !
- C'est exact. 2 points pour Serpentard pour ce bon travail de préparation. Les spores déclenchent une réaction d'allergomagie majeure, à laquelle la peau réagit en formant une couche d'écailles très urticantes et vertes qui mettent des jours à s'en aller. Bien sûr, nous pouvons concocter des baumes pour soulager l'inconfort, mais la tâche ne disparaît que par elle-même au bout de plusieurs semaines. Aussi, pour éviter qu'elle n'explose, vous allez devoir redoubler de douceur. Certains d'entre vous ont sûrement déjà vus leurs mères chanter des berceuses à leurs orchidées explosives quand elles font chauffer la cheminée, n'est-ce pas ? Hé bien c'est parce que les orchidées grandissent avec cette chaleur mais que trop d'un coup risque de déclencher l'explosion des boutons, alors il convient d'être apaisant avec eux. Aussi vous demanderai-je d'entrer dans le calme, histoire de ne pas commencer à les stresser inutilement. Vous êtes prêts ?
Au lieu d'une réponse uniforme, les élèves se lancèrent dans des discussions désordonnées, certains s'inquiétant de ce qu'ils pouvaient rater leur sort de chaleur tandis que d'autres inventaient déjà des versions égrillardes des chansons pour enfant qu'ils connaissaient.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
Ambassade magique de Paris, France, Jeudi 05 Octobre 2124 (
Message publié Samedi 26 Avril 2025 à 18:12
)
Lyle avait discrètement replacé sa main dans sa poche, histoire de ne pas avoir trop l'air de celui qui s'est pris un vent aux yeux des quelques âmes qui s'affairaient à installer les tables, ajuster la lumière, polir le parquet pourtant déjà si scintillant qu'il reflétait les bougies comme la surface d'un lac parfaitement tranquille. Le sorcier avait serré les dents.
- Soit, profite bien de ta gloire pour le temps qu'elle durera, rétorqua-t-il froidement à voix basse. Je ne fais pas deux fois ce genre d'offre.
Malgré le ton glacial d'une réplique qui trahissait sa contrariété, Lyle se mit à afficher son sourire le plus affable lorsque les grandes portes principales de la pièce s'ouvrirent pour accueillir la véritable star de la soirée : Gary Oldmore.
L'aisance du personnage était à la hauteur de la nervosité de Lyle. Là où l'homme expérimenté écartait les bras pour accueillir sa ravissante Viviane et s'exclamait d'une voix tonitruante, remplissant l'espace, le jeune sorcier lui s'était raidi au point de s'affiner - un point d'exclamation silencieux, aux yeux ronds et à la colonne rigide. Quand son nom franchit les lèvres de Viviane, Oldmore braqua sur lui ses yeux perçants. La douceur qui avait peint ses traits en saluant la fille Valcourt - sous les regards curieux de la petite foule qui se massait autour d'eux, désireuse de ne rien perdre de la moindre scène, d'en être témoin, au cas où la moindre chose d'importance pouvait se produire - cette douceur s'était évaporée instantanément. Comme une flamme d'une bougie sur laquelle on aurait soufflé, soudain les prunelles de l'homme étaient devenues noires, presque fumantes.
Lyle, un moment décontenancé par ce changement soudain, perdit brièvement ses moyens. Il resta coi, à guetter quelque autre indice dans la posture d'Oldmore, qui continuait à la scruter. Mais que ce dernier parla, il y avait dans sa voix une cordialité saine.
- Lyle, petit-fils d'Oswald, répéta-t-il lentement. Quelle étonnante surprise.
Lyle toussota pour se donner une contenance, avant d'oser tendre la main.
- Hum, oui, hum. Merci d'accepter de me rencontrer, balbutia-t-il. Vous êtes hum... Ca fait longtemps que j'admire votre travail.
- Allons bon, répondit Gary en prenant dans sa grosse main celle de Lyle - qui sentit ses phalanges douloureusement écrasées - à dessein ou non ? - entre les doigts épais du diplomate. Et comment va votre grand-père ?
- Oh, très bien, s'empressa Lyle. Il... Il vous passe le bonjour.
Archi-faux, Oswald ne passait le bonjour à personne, sauf peut-être à la voisine du cottage qui avait l'amabilité de ramener Snöri quand celui-ci venait pleurnicher dans sa cuisine qu'Oswald ne voulait pas mettre ses chaussons en plein hiver. Et encore.
- Comme c'est charmant, acquiesça Gary, relâchant les doigts broyés de Lyle avec un acquiescement qui parut confirmer que l'ambassadeur savait qu'Oswald ne se serait jamais fendu d'une chose pareille. J'espère qu'il profite bien de sa retraite, et qu'il en a profité pour couper les ponts avec ses mauvaises fréquentations.
Lyle sourit, gêné. Il savait que des rumeurs couraient sur son grand-père. Mais c'était seulement des rumeurs venant de concurrents, Oswald l'avait toujours affirmé. C'était décevant que Gary eut cette image de sa famille.
- En tout cas, pour ce qui est des apparences, vous êtes une expérimentation réussie, il semblerait. Quoiqu'il en soit, nous discuterons tout à l'heure. Pour l'instant, je veux me sustenter et prendre des nouvelles de cette brillante Viviane.
Gary Oldmore, dans son costume élégant, passa élégamment le bras autour de la jeune fille, et il tourna le dos au jeune sorcier pour emmener Viviane vers les buffets. Lyle les regarda s'éloigner les bras ballants et l'oeil vide.
Au bras d'Oldmore, Viviane avait l'air d'une brindille qu'il aurait pu rompre d'une pression contre son corps rond et fort. Au buffet, des serveurs leur tendirent coupes de champagne et plateaux de hors d'oeuvre. La petite troupe qui constituait la clique de l'ambassadeur avait dépassé Lyle sans s'y intéresser et bourdonnait maintenant autour de l'homme et de la sorcière comme autant de guêpes intéressées par un morceau de melon laissé au soleil. Le Serdaigle resta posté au même endroit, comme incapable de détacher ses yeux et ses oreilles de ce qui se produisait : la voix tonitruante d'Oldmore couvrait aisément les conversations, mais il ne saisissait pourtant ce qui se disait. Il voyait ses yeux perçants aller du buffet à Viviane, pour aller consulter d'un regard un acolyte, afin de revenir sur Viviane. Des yeux calculateurs. Des yeux... dévorants.
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Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 27 Novembre 2024 à 14:31
)
Sasha recula sur le banc, malgré lui.
Quel évènement ?
Il ne s'était pas attendu à cette question. Il ne s'était pas attendu à ce qu'elle pût négocier sa réponse. Sasha s'humecta les lèvres, comme pour se donner le temps de réfléchir. Que risquait-il à lui donner cette information ? Anya n'était qu'une jeune élève qui n'était certainement pas en contact avec les armées Russes. Et pourtant. Il lui suffisait d'écrire une lettre vers la Russie, et la Russie saurait la trouver, elle. Saurait envoyer ses émissaires pour venir le questionnaire.
Sasha déglutit, avant de secours la tête, en un non qui signifiait qu'il ne dirait rien.
Un moment, il imagina tout ce qu'il aurait pu obtenir, comme informations, s'il s'était fait passer pour un Russe depuis le début. S'il avait su ravaler son ego pour se mêler aux autres, il aurait pu collecter tout un tas de rumeurs, découper des journaux pour en envoyer des petits morceaux vers l'Ukraine. Il y avait tant de choses qu'il aurait pu faire à distance, pour aider les siens. Et à la place, il n'avait su que foncer dans le tas en rugissant qu'il n'était pas Russe.
Il serra les dents, espérant faire reflouer cette émotion qui voulait lui envahir le visage alors qu'il devait rester le plus impassible possible. Ses sourcils froncés, ses yeux attaquant car c'était la meilleure défense, il n'en était pas moins que le remord lui rongeait les tripes.
Et maintenant ?
Et maintenant, il était pris à son propre piège. Il avait voulu clamer haut et fort qu'il était Ukrainien, il était désormais identifié. Et qu'est-ce que cela lui apportait ?
Au fond de lui, pourtant, il savait que c'était mieux ainsi. Il avait secrètement désiré ces petits instants passés à lire le journal à ses côtés, cette ennemie au visage si supérieur. Avec le temps, qui savait s'il ne se serait pas laissé bêtement séduire ? Au moins, il ne risquait plus rien désormais : il voyait tout le dégoût qu'il provoquait en elle, et cela aussi ajoutait à tout ce qui se nouait en lui à cet instant.
Et pourtant, il lui fallait être pragmatique : si elle était la seule à pouvoir lui donner quelques informations, que ferait-il alors ? Il fallait qu'il tentât.
Alors il croassa, à voix basse :
- Un assaut.
Peut-être que ce n'était pas ses chances d'obtenir ce qu'il voulait, qui le faisait parler. C'était peut-être tout simplement la posture impénétrable, sévère d'Anya. Elle était entre lui et la porte, et cela en soi était une menace, mais il ne bougea pas. Si elle savait, si elle voulait lui faire du mal, alors il lui aurait suffit de demander à d'autres Serpentards russes de venir les rejoindre. Alors son compte était bon.
- Ca s'est déjà passé, alors tu peux rien faire pour l'empêcher, c'est même plus un secret. C'était prévu depuis longtemps. Ca a dû avoir lieu vendredi. Ca doit être dans le numéro d'aujourd'hui.
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Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 27 Novembre 2024 à 15:32
)
Quand bien même le visage de Sasha était déjà fermé, il parut à peine perceptiblement se décomposer. Les condoléances d'Anya étaient un coup de poing dans les entrailles dont il se serait bien passé. Il avait blêmi légèrement.
- Он... Ничего нет? Совсем ? (Il... Il n'y a rien ? Du tout ?)
Elle n'avait aucun intérêt à mentir, jugeait-il. Alors comment savoir si l'Unificateur avait pu tout simplement passer sous silence l'assaut en question ? Il y avait peut-être quelques lignes qui avait échappé à la Russe. Deux, tout au plus, qui ne lui aurait pas échappé à lui. Quelque chose du genre. Des bâtiments écroulés dans telle ville, malheureusement quelques morts. Et lui saurait, avec le nom de la ville, que c'était un assaut réussi de la part des Veilleurs.
Ou bien il n'y avait vraiment rien parce que les Veilleurs en question avaient été arrêtés. Et là...
Ses entrailles se tordaient désagréablement. Anya n'avait pas l'air d'accepter de négocier pour quoi que ce soit. Lorsqu'elle bougea, il avait instinctivement saisi sa baguette, lui aussi, prêt à riposter - prêt surtout à invoquer un quelconque sortilège pour pouvoir faire diversion et se tirer de ce mauvais pas. Il jeta un oeil sur la pochette, tenté un instant de la lui prendre par la force, mais il renonça. A la place, il s'était levé comme elle.
- Зачем ты это принес, если уже знал ? grogna-t-il en désignant la pochette d'un mouvement du menton. (Pourquoi avoir amené ça si tu savais déjà ?)
Il encaissa en silence les décisions qu'elle avait prise à leur sujet : ne plus jamais se parler, ne plus jamais se regarder, même. Sasha soutint pourtant son regard, plusieurs longues secondes. On aurait pu croire que c'était pour la défier, mais non : il voulait être sûr qu'elle ne changerait pas d'avis. S'il y avait le moindre espoir, la moindre faille, Sasha l'exploiterait.
Mais le second crachat et les cheveux qui s'enflammaient étrangement, bien que fascinants, lui faisaient comprendre qu'il ne pouvait y avoir de retour en arrière.
Il recula lui aussi, d'un pas, vers la porte. A mesure qu'ils s'éloignaient l'un de l'autre, la tension semblait s'amenuiser à peine perceptiblement, donnant à Sasha de quoi retrouver un peu de respiration.
Il était prêt à partir. Dans deux pas, il serait sorti du cachot, et ils ne se reparleraient plus jamais, ne se regarderaient plus jamais. Alors, peut-être qu'il en profitait un peu, malgré lui.
Du couloir émanait le simple chuintement d'un courant d'air, trahissant la solitude dans laquelle ils se trouvaient tous les deux : au pire, qui saurait ce qui s'était passé, s'ils se battaient ici ? Il aurait l'avantage, jugea-t-il. Il lui suffisait d'un ou deux sorts. Mais c'était idiot et il le savait très bien : Blondasse l'avait vu, et d'autres gens, les autres jours, les avaient vus s'isoler ici. Il serait désigné coupable très rapidement.
Mais Sasha était impulsif. C'était sur un impulsion qu'il avait fait son sac et avait couru attraper un Portoloin avec les autres. C'était sur une impulsion qu'il s'était lancé dans un immeuble à demi-écroulé pour essayer de fuir. C'était sur une impulsion qu'il avait décidé de passer sous silence qu'il était ukrainien avec Anya.
Alors, au moment où il allait déguerpir pour de bon, son poignet agita subtilement sa baguette.
- Tyanì obladanie, incanta-t-il en un seul souffle léger.
Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, arracha instantanément la pochette qu'Anya serrait contre elle. Le journal fondit sur Sasha qui l'attrapa sans réfléchir.
L'instant suivant, il détalait dans le couloir, au pas de course.
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Serre de préparation, Dimanche 15 Octobre 2124 (
Message publié Mardi 07 Janvier 2025 à 20:55
)
Sasha se tenait là, les mains enfoncées dans les poches de sa robe de sorcier qui lui tenait trop chaud dans l'atmosphère étouffante que la professeure de botanique avait réussi à créer pour ses précieuses orchidées. Le garçon faisait mine d'être intéressé par les premières couleurs qui se devinait dans les gros bourgeons prêts à éclore, mais le moment était particulièrement désagréable. Il était à deux doigts de lui obéir : retourner faire ce qu'il s'apprêtait à faire... Mais comme il s'apprêtait à ne rien faire du tout, autant rester un peu. Et si ça faisait les pieds à Alison, tant mieux.
La dernière semaine ne s'était pas particulièrement bien écoulée. Après l'épisode désagréable et les informations déplorables qu'il avait arrachées du journal d'Anya, il avait été carrément privé des nouvelles du front, tout comme de compagnie : il n'avait pas revu Charlie ni Alison. Il avait délibérément évité la dernière comme elle l'avait fait avec lui depuis leur dernière entrevue, poussé par un ressentiment qui l'avait enfoncé dans un mutisme plus prononcé que d'ordinaire. Mais peu à peu, Alison lui semblait moins coupable, et sa colère s'était dissoute progressivement. Juste avant le cours de potions pour la semaine suivante, il s'était même armé de courage pour tenter une discussion - mais ses espoirs avaient été douchés quand il avait été mis devant le fait accompli : Alison avait choisi un autre binôme, prétextant que la Potion de Croissance qu'elle préparerait avec sa copine de brochette était critique parce qu'elle devait être utilisée pour les fameuses Orchidées d'Halloween, dont la floraison avait pris du retard. Comme ils étaient un nombre impair dans la classe, Sasha avait dû faire sa potion seul.
Et avait récolté un beau Troll, parce qu'il avait malencontreusement mis beaucoup trop de Lierre-en-flamme dans le chaudron, provoquant une éruption subite dont les éclats avaient brûlé, par projection, la blouse d'une élève de la paillasse voisine. Heureusement, Brooks était intervenu immédiatement avec un sortilège apaisant, mais Sasha avait dû subir ensuite une leçon sonore sur les préconisations concernant le Lierre-en-Flamme. Le professeur avait bien insisté sur le fait que pour la séance, il aurait dû lire tout le chapitre de l'ouvrage "Floramens et Filagraines : L’Art des Plantes en Potion" d'Esmeralda Cottenthorne qui décrivait parfaitement les problématiques de mésusage du Lierre-en-Flamme. Sasha s'était contenté d'acquiescer en silence et de renvoyer à qui l'observait trop intensément des regards furieux et menaçants.
La vérité, c'était qu'effectivement, il n'avait pas beaucoup travaillé ces derniers jours. Il mangeait tôt après les cours pour s'échapper aussi vite que possible dans le parc et y passer sa soirée et une grande partie de la nuit sous sa forme animale, délaissant ses devoirs et ses révisions. Pourtant, il avait plutôt réussi à étudier régulièrement depuis le début de l'année, mais les derniers évènements ne lui avaient que donné envie de ne plus réfléchir à rien, et les rares moments passés assis sur une chaise l'ennuyaient profondément. Et plus son humeur morne se renforçait, plus il fuyait sous sa forme animale, et plus il rentrait tard au dortoir, et moins il dormait.
Tant et si bien qu'il avait fini par récolter une retenue pour s'être endormi au cours d'histoire de la magie.
Aussi, maintenant qu'il se retrouvait là devant Alison, Sasha était comme apathique, avec des cernes sous les yeux et sa cravate mal nouée pour laquelle il avait visiblement décidé d'apporter encore moins de soin que d'ordinaire. Cette fatigue ne l'aidait en rien à trouver les mots justes : même des mots tout courts étaient sacrément difficiles à trouver pour exprimer ce qu'il voulait dire, parce qu'il ne le savait pas vraiment lui-même. Le discours qu'il avait préparé pour le cours de potions ne tenait plus vraiment la route, avec le recul.
Mais comme il devait commencer, il finit par hausser les épaules avant de se lancer.
- J'ai des mauvaises notes sans toi.
Voilà, il avait dit l'essentiel. Il braqua sur Alison un regard franc, sans dévier.
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Le cachot devant l'entrée de la salle commune des Serpentards, Mardi 10 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 27 Novembre 2024 à 20:51
)
Si une seule chose était sûre, c'était qu'à Poudlard, il n'avait encore jamais rencontré de traqueuse aussi déterminée qu'elle.
Sasha n'avait pas eu de mal à la semer au début, persuadé qu'une fois hors de sa vue, il pourrait tranquillement attendre qu'elle s'en allât, mais c'était sans compter sur le refus d'Anya d'abandonner sa proie. Posté dans l'entrelacement des branches d'un énorme chêne sessile, plusieurs fois centenaire, Sasha était longuement resté immobile, la respiration tranquille, comme si ses soupirs s'accordaient avec le vent maintenant qu'il avait pu trouver une position confortable : étendu sur le ventre, la branche soutenant l'ensemble de son corps, la pochette bien coincée entre l'écorce et son buste - quitte à la déformer. Il se fondait si bien dans l'arbre qu'il n'était plus visible, en tout cas pas aux yeux de quelqu'un qui ne s'attendait pas à le trouver là.
Le temps s'était écoulé, et il avait fermé les paupières, sans pour autant s'endormir. Il écoutait. Quand les pas d'Anya se rapprochaient, il rouvrait les yeux. De loin, il voyait la silhouette, élégante et déterminée, sertie d'une chevelure brûlante qui ne décolérait pas, déambuler entre les troncs. Il retenait parfois son souffle, quand elle s'approchait un peu. Mais elle perdait systématiquement sa trace - si trace elle avait, ce dont il doutait.
Au bout d'un long moment, elle avait disparu de son champ de vision. Elle avait dû s'aventurer plus loin, ou bien était simplement rentrée au château. Alors seulement, il s'était autorisé à se redresser. Ses membres étaient endoloris, et c'était avec un grognement qu'il avait changé de position. Il était revenu vers le tronc, là où la branche à sa base était plus large, pour pouvoir s'asseoir en tailleur et déposer sur ses jambes la pochette. Il l'avait pas mal abîmée : elle était tordue en son centre, comme perforée par endroits de petites entailles rondes, et l'humidité de l'écorce avait laissé quelques traces marrons. Avec précaution, Sasha l'ouvrit, pour mieux découvrir, le coeur battant, le dernier numéro de l'Unificateur.
Il l'ausculta longuement. Se résigna à admettre qu'Anya avait raison : il n'y avait rien là-dedans qui indiquât que les Veilleurs eussent réussi une opération spéciale quelconque. Pourtant, presque à la toute fin du numéro, après un reportage sur un groupe de sorcière qui tricotaient des écharpes incrustés de slogans de leur parti politique - les fonds étaient reversés aux blessés de guerre, indiquait le reporter - un petit encart indiquait, avec un titre tapageur : Le Front Magique Unifié a encore frappé ! Un complot déjoué à la frontière !
Sasha se pencha sur l'article, ses yeux dévorant les quelques lignes.
"Dans une opération spectaculaire menée à l'aube par la Division Obscura, un groupe de sorciers ennemis a été neutralisé alors qu’il préparait un attentat d’une ampleur effroyable près de notre frontière sud. Les suspects, au nombre de cinq, ont été interceptés dans une clairière ensorcelée, dissimulés par un sortilège de Repousse-Moldu, et portaient sur eux une cargaison inquiétante : des potions explosives, des artefacts interdits, et des cartes marquées d’emplacements stratégiques. "Il est clair qu’ils projetaient une attaque visant à semer la terreur chez nous", a déclaré le Ministre de la Magie, Dmitri Volkov, ajoutant que l'opération "a probablement sauvé des centaines de vies". Cet acte de trahison abjecte montre, une fois encore, que nos ennemis n'hésitent pas à franchir des limites innommables. "Nous devons rester unis et vigilants", a insisté le ministre, qui appelle à redoubler de patriotisme face à ces menaces. Les sorciers terroristes ont bien entendu été exécutés.
L'Unificateur félicite nos héros et rappelle que tout comportement suspect doit être signalé immédiatement. N’oubliez pas : la sécurité de notre monde dépend de votre vigilance."
Sasha avait senti un enclume tomber au fond de ses entrailles. Ses yeux ne pouvaient plus se détacher du petit encart, minuscule, à côté de la grande photo animée de ce groupe de vieilles femmes occupées à tricoter avec les sourires odieux de ceux qui sont persuadés de bien faire. IL se mit à relire l'article, une fois encore, puis une fois encore, comme s'il avait pu manquer une information supplémentaire de ces quelques mots sordides. Mais au bout d'un moment, il comprit qu'il n'aurait rien de plus que cette information sèche.
Au bout d'un moment, il porta ses mains sur son visage, pour empêcher ses yeux de vouloir relire encore ces lignes odieuses, qui ne lui apporteraient rien de plus.
Au loin, le craquement sinistre d'un sortilège écorchait le tronc d'un arbre, et d'entre les doigts de Sasha débordaient des larmes silencieuses.
A l'heure du dîner, la Grande Salle débordait de bonne humeur. Après un week end au temps plutôt agréable malgré un vent d'automne, un bon nombre d'étudiants se partageaient leurs anecdotes suite à leur visite à Pré-au-Lard. Du courrier pour la semaine arrivait aussi au-dessus des tables, apporté par des hiboux aux hululements joyeux.
Le brouhaha et les mouvements des élèves firent que Sasha passa presque inaperçu quand il entra à son tour, après tous les autres.
Presque, parce qu'il avait tourné immédiatement la tête vers la table des Serpentards et y avait croisé immédiatement le regard d'Anya Nikitovna. Elle avait le visage fermé, signe qu'elle n'avait pas digéré ce qui s'était produit ce jour, quand bien même ses cheveux avaient perdu de leur couleur carmine qu'il avait vu un peu plus tôt.
Il avait décidé qu'il ne fuirait pas. Au contraire, il avança droit vers la table des Serpentards, à l'endroit même où Anya était assise. Par chance, près du bord, et loin d'Alison dont il ne vit même pas si elle était assise ici. Les lèvres pincées, il se contenta de laisser tomber sur la table, à côté de l'assiette d'Anya et d'un geste sec qui fit claquer le papier sur le bois, la pochette.
Elle était pleine de ce qu'Anya y avait mis, malgré son aspect pitoyablement abîmé. Le dernier numéro du journal était humide et des doigts avaient gauchement effacé les tâches mouillées en emportant l'encre par endroit en traces inélégantes, mais en dessous, s'y trouvaient les photos et coupures.
Il les avait observé, longuement. Il n'était pas compliqué de comprendre que l'histoire d'Anya tenait là-dedans, et pendant qu'il était dans son arbre, il avait senti une brûlure atroce au fond de son ventre, à les observer. Evidemment, il savait bien que l'ennemi aussi, formait des familles et des patriotes. Ils étaient du même sang, d'une certaine manière, et cette même fureur de se défendre courait dans leurs veines.
Il avait songé à déchirer ces artefacts d'une vie sentimentale, à les jeter peut-être dans la Forêt Interdite pour qu'ils y fussent piétinés par la sauvagerie de l'endroit.
Mais au bout d'un long moment, il avait juste tout remis dans la pochette, pour venir ici, les cheveux en bataille et une part de ses vêtements encore mouillés par endroit de l'humidité conférée par l'arbre.
Sans un mot, Sasha s'apprêta à faire demi-tour. Des regards pesaient sur lui, sans qu'il ne sût exactement si elle avait partagé son aventure avec d'autres. Des Russes lui tomberaient peut-être dessus, ce soir, dans son propre dortoir. Il les affronterait s'il le fallait.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124 (
Message publié Dimanche 01 Décembre 2024 à 12:28
)
- Chut ! Mais chut j'ai dit !
Un Sasha catastrophé, les yeux ronds d'indignation, s'évertuait à chuchoter avec énergie tout en tâchant de rester discret. Le pire là-dedans, c'était qu'il ne comprenait rien à ce que disait la petite fille qui gesticulait. Ribbit était sûrement encore un de ces mots écossais que le reste du monde ne partageait pas. Il n'était pas suffisant que le monde entier fisse l'effort de parler leur langue, ces fichus écossais inventaient des mots qui n'existaient pas en anglais !
- Mais arrête j'ai dit !
Sasha n'y tint plus. Mû par l'inquiétude d'attirer à eux non pas seulement l'Ombrelangue qui s'agaçait en bas, mais aussi d'autres animaux de la Forêt dont la réputation n'était pas volée, il se souleva, les pieds en équilibre précaire sur la branche, pour attraper brusquement la petite fille. Ce faisant, il lui colla fermement une main sur la bouche.
La gamine n'était pas calmée pour autant. Elle continua à gesticuler tout en criant des MMH-MMMH ! dont le son traversait fort malheureusement sa bouche fermée et les doigts - sales d'écorce humide et de boue - de Sasha. Evidemment, Mmh-mmmh était sûrement toujours ce mot absurde : Ribbit.
Elle pointa un index vers le ciel, et Sasha suivit son regard, pour apercevoir la créature qui battait des ailes sans vouloir quitter la cime d'un arbre voisin.
Une chouette. Bon, et alors ? C'était juste une chouette avec dans les serres...
- Un crapaud,grommela-t-il, son nez se froissant. Tout ça pour un crapaud ? Ah ben bravo !
C'était donc cela qu'elle avait fait s'envoler avec son malheureux Wingardium Leviosa. Sasha baissa la tête pour la fustiger du regard, ses propres cheveux en bataille lui donnant l'air d'une bête mal léchée. On s'en fichait d'un crapaud ! Au mieux, on le...
Tssss...
Le garçon pencha brusquement la tête de côté, avec la vivacité d'un félin ayant aperçu une proie. L'ombrelangue les avait entendus, bien sûr. Dans la brume qui s'épaississait, Sasha ne le distinguait plus et son coeur s'était mis à battre la chamade. Il avait resserré sa prise plus fermement sur la petite fille, comme pour lui faire comprendre que l'heure n'était plus aux jérémiades - sans penser qu'alors il lui faisait peut-être un peu mal.
Deux problèmes.
Si Sasha avait appris une chose à la guerre, c'était que quand on avait deux ennemis, la façon la plus efficace de procéder était de se débrouiller pour gérer un problème grâce à l'autre. Alors brusquement, il remit la gamine sur ses pieds et la tourna pour qu'elle lui fît face, leur visage à quelques centimètres l'un de l'autre. Il avait libéré sa bouche.
- Tu ne bouges pas. Tu ne cries pas. Tu me laisses faire, ordonna-t-il d'une voix grave, insensible aux grands yeux mouillés de la gamine - au visage pourtant étrangement familier.
Sasha la lâcha en priant pour qu'elle ne fît rien d'idiot, et il tira sa baguette en levant le nez vers la chouette.
- Bestia Domitus ! souffla-t-il.
Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait.
Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure.
- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui pour mieux se concentrer sur le combat, pointant sa baguette sur la chouette.
Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage et un combat bref mais invraisemblable s'engagea : l'Ombrelangue referma ses crocs sur le vide, le rapace évitant de peu une mort certaine. La chouette virevolta autour de la tête du serpent, et fonça subitement, tête en avant : elle creva un oeil de l'Ombrelangue qui fit jaillir sa longue langue fendue avec un sifflement de douleur. Il se rétracta dans la brume et disparut, bientôt poursuivi pour une chouette féroce qui l'éloignerait d'ici.
- Fiou, c'était moins une, souffla Sasha, soulagé.
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Message publié Lundi 02 Décembre 2024 à 17:15
)
Pendant quelques instants, Sasha eut peine à croire à la facilité avec laquelle il avait réussi à sauver le crapaud et leur propre peau avec un plan aussi erratique que celui-ci. Mais sa connivence avec le monde animal payait peut-être malgré tout, après des années à s’entraîner. La brume leur ayant caché la suite du combat, Sasha se laissa tomber accroupi, baguette toujours en main, le temps de faire retrouver à son cœur un rythme raisonnable.
- Mieux vaut eux que nous, se contenta-t-il de commenter au sujet de la mort prochaine d’au moins l’une des deux créatures.
Il ne lui venait même pas à l’esprit qu’un tel destin eût pu heurter les sentiments d’une si jeune fille : lui qui avait grandi dans la campagne savait que les animaux étaient destinés à mourir, pour la plupart, afin de faire le festin d’une autre créature – y compris lui-même. Il ne percevait pas même qu’on pût en être triste à l’âge de cette petite gamine qui l’appelait par son nom. Sasha tressaillit subitement.
- Hein ?!
Sasha décrocha sa mémoire en un « HUH » de surprise proprement ahuri pour scruter l’enfant avec des yeux ronds comme des soucoupes. Comment cette gamine qui lui arrivait à peine au-dessus du nombril pouvait-elle connaître son prénom ET son nom de famille ? Un moment, il la regarda comme si ce petit corps d’élève avait pu renfermer quelque vieille Baba Yaga sage prête à se transformer en un serpent pour le dévorer ou le récompenser de ses bonnes actions. Mais ce n’était tout simplement pas possible, alors il repoussa fermement les histoires de son enfance pour froncer les sourcils, suspicieux.
- Comment tu sais d’abord que…
Ils avaient parlé en même temps, s’étaient interrompus en même temps.
- Hé !
Avec un réflexe idiot, Sasha brassa le vide. C’était trop tard : l’enfant était tombée plus bas, et il la suivit des yeux avec embarras. Elle se prit une branche, puis une autre, avant de se retrouver la tête à l’envers avec sa robe sur elle. L’Ukrainien leva les yeux au ciel en voyant le crapaud et la baguette tombée plus bas.
L’univers visuel de cette enfant devait être bien sombre, à l’instant même. Sasha profita de ce que la vue lui avait été de nouveau dérobée pour descendre tranquillement d’une branche à l’autre, dans un silence feutré. En bas, les coassements du crapaud indiquaient qu’il avait survécu. Il faudrait aller le chercher, lui et la baguette de la petite fille, avant d’essayer de s’orienter pour retrouver le chemin du château. La brume était si épaisse que même pour Sasha, ce n’était pas si facile… En tout cas, pas sous cette forme-là.
Entre un index et un pouce, il saisit un pan de la robe de sorcière pour la soulever. Il découvrit un visage qui devenait tout rouge, mais il avait décidé de prendre son temps. Au moins, saisie ainsi, elle ne risquait plus de créer un autre problème. De son côté, elle le découvrit étrangement allongé sur le ventre, soutenu le long d’une branche voisine, comme si c’était là absolument naturel pour lui de trouver un peu de repos dans cette position, les chevilles croisées derrière lui pour assurer un minimum de stabilité.
- On t’appellerait pas Miss Catastrophe, par hasard ? grommela-t-il de son air bougon habituel. Gigote pas, sinon on en a pour une heure.
Sasha fit un signe du menton vers la plante qui avait saisie l’enfant par le pied.
- Dyavol'skiye silki, on appelle ça par chez moi. T’inquiète, elle va te lâcher bientôt.
Il accrocha le pan de la robe sur une petite branche voisine, pour qu’elle pût garder la vue dégagée, puis il croisa ses mains sous son menton pour faire reposer sa tête sur sa propre branche. A l’envers, la fille avait les mêmes cheveux roux qui dansaient sous sa tête qu’Alison Carter – mais c’était pour lui le seul lien lointain qu’il pouvait faire. Sasha resta longuement ainsi : il la regardait tranquillement, avec la même curiosité qu’une araignée attendait qu’un insecte fût enfin assez mûr dans sa toile.
- T’inquiète, on ira les retrouver après, ton Seigneur Kvakva et ta baguette. Comment tu sais comment j’m’appelle ? il finit par demander. Si tu me dis ce que tu sais, je te libère. Et après, tu montes sur mon dos et tu t’accroches à mes oreilles, ok ?
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Serre de préparation, Dimanche 15 Octobre 2124 (
Message publié Mercredi 08 Janvier 2025 à 10:28
)
Sasha ne savait pas pourquoi, mais soudain, il avait chaud. Ce devait être cette atmosphère tropicale. Ou la vue du thé fumant. Ou Alison en débardeur dont le maquillage se troublait qui lui rappelait qu'il n'aurait pas dû être autant habillé.
Bref, il finit par retirer sa robe de sorcier épaisse pour la déposer sans précaution sur un établi, avant de passer la main dans son col pour que sa cravate se desserrât ne serait-ce qu'un peu. Il jetait ce faisant quelques regards en biais vers la jeune fille.
Ah. Donc j'arrête tout, c'était j'arrête le deal. Il aurait peut-être dû poser la question tout de suite, finalement, grommela sa petite voix intérieure, qui lui reprochait la peine qu'il s'était donnée pour répondre aux exigences de La Fouine. Ce dernier désormais avait développé une obsession pour Alison : le jeune Serpentard bavait depuis quelques jours à la vue de la cadette des Carter, et visiblement était définitivement convaincu que Sasha et elle faisaient des choses pas catholiques dans les placards. Il ne savait pas si Alison s'en était rendue compte. Le boutonneux était déjà bizarre habituellement, sans avoir besoin de l'aide de Sasha.
Ce dernier, mal à l'aise - cette atmosphère était si différente des conditions dans lesquelles il avait l'habitude de rencontrer Alison - s'appuya sur le bord d'un plan de travail. Par un mimétisme inconscient, lui aussi se mit à toucher une plante. Elle avait des feuilles rugueuses et épaisses et il n'avait aucune idée de ce dont il s'agissait, sinon que cela occupait ses doigts. Les égratignures de sa chute sur les escaliers avaient déjà complètement disparu.
- Mmnon, balbutia-t-il, une moue déçue sur le visage. C'était pas que j'voulais qu'on arrête, c'était juste que j'voulais pas qu'on se fasse remarquer des professeurs. Et tu sais pourquoi, maintenant. Je préfère autant qu'ils s'intéressent pas trop à moi.
Ce n'était pas parfaitement vrai. Mais ça l'était partiellement. Ca lui convenait à peu près que les élèves croient qu'Alison se mettait régulièrement sous la table pour s'occuper de son entrejambe. Enfin ça le mettait un peu mal à l'aise comme idée, mais il l'acceptait. C'était une image qu'il pouvait renvoyer, si elle le voulait vraiment. Mais si les professeurs le trouvaient trop entreprenant avec des plus jeunes, et qu'en plus ils découvraient qu'il était un animal, il doutait qu'on le laissât tranquille.
Mais cela voulait-il dire qu'il fallait renoncer au deal ?
- Moi je voudrais bien qu'on continue.
Il avait parlé à voix basse, un peu comme s'il n'assumait qu'à moitié ses propos. Il regarda la tasse qu'elle avait déposé près de lui maintenant qu'elle s'était rapprochée, et il s'en saisit pour s'occuper les mains. Les odeurs qui s'en échappaient se mêlaient à celles d'Alison, se mariaient d'une manière agréable. Sasha osa la regarder : elle lui paraissait différente. Peut-être que c'était parce qu'il n'y avait aucun autre élève pour les épier, mais Alison n'avait pas l'air obnubilée par sa frange, cette fois. Les ondulations qui s'invitaient dans ses cheveux rappelaient la tignasse plus naturelle de Charlie, dans une version moins épaisse, et le maquillage troublé par l'humidité lui donnait un visage plus naturel, moins apprêté. Il la préférait bien comme ça : un peu plus sauvage. Peut-être que c'était parce qu'elle lui ressemblait un peu plus ainsi, lui qui n'était jamais tout à fait net ? Peut-être que c'était exactement le problème : il ne renvoyait justement pas l'image qu'elle voulait.
Par réflexe, Sasha baissa les yeux sur son accoutrement : en-dessous de sa chemise, un jean et des baskets pas très soignée. Mais au moins, pour une fois, il n'était pas plein de boue. Il releva les yeux vers Alison, plongea ses lèvres dans le thé pour se donner une contenance. Mais il eut un mouvement brusque et secoua une main.
- Ah ! Mais c'est trop chaud ce truc !
Avec un geste agacé, il reposa la tasse sur l'établi. Il perdait patience. A quoi ça lui servait de jouer constamment les doux agneaux pour elle si elle ne reconnaissait même pas les efforts qu'il faisait ?
- Qu'est-ce que tu veux, à la fin ? s'énerva-t-il. Dis-moi ! Sois claire quoi, puis je le ferai !
L'écho de sa voix était à demi étouffée par l'atmosphère surchauffée et saturée d'humidité de la serre. Il la regarda, de pied en cap. Ses cheveux défaits, les bretelles de son débardeur qui laissait voir sa peau laiteuse, laissée en évidence. De drôles d'idées lui venaient. Il écarta les bras.
- J'peux faire plus évident, dit-il en tâchant d'avoir l'air convaincant. Si c'est c'que tu veux, à la soirée d'Halloween j't'embrasse de façon très... Er, très entreprenante devant tout le monde. J'te dévore, avec les mains sur les fesses et les baisers dans le cou et tout. J'pourrai prétendre que j'avais bu et que j'me contrôlais plus, tu pourras prétendre qu'on est comme ça tout le temps quand personne nous regarde.
Sasha tâcha de rester stoïque, mais il se sentait fébrile. Sûr que s'il devait faire un truc pareil devant tout le monde, il faudrait réellement qu'il trouvât de l'alcool.
Il était resté les mains écartées, incertain. La réponse d'Alison mettait beaucoup trop de temps à venir à son goût. Il se passa une main dans ses cheveux en soupirant - les décoiffant plus encore que d'habitude si c'était possible, mais son visage était devenu rouge.
- Il fait trop chaud ici. Enfin bref. Si c'est autre chose, on fait autre chose, juste tu me l'expliques, ok ? Tu me dis et je fais, c'est simple. Tu veux que je vienne me planter devant la salle commune des Serpentards tous les jours pour te demander ? Je fais. Que je menace de fracasser les mecs qui t'ont regardée en ma présence ? Je fais. Tu vois ? C'est pas compliqué. Tu dis, je fais.
Son coeur tambourinait dans sa poitrine. Ses propos dépassaient un peu sa pensée sous l'effet de la frustration de perdre ce deal qui lui avait sauvé la mise sur quelques-uns de ses cours. Or, maintenant qu'ils étaient déjà à presque deux mois de la rentrée, si Alison changeait de binôme, il serait fichu. Personne n'accepterait de la remplacer parmi les cinquième années et il ne se sentait plus la capacité d'obtenir des bonnes notes par lui-même.
- St'euh plaît, il ajouta avec une mine déconfite, façon léopard-potté.
Ce titre distingue un donateur d’exception dont la générosité rivalise avec les coffres les plus remplis de Gringotts, faisant de lui un véritable magicien de la fortune solidaire.
A quelques mètres de la lisière, dans le brouillard, Mercredi 27 Septembre 2124 (
Message publié Mardi 03 Décembre 2024 à 09:22
)
- Han-han. Nyet.
Sasha avait fait un lent signe négatif du visage. Décidément, la petite fille n'était pas le moins du monde effrayée par la situation. Sasha la trouvait bien plus courageuse que la plupart des élèves ici, qui, au lieu de s'aventurer dans la Forêt Interdite, y aurait abandonné leur animal de compagnie de peur de se salir les chaussures dans la boue. Alors qu'elle, elle était à peine affolée d'avoir failli être le dîner d'un Ombrelangue puis d'être suspendu par le pied par un filet du Diable.
- Je ferai de la lumière qu'au dernier moment, il expliqua. La lumière, ça attire tout un tas de bêtes, ici. A quoi crois-tu que sert une plante pareille, sinon à être le garde-manger de je sais pas quel animal ?
Effectivement, autour d'eux la brume était toujours là, mais elle s'était étrangement assombrie. Il semblait que les deux élèves étaient enveloppés dans une ouate sombre, comme un cocon humide et froid, et pourtant intimiste. La lumière avait tant décliné que les traits de leur visage allaient bientôt disparaître à leurs yeux, pour ne laisser que les contours de leurs silhouettes.
Face aux questions suivantes, Sasha resta tranquillement silencieux. Il avait l'avantage et le savait parfaitement. Il n'y avait pas de malice dans ses yeux. Il avait l'air juste d'attendre, à la manière d'un chat qui attend patiemment le retour de ses maîtres : un peu plus il s'endormirait là, dans le confort relatif de cette branche solide où reposait son menton sur ses mains striées de ses cicatrices noires et inélégantes.
Mais son regard se fit soudain plus alerte et il se redressa légèrement.
- Quoi ?! T'es la soeur d'Alison ?
Maintenant qu'elle le disait, c'était parfaitement évident. Pas seulement les cheveux roux, mais le petit air donneur de leçon quand elle lui expliquait comment s'appelait Lord Ribbit et qu'on disait les épaules, pas les oreilles. Avec un air bougon, Sasha reposa son menton sur ses mains.
Il n'était pas le moins du monde surpris par les raisons précises qu'évoquaient la gamine concernant sa soeur et leur présumée relation. Non, ce qui l'étonnait plus, c'était tout simplement qu'Alison eût une petite soeur et qu'il ne le sût même pas. Après tout, c'était vrai qu'ils n'échangeaient jamais sur leur vie personnelle, et il ne lui était pas venu à l'esprit que la Serpentard eut une quelconque vie qui la rendît plus humaine. Car jusqu'ici, il se l'était imaginée comme une fille unique choyée par deux parents trop bien habillés pour être innocents, qui l'auraient couverts de cadeaux et de compliments. Une espèce de poupée de porcelaine froide et méprisante, qui pleurait parfois.
Sasha haussa les sourcils après un silence, à regarder les mimiques expressives - tellement naturelles comparées à celles d'Alison - de la petite fille.
- T'es pas un peu trop jeune pour parler de ces choses-là, toi ? Et c'est quoi ton prénom ?
Il n'allait quand même pas l'appeler Miss Carter. Mais enfin, en attendant, Miss Carter posait un sérieux problème : apparemment, les deux filles semblaient partager beaucoup de leur vie personnelle et il pouvait bien sûr décemment craindre que...
De discrets bruits se firent entendre à leur droite et Sasha tourna vivement la tête.
Il replia ses jambes sous lui pour s'accroupir au bord de la branche, silencieusement. Elle se plia dangereusement, le rapprochant de la petite fille.
- Ecoute, petite soeur trop-gentille, ce que je sais, c'est que tu es beaucoup plus courageuse que ta soeur et que les autres élèves ici. Alors ce serait dommage que tu sois le dîner d'une araignée.
Il chuchotait, et ses yeux alertes ne quittaient pas ceux de la petite fille, à la manière d'un hypnotiseur. Etrangement, il avait l'impression d'avoir déjà fait ça : parler à une petite fille pour la convaincre. Et quand faire peur à la petite fille ne fonctionnait pas, il fallait jouer sur d'autres cordes. Une drôle de douleur lui tordit les entrailles, sourde et lointaine, mais il tâcha de se concentrer.
- Alors tu as droit à une réponse ou deux, mais seulement en échange de garder le secret. D'accord ?
Il attendit d'avoir au moins un mouvement de tête en guise de réponse. Quand il reprit la parole, c'était pour parler un peu plus bas encore, comme si les troncs étaient remplis de créatures trop curieuses qui auraient pu voler leur secret.
- Je viens ici parce que je suis pas tout à fait humain. Mon travail, c'est de faire en sorte que les monstres cachés n'aillent pas plus loin que la lisière de la Forêt. Tu vois ? Pour qu'ils n'attaquent pas le château et ses habitants.
D'un index, il désigna une direction, probablement celle du château, même s'il n'était pas certain que ce fut cette direction-là.
- Mais il n'y a qu'un monstre lui-même qui peut faire ce travail-là. Et pour que je puisse continuer à travailler, pour que les créatures de la Forêt n'envahissent pas les gens du château, les humains, hé bien il ne faut pas qu'il sache qui je suis vraiment. Tu comprends ?
Voilà longtemps qu'il n'avait pas inventé de conte. Il faisait ça souvent, quand il était plus jeune, mais il n'en avait plus eu l'occasion depuis longtemps. Ce qui était fort dommage, car il estimait s'être beaucoup amélioré depuis. Sasha vérifia qu'il avait bien toute l'attention de la petite fille.
- Alors, Oksana, il faut que tu dises à personne la vérité sur moi. Ni que je viens dans la forêt, ni que je suis une bête, ok ? A personne, et encore moins à ta soeur.
Il ne savait pas quel âge elle avait, au fond. Peut-être était-il trop tard pour qu'elle pût croire son histoire. Mais l'effrayer davantage ne marcherait pas et il le savait - sauf à la traumatiser, ce qu'au fond, Alison ne lui pardonnerait sûrement pas. Il capta la mimique dubitative de la petite fille, même à l'envers.
- Quoi, tu me crois pas ?
Il avait haussé les sourcils dans une expression qui paraissait sincèrement étonné, puis il haussa les épaules.
- Tant pis, tu verras toi-même. Il faut qu'on se dépêche, sinon le crapaud que t'as dans le ventre va réveiller toute la forêt. Je vais allumer la lumière et me mettre en dessous de toi. Et toi, tu te rappelles : tu t'accroches à mes oreilles, insista-t-il, sans un sourire. Mais pas trop fort, s't'euh plait.
Sasha fit apparaître sa baguette magique dans sa main. Mais une fois qu'il l'agita, faisant apparaître une faible lumière au bout du morceau de bois, qui éclaira leur deux visage, il coinça la baguette en travers de sa bouche. Et alors qu'il la bloquait avec ses dents, il se laissa tomber subitement, vers la branche d'en-dessous la petite fille, tandis que déjà, le Filet du Diable relâchait doucement sa prise.
Ce qui atterrit sur la branche d'en dessous n'avait plus rien d'un garçon de sixième année. Des pattes souples et velues s'ancrèrent dans la branche qui ploya légèrement sous le poids de la bête, à l'aide de longues griffes plantées dans le bois. Dans la brume, on distinguait surtout sa silhouette trapue et la longue queue suspendue, qui s'agitait lentement, trahissant une impatience animale, et les tâches sombres d'un pelage marbré. De Sasha, il ne restait qu'une seule chose : deux yeux verts bougons qui fixaient de potentiels prédateurs dans la brume, et des traces noires discrètes entre son pelage marbré.