Harry Potter RPG

Liste des messages de Freya Carter

Freya Carter

Femme

25 ans

Sang-mêlé

Britannique

Et demain ?

Message publié le 11/07/2025 à 18:20

Le printemps mal dégrossi gratte la grisaille écossaise. L'herbe verte tâche les flancs du village de Pré-Au-Lard pour rappeler qu'ici, la nature s'obstine chaque mois de mai à revenir malgré la brume dense. Sur les toits d'ardoise Grand-Rue, et au coin des volets de bois, quelques rayons timides du soleil font briller la rosée en dentelle de perles. Il est quinze heures mais il pourrait être sept heures ou midi, que ça ne changerait rien ; le ciel est aquarelle. C'est une journée humide, délavée d'averses, et bientôt le visage des visiteurs s'élève. Un arc-en-ciel surplombe le village.

 

Chez Owen Carter Quidditch, l’air sent l'aube des examens et l'imminence des vacances scolaires. Certains étudiants espèrent se changer les idées entre deux révisions, d'autres clients prévoient de voyager en balai au mois de juillet et viennent chercher un équipement, ou améliorer leur monture. Côté sports volants, les clubs préparent le matériel des camps d'été, et toujours plus de curieux espèrent pouvoir essayer un OCQ500 après qu'Elliot Blackburn ait été la meilleure des égéries. En rayon, les gants légers ont remplacé ceux d'hiver, et des collections aux couleurs estivales ont pris place sur les portants à vêtements. Tête de gondoles, les kits de réparation express et les rangements extensibles sont les stars du fly-trip, à côté des nouveaux maillots d'équipes. 

 

Au-delà du quotidien de la boutique en cette saison, une ambiance pesante règne au-dessus du foyer Carter. Le courrier d'Owen a redonné à Freya l'espoir de voir son père rentrer. Sans le vouloir depuis la semaine dernière, elle surveille la rue, tourne la tête machinalement vers l'entrée à chaque tintement de clochette, ronge la peau du contour de ses ongles quand elle n'utilise pas ses mains pour jeter des sortilèges ou lire des parchemins. Peut-être arrivera-t-il cet après-midi ? Peut-être demain ? L'incertitude lui renverse les tripes de temps à autre. Elle serre les dents.

 

Au comptoir Fenella sifflote gaiement, au service des clients qui veulent passer en caisse, un balai miniature tournoyant au-dessus d'elle. La Serdaigle demeure pimpante en dépit de l'inquiétude creusant le front de Freya. En quelques mois, elle est devenue vendeuse référente du samedi en boutique, remplaçant souvent l'aînée Carter pour lui libérer du temps. Son sourire illumine le commerce et aide Sasha à gagner en confiance. "Travail d'équipe", répète-t-elle lorsqu'ils se divisent les tâches, l'élève en charge du réassort et des besognes plus simples, Fenella à la rescousse quand il s'agit de conseiller un visiteur aux questions pointues, ou pire, qui ne s'exprime qu'en Écossais. Au fil des weekends, le binôme a pris des marques solides, utiles pour survivre aux rushs de Pré-Au-Lard. 

 

Les deux jeunes femmes ont gardé un avis nuancé à propos du passé de l'Ukrainien. Si au début elles l'observaient de biais, conscientes du bagage lourd et invisible dans son dos, elles se sont toujours efforcées de rester bienveillantes, de penser avec compassion à l'égard de son histoire douloureuse, et surtout respect à l'égard de son courage. Cependant une part de l'aînée Carter surveille Sasha de loin, pas pour le piéger, pas pour le juger, mais pour veiller au bon déroulement des choses, au village comme à Poudlard.

 

Aujourd'hui d'ailleurs, il a demandé à lui parler. Alors qu'elle dépose une tasse de thé sur le comptoir à l'intention de Fenella, la rouquine interpelle le sixième année. Sasha ? Tu viens derrière du coup ? Après un coup d’œil vers l'entrée, sa tête disparaît de l'autre côté du rideau qui sépare le magasin de l'arrière-boutique. Elle a servi deux tasses de thé sur la table basse jouxtant trois fauteuils dépareillés au confort incontestable. Installe-toi, on va s'mettre là, dit-elle en désignant le Chesterfield abîmé. Près des boissons fumantes, quelques biscuits et une barquette de mûres attendent de rassasier l'appétit légendaire du Gryffondor. Sers-toi, indique Freya en prenant une baie noire qu'elle jette dans sa bouche. 

 

— Alors, tu voulais me dire quelque-chose ?


Le grand emballement

Message publié le 11/07/2025 à 13:01

Elle voudrait qu'il ne s'arrête plus. Qu'il vole jusqu'au-delà des frontières, et qu'elle le suive, laissant tout derrière. L'air glacial d'Écosse peut bien lui mordre les joues, Freya s'en fiche, riant aux éclats tandis que son coeur s'emballe une fois encore. Les chants de Noël diffusés h24 en boutique l'ont rendue mièvre, ou l'était-elle déjà avant ? C'est pas de sa faute si Elliot a toujours la bouille de leurs treize ans lorsqu'il la taquine, pas de sa faute s'il la ramène à l'âge où n'importe quoi était possible, pas de sa faute si à ses côtés elle se sent heureuse, comme avant. Jouant des coudes et des épaules avec le batteur, la rouquine entend son corps réclamer plus. Plus de frôlements, plus de contacts - aussi brusques soient-ils parfois - plus de regards échangés et le monde qui disparaît autour.

 

Est-ce qu'on appelle ça l'amour ?

Dans son cas, c'est plutôt une malédiction.

 

Les balais se calment, les souffles s’apaisent, mais Freya vient de reprendre une dose dangereuse à proximité du brun. Elle est accro, soyez-en sûrs. Elle plane, littéralement. Son esprit imagine l'impossible, loin de penser à la descente sévère qu'il faudra encaisser ce soir, demain, lorsqu'il aura disparu et qu'elle ramassera les miettes de ses souvenirs pour affronter le vide qu'il laisse à chaque fois.

 

Leurs jambes au repos, les OCQ500 à faible allure, ses bras libres, l'aînée Carter rend son sourire au Gallois, une lueur de fierté au fond de ses yeux fatigués. En match, ça va être fou. On a déjà programmé six mois de fabrication avec Jun là, on a des contrats de partout alors qu'on montre juste des prototypes quand on démarche les équipes, informe-t-elle, soulagée d'avoir réussi son pari, à presque rien d'assurer un retour au succès familial dans l'univers du quidditch. Le batteur risque d'y gagner aussi en notoriété, pour un peu que la sphère des entraîneurs nationaux commence à s'intéresser au joueur qui a eu le privilège d'être le premier à chevaucher un 500.

 

Plus bas, sous les nuages et la brume, Pré-Au-Lard et sa campagne frissonnent, et le château attend la fin des vacances, protégeant les élèves restés en son sein jusqu'à la nouvelle année.

 

— T'as eu un bon Noël ? T'as réussi à te reposer ? questionne Freya, sincèrement soucieuse des conséquences du rythme de son égérie, et des répercussion de la pression qu'il subit au quotidien. Elle observe Elliot sans oser laisser trop traîner ses yeux sur son profil ravageur. Elle avait secrètement espérée qu'elle le trouverait moins beau en grandissant, que ça l'aiderait à tourner la page, mais devinez quoi ; il est craquant. L'aînée rabat ses cheveux chaotiques en arrière, ces derniers qui reviennent aussitôt lui lécher les joues et le front, comme si son visage était une torche rousse, flamboyante. Pour nous c'est joker, ça a fini avec Charlie en pleurs et Alison en fugue, j'veux oublier ça, confie-t-elle honteusement. Son regard balaye la mer blanche qu'ils survolent, un soupir au bout des lèvres. Il faudra bientôt rentrer. D'ailleurs Elliot, tu sais c'qu'il se passe entre Alison et Spike Ryder ? J'veux dire, j'me doute de c'qu'il se passe hein. Mais des fois elle dit des trucs juste pour m'emmerder, alors j'sais jamais c'qui est vrai. Tu l'sais toi ? Il en parle ? 


Le grand emballement

Message publié le 29/06/2025 à 13:20

Fille d'Owen Carter, la jeune Freya était prédisposée à suivre les pas de son père dans le quidditch, elle-même particulièrement douée sur un balai. Les recruteurs de talents des ligues suivaient sa progression avant celle d'Elliot, rien que grâce à son nom de famille, sans qu'elle n'ait encore l'âge d'intégrer les équipes scolaires de Poudlard pour briller. Poursuiveuse au départ, et très vite en route vers une carrière d'attrapeuse, la rouquine a éloigné d'elle-même toutes les opportunités dès lors que sa mère a disparu. Elle a refusé un poste dans l'équipe de Poufsouffle, partagée entre l'école et Pré-Au-Lard, a tourné le dos aux chasseurs de têtes et c'est mieux comme ça

 

La voie d'Elliot n'a d'enviable que le temps qu'il passe sur un balai.

Freya n'aurait jamais supporté le reste. 

 

Elle l'admire, heureuse pour lui, attentive depuis le début à sa progression, match après match, d'une équipe à l'autre. Aujourd'hui encore, l'aînée des trois filles Carter sent bien qu'il a fait une place qu'elle n'aurait pas pu assumer. Un sourire un peu con aux lèvres de le voir prendre en main l'OCQ500, Freya vit le bonheur d'Elliot par procuration.

 

Le batteur des Catapultes de Caerphilly peut apprécier son travail à sa juste valeur, et se rendre compte du bouleversement que va provoquer l'arrivée des nouveaux balais Carter sur le marché du sport volant. Sentir la reconnaissance d'Elliot donne des ailes à Freya. Elle oublie un instant la fatigue des dernières semaines, des dernières années. Une chaleur douce au fond du ventre, elle se concentre pour graver l'image dans sa mémoire, bien consciente qu'il s'agit d'une miette de pain au cœur de la vaste vie de son égérie.

 

L'exclamation du brun réveille l'ancienne Poufsouffle qui saisit alors son propre OCQ500, en chêne blanc aussi, moins tape-à-l'œil cependant. En trois secondes, elle s'élève à la hauteur du prodige, baguette rangée. Tu vas pas te contenter du plafond quand même ? demande-t-elle sur le ton du défi. Ses doigts envoient un sortilège à la penderie faisant office de passage vers les souterrains de Pré-Au-Lard, et Freya virevolte autour d'Elliot. Passe devant, prends ta revanche ! Elle rit, l'esprit léger, la sensation d'avoir douze ans. Son balai donne des à coups, impatient, et la rouquine dessine de grands lacets pour l'apaiser en attendant que le Gryffondor ne fonce droit vers les portes ouvertes du meuble. Son rythme cardiaque accélère, ses phalanges serrent le manche. Elle est prête à suivre Elliot. 


Le grand emballement

Message publié le 19/06/2025 à 19:02

En dehors d'Elliot , chaque membre de l'équipe des Catapultes de Caerphilly aura bientôt son OCQ500, puis quelques autres célébrités du quidditch choisies pour leur rayonnement parmi la sphère sportive. Freya et Jun doivent distribuer pas moins de 30 balais avant fin janvier, alors l'atelier aux dimensions de cathédrale d'Owen s'en trouve encombré. Après elle sous-traitera certaines étapes de fabrication et ne s'occupera plus personnellement des tests de compatibilité, mais les premiers modèles ont le privilège d'être entièrement assemblés dans le sous-sol grandiose de l'arrière-boutique.

 

Surplombées par des lanternes flottantes, les tables de travail témoignent de tâches interrompues, diverses et variés. Là, un manche en mélèze à moitié poncé, ici des outils de gravure près d'une bague en laiton brossé, au fond quelques plumes abandonnées en pleine taille, et partout, des parchemins remplis de croquis dont certains bougent en silence. Mais le véritable spectacle se passe en l'air, entre les lanternes. 

 

Jusqu'alors distraite et incapable de répondre aux provocations d'Elliot, la rouquine se tourne dans sa direction quand il réclame son balai. Ton bébé ? Essaye de le faire venir, défie-t-elle en donnant un coup de menton vers le plafond. Là-haut, l'OCQ500 montre des signes d'impatience, dessinant des cercles larges, irréguliers, ponctués parfois de feintes nerveuses. Devine quoi, j'crois qu'il s'ennuie, ajoute Freya en souriant. Elle attend depuis longtemps la réaction du Gryffondor qui tient une place particulière au centre de sa vie, quoiqu'il en fasse. Siffle-le, conseille-t-elle en se positionnant à ses côtés pour fixer le balai taillé dans un chêne blanc noueux et dense, portant encore les stries naturelles du bois, comme autant de cicatrices de combattant. Couvert de vernis mat texturé, légèrement bruni, l'engin semble capturer la lumière aux endroits où sa patine tire vers le doré. Chêne blanc, oiseau tonnerre. Les propos de l'aînée Carter confirment l'impression d'apercevoir des plumes immenses mêlées aux branches de la queue imposante du balai, retenues par plusieurs cerclages en alliage de bronze et d'or. Les étriers sont forgés de ce même mélange, inclinés en avant pour un meilleur dynamisme. Au-dessus, un siège couvert de cuir végétal languit d'être chevauché, tandis que les plumes vibrent à l'arrière, arrogantes.

 

Fruit de longues conversations entre le synthétiste et Freya, le balai possède un tempérament incompatible avec l'hésitation. Il toise les deux sorciers en produisant un bourdonnement grave quand la Poufsouffle ricane. On faisait les ajustements la semaine dernière, et il a failli péter les côtes de Jun, il lui faut du répondant, ce qui ne devrait pas poser de problème, a priori, mais sait-on jamais. Ses yeux cernés observent le batteur, surveillant la moindre de ses attitudes jusqu'à ce qu'il enfourche enfin son OCQ500. 

 

— À toi de jouer. Impressionne-moi. Elle enfonce une main dans sa poche, prête à sortir sa baguette au besoin. 


Le grand emballement

Message publié le 16/06/2025 à 14:24

"Les crédits de 2124 expirent le 22 janvier. Pensez à faire valoir vos gallions avant qu’ils ne se dissipent !" scande une affiche au-dessus du comptoir tandis que la foule se presse entre les rayons d'OCQ. L'effervescence est palpable au 76 Grand-Rue. Certains clients viennent échanger leur cadeau de Noël, déçus d'avoir reçu le t-shirt de la mauvaise équipe, ou des protections trop petites. D'autres sont là pour utiliser le bon d'achat offert par une tante qui ne savait pas quoi choisir, ou juste pour dépenser l'argent économisé toute l'année. La visite à Pré-Au-Lard est un classique des vacances scolaires auxquelles les familles de sorciers dérogent rarement. Le charme du village en hiver profite aux commerces, et Freya ne lâche rien malgré la fatigue accumulée depuis la rentrée.

 

— J'dois prendre la résine de saule argenté en bas, tu vois le brun là qui vient d'arriver ? C'est Elliot. Dis-lui de venir derrière s'te plaît, demande la Poufsouffle à Charlie en désignant Nikola Brutcell. Les bras chargés d'une caisse avec des items à remettre en boutique, la benjamine opine et se précipite au comptoir tandis que Freya emprunte l'escalier en colimaçon, et disparaît. Ali, tu vois le brun qui vient d'arriver ? C'est un héritier de la monarchie française hyper blindax et célibataire il faut l'appeler Monseigneur Munster. J'ai la flemme, j'te le laisse du coup, déclare-t-elle avant d'emporter sa caisse plus loin, à un endroit d'où elle pourra suivre discrètement la scène, si personne ne l'interrompt. Alison fixe l'étranger et rajuste sa frange. 

 

Les sœurs Carter ont encaissé l'absence d'Owen à Noël chacune à leur manière, la déception nourrissant chez elles des émotions différentes, entre résignation, tristesse et colère.

 

Forte d'avoir enfin seize ans, la Serpentard s'approche du joueur gallois sous couverture. Monseigneur Munster, bienvenu chez Owen Carter Quidditch, déclare-t-elle maladroitement en effectuant un genre de courbette. Dans un coin, Charlie se tient le ventre, prise d'un fou-rire incontrôlable. Les clients jettent quelques œillades à l'étrange duo formé par Alison et son interlocuteur. Permettez que je vous escorte humblement vers notre matériel d'exception. Que cherchez-vous exactement ? Les pommettes rouges, l'adolescente s'essayer à franciser son accent, sans grande réussite ; on dirait plutôt qu'elle parle avec une pomme de terre trop chaude sur la langue. Alors que derrière eux, une affiche représente Elliot Blackburn en train de poser torse-nu chevauchant un OCQ500 au milieu des Highlands, elle s'explique. Vous avez besoin d'une perle rare comme notre prochain balai. Ignorez le modèle, les Anglais n'ont pas l'élégance à la Française, vous serez bien plus chic que lui Monseigneur Munster, signale-t-elle en cachant la silhouette musclée du sportif.

 

— Ali, qu'est-c'tu fout ?! interrompt Freya au bout de cinq bonnes minutes de comédie. Hein ? Bah je- viens Elliot, murmure la responsable du magasin qui fait signe au Gryffondor de rejoindre l'arrière-boutique. Alison s'interroge, puis fulmine en découvrant Charlie, toujours morte de rire entre les écharpes de supporters et le présentoir à multiplettes. Putain mais quelle petite- Alison, CAISSE, dépêche. Charlie, reprends-toi il reste moins d'une heure, s'te plaît. Freya referme la porte derrière Nikola sans prendre le temps de vérifier que ses sœurs se soient remises au travail. "Inventaire J-4, fermeture annoncée de deux jours minimum !" chantonne l'horloge accrochée au mur pendant que la rouquine semble faire un point mental dans sa tête. Ça, c'est ok. -ça... c'est demain. ... Ah merde, bon. J'lui dirai après- Elliot, réalise-t-elle soudain en croisant pour la première fois le regard de son ancien camarade de classe. Elle est clairement surmenée. Ça va ? Un peu le speed ici comme tu vois. Bravo pour votre match au fait. Bon on descend ? 


Les Frontières

Message publié le 30/05/2025 à 21:06

À quinze ans, Freya a géré par intermittence le foyer à la place de son père qui plongeait dans une dépression sévère. À seize ans, elle a décidé de la meilleure façon d'accompagner l'anorexie mentale de sa sœur, Alison, sans que les services magico-sociaux ne puissent être alertés. À dix-sept, elle éconduisait les journalistes trop curieux, pressés aux portes de la boutique. L'année de ses dix-huit ans, elle a redressé le commerce OCQ, et maîtrisé les catastrophes causés par l'éveil du don magique de Charlie, et ses multiples idées fantasques. Le reste n'a été qu'une succession de défis, de choix impossibles mais essentiels, de beaucoup de résilience.

 

Alors face à la réaction confuse de Sasha, elle acquiesce, ravalant ses doutes comme la centaine de fois où elle a été obligée de prendre une décision hâtive. À samedi, rentre bien, se contente-t-elle de répondre en le suivant des yeux, persuadée qu'il gardera un souvenir amer de cette conversation. La silhouette de Sasha s'éloigne et la Poufsouffle espère avoir su trouver les mots quand même, et qu'il comprendra. Un soupir d'épuisement traverse ses lèvres. 

 

C'est seulement lorsqu'elle rentre dans la boutique que Freya remarque une lettre au sol, probablement glissée sous la porte. Elle referme derrière elle et ouvre le courrier, observée par différents posters d'Elliot Blackburn, quelques uns de Spike, et un étendard représentant son père. Le parchemin porte l'écriture raffinée de Jun.

 

Il l'invite à sortir avec lui pour la St Valentin, après leurs journées de travail respectives. La rouquine relit deux fois la formulation parfaite du Japonais et sourit. Elle ne le pensait pas capable d'un tel bond en avant. Les phrases sont sobres, pudiques, sans débordement de quoique ce soit, comme l'est son collègue au quotidien. Freya lève la tête et croise le regard d'Elliot Blackburn qui s'arrête de cirer son balai pour lui envoyer un clin d’œil. 

 

Elle se remémore leur seule St Valentin, en quatrième année, quand le Gryffondor a fini par dessiner un coeur sur le joint qu'il était en train de rouler et le tendre à la rouquine, accompagné d'une fleur, et d'une réplique inoubliable : "Tu diras pas j'suis pas romantique, j'peux même t'allumer la mèche s'tu veux".

 

Bien-sûr, Freya a gardé le joint, et la fleur. Bien-sûr, elle n'a jamais offert son cadeau ce jour-là, honteuse d'en avoir fait "trop", de s'être enflammée. Les joues rouges, la Poufsouffle relit encore la lettre ; c'est sa première invitation pour une Saint Valentin. Elle marche un peu dans le magasin, sentant les yeux de quelques posters la suivre. Tu vas faire quoi ?! demande l'aînée Carter sur un ton de défiance à son ancien petit-ami occupé à dessiner des loopings devant un coucher de soleil. Il a probablement déjà reçu un sac entier d'invitations à partager des dîners et des hôtels pour la St Valentin, se dit-elle, amère. J'vais y'aller Blackburn. Je mettrai peut-être même une mini-jupe, affirme-t-elle à haute voix, provoquant l'indignation d'Owen Carter en banderole. 

 

— Faudrait d'jà que vous soyez là pour m'en empêcher, signale Freya, appuyant son regard sur les portraits de son père et d'Elliot. La scène lui provoque un rire, comme une soupape laissant échapper la pression de cette fin de semaine. Elle range le parchemin et quitte la boutique sans leur dire "bonne nuit". 


Flou artistique

Message publié le 30/05/2025 à 19:12

Lorsqu'Elliot affirme son choix pour le chêne blanc, Jun acquiesce, un sourire de satisfaction aux lèvres, et Freya opine aussi en mordant l'intérieur de sa joue pour retenir sa joie d'être trop virulente. L'adolescente profondément amoureuse du batteur hurle en elle que c'est un signe, dingue d'avoir le même bois de prédilection. L'adulte raisonnable se contente de continuer à ranger le matériel, écoutant Jun donner quelques explications au Gryffondor. On parle plutôt d’appréhension de l'espace, rectifie-t-il tout en emballant les échantillons de bois dans différents tissus, visiblement beaucoup plus précautionneux que l'aînée Carter. Basiquement, les humains et les animaux terrestres vont en avant, en arrière, Z et X, et parfois en bas ou en haut, Y, mais à petite échelle. On évolue sur une surface plane- sauf les mecs en balais, ajoute Freya, occupée à faire léviter du bout des doigts les housses pleines l'une après l'autre jusqu'à l'intérieur de la malle.

 

Dehors, le vent souffle contre les parois en tissu de la tente qui claque par endroit. Sauf les mecs sur des balais, reprend Jun d'une voix professorale. Justement, quand tu voles ou quand tu nages, t'utilises constamment les trois dimensions, X, Z, et Y. Son index dessine les trois axes puis se promène au milieu pour illustrer son propos. La rouquine jette un œil au Japonais, puis à Elliot, son ancien camarade de classe parfaitement incapable de suivre un cours sans jouer au pitre. Elle se marre en devinant qu'il regrette probablement d'avoir posé la question. Mais Jun poursuit. Dans l'OCQ500, on va chercher cette appréhension du monde en 3D pour implanter la mémoire sensorielle de la créature directement au coeur du bois. Ses perceptions spatiales vont apporter la fluidité du mouve- Jun, tu l'as perdu. Quoi ? Freya ricane et s'approche en prenant le bras du synthétiste. 

 

— Garde ça pour la conférence de presse, pour les journaleux du Plume & Particules, tu seras parfait, ajoute-t-elle d'un ton assuré en hochant la tête avant de lâcher Jun qui semble réaliser s'être enflammé, au moment même où un membre du staff d'Elliot interrompt leur conversation. Il est temps que chacun retourne à ses occupations

 

Le résultat de la séance photo sera communiqué par le studio Altitude directement au producteur du batteur et à la fille d'Owen Carter, sans même qu'ils n'aient à se déplacer. On se voit à l'atelier pour finaliser ton balai, ils doivent me dire si t'es dispo dimanche ou celui d'après, qu'on fasse ça vite avant décembre, lance Freya à Elliot tandis que quelques sorciers brandissent leurs baguettes et font disparaître les trois larges tentes.


Les Frontières

Message publié le 27/05/2025 à 09:21

Freya écoute attentivement l'étudiant en essayant de jauger sa sincérité. À travers l'embarra de Sasha, elle reconnaît l'honnêteté qu'elle aimerait y voir, et décide de le croire. J'te fais confiance, répond-elle sans quitter le regard fuyant de l'adolescent. Son père n'aurait pas eu la même clémence. Owen Carter aurait demandé au Gryffondor de prendre ses distances avec la famille, et Freya le sait. Mais les samedis passés en compagnie de l'Ukrainien et le repas ce soir lui font penser qu'il a laissé là-bas les stigmates de guerre, et qu'il profite de l'Écosse pour changer d'air, et oublier la violence.

 

— Sasha, c'que j'ai dit avant est toujours d'actualité, j'apprécie ton engagement dans le job, j'aime bien ta façon d'être, donc ça change rien là-dessus, ok ? insiste-t-elle, endossant à la fois le rôle de responsable d'OCQ et de cheffe temporaire du 76 Grand-Rue. C'est sa casquette de grande sœur qui sera plus difficile à convaincre. Freya dévisage Sasha dont elle connaît la relation avec Alison à travers les récits de Charlie depuis le mois d'octobre. Je parlerai à Alison et Charlie, parce qu'Alison abordera jamais le sujet avec moi, quoiqu'elle en pense, et Charlie cogite trop, elle a déjà plein de questions en tête. Je trouverai les mots pour expliquer ta situation, et qu'elles restent indulgentes, et discrètes. Mais elles doivent savoir si elles te fréquentent. Pour leur sécurité. Le ton ne laisse aucun doute sur les intentions de la Poufsouffle, déterminée à prendre les choses en main. Ses sœurs sont intelligentes, elles sauront écouter, se persuade-t-elle. 

 

Un rapide calcul permet de comprendre que Sasha s'est engagé entre douze et treize ans ; un âge où personne ne devrait avoir à rejoindre des unités de combat et les horreurs du terrain. Freya choisit de transformer cette perspective effrayante en compassion. Moi aussi j'ai dû grandir vite, j'ai pas eu le choix, même si c'était dans un contexte moins violent, se confie-t-elle alors que le froid traverse son châle.

 

La conversation importe davantage, et l'aînée Carter humecte ses lèvres, traversée par le souvenir de son adolescence catastrophique. C'est difficile de se construire une personnalité quand on nous impose un chemin si brutalement, et toi encore plus. J'veux continuer à te soutenir, mais tu dois m'dire s'il y a des choses pas claires qui t'ont suivies ici en Écosse ok ? Comment savoir ce qu'il a entendu, ce qu'il a vu, ce qu'il a enduré, et ce qu'il a fait avec les Veilleurs de l'Aube ? Au-dessus du toit, le rapace rappelle sa présence et sa surveillance du foyer  en poussant un unique cri strident. Freya se tourne et aperçoit Charlie derrière la fenêtre du salon. Celle-ci disparaît aussitôt. Soudain, la Poufsouffle se souvient du couvre-feu et couvre son front. Tu vas être en retard, t'auras qu'à dire que j't'ai retenu au magasin d'accord ? J'écrirai un courrier s'il faut. On en reparlera la semaine prochaine.


Les Frontières

Message publié le 26/05/2025 à 00:33

Pourquoi a-t-il souhaité bonne chance à Charlie pour cette nuit ? s'interroge l'aînée Carter en suivant Sasha vers la grande porte en bois du magasin. Elle remonte autour de son cou le châle écossais attrapé au vol dans les escaliers alors qu'ils sortent, leurs visages éclairés par les lanternes de la Grand Rue et quelques insectes luisants. C'est rien ça, répond très sincèrement Freya aux remerciements mêlés d’inquiétudes du Gryffondor.

 

S'il y a bien une chose qu'elle a remarqué sur Sasha depuis le mois de janvier, c'est qu'il est un garçon poli, soucieux de se rendre utile, et embarrassé par sa propre présence quelque-part, comme s'il avait peur de gêner. Elle croise les bras au-dessus du châle en souriant. Mon père fait deux mètres cinquante, j't'assure qu'il mange plus que toi ! Le potage entier aurait pu passer dans l'estomac d'Owen, la miche de garlic bread aussi, et encore une omelette géante. La rouquine observe l'adolescent et se décide à lui ouvrir un peu son coeur. Au contraire, tout le monde était content de t'avoir à table, d'habitude on laisse des restes quand j'suis toute seule avec Charlie, dit-elle en espérant le rassurer. En vérité, ça avait été bon de sentir l'agitation remplir à nouveau l'appartement durant ce repas. Freya hausse ses épaules pour se donner un air de rien. Même au magasin, je trouve que t'as fait ta place, faut pas douter de ça hein. Grattant un morceau de mousse accroché aux pavés du bout de sa chaussure, elle cherche ses mots avant d'aborder le prochain sujet - celui qui la tracasse.

 

— Par contre Sasha, commence la Poufsouffle en reprenant une posture droite, les deux pieds stables sur le sol. Elle observe minutieusement les réactions de l'étudiant. On n'avait jamais vraiment parlé de ton histoire, c'est sûrement d'ma faute, j'aurais dû poser des questions. Elle avait choisi d'accueillir Sasha comme n'importe quel autre élève de Poudlard, ignorant la méfiance de certains villageois envers les réfugiés slaves. Aujourd'hui, Freya regrette de ne pas s'être intéressée davantage à son employé. J'suis désolée, j'ai du mal à toucher terre depuis la fin de l'été, j'ai manqué de lucidité, j'aurais dû prendre des nouvelles de ta famille, ou même juste te demander comment tu vis la situation. Fenella y avait pensé directement, elle. Le regard de l'aînée Carter voyage d'une blessure à l'autre sur le visage de son interlocuteur. Elle voit encore la façon dont il a bombé le torse tout à l'heure pour annoncer qu'il s'était engagé parmi les sorciers combatants d'Ukraine. Chez les Veilleurs, ça a duré longtemps ? s'enquiert-elle soudainement.

 

L'ambiance change quand Freya pèse chacun de ses mots, consciente de la délicatesse du sujet. Elle reste toutefois déterminée à obtenir ce qu'il faut d'informations pour défendre son foyer, et d'abord ses sœurs. J'veux dire, sans vouloir juger... C'que t'as vécu là-bas, ou c'que t'as dû faire, ça laisse des traces j'imagine. De plus en plus de journaux décrivent les groupes de combattants slaves comme des monstres prêts aux pires horreurs, y compris entre eux. 

 

Depuis le toit, un hibou grand-duc écoute vaguement l'échange, surveillant le ciel sombre de Pré-Au-Lard.

 

— J'ai rien à te reprocher, mais- la rouquine s'interrompt, mal à l'aise avec la conversation. Son père aurait dû être là et gérer ça, ainsi que beaucoup de choses. J'dois veiller sur Alison et Charlie, j'peux pas fermer les yeux, tu comprends ? Elle prend une respiration d'encouragement.

 

— Est-ce que des fois tu sens que tu pourrais être dangereux à cause de tes souvenirs ? Est-ce que j'dois m'inquiéter Sasha ?


Les Frontières

Message publié le 23/05/2025 à 20:12

— Elle s'appelle comment ? questionne Charlie, les yeux posés sur le vif d'or, puis vers le visage triste de Sasha dont les paroles semblent la toucher. La suite du récit force les trois filles à imaginer une situation qu'elles ne connaissent pas, mais dont le Gryffondor parle avec tant de franchise qu'il arrive à en dessiner les contours au fond de leurs esprits. Exempté, se contente de rectifier Fenella alors que le silence ponctue chaque phrase du garçon, jusqu'à ce que Charlie comprenne le sens de ses derniers mots. Tu t'es battu à la guerre ?!

 

— Charlie, il veut pas en parler, intervient immédiatement Freya, à la fois consciente que l'image peut heurter la Serdaigle, et que le souvenir risque d'affecter Sasha. "Les Veilleurs de l'Aube" ? Ils ont rendu ça presque poétique pour c'que c'est, commente l'ancienne étudiante, une lueur amère dans le regard tandis que Charlie cogite de manière palpable, ses doigts entortillés entre les dizaines de bracelets de perles qu'elle porte au poignet. T'as été très courageux de t'engager. L'aînée Carter appuie ses propos d'un hochement de tête, ignorant la curiosité dévorante de sa petite sœur qui retient visiblement un millier et demi de questions derrière une moue contrariée. J'suis pas un enfant, j'suis une adolescente. Allez, à ton tour, sers-toi Charlie, répond Freya en désignant le potage.

 

L'insistance de la Poufsouffle avait suffit à contenir les interrogations de la benjamine, mais pas à les anéantir.

 

L'appétit de Sasha contraste avec celui d'Alison cette année - sauf lorsqu'elle se donne comme excuse d'être stressée afin d'engloutir les gâteaux laissés intentionnellement sur la table par Freya pour la faire manger.

 

— Moi j'me rappelle pas d'ma mère, souffle Charlie, une bonne moitié de potage encore dans son bol, ses épaules levées en signe d'embarras. Mais on a des photos et des livres qu'elle a écrit, et Papa m'a raconté toutes ses explorations. Elle accompagne sa déclaration d'un léger sourire, puis continue de repêcher les morceaux de pain imbibés de soupe pour les manger, un à un. Alison ? Mh-

 

Hésitante, Freya prend le temps de terminer sa bouchée en silence. Oulala.

 

— Pas trop bien. C'est un euphémisme, confirmé d'un geste du menton par Fenella qui a grandi auprès des trois sœurs Carter, elle-même originaire de Pré-Au-Lard. Charlie, tu peux aller prendre l'album photo de Maman au bureau ? On va les montrer à Sasha. Et pendant que cette dernière s'exécute promptement, Freya poursuit à l'intention du sixième année, sur un ton plus bas, imposant la discrétion. Alison, elle se rappelle parfaitement du départ de notre mère. Même si elle avait que cinq ans, elle est capable de ressortir des détails hyper précis, comme c'qu'elle avait mis dans sa valise, ou ce qu'on avait mangé la veille ensemble. Et en fait, le problème, c'est que Charlie avait deux ans tu vois, donc moi quand je rentrais le weekend de l'école, je m'occupais en priorité de Charlie parce que notre père il était là, mais dans sa tête, il était ailleurs quoi.

 

— Il partait même des fois, Ali et Cha venaient à la ferme, Ali dormait dans ma chambre, complète Fenella, attentive à la conversation et au sentiment de culpabilité qui se dégage du visage de Freya.

 

— Ouais. Fin en gros, à partir de ses six ans, elle est beaucoup restée dans son coin. Elle nous rejetait, elle faisait l'effort pour Charlie, mais vite-fait. Après la rentrée à Poudlard ça allait un peu mieux, mais maintenant qu'mon Père aussi est reparti longtemps- elle a encore l'impression d'se faire abandonner. Ouais voilà, moi j'pense qu'elle se protège en devenant agressive, juste parce que c'est trop dur. C'est trop dur pour elle de- l'aînée s'interrompt lorsque Charlie revient avec un gros classeur à la couverture en cuir, qu'elle pose juste devant Sasha. TADAA !

 

— Faut surveiller l'heure aussi hein, y'a le couvre-feu. Tu rentres en combien de temps Sasha ? Sur cette remarque, les deux jeunes femmes se lèvent et débarrassent la table. 


Les Frontières

Message publié le 21/05/2025 à 12:14

L'appartement du foyer Carter surplombe la boutique comme un empilement d'étages, sans plan d’architecte ni souci de symétrie. Chaque extension semble avoir été créée sous le coup de l'impulsion, et pour cause. Dès l'installation d'Owen et Kate, il avait fallu s'adapter quand le colosse d'un mètre cinquante s’est cogné partout dans la salle de bain minuscule. Une baignoire démesurée a été installée au centre d'une petite pièce annexe ouverte à la va-vite, suspendue au-dessus de l'arrière-boutique comme un nid d’aigle. En 2100, la naissance de Freya a imposé l’ajout d’une première chambre mansardée. Puis, à chaque grossesse de Kate, les murs ont été repoussés à coup de charmes d’agrandissement, les plafonds rehaussés, les planchers rétrécis par endroits, jusqu'à ce que l’appartement ressemble à une étrange accumulation de souvenirs et de compromis. Ici, un palier penché donne sur un bureau minuscule, là, un couloir en zigzag débouche sur une verrière qui regarde le jardin. Quelques mezzanines accrochées entre les poutres cachent d'autres secrets. Rien n’est droit, rien n’est logique, mais tout raconte l’évolution chaotique de la famille. 

 

Il flotte dans l’air une nostalgie persistante qu’aucun sort de nettoyage ne parvient à faire disparaître. Au mur du premier couloir, les cadres désaxés témoignent de jours meilleurs : un article encadré de La Gazette du Sorcier titrant "La dynastie Carter, balais et boussoles", une photo animée de Kate saluant depuis les dunes de Gobi, un trophée du championnat d’Europe de Quidditch signé d’Owen en lettres flamboyantes.

 

Les promesses d'un avenir légendaire ont pris la poussière, les couleurs ont pâli, la pendule familiale tourne parfois à vide, et certaines pièces restent fermées des mois entiers.

 

La cuisine ressemble à une vieille dame côtoyant un vieux monsieur, le salon. Ils s'embrassent maladroitement et forment une scène de casseroles cabossées suspendues au plafond, tasses ébréchées alignées sur une étagère qui penche légèrement, large table de bois rayée par les années, entourée de chaises dépareillées. L’odeur du feu, du café, du cuir mouillé et d'un potage cuit la veille flotte dans l’air. Au mur, la pendule s'essouffle, amputée de deux aiguilles ; celle de Kate, au métal terni, pointe inlassablement vers "En voyage", une mention unique que Freya a elle-même gravée à la baguette quand l'aiguille refusait de se positionner ailleurs. Celle d’Owen a glissé de "En déplacement" à "Inconnu", tremblant comme si elle tentait de retrouver un signal.

 

Au fond du salon, une grande cheminée en pierre trône, accompagnée d’un vieux tapis râpé où s’entassent coussins fatigués et manuels de Quidditch. Au-dessus du manteau, trois rangées de livres se disputent l’espace avec des trophées rouillés et des cartes du monde annotées à la plume. Le fauteuil d’Owen est usé aux accoudoirs, toujours tourné vers l'âtre, tandis que celui de Kate reste vide, une couverture américaine soigneusement posée dessus.

 

Sur les meubles bousculés, on peut voir des photos animées d'Owen plus jeune, brandissant un Souafle sous les acclamations du public. D’autres révèlent Kate, casquée, en pleine ascension d’un glacier ou accrochée à un balai survolant une infinie étendue de sable, le sourire fendu jusqu’aux oreilles. Des babioles rapportées d’Amérique ou d’ailleurs - attrape-rêves, pierres gravées, statuettes ou carnets mystérieux, attestent d’un quotidien d'aventures brutalement interrompu.

 

Pourtant en regardant bien, la vie existe toujours ici. Dans le désordre d'une cape jetée à la va-vite, dans les miettes traînant au sol, Freya et ses sœurs empêchent l'appartement de se figer totalement. Derrière le grand canapé, un trait de rouge à lèvres mal essuyé rappelle les expérimentations audacieuses d’Alison. Sur le rebord d'une chaise, un manuel de sortilèges trahit la manie qu'a Charlie de lire n'importe où. Le plan de travail de la cuisine, lui, n’échappe pas à la routine de Freya : tasses empilées, parchemins annotés, et une boîte à recettes qu’elle consulte rarement. L'aînée est partout sans jamais s'imposer, à l'image des outils proprement alignés contre le mur de l'entrée, d'une boîte à courrier qu'elle seule contrôle, ou du kit de couture en plein raccommodage d'une paire de gants en cuir, ensorcelé pour travailler en autonomie.

 

 

— ... -l'idée, c'est la place que tu donnes à la personne au milieu de ta tête, même si tu penses déjà à beaucoup de choses, explique Freya à Charlie qui continue de cogiter sur la signification de la citation choisie par Sasha. Ce faisant, l'aînée lave ses mains et la plus jeune s'empresse de donner des caresses à une petite chouette aux grands yeux ronds perchée en haut d'une maisonnette miniature collée à l'une des fenêtres de l'appartement. Mh-mh, coucou MicMac, ça va ? demande-t-elle affectueuse au rapace gris cendré, strié de plumes crème. Quelques piaillements retentissent alors, et l'animal ébouriffé semble confus, entre raconter sa semaine à la Serdaigle et tendre le cou pour observer curieusement les deux invités. C'est Fanfan et Sasha ! Tu connais Fanfan, et Sasha est cool, commente Charlie en souriant.

 

— Attends, je t'aide à mettre la table, propose Fenella en voyant Freya qui se lance dans la confection d'un garlic bread improvisé à base de sortilèges lancés sur de la farine et des épices. Les ingrédients s'assemblent, l'eau jaillissant du robinet vers la pâte gonflée et déjà odorante. Sasha, bienvenue chez nous au fait, dit-elle en jetant un œil au Gryffondor. Reste pas planté là, assieds-toi si tu veux, ajoute la rouquine, amusée par l'embarras de l'adolescent. Du bout des doigts, elle allume la gazinière pour y mettre à réchauffer du potage, tandis que les assiettes et les couverts traversent la pièce, guidés à la baguette de Fen'. 

 

Depuis son nid, la chouette continue d'observer l'animagus. Ça se passe comment en Ukraine, pour ta famille restée là-bas ? questionne l'ancienne étudiante. 

 

— Il vit dans un village moldu ! s'écrie Charlie, attirant l'attention de Freya qui vient de mettre le pain en cuisson à l'intérieur d'un petit four surmontant la cheminée. T'as d'autres sorciers dans ta famille ? demande-t-elle en se tournant vers eux, les mains encore blanches de farine. 

 

— Pourquoi ils peuvent pas venir ici ? 


Les Frontières

Message publié le 17/05/2025 à 13:43

L’après-midi avait ramené son lot de clients décidés : ceux qui savaient exactement ce qu’ils venaient chercher pour la Saint-Valentin, pour agrandir leur collection, ou pour voir le nouveau balai OCQ500. Sasha s’était trouvé face aux interrogations d’un sorcier à la cape élimée qui ne comprenait pas pourquoi le dernier modèle n’avait pas de poignée arrière anti-dérive. Arrivée à la rescousse avec ses cheveux attachés en vitesse, Freya avait expliqué l'incidence de la synthèse coeur/bois sur l'autonomie du balai et répondu aux autres questions du passionné pendant presque vingt minutes. Le client était reparti en exhibant fièrement son Coffret de Précommande de l'OCQ500 et son badge "Futur Pilote" accroché à la cape.

 

Plus tard, lorsqu’un couple maladroit s’était disputé devant le rayon des Vifs d’Or miniatures, Fenella avait glissé à Sasha un murmure complice. "Tu vois, il faut toujours vérifier les goûts Quidditch de quelqu'un avant de s'attacher."

 

Ensuite, elle s’était occupée d’une sorcière d’âge mûr venue acheter un second OCQ400 pour "ne pas laisser à la traîne son épouse" qui lui en avait offert un semblable pour Noël. Elle avait su la conseiller avec le ton enjoué qui la caractérisait, ajoutant une pointe de flatterie bien dosée sur sa carrure "encore très sportive pour quelqu’un de votre génération", et l’avait faite éclater de rire. À la fin de la vente, elle lui avait glissé un bon de réduction avec une aisance telle qu'on pouvait croire qu’elle n’était jamais partie du magasin.

 

Vers la fin d’après-midi, quand la lumière hivernale avait commencé à bleuir Pré-au-Lard, la boutique s’était de nouveau emplie. Freya avait pris les rênes à la caisse, ses gestes assurés malgré la fatigue, tandis que Sasha et Fenella s’étaient relayés pour renseigner les derniers clients et réapprovisionner les rayons. Jusqu'à 18h, l'aînée Carter avait continué d’assurer les rouages de la boutique avec une efficacité redoutable, et le calme avait fini par revenir.

 

- - -

 

Soudain, la bourrasque d'air froid qui s'engouffre dans le commerce est accompagné d'une tornade rousse aux joues écarlates. Les scroutts à pétard peuvent pas roter, ni péter ! Pour ça qu’ils explosent ! s'exclame joyeusement Charlie Carter en faisant tomber la lourde capuche de sa cape en arrière. 

 

— Fallait absolument que j'le dise avant d'oublier ! Et bonjou- OH FANFAN ! Les yeux de la benjamine s'illuminent en voyant la silhouette pétillante de l'employée. Cette dernière ouvre ses bras en retour pour accueillir le câlin spontané de Charlie. T'as encore pris 10 centimètres toi ! Ouais j'fais presque la taille d'Alison maintenant, rétorque fièrement l'étudiante de troisième année. Elle termine les salutations en donnant une accolade chaleureuse à Freya, et plus brève à Sasha qu'elle protège en faisant mine de moins le connaître qu'en réalité.

 

— T'as vu ta sœur aujourd'hui ?

— Oui, j'l'ai vue au p'tit déjeuner, elle viendra pas. Eh, tu sais qu'elle a fait les cheveux aux carrés à Sasha samedi dernier en méta ?! Et Spike Ryder s'est transformé en rat ! L'annonce provoque le ricanement des deux jeunes femmes, bien habituées aux frasques des classes magiques.

 

— Alors comme ça j'te libère des samedis et t'en profites pour améliorer ton brushing ? plaisante Freya à l'intention du Gryffondor. La clochette de l'entrée interrompt leur conversation. Fenella accueille le client tandis que la jeune Serdaigle se promène entre les rayons, le nez tendu vers les nouveautés et la gamme de Saint Valentin. Elle s'arrête face à des gants de sport aux couleurs des quatre maisons, ornés de rubans messagers.

 

Serpentard : « L’amour, c’est une stratégie. Et tu es mon plan A. »

  • Gryffondor : « Je n’ai peur de rien. Sauf de toi. »

  • Serdaigle : « J’ai tout analysé. Tu es irrationnel·le… et parfait·e. »

  • Poufsouffle : « Fidèle jusqu’au dernier match. »

 

Saisissant l'occasion quand Sasha passe près d'elle, Charlie Carter attire son attention. Rm-rm, tu vas proposer à Alison pour la Saint Valentin ? Elle a rien prévu encore, questionne-t-elle, l'air de rien.


Les Frontières

Message publié le 16/05/2025 à 15:13

L'ancien employé, Blaine, aidait rarement Freya le samedi, mais plutôt en semaine. L'Écossais cracmol avait rejoint l'équipe d'OCQ au premier départ de Kate en 2100, pour soutenir son ami d'enfance, Owen Carter. Dernièrement, il venait tenir le magasin quand Freya devait passer du temps à l'atelier, avec les fournisseurs, ou encore en campagne de sponsoring. Il n'avait pas spécialement connu Sasha, croisé quelques fois, et était resté d'un naturel impassible face à ses origines ou son histoire. Fenella se comporte de manière totalement différente, attentive au Slave, intéressée par l'altercation dont il parle.

 

— Tsss, les Serpentard, toujours eux hein, commente-t-elle en pliant ses doigts pour mimer les crochets d'un serpent tandis que Freya inspecte son travail sur les blessures de l'élève. J't'en prie. Quoi, la classe d'Alison ? Première Serpentard depuis un grand nombre de générations chez les Carter, la répartition de la cadette avait posé question au sein du foyer de sorciers écossais. Me regarde pas comme ça, j'suis Serdaigle, les meilleurs. J'parie qu't'es tombé chez Poufsouffle, rétorque l'inconnue en croisant les coups d’œil nerveux de Sasha. 

 

— Gryffondor.

— Ah ! Intéressant...

— J'ai jamais vu un Poufsouffle chercher un job étudiant, ricane Freya, moqueuse envers sa propre maison, oubliant qu'elle-même a fourni des efforts considérables très tôt pour aider son foyer en venant travailler le weekend. Elle hausse les épaules et reprend leur conversation. Donc, ils voulaient quoi, les Serpentard ? T'en as parlé à la Direction ? Pendant ce temps, Fenella attrape un tablier noir brodé OCQ en lettres dorées suspendu derrière la porte qui sépare la boutique de l'arrière-boutique, et l'enfile au-dessus de son gros pull en laine. 

 

— T'as qu'à dire que t'as rangé les battes !
— C'est bien ça ouais. T'as qu'à dire que la poudre d’agressivité sponsorisée par Blackburn est trop efficace. Elle étire ses lèvres en coin, ravie par l'argument, et se redresse à son tour pour saisir son tablier sur lequel s'étale son prénom en calligraphie plus ronde, sous le nom du magasin. Ce faisant, elle en jette un à Sasha. Tiens, regarde c'que j't'ai fait.

 

— La classe ! affirme Fenella quand le sixième année déplie son tablier et découvre son prénom brodé dessus, à côté d'une mention "En Formation". Déso, ça arrive un peu tard, mais j'ai pas le temps avant. Bon j'vous laisse ouvrir j'dois descendre faire un point sur le stock de matière pour Jun. Sasha, tu dois encore mettre les nouveaux badges en rayon, oublie pas. Fen', c'est ok ? Parfaitement ok cheffe ! plaisante l'ancienne-nouvelle vendeuse, visiblement réjouie de passer la journée chez OCQ. 

 

Et tandis que la Poufsouffle emprunte l'escalier de colimaçon qui tourne jusqu'au laboratoire d'invention, Fenella s'empresse de sortir sa baguette pour actionner les lampes et tous les petits objets censés être en mouvement dans la boutique. Dehors, une famille attend l'ouverture, ainsi qu'un duo d'hommes d'environ 25 ans. Pendant qu'elle s'active, la sorcière discute. Alors, t'es bien ici ? C'est cool non ? Freya est cool. Pis c'est l'ambiance Saint Valentin là, c'est doux, j'aime bien, les gens viennent chercher des cadeaux. T'as une chérie à Poudlard ? Ou un chéri hein, j'm'en fous. À 10h pile, la double porte s'ouvre et les clients entrent, animant la boutique d'un brouhaha joyeusement tinté par la folk écossaise diffusée à bas volume. 

 

— Bonjour ! chantonne naturellement Fenella, comme si elle n'avait jamais arrêté de travailler ici. Bonjour Messieurs ! Bonjour, oh, jolie écharpe, tu sais que maintenant on a les modèles qui scandent des hymnes ? Un enfant écarquille ses yeux et la Serdaigle débute son samedi de ventes. 


Les Frontières

Message publié le 16/05/2025 à 12:34

La réaction de Sasha suscite l'intérêt de Freya qui s'approche pour essayer de comprendre s'il s'agit d'un accident ou d'une blessure volontaire. Elle observe sa lèvre fendue tandis qu'il parle. Les clients ? Tu commences à les connaître, ils vont t'poser des questions. D'autant plus à Pré-Au-Lard, capitale des ragots du Monde Sorcier. L'étudiant avait pu découvrir le caractère curieux des habitants du village dès le début de son contrat chez Owen Carter Quidditch, quand il a reçu la visite de ceux qui voulaient savoir si un réfugié travaillait au magasin le samedi, comme la rumeur le prétendait. Une dame avait alors commenté son accent sans se soucier d'être juste en face de lui, et Freya avait dû intervenir pour l'éconduire gentiment. 

 

— T'as fait ça comment ? questionne l'aînée des sœurs Carter, habituée à éviter les détours avec l'autre adolescente qu'elle fréquente. À cet instant, la clochette de l'entrée retentit, bien qu'il reste encore 15 minutes avant l'ouverture. Derrière eux, une jeune femme à la chevelure cuivrée surmontée d'un béret d'hiver passe le seuil, un bouquet coloré en mains. Hello ! s'exclame-t-elle en souriant tandis que Freya répond, le visage lumineux à son tour. Salut Fen', viens au chaud, ferme la porte !

 

— J't'ai pris des fleurs, pour la déco de la Saint Valentin ! On pourra les mettre sur le comptoir.

— C'est trop gentil ! Tiens, donne-les moi, enlève ta cape, et j'te présente Sasha du coup, le nouveau job étudiant.

 

Déboutonnant sa cape épaisse pour laisser apparaître encore un gros cardigan vert bouteille, l'inconnue aux yeux gris-bleu incline poliment sa tête devant Sasha. Contente de te connaître Sasha, moi c'est Fenella, mais on m'appelle Fen', ou Fanfan. Elle porte une jupe orange élégante, plissée jusqu'aux mollets, et des bottines en cuir.

 

— Elle va remplacer Blaine. Elle a déjà bossé ici, en fait j'l'ai embauchée l'année dernière, elle était en septième année au chateau, elle venait le samedi comme toi. Elle a grandi à Pré-Au-Lard avec nous, ses parents ont un élevage de veaudelunes. 

— J'ai pris un an pour me préparer à passer les examens du Ministère avant d'essayer de me spécialiser dans le contrôle et la régulation des créatures magiques, précise Fenella en penchant légèrement la tête de côté. 

 

— Tu t'es battu ? demande-t-elle alors sans tergiverser. 

— C'était justement ma question quand t'es arrivée. Anyway, j'vais pas te laisser avec ça Sasha, tu viendras dans l'arrière-boutique après et j'te soigne. Fen', t'as qu'à poser tes affaires derrière aussi, j't'explique vite fait la journée. 

 

— T'es mignon quand même, allez, fais pas cette tête, sourit l'Écossaise avant de s'activer pour rejoindre Freya. Les deux jeunes femmes discutent des nouveautés et des priorités du weekend jusqu'à ce que le Gryffondor ne se montre enfin. "Attention, afflux imminent de pilotes en herbe et de fans surexcités ! On respire, on aligne les badges, et on cache les posters trop grincheux !", chantonne l'horloge alors qu'il reste dix minutes de calme dans le commerce. 

 

Désignant l'un des fauteuils jouxtant la table basse, Freya demande à Sasha de s’asseoir. Ça va prendre deux secondes. Par contre, j'veux toujours savoir c'que t'as fait. Légèrement en retrait, Fenella attrape la pile de flyers Gnomes Sans Frontières qu'elle parcourt rapidement. 

 

— C'est ta sœur qu'a mis ça là ?

— Non mais ça pourrait. C'est une vieille bique qu'a filé ça ce matin à Sasha. 

— Ça se voit qu'ils ont jamais eu un congrès gnome inter-jardins dans leur champ ces gens-là, rigole-t-elle tout en prêtant un œil distrait à la magie de l'aînée Carter qui écarte les doigts pour lancer le charme directement depuis ses paumes.

 

— Episkey.

La plaie de la lèvre se referme partiellement, un filet de croûte apparaît sur la peau, propre mais visible. La tempe cesse de gonfler, la douleur diminue, mais un bleu reste marqué. Déjà mieux, se satisfait à haute voix la rouquine en frottant ses mains.

Freya Carter a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège du Bisou Magique
Difficulté
5
Résultat D20
13
Interprétation
Réussite
XP gagnée
3

La plaie de la lèvre se referme partiellement, un filet de croûte apparaît sur la peau, propre mais visible. La tempe cesse de gonfler, la douleur diminue, mais un bleu reste marqué. Déjà mieux, se satisfait à haute voix la rouquine en frottant ses mains.

Autres résultats possibles

Un souffle tiède enveloppe le visage de Sasha, comme un baume invisible. Sa lèvre se referme lentement, sans douleur, laissant à peine une trace rosée. La tempe se dégonfle avec un petit frisson, comme si la douleur avait été aspirée. Et voilà, se satisfait à haute voix la rouquine en frottant ses mains.
Le sort agit de travers. La lèvre se referme… puis se rouvre partiellement avec une nouvelle sensibilité. La tempe chauffe, comme sous un coup de soleil. Rien n’empire, mais rien ne s’arrange. Attends, tu me laisses réessayer, j'vais prendre ma baguette, ok ?
Le sort rebondit sur la pommette de Sasha comme une gifle légère. La douleur s’intensifie brièvement, la lèvre saigne un peu plus, la tempe pulse violemment. Qu'est-ce que j'ai foutu ? C'est une blessure magique ou normale ? Attends, j'vais prendre ma baguette, dit-elle tandis qu'elle se redresse.

Les Frontières

Message publié le 15/05/2025 à 13:11

"Un bon balai vaut mieux qu’un mauvais rencard !" affiche le panneau ensorcelé dans la vitrine d'OCQ en référence à l'approche de la St Valentin. Depuis quelques jours, tout le village revêt l'ambiance mièvre de cette fête d'origine britannique bien utile pour booster les ventes après Noël. La boutique de vente de balais magiques et matériel de sports volants n'y échappe pas, proposant une sélection de cadeaux mis en valeur par des petites pancartes aux messages audacieux. Ainsi on peut lire à côté des vifs d'or "Attrape son cœur… et ne le relâche jamais", ou encore "Avec toi, je joue sans filet" non loin des protections, sans compter les miniatures tournoyantes ornées de rubans, les cercles de souafles transformés en cœurs dorés et le stand de poudre à dessiner des traînées roses derrière les balais.

 

Mais l'attraction principale reste l'OCQ500 sorti un mois plus tôt, et son égérie, le batteur Elliot Blackburn, omniprésent sur les murs du magasin de la Grand-Rue.

 

Indisponible à la vente jusqu'à l'été, l'OCQ500 attire une foule de curieux, de sportifs, de fans d'Owen Carter, ou du joueur Gallois, et suscite les pré-commandes. De manière moins prévisible, des chercheurs en magie viennent aussi l'observer, admiratifs de l’innovation qu'il représente dans le domaine de la synthèse énergétique.

 

 

Quand Freya entend la clochette tinter ce samedi matin, elle l'associe à Sasha et continue de s'affairer le temps qu'il traverse le magasin jusqu'à l'arrière-boutique. Occupée à ranger le stock des cartons de badges "Futur pilote OCQ500" en les déplaçant à l'aide de sortilèges informulés lancés du bout des doigts, elle détourne à peine le regard et salue l'étudiant. Hi Sasha, ça va ? demande-t-elle par automatisme, bien qu'elle soit généralement trop débordée pour vraiment écouter la réponse. "Rappel : certains posters sont d’humeur massacrante. Ne jamais coller deux Blackburn grincheux l'un à côté de l'autre afin éviter les affrontements muraux. Le modèle torse-nu bras croisés souffle dans son cadre depuis dix minutes !" déclare l'horloge en même temps que le Gryffondor parle. Freya fronce les sourcils, jette un œil rapide au garçon, puis à l'heure qui tourne, tandis que deux des nombreuses aiguilles de l'horloge situent Charlie et Alison à Poudlard, probablement chacune en classe de soutien. 

 

— Pose-les là. Son geste arrache à distance les flyers des mains de Sasha pour les abandonner sur la table basse décorée d'une centaine d'anciennes cartes de Quidditch à collectionner. Elle ne prête pas attention au visage du sixième année tout de suite, pressée de lui donner les premières tâches de la matinée. Faudrait juste balayer ça avant qu'ils aillent dans le magasin, dit-elle en désignant une nuée de copeaux enchantés qui dansent joyeusement autour de l'atelier.

 

— J'ai pas eu le temps de nettoyer les traces de nez sur la vitrine et on a reçu des badges à mettre en rayon au plus vite. Son index pointe plusieurs cartons annotés "Mon cœur bat pour un batteur", "J'ai le béguin pour un poursuiveur" et "Toi + moi = balai tandem" disposés près d'une pile de courrier arrivé à l'aube. Elle repousse une mèche épaisse de cheveux roux en arrière sur sa tête en soufflant, moi j'vais gérer les posters. Sans un regard à l'Ukrainien, Freya rejoint le coeur de la boutique où deux photos du Gallois installées côte-à-côte s'affrontent à coups de grognements et de ricanements moqueurs. Ça suffit vous allez stresser les clients, déplore l'aînée des Carter en décrochant le parchemin avec Elliot torse-nu, et arborant désormais un sourire enjôleur. Face au portrait de son ancien petit-ami, elle serre la mâchoire. Tu voulais juste un peu d'attention, bien sûr, siffle-t-elle entre ses dents. 

 

Après une courte hésitation, elle décide de fixer le poster dans le coin des bougies senteur "Vestiaires une jour de victoire", "Premier vol un matin de printemps" ou encore "Minuit sur le terrain d'entraînement" pour l'apaiser.

 

C'est en vérifiant l'expression du premier Elliot que Freya remarque l'attention des affiches, désormais tournée vers Sasha en plein travail. Elle s'interroge. Qu'est-ce qu'ils ont tous ? Fais-voir ton œil ? C'est quoi ça ? Et ta bouche ?

Liste des messages de Freya Carter