Harry Potter RPG

Liste des messages de Sasha Shevchen

Sasha Shevchen

Homme

17 ans

Sang-mêlé

Ukrainien

Templum Maledictum

Message publié le 03/12/2024 à 14:07

Au moment exact où le bibliothécaire parla, Sasha sut que ce serait compliqué. Il ne se l'expliquait pas : il voyait juste très bien, dans ce regard bon enfant, ces petites tapes dans ces mains, toutes guillerettes, et ce petit sourire léger, qu'ils n'allaient pas s'entendre. Le Gryffondor retint son souffle, interdit, jetant seulement quelques oeillades autour de lui : subitement la bibliothèque changeait complètement d'atmosphère. D'un endroit austère elle devenait soudain quelque chose de plus convivial, semblable à un grand salon de thé où les murmures des conversations réchauffaient les grandes rangées d'étagères. Le regard de Sasha fut attiré par le gramophone qui lévita vers eux, et il ne put s'empêcher de rentrer légèrement la tête entre les épaules comme si un tel objet lui donnait des frissons. Puis il dévisagea le bibliothécaire.

 

- De... De danseurs ? il répéta comme s'il n'était pas sûr d'avoir bien compris.

 

Sasha avait un tout petit espoir : des fois, les anglais utilisaient un mot pour un autre. Par exemple, il avait vite entendu que chick ne désignait pas les poussins, mais... les filles. Alors peut-être que par danseur, mister Beckett voulait dire nettoyeur ou quelque chose de ce genre.

Il l'espérait.

Il suppliait intérieurement les Dieux Ukrainiens, anglais, et tous les autres qui pussent exister.

(Pas les Russes. Il fallait quand même pas pousser. Plutôt danser que de supplier un Russe.)

 

Un rire derrière Sasha le tira de son mutisme. 

 

- Heu... Le bal ?

 

Il savait ce qu'était un bal, même s'il n'avait jamais été à un autre bal que celui qui se tenait dans son village, où on chantait des chansons paillardes et où les adultes finissaient complètement ivres. Mais Sasha se doutait bien que le Bal de Poudlard ne ressemblerait pas à ça. Il imaginait quelque chose de très solennel, avec des centaines d'étudiants silencieux qui regardaient un spectacle avant d'avoir le droit de boire un jus de citrouille. La perspective de devoir danser dans ces conditions lui donna envie de se transformer sur le champ et fuir le plus loin possible du château.

Mais à la place, Sasha secoua la tête en un signe négatif, le visage fermé.

 

- Non, je sais pas danser, mister.

 

Devant l'air surpris du bibliothécaire, Sasha fit un pas en arrière, instinctivement. On entendit quelques élèves pouffer non loin d'eux, témoins heureux sûrement de cette scène incongrue où l'Ukrainien casseur de nez avait peur d'un pas de danse. Ce dernier sentait une confusion nerveuse monter en lui, à mesure que ce destin irrémédiable approchait. Il secoua de nouveau la tête, plus frénétiquement.

 

- Moi, dépoussiérer les bouquins anciens, ça me va très bien, affirma-t-il - non sans faire la liste, intérieurement, de toutes les injures dans sa langue d'origine qu'il aurait pu réserver à l'intention de mister Brooks. Je peux laver par terre, aussi. Ré-étiqueter les vieux livres. Nettoyer les joints des murs entre chaque pierre à la brosse à dents. Ou les toilettes. Ca me dérange pas.

 

Bon, Sasha aurait bien évité de se porter volontaire pour ce genre de tâches, mais dans des circonstances si désespérées, récurer les chiottes pendant plusieurs après-midis toutes entières n'était pas une sentence si lourde. Et tout ça pour un pauvre nez cassé ! Poudlard était une école bien plus cruelle qu'il ne s'y était attendu.


L'Ombrelangue

Message publié le 03/12/2024 à 09:22

- Han-han. Nyet.

 

Sasha avait fait un lent signe négatif du visage. Décidément, la petite fille n'était pas le moins du monde effrayée par la situation. Sasha la trouvait bien plus courageuse que la plupart des élèves ici, qui, au lieu de s'aventurer dans la Forêt Interdite, y aurait abandonné leur animal de compagnie de peur de se salir les chaussures dans la boue. Alors qu'elle, elle était à peine affolée d'avoir failli être le dîner d'un Ombrelangue puis d'être suspendu par le pied par un filet du Diable.

 

- Je ferai de la lumière qu'au dernier moment, il expliqua. La lumière, ça attire tout un tas de bêtes, ici. A quoi crois-tu que sert une plante pareille, sinon à être le garde-manger de je sais pas quel animal ?

 

Effectivement, autour d'eux la brume était toujours là, mais elle s'était étrangement assombrie. Il semblait que les deux élèves étaient enveloppés dans une ouate sombre, comme un cocon humide et froid, et pourtant intimiste. La lumière avait tant décliné que les traits de leur visage allaient bientôt disparaître à leurs yeux, pour ne laisser que les contours de leurs silhouettes.

 

Face aux questions suivantes, Sasha resta tranquillement silencieux. Il avait l'avantage et le savait parfaitement. Il n'y avait pas de malice dans ses yeux. Il avait l'air juste d'attendre, à la manière d'un chat qui attend patiemment le retour de ses maîtres : un peu plus il s'endormirait là, dans le confort relatif de cette branche solide où reposait son menton sur ses mains striées de ses cicatrices noires et inélégantes.

Mais son regard se fit soudain plus alerte et il se redressa légèrement.

 

- Quoi ?! T'es la soeur d'Alison ?

 

Maintenant qu'elle le disait, c'était parfaitement évident. Pas seulement les cheveux roux, mais le petit air donneur de leçon quand elle lui expliquait comment s'appelait Lord Ribbit et qu'on disait les épaules, pas les oreilles. Avec un air bougon, Sasha reposa son menton sur ses mains.

Il n'était pas le moins du monde surpris par les raisons précises qu'évoquaient la gamine concernant sa soeur et leur présumée relation. Non, ce qui l'étonnait plus, c'était tout simplement qu'Alison eût une petite soeur et qu'il ne le sût même pas. Après tout, c'était vrai qu'ils n'échangeaient jamais sur leur vie personnelle, et il ne lui était pas venu à l'esprit que la Serpentard eut une quelconque vie qui la rendît plus humaine. Car jusqu'ici, il se l'était imaginée comme une fille unique choyée par deux parents trop bien habillés pour être innocents, qui l'auraient couverts de cadeaux et de compliments. Une espèce de poupée de porcelaine froide et méprisante, qui pleurait parfois.

Sasha haussa les sourcils après un silence, à regarder les mimiques expressives - tellement naturelles comparées à celles d'Alison - de la petite fille.

 

- T'es pas un peu trop jeune pour parler de ces choses-là, toi ? Et c'est quoi ton prénom ?

 

Il n'allait quand même pas l'appeler Miss Carter. Mais enfin, en attendant, Miss Carter posait un sérieux problème : apparemment, les deux filles semblaient partager beaucoup de leur vie personnelle et il pouvait bien sûr décemment craindre que...

 

De discrets bruits se firent entendre à leur droite et Sasha tourna vivement la tête.

Il replia ses jambes sous lui pour s'accroupir au bord de la branche, silencieusement. Elle se plia dangereusement, le rapprochant de la petite fille.

 

- Ecoute, petite soeur trop-gentille, ce que je sais, c'est que tu es beaucoup plus courageuse que ta soeur et que les autres élèves ici. Alors ce serait dommage que tu sois le dîner d'une araignée.

 

Il chuchotait, et ses yeux alertes ne quittaient pas ceux de la petite fille, à la manière d'un hypnotiseur. Etrangement, il avait l'impression d'avoir déjà fait ça : parler à une petite fille pour la convaincre. Et quand faire peur à la petite fille ne fonctionnait pas, il fallait jouer sur d'autres cordes. Une drôle de douleur lui tordit les entrailles, sourde et lointaine, mais il tâcha de se concentrer.

 

- Alors tu as droit à une réponse ou deux, mais seulement en échange de garder le secret. D'accord ?

 

Il attendit d'avoir au moins un mouvement de tête en guise de réponse. Quand il reprit la parole, c'était pour parler un peu plus bas encore, comme si les troncs étaient remplis de créatures trop curieuses qui auraient pu voler leur secret.

 

- Je viens ici parce que je suis pas tout à fait humain. Mon travail, c'est de faire en sorte que les monstres cachés n'aillent pas plus loin que la lisière de la Forêt. Tu vois ? Pour qu'ils n'attaquent pas le château et ses habitants.

 

D'un index, il désigna une direction, probablement celle du château, même s'il n'était pas certain que ce fut cette direction-là.

 

- Mais il n'y a qu'un monstre lui-même qui peut faire ce travail-là. Et pour que je puisse continuer à travailler, pour que les créatures de la Forêt n'envahissent pas les gens du château, les humains, hé bien il ne faut pas qu'il sache qui je suis vraiment. Tu comprends ?

 

Voilà longtemps qu'il n'avait pas inventé de conte. Il faisait ça souvent, quand il était plus jeune, mais il n'en avait plus eu l'occasion depuis longtemps. Ce qui était fort dommage, car il estimait s'être beaucoup amélioré depuis. Sasha vérifia qu'il avait bien toute l'attention de la petite fille.

 

- Alors, Oksana, il faut que tu dises à personne la vérité sur moi. Ni que je viens dans la forêt, ni que je suis une bête, ok ? A personne, et encore moins à ta soeur.

 

Il ne savait pas quel âge elle avait, au fond. Peut-être était-il trop tard pour qu'elle pût croire son histoire. Mais l'effrayer davantage ne marcherait pas et il le savait - sauf à la traumatiser, ce qu'au fond, Alison ne lui pardonnerait sûrement pas. Il capta la mimique dubitative de la petite fille, même à l'envers.

 

- Quoi, tu me crois pas ?

 

Il avait haussé les sourcils dans une expression qui paraissait sincèrement étonné, puis il haussa les épaules.

 

- Tant pis, tu verras toi-même. Il faut qu'on se dépêche, sinon le crapaud que t'as dans le ventre va réveiller toute la forêt. Je vais allumer la lumière et me mettre en dessous de toi. Et toi, tu te rappelles : tu t'accroches à mes oreilles, insista-t-il, sans un sourire. Mais pas trop fort, s't'euh plait. 

 

Sasha fit apparaître sa baguette magique dans sa main. Mais une fois qu'il l'agita, faisant apparaître une faible lumière au bout du morceau de bois, qui éclaira leur deux visage, il coinça la baguette en travers de sa bouche. Et alors qu'il la bloquait avec ses dents, il se laissa tomber subitement, vers la branche d'en-dessous la petite fille, tandis que déjà, le Filet du Diable relâchait doucement sa prise.

 

 

 

 

 

Ce qui atterrit sur la branche d'en dessous n'avait plus rien d'un garçon de sixième année. Des pattes souples et velues s'ancrèrent dans la branche qui ploya légèrement sous le poids de la bête, à l'aide de longues griffes plantées dans le bois. Dans la brume, on distinguait surtout sa silhouette trapue et la longue queue suspendue, qui s'agitait lentement, trahissant une impatience animale, et les tâches sombres d'un pelage marbré. De Sasha, il ne restait qu'une seule chose : deux yeux verts bougons qui fixaient de potentiels prédateurs dans la brume, et des traces noires discrètes entre son pelage marbré.

 

 


L'Ombrelangue

Message publié le 02/12/2024 à 17:15

Pendant quelques instants, Sasha eut peine à croire à la facilité avec laquelle il avait réussi à sauver le crapaud et leur propre peau avec un plan aussi erratique que celui-ci. Mais sa connivence avec le monde animal payait peut-être malgré tout, après des années à s’entraîner. La brume leur ayant caché la suite du combat, Sasha se laissa tomber accroupi, baguette toujours en main, le temps de faire retrouver à son cœur un rythme raisonnable.

 

-    Mieux vaut eux que nous, se contenta-t-il de commenter au sujet de la mort prochaine d’au moins l’une des deux créatures.

 

Il ne lui venait même pas à l’esprit qu’un tel destin eût pu heurter les sentiments d’une si jeune fille : lui qui avait grandi dans la campagne savait que les animaux étaient destinés à mourir, pour la plupart, afin de faire le festin d’une autre créature – y compris lui-même. Il ne percevait pas même qu’on pût en être triste à l’âge de cette petite gamine qui l’appelait par son nom. 
Sasha tressaillit subitement.

 

-    Hein ?!

 

Sasha décrocha sa mémoire en un « HUH » de surprise proprement ahuri pour scruter l’enfant avec des yeux ronds comme des soucoupes. Comment cette gamine qui lui arrivait à peine au-dessus du nombril pouvait-elle connaître son prénom ET son nom de famille ? Un moment, il la regarda comme si ce petit corps d’élève avait pu renfermer quelque vieille Baba Yaga sage prête à se transformer en un serpent pour le dévorer ou le récompenser de ses bonnes actions. Mais ce n’était tout simplement pas possible, alors il repoussa fermement les histoires de son enfance pour froncer les sourcils, suspicieux.

 

-    Comment tu sais d’abord que…

 

Ils avaient parlé en même temps, s’étaient interrompus en même temps.

 

-    Hé !

 

Avec un réflexe idiot, Sasha brassa le vide. C’était trop tard : l’enfant était tombée plus bas, et il la suivit des yeux avec embarras. Elle se prit une branche, puis une autre, avant de se retrouver la tête à l’envers avec sa robe sur elle. L’Ukrainien leva les yeux au ciel en voyant le crapaud et la baguette tombée plus bas.

 

 

 


L’univers visuel de cette enfant devait être bien sombre, à l’instant même. Sasha profita de ce que la vue lui avait été de nouveau dérobée pour descendre tranquillement d’une branche à l’autre, dans un silence feutré. En bas, les coassements du crapaud indiquaient qu’il avait survécu. Il faudrait aller le chercher, lui et la baguette de la petite fille, avant d’essayer de s’orienter pour retrouver le chemin du château. La brume était si épaisse que même pour Sasha, ce n’était pas si facile… En tout cas, pas sous cette forme-là.

 

Entre un index et un pouce, il saisit un pan de la robe de sorcière pour la soulever. Il découvrit un visage qui devenait tout rouge, mais il avait décidé de prendre son temps. Au moins, saisie ainsi, elle ne risquait plus de créer un autre problème. De son côté, elle le découvrit étrangement allongé sur le ventre, soutenu le long d’une branche voisine, comme si c’était là absolument naturel pour lui de trouver un peu de repos dans cette position, les chevilles croisées derrière lui pour assurer un minimum de stabilité.

 

-    On t’appellerait pas Miss Catastrophe, par hasard ? grommela-t-il de son air bougon habituel. Gigote pas, sinon on en a pour une heure.

 

Sasha fit un signe du menton vers la plante qui avait saisie l’enfant par le pied.

 

-    Dyavol'skiye silki, on appelle ça par chez moi. T’inquiète, elle va te lâcher bientôt.

 

Il accrocha le pan de la robe sur une petite branche voisine, pour qu’elle pût garder la vue dégagée, puis il croisa ses mains sous son menton pour faire reposer sa tête sur sa propre branche. A l’envers, la fille avait les mêmes cheveux roux qui dansaient sous sa tête qu’Alison Carter – mais c’était pour lui le seul lien lointain qu’il pouvait faire. 
Sasha resta longuement ainsi : il la regardait tranquillement, avec la même curiosité qu’une araignée attendait qu’un insecte fût enfin assez mûr dans sa toile.

 

-    T’inquiète, on ira les retrouver après, ton Seigneur Kvakva et ta baguette. Comment tu sais comment j’m’appelle ? il finit par demander. Si tu me dis ce que tu sais, je te libère. Et après, tu montes sur mon dos et tu t’accroches à mes oreilles, ok ?

 

Il était on ne peut plus sérieux. 


L'Ombrelangue

Message publié le 01/12/2024 à 12:28

- Chut ! Mais chut j'ai dit !

 

Un Sasha catastrophé, les yeux ronds d'indignation, s'évertuait à chuchoter avec énergie tout en tâchant de rester discret. Le pire là-dedans, c'était qu'il ne comprenait rien à ce que disait la petite fille qui gesticulait. Ribbit était sûrement encore un de ces mots écossais que le reste du monde ne partageait pas. Il n'était pas suffisant que le monde entier fisse l'effort de parler leur langue, ces fichus écossais inventaient des mots qui n'existaient pas en anglais !

 

- Mais arrête j'ai dit !

 

Sasha n'y tint plus. Mû par l'inquiétude d'attirer à eux non pas seulement l'Ombrelangue qui s'agaçait en bas, mais aussi d'autres animaux de la Forêt dont la réputation n'était pas volée, il se souleva, les pieds en équilibre précaire sur la branche, pour attraper brusquement la petite fille. Ce faisant, il lui colla fermement une main sur la bouche.

La gamine n'était pas calmée pour autant. Elle continua à gesticuler tout en criant des MMH-MMMH ! dont le son traversait fort malheureusement sa bouche fermée et les doigts - sales d'écorce humide et de boue - de Sasha. Evidemment, Mmh-mmmh était sûrement toujours ce mot absurde : Ribbit.

 

Elle pointa un index vers le ciel, et Sasha suivit son regard, pour apercevoir la créature qui battait des ailes sans vouloir quitter la cime d'un arbre voisin.

 

Une chouette. Bon, et alors ? C'était juste une chouette avec dans les serres...

 

- Un crapaud, grommela-t-il, son nez se froissant. Tout ça pour un crapaud ? Ah ben bravo !

 

C'était donc cela qu'elle avait fait s'envoler avec son malheureux Wingardium Leviosa. Sasha baissa la tête pour la fustiger du regard, ses propres cheveux en bataille lui donnant l'air d'une bête mal léchée. On s'en fichait d'un crapaud ! Au mieux, on le...

 

 

Tssss...

 

 

Le garçon pencha brusquement la tête de côté, avec la vivacité d'un félin ayant aperçu une proie. L'ombrelangue les avait entendus, bien sûr. Dans la brume qui s'épaississait, Sasha ne le distinguait plus et son coeur s'était mis à battre la chamade. Il avait resserré sa prise plus fermement sur la petite fille, comme pour lui faire comprendre que l'heure n'était plus aux jérémiades - sans penser qu'alors il lui faisait peut-être un peu mal.

 

Deux problèmes.

 

Si Sasha avait appris une chose à la guerre, c'était que quand on avait deux ennemis, la façon la plus efficace de procéder était de se débrouiller pour gérer un problème grâce à l'autre. Alors brusquement, il remit la gamine sur ses pieds et la tourna pour qu'elle lui fît face, leur visage à quelques centimètres l'un de l'autre. Il avait libéré sa bouche.

 

- Tu ne bouges pas. Tu ne cries pas. Tu me laisses faire, ordonna-t-il d'une voix grave, insensible aux grands yeux mouillés de la gamine - au visage pourtant étrangement familier.

 

Sasha la lâcha en priant pour qu'elle ne fît rien d'idiot, et il tira sa baguette en levant le nez vers la chouette.

 

- Bestia Domitus ! souffla-t-il.

 

Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait. 

 

Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure. 

 

- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui pour mieux se concentrer sur le combat, pointant sa baguette sur la chouette.

 

Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage et un combat bref mais invraisemblable s'engagea : l'Ombrelangue referma ses crocs sur le vide, le rapace évitant de peu une mort certaine. La chouette virevolta autour de la tête du serpent, et fonça subitement, tête en avant : elle creva un oeil de l'Ombrelangue qui fit jaillir sa longue langue fendue avec un sifflement de douleur. Il se rétracta dans la brume et disparut, bientôt poursuivi pour une chouette féroce qui l'éloignerait d'ici. 

 

- Fiou, c'était moins une, souffla Sasha, soulagé.

 

Sasha Shevchen a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège de Domestication
Difficulté
Résultat D20
20
Interprétation
Réussite Critique
XP gagnée
6

Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait.

 

Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait. 

 

Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure. 

 

- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui pour mieux se concentrer sur le combat, pointant sa baguette sur la chouette.

 

Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage et un combat bref mais invraisemblable s'engagea : l'Ombrelangue referma ses crocs sur le vide, le rapace évitant de peu une mort certaine. La chouette virevolta autour de la tête du serpent, et fonça subitement, tête en avant : elle creva un oeil de l'Ombrelangue qui fit jaillir sa longue langue fendue avec un sifflement de douleur. Il se rétracta dans la brume et disparut, bientôt poursuivi pour une chouette féroce qui l'éloignerait d'ici. 

 

- Fiou, c'était moins une, souffla Sasha, soulagé.

Autres résultats possibles

Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Il percuta la chouette qui émit un drôle de cri de douleur. Désorientée, elle perdit un peu de temps à voler en cercles frénétiques au-dessus d'eux, avant d'enfin obéir comme Sasha le souhaitait. 

 

Le rapace fondit vers l'Ombrelangue, leur jetant au passage le crapaud que Sasha prit en pleine figure. 

 

- Yeurk, gémit-il en décollant l'animal gluant de son visage avant de le mettre d'office dans les mains de la petite fille devant lui. 

 

Au-dessous, la tête du serpent était apparue. Enorme, elle émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels. La chouette l'attaqua avec un cri sauvage : l'Ombrelangue n'eut qu'à ouvrir sa gueule béante et ses crocs se refermèrent avec violence sur le rapace. On entendit le pauvre animal gémir de douleur avant que le serpent ne l'engloutit entre ses deux mâchoires qui se décrochaient étrangement l'une de l'autre. 

 

Gloups, déglutit Sasha. 

 

Il tira la gamine vers lui. 

 

- Monte sur mon dos, dépêche-toi, il lui intima tandis qu'il se retournait vers le tronc, avec l'intention de grimper un peu plus haut. 

 

Si l'Ombrelangue persistait, il serait obligé de se transformer... songea-t-il le souffle court. 

Le sortilège déploya un étrange jet de vapeur en direction du rapace au moment où celui-ci s'envolait. Mais au lieu de frapper la chouette, le maléfice frappa de plein fouet le crapaud. 

 

Attaque l'ombrelangue ! répéta Sasha en son for intérieur, les doigts serrés autour de sa baguette. 

 

- Croâ ? répondit mollement le crapaud avant d'être emporté par la chouette. 

 

Les deux animaux disparurent instantanément dans la brume, tandis que la tête de l'Ombrelangue, énorme, émergeait en dessous d'eux comme d'une mer de ténèbres, ses yeux brillants dans la nuit comme deux lasers mortels.

 

- Blyad ! jura Sasha. 

 

Alors, il n'eut pas d'autre choix que de se transformer.

 

Alors, n'ayant plus d'autre choix et à cause des réflexes qui étaient les siens, Sasha se transforma.

 

Pendant ce temps, la chouette s'enfuyait à tire-d'ailes avec son butin entre les serres...


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 20:51

Si une seule chose était sûre, c'était qu'à Poudlard, il n'avait encore jamais rencontré de traqueuse aussi déterminée qu'elle.

 

Sasha n'avait pas eu de mal à la semer au début, persuadé qu'une fois hors de sa vue, il pourrait tranquillement attendre qu'elle s'en allât, mais c'était sans compter sur le refus d'Anya d'abandonner sa proie. Posté dans l'entrelacement des branches d'un énorme chêne sessile, plusieurs fois centenaire, Sasha était longuement resté immobile, la respiration tranquille, comme si ses soupirs s'accordaient avec le vent maintenant qu'il avait pu trouver une position confortable : étendu sur le ventre, la branche soutenant l'ensemble de son corps, la pochette bien coincée entre l'écorce et son buste - quitte à la déformer. Il se fondait si bien dans l'arbre qu'il n'était plus visible, en tout cas pas aux yeux de quelqu'un qui ne s'attendait pas à le trouver là.

 

Le temps s'était écoulé, et il avait fermé les paupières, sans pour autant s'endormir. Il écoutait. Quand les pas d'Anya se rapprochaient, il rouvrait les yeux. De loin, il voyait la silhouette, élégante et déterminée, sertie d'une chevelure brûlante qui ne décolérait pas, déambuler entre les troncs. Il retenait parfois son souffle, quand elle s'approchait un peu. Mais elle perdait systématiquement sa trace - si trace elle avait, ce dont il doutait.

 

Au bout d'un long moment, elle avait disparu de son champ de vision. Elle avait dû s'aventurer plus loin, ou bien était simplement rentrée au château. Alors seulement, il s'était autorisé à se redresser. Ses membres étaient endoloris, et c'était avec un grognement qu'il avait changé de position. Il était revenu vers le tronc, là où la branche à sa base était plus large, pour pouvoir s'asseoir en tailleur et déposer sur ses jambes la pochette. Il l'avait pas mal abîmée : elle était tordue en son centre, comme perforée par endroits de petites entailles rondes, et l'humidité de l'écorce avait laissé quelques traces marrons. Avec précaution, Sasha l'ouvrit, pour mieux découvrir, le coeur battant, le dernier numéro de l'Unificateur.

 

Il l'ausculta longuement. Se résigna à admettre qu'Anya avait raison : il n'y avait rien là-dedans qui indiquât que les Veilleurs eussent réussi une opération spéciale quelconque. Pourtant, presque à la toute fin du numéro, après un reportage sur un groupe de sorcière qui tricotaient des écharpes incrustés de slogans de leur parti politique - les fonds étaient reversés aux blessés de guerre, indiquait le reporter - un petit encart indiquait, avec un titre tapageur : Le Front Magique Unifié a encore frappé ! Un complot déjoué à la frontière !

Sasha se pencha sur l'article, ses yeux dévorant les quelques lignes.

 

 

"Dans une opération spectaculaire menée à l'aube par la Division Obscura, un groupe de sorciers ennemis a été neutralisé alors qu’il préparait un attentat d’une ampleur effroyable près de notre frontière sud. Les suspects, au nombre de cinq, ont été interceptés dans une clairière ensorcelée, dissimulés par un sortilège de Repousse-Moldu, et portaient sur eux une cargaison inquiétante : des potions explosives, des artefacts interdits, et des cartes marquées d’emplacements stratégiques. "Il est clair qu’ils projetaient une attaque visant à semer la terreur chez nous", a déclaré le Ministre de la Magie, Dmitri Volkov, ajoutant que l'opération "a probablement sauvé des centaines de vies". Cet acte de trahison abjecte montre, une fois encore, que nos ennemis n'hésitent pas à franchir des limites innommables. "Nous devons rester unis et vigilants", a insisté le ministre, qui appelle à redoubler de patriotisme face à ces menaces. Les sorciers terroristes ont bien entendu été exécutés.

 

L'Unificateur félicite nos héros et rappelle que tout comportement suspect doit être signalé immédiatement. N’oubliez pas : la sécurité de notre monde dépend de votre vigilance."

 

 

 

Sasha avait senti un enclume tomber au fond de ses entrailles. Ses yeux ne pouvaient plus se détacher du petit encart, minuscule, à côté de la grande photo animée de ce groupe de vieilles femmes occupées à tricoter avec les sourires odieux de ceux qui sont persuadés de bien faire. IL se mit à relire l'article, une fois encore, puis une fois encore, comme s'il avait pu manquer une information supplémentaire de ces quelques mots sordides. Mais au bout d'un moment, il comprit qu'il n'aurait rien de plus que cette information sèche.

Au bout d'un moment, il porta ses mains sur son visage, pour empêcher ses yeux de vouloir relire encore ces lignes odieuses, qui ne lui apporteraient rien de plus.

 

Au loin, le craquement sinistre d'un sortilège écorchait le tronc d'un arbre, et d'entre les doigts de Sasha débordaient des larmes silencieuses.

 

 

 

 

 

 

 

A l'heure du dîner, la Grande Salle débordait de bonne humeur. Après un week end au temps plutôt agréable malgré un vent d'automne, un bon nombre d'étudiants se partageaient leurs anecdotes suite à leur visite à Pré-au-Lard. Du courrier pour la semaine arrivait aussi au-dessus des tables, apporté par des hiboux aux hululements joyeux.

Le brouhaha et les mouvements des élèves firent que Sasha passa presque inaperçu quand il entra à son tour, après tous les autres.

 

Presque, parce qu'il avait tourné immédiatement la tête vers la table des Serpentards et y avait croisé immédiatement le regard d'Anya Nikitovna. Elle avait le visage fermé, signe qu'elle n'avait pas digéré ce qui s'était produit ce jour, quand bien même ses cheveux avaient perdu de leur couleur carmine qu'il avait vu un peu plus tôt.

 

Il avait décidé qu'il ne fuirait pas. Au contraire, il avança droit vers la table des Serpentards, à l'endroit même où Anya était assise. Par chance, près du bord, et loin d'Alison dont il ne vit même pas si elle était assise ici. Les lèvres pincées, il se contenta de laisser tomber sur la table, à côté de l'assiette d'Anya et d'un geste sec qui fit claquer le papier sur le bois, la pochette.

 

Elle était pleine de ce qu'Anya y avait mis, malgré son aspect pitoyablement abîmé. Le dernier numéro du journal était humide et des doigts avaient gauchement effacé les tâches mouillées en emportant l'encre par endroit en traces inélégantes, mais en dessous, s'y trouvaient les photos et coupures.

Il les avait observé, longuement. Il n'était pas compliqué de comprendre que l'histoire d'Anya tenait là-dedans, et pendant qu'il était dans son arbre, il avait senti une brûlure atroce au fond de son ventre, à les observer. Evidemment, il savait bien que l'ennemi aussi, formait des familles et des patriotes. Ils étaient du même sang, d'une certaine manière, et cette même fureur de se défendre courait dans leurs veines.

Il avait songé à déchirer ces artefacts d'une vie sentimentale, à les jeter peut-être dans la Forêt Interdite pour qu'ils y fussent piétinés par la sauvagerie de l'endroit.

 

Mais au bout d'un long moment, il avait juste tout remis dans la pochette, pour venir ici, les cheveux en bataille et une part de ses vêtements encore mouillés par endroit de l'humidité conférée par l'arbre.

 

Sans un mot, Sasha s'apprêta à faire demi-tour. Des regards pesaient sur lui, sans qu'il ne sût exactement si elle avait partagé son aventure avec d'autres. Des Russes lui tomberaient peut-être dessus, ce soir, dans son propre dortoir. Il les affronterait s'il le fallait.

 

Il était prêt.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 17:01

Sasha bouscula un élève, puis un autre, tenant la pochette serré contre sa poitrine. Le souffle court, il détalait à toute allure. Ses jambes avalèrent, quatre à quatre, les escaliers qui conduisaient au rez-de-chaussée, puis ses baskets crissèrent au sol tandis qu'il dérapait vers la sortie.

Un grand saut pour passer les dernières marches qui amenaient au parc, et il atterrit dans les gravillons en faisant peur à une nuée de pigeons ainsi qu'un autre groupe d'élèves. Dehors, un vent désagréable cingla son visage, mais Sasha ne ralentit pas pour autant. Il changeait irrégulièrement de direction, pour éviter un sort qui aurait pu le mettre à terre - car cette garce l'avait poursuivi jusqu'ici.

 

Sur le moment, il avait cru qu'elle abandonnerait, mais les insultes pleuvant dans son dos lui avaient indiqué le contraire, à sa grande surprise. Après tout, ce n'étaient que de simples numéros d'un journal dont les autres Russes avaient certainement la copie, qu'il avait volé. Pourquoi s'acharnait-elle autant, sinon pour le plaisir de se faire la peau d'un Ukrainien ? Il ne pouvait pas lui en vouloir ; si un Russe lui en avait fait autant, il se serait peut-être battu avec la même hargne.

 

Sasha emprunta un sentier entre deux bosquets - il se rapprochait dangereusement de la Forêt Interdite, mais il en avait bien moins peur que les autres élèves. Anya Nikitovna oserait-elle le suivre dans un environnement si imprévisible ? Ils en étaient encore à une cinquantaine de mètres toutefois, au moins.

Sur un tronc à sa gauche éclata soudain un morceau d'écorce percuté par un sortilège, et Sasha eut un hoquet de stupeur. Par réflexe, il fit un détour dans la direction opposée. Ses jambes le portaient par cette espèce de réflexe automatique de la fuite, l'adrénaline faisant battre à ses tempes un flot de sang ravageur - et étrangement, c'était à la fois terrassant et bon.

 

Mais il ne pouvait pas se permettre de perdre les documents qu'il gardait désormais jalousement contre lui. Il ne voulait pas faire de mal à Anya, au fond : elle n'avait pas elle-même participé à la guerre, elle en était bien trop loin, comme une bonne petite fille Russe tenue loin du combat. Elle l'avait dit elle-même. En revanche, ce qu'elle détenait était beaucoup trop important pour lui - et si son pays lui envoyait de l'argent, elle n'aurait qu'à se payer une deuxième édition du dernier numéro si elle y tenait tant.

Alors, dès qu'il passa devant le gros tas de bûches de bois que conservait près du bosquet le garde-chasse, Sasha osa un instant ralentir et se retourner.

 

- Padasno ! s'écria Sasha - la version slave du sortilège de Descente.

 

De sa baguette jaillit un rapide trait bleu qui vint percuter la montagne de bois. Celle-ci s'écroula à moitié, les bûches roulant subitement entre Sasha et Anya pour entraver la course de cette dernière. Ce n'était certes pas suffisant pour blesser la Russe, mais cela faisait gagner quelques précieuses secondes à Sasha maintenant qu'elle devait ralentir et contourner cet obstacle.

Sasha Shevchen a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège de Descente
Difficulté
Résultat D20
6
Interprétation
Réussite
XP gagnée
3

- Padasno ! s'écria Sasha - la version slave du sortilège de Descente.

 

De sa baguette jaillit un rapide trait bleu qui vint percuter la montagne de bois. Celle-ci s'écroula à moitié, les bûches roulant subitement entre Sasha et Anya pour entraver la course de cette dernière. Ce n'était certes pas suffisant pour blesser la Russe, mais cela faisait gagner quelques précieuses secondes à Sasha maintenant qu'elle devait ralentir et contourner cet obstacle.

Autres résultats possibles

- Padasno ! s'écria Sasha - la version slave du sortilège de Descente.

 

De sa baguette jaillit un rapide trait bleu qui vint percuter la montagne de bois. Celle-ci s'éboula de façon spectaculaire, avec un bruit tapageur tandis que les bûches se mirent toutes à rouler et débouler... entravant directement les pas d'Anya qui arrivait précisément à cet endroit-là, la déséquilibrant catastrophiquement. Cette distraction était bien suffisante pour offrir toute latitude à Sasha de poursuivre sa course pour enfin disparaître dans la Forêt...

- Padasno ! s'écria Sasha - la version slave du sortilège de Descente.

 

De sa baguette jaillit un rapide trait bleu qui passa de près du tas de bois sans malheureusement le toucher. Le sortilège alla frapper un arbre non loin qui ne perdit que quelques morceaux d'écorce, pitoyablement.

Sasha n'attendit pas et se remit à courir. 

- Padas... avait commencé à s'écrier Sasha, esquissant deux pas en arrière. 

 

Mais il ne put terminer. Sa chaussure s'était accrochée à la racine mouvante d'un tronc facétieux aux abords de la Forêt, et au lieu de lancer un sortilège, le garçon s'écroula sur le dos avec un hoquet de douleur... Un contre-temps qui permettait bien sûr à Anya de le rattraper.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 15:32

Quand bien même le visage de Sasha était déjà fermé, il parut à peine perceptiblement se décomposer. Les condoléances d'Anya étaient un coup de poing dans les entrailles dont il se serait bien passé. Il avait blêmi légèrement.

 

- Он... Ничего нет? Совсем ? (Il... Il n'y a rien ? Du tout ?)

 

Elle n'avait aucun intérêt à mentir, jugeait-il. Alors comment savoir si l'Unificateur avait pu tout simplement passer sous silence l'assaut en question ? Il y avait peut-être quelques lignes qui avait échappé à la Russe. Deux, tout au plus, qui ne lui aurait pas échappé à lui. Quelque chose du genre. Des bâtiments écroulés dans telle ville, malheureusement quelques morts. Et lui saurait, avec le nom de la ville, que c'était un assaut réussi de la part des Veilleurs.

Ou bien il n'y avait vraiment rien parce que les Veilleurs en question avaient été arrêtés. Et là...

Ses entrailles se tordaient désagréablement. Anya n'avait pas l'air d'accepter de négocier pour quoi que ce soit. Lorsqu'elle bougea, il avait instinctivement saisi sa baguette, lui aussi, prêt à riposter - prêt surtout à invoquer un quelconque sortilège pour pouvoir faire diversion et se tirer de ce mauvais pas. Il jeta un oeil sur la pochette, tenté un instant de la lui prendre par la force, mais il renonça. A la place, il s'était levé comme elle.

 

- Зачем ты это принес, если уже знал ? grogna-t-il en désignant la pochette d'un mouvement du menton. (Pourquoi avoir amené ça si tu savais déjà ?)

 

Il encaissa en silence les décisions qu'elle avait prise à leur sujet : ne plus jamais se parler, ne plus jamais se regarder, même. Sasha soutint pourtant son regard, plusieurs longues secondes. On aurait pu croire que c'était pour la défier, mais non : il voulait être sûr qu'elle ne changerait pas d'avis. S'il y avait le moindre espoir, la moindre faille, Sasha l'exploiterait.

Mais le second crachat et les cheveux qui s'enflammaient étrangement, bien que fascinants, lui faisaient comprendre qu'il ne pouvait y avoir de retour en arrière.

 

Il recula lui aussi, d'un pas, vers la porte. A mesure qu'ils s'éloignaient l'un de l'autre, la tension semblait s'amenuiser à peine perceptiblement, donnant à Sasha de quoi retrouver un peu de respiration.

 

Il était prêt à partir. Dans deux pas, il serait sorti du cachot, et ils ne se reparleraient plus jamais, ne se regarderaient plus jamais. Alors, peut-être qu'il en profitait un peu, malgré lui.

 

Du couloir émanait le simple chuintement d'un courant d'air, trahissant la solitude dans laquelle ils se trouvaient tous les deux : au pire, qui saurait ce qui s'était passé, s'ils se battaient ici ? Il aurait l'avantage, jugea-t-il. Il lui suffisait d'un ou deux sorts. Mais c'était idiot et il le savait très bien : Blondasse l'avait vu, et d'autres gens, les autres jours, les avaient vus s'isoler ici. Il serait désigné coupable très rapidement.

 

Mais Sasha était impulsif. C'était sur un impulsion qu'il avait fait son sac et avait couru attraper un Portoloin avec les autres. C'était sur une impulsion qu'il s'était lancé dans un immeuble à demi-écroulé pour essayer de fuir. C'était sur une impulsion qu'il avait décidé de passer sous silence qu'il était ukrainien avec Anya.

 

Alors, au moment où il allait déguerpir pour de bon, son poignet agita subtilement sa baguette.

 

- Tyanì obladanie, incanta-t-il en un seul souffle léger.

 

Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, arracha instantanément la pochette qu'Anya serrait contre elle. Le journal fondit sur Sasha qui l'attrapa sans réfléchir. 

 

L'instant suivant, il détalait dans le couloir, au pas de course.

Sasha Shevchen a lancé un sortilège !

Sortilège
Sortilège d'Attraction
Difficulté
Résultat D20
12
Interprétation
Réussite
XP gagnée
3

Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, arracha instantanément la pochette qu'Anya serrait contre elle. Le journal fondit sur Sasha qui l'attrapa sans réfléchir. 

 

L'instant suivant, il détalait dans le couloir, au pas de course.

Autres résultats possibles

Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, arracha instantanément la pochette qu'Anya serrait contre elle, d'une brutalité si soudaine qu'avec la pochette fut emportée l'amulette dont le fil se cassa sous le choc. Le tout fondit sur Sasha qui l'attrapa sans réfléchir. 

 

L'instant suivant, il détalait dans le couloir, au pas de course.

Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, confina à la pochette qu'Anya détenait dans ses bras une force soudaine - mais la Russe avait eu le réflexe de retenir l'objet contre elle. Le sortilège n'était tout simplement pas assez fort. 

 

- Chuma ! feula Sasha dans la direction d'Anya. 

 

L'expression typiquement ukrainienne la désignait comme une peste, maudite. Sasha, le visage déformé par la colère, cracha à son tour avant de disparaître au pas de course. 

Le sortilège d'attraction, semblable à un Accio! anglais, aurait dû décrocher la pochette des bras d'Anya pour qu'il pût s'enfuir avec. C'était sans compter la maladresse avec laquelle il avait formulé sa requête : le sortilège n'avait pas agi sur la pochette mais sur l'ensemble de ce qu'Anya avait sur elle. Bien sûr, ce n'était pas assez fort pour qu'elle se retrouvât démunie de quoi que ce fut, mais suffisamment pour qu'une partie de son haut fusse arrachée et qu'une boucle d'oreille tombât au sol avec un tintement. 

 

Un instant pétrifié par l'attaque malgré lui qu'il avait lancé, Sasha resta le souffle court à observer Anya et sa gorge dénudée. 

 

Puis il referma subitement la bouche pour s'enfuir.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 27/11/2024 à 14:31

Sasha recula sur le banc, malgré lui.

 

Quel évènement ?

 

Il ne s'était pas attendu à cette question. Il ne s'était pas attendu à ce qu'elle pût négocier sa réponse. Sasha s'humecta les lèvres, comme pour se donner le temps de réfléchir. Que risquait-il à lui donner cette information ? Anya n'était qu'une jeune élève qui n'était certainement pas en contact avec les armées Russes. Et pourtant. Il lui suffisait d'écrire une lettre vers la Russie, et la Russie saurait la trouver, elle. Saurait envoyer ses émissaires pour venir le questionnaire.

Sasha déglutit, avant de secours la tête, en un non qui signifiait qu'il ne dirait rien.

 

Un moment, il imagina tout ce qu'il aurait pu obtenir, comme informations, s'il s'était fait passer pour un Russe depuis le début. S'il avait su ravaler son ego pour se mêler aux autres, il aurait pu collecter tout un tas de rumeurs, découper des journaux pour en envoyer des petits morceaux vers l'Ukraine. Il y avait tant de choses qu'il aurait pu faire à distance, pour aider les siens. Et à la place, il n'avait su que foncer dans le tas en rugissant qu'il n'était pas Russe.

Il serra les dents, espérant faire reflouer cette émotion qui voulait lui envahir le visage alors qu'il devait rester le plus impassible possible. Ses sourcils froncés, ses yeux attaquant car c'était la meilleure défense, il n'en était pas moins que le remord lui rongeait les tripes.

 

Et maintenant ?

 

Et maintenant, il était pris à son propre piège. Il avait voulu clamer haut et fort qu'il était Ukrainien, il était désormais identifié. Et qu'est-ce que cela lui apportait ?

Au fond de lui, pourtant, il savait que c'était mieux ainsi. Il avait secrètement désiré ces petits instants passés à lire le journal à ses côtés, cette ennemie au visage si supérieur. Avec le temps, qui savait s'il ne se serait pas laissé bêtement séduire ? Au moins, il ne risquait plus rien désormais : il voyait tout le dégoût qu'il provoquait en elle, et cela aussi ajoutait à tout ce qui se nouait en lui à cet instant.

 

Et pourtant, il lui fallait être pragmatique : si elle était la seule à pouvoir lui donner quelques informations, que ferait-il alors ? Il fallait qu'il tentât.

 

Alors il croassa, à voix basse :

 

- Un assaut.

 

Peut-être que ce n'était pas ses chances d'obtenir ce qu'il voulait, qui le faisait parler. C'était peut-être tout simplement la posture impénétrable, sévère d'Anya. Elle était entre lui et la porte, et cela en soi était une menace, mais il ne bougea pas. Si elle savait, si elle voulait lui faire du mal, alors il lui aurait suffit de demander à d'autres Serpentards russes de venir les rejoindre. Alors son compte était bon.

 

- Ca s'est déjà passé, alors tu peux rien faire pour l'empêcher, c'est même plus un secret. C'était prévu depuis longtemps. Ca a dû avoir lieu vendredi. Ca doit être dans le numéro d'aujourd'hui.


Les Orchidées Explosives

Message publié le 27/11/2024 à 10:49

Lorsqu'il avait ouvert les yeux, le matin suivant, Sasha avait été assailli par les images troubles d'une nuit à demi-passée dans la forêt, non dans l'état tranquille qui était le sien habituellement lorsqu'il se transformait pour goûter un peu la liberté d'être animal, mais dans une course folle où il traînait sous lui une petite fille qui n'avait rien demandé mais avait chuté dans l'herbe noyée de brume.

Un moment, il tâcha de repousser ses souvenirs comme un mauvais rêve, mais quand sa conscience s'éveilla totalement, il fut forcé de constater que ce n'était guère le fruit de son imagination, mais quelque chose qui s'était réellement produit. Blyad, avait-il juré en sortant de son lit, sautant à toute vitesse dans un jean parce que les cours reprenaient ce matin et que les autres élèves n'avaient pas jugé bon de le réveiller : il était seul dans la chambre de son dortoir. Ses compagnons de chambrée ne le trahissaient pas pour ses absences nocturnes, mais ils n'en faisaient guère plus pour lui. Non sans d'abord passer ses mains dans ses cheveux pour les épousseter - histoire de les débarrasser sommairement de quelques traces de la forêt restée dans ses mèches - Sasha se mit à chercher frénétiquement de quoi se mettre quelque chose sur le dos. Ses pensées étaient tout aussi désorganisées que son sac plein de vêtements roulés en boule. Avec un pull et une chemise en moins. Avec la soeur d'Alison et sa promesse à tenir à la place. Avec ses yeux noyés de larmes et la paume de sa main sur le front.

 

Le geste avait été si doux qu'il en avait fermé les yeux, accroupi sur les marches. Il aurait voulu être léopard à ce moment-là : il savait qu'alors son état d'esprit aurait pu être suffisamment détaché de tous les tracas du monde pour être concentré sur l'instant. Mais il avait été parfaitement conscient, et peut-être suffisamment conscient pour avoir l'impression de ressentir encore la chaleur de la main de Charlie entre ses yeux, de longues heures de sommeil plus tard.

 

En-dehors de cette rencontre nocturne qui avait clos le week-end, Sasha avait passé la moitié de ces derniers jours à explorer le château et ses environs, curieux au fond de cet environnement nouveau ; et l'autre moitié à maugréer dans sa barbe qu'il avait sûrement pas peur des Russes, que les Russes il en faisait qu'une bouchée, même qu'il mettrait sur leur carcasse du coulis de framboise comme sur les côtes de porc qu'ils servaient à Poudlard pour leur croquer les os et les broyer entre ses dents comme de vulgaires rats des champs tombés entre les crocs d'un chat sauvage, et que s'il avait voulu il aurait déjà cassé les gueules de ceux qui se tapissaient bien au chaud autour d'elle.

Et autres joyeusetés de ce genre.

 

Il fallait donc au moins cette rencontre avec Charlie, son crapaud et la promesse qu'elle lui avait demandé pour qu'il cessât enfin d'en vouloir à Alison et de ruminer comme un bovin dépité de son sort.

 

Le matin, il put se présenter à temps avec les sixième années en cours de métamorphose, où il se débrouillait plutôt correctement - si tant était qu'on le laissait formuler ses sorts dans sa langue d'origine, ce à quoi rechignaient un peu certains professeurs. D’aucuns répétaient à Sasha que les formules latines étaient plus subtiles et plus puissantes. Sasha y mettait du sien en formulant ses versions slaves dans les variations les plus puissantes possibles, histoire de leur donner tort devant les autres élèves de la classe. Et ainsi, s'il y avait des Russes, qu'ils fussent tous bien informés qu'il les transformerait avec aisance en bûche de Noël si l'envie lui prenait. (Parce que, rappelons, il n'avait sûrement pas peur d'eux.)

 

Au déjeuner, Sasha n'avait pas cherché Alison, mais plus la journée passait, plus il sentait son estomac se rappeler à lui dans des contorsions étranges. Ce n'était pas vraiment lié à l'excitation de revoir sa fausse petite amie, non : il s'agissait d'encaisser ses récriminations. Car cette fois, il avait vraiment quelque chose à se reprocher. Si Charlie n'avait pas tenu sa promesse, elle se fâcherait parce qu'il avait emmené sa petite soeur promener plutôt que de la ramener au château, risquant littéralement sa vie. Aussi avait-il l'impression que la journée passait trop vite et que ce cours de botanique de l'après-midi courait vers lui sans qu'il pût y échapper. Par précaution, n'ayant aucune envie de risquer de nouveau une privation de repas pour les caprices, Sasha prit soin de dévorer tout ce qu'il pouvait avant de prendre la direction des serres. 

 

Dehors, le temps était exceptionnellement clément : un soleil radieux se montrait régulièrement entre deux colonnes de nuages qui soutenait un ciel frais mais engageant. Sur le chemin, il décida donc d'un plan ingénieux : il ferait comme si de rien n'était et avec un peu de chance, tout irait bien.

 

Lorsque Sasha se présenta à l'entrée des serres, la plupart des élèves étaient déjà là. Les cinquième année étaient rudement ponctuels, trouvait-il, tandis qu'il se présentait à l'entrée - les mains dans les poches de sa robe de sorcier et bien sûr, son noeud de cravate de travers.

La brochette bien évidemment était entièrement constituée, dans les premiers rangs de ceux qui attendaient de pouvoir entrer, lorsque la professeure leur ouvrirait la petite porte qui leur permettrait de se réfugier à l'intérieur. Sasha doubla la longue file, déclenchant sur son passage quelque silence, puis quelques murmures parmi les Serpentards. Evidemment, puisque leur dernière rencontre s'était soldée par l'envoi de l'un d'entre eux à l'infirmerie. Sasha ne se cacherait certainement pas pour cela. Il passa devant eux avec indifférence - sa seule intention étant de reprendre son poste aux côtés de la petite rousse qui lui servait de patte blanche à montrer aux professeurs. Sasha la rejoignit et, ignorant la brochette du mieux qu'il savait le faire, se pencha sur Alison. Lui colla un baiser un peu plus lent que celui de leur dernier cours, histoire de s'appliquer un peu même s'il avait le naturel d'un automate, puis il lui prit la main pour la mettre dans sa poche à lui, d'une manière un peu brusque, un peu autoritaire - le coeur battant à tout rompre, s'attendant à ce qu'à tout instant la jeune fille lui collât une gifle bien méritée. 

 

Mais rien de cela n'arrivât.

 

Une bouffée d'espoir l'inonda : Alison n'avait pas l'air au courant (ou alors elle cachait parfaitement son courroux), mister Brooks avait trouvé qu'ils avaient fait du bon travail. Encore une ou deux séances de Potions sur ce registre-là, puis la même chose en Botanique, et il pourrait bientôt demander à retourner être à plein temps avec les sixième année. (Pour la Divination, les cours n'avaient pas encore commencé, mais il suffirait de prouver à la première séance qu'il était un voyant de premier ordre, ce qu'il n'était pas, bien sûr, pour faire en sorte que le professeur de Divination approuvât qu'il fusse au plus vite auprès des 6ème année). Car quitte à perdre tant de mois à Poudlard, au moins qu'ils fussent les plus productifs possibles. Il avait davantage d'espoir d'apprendre des choses utiles à la guerre en sixième année qu'en cinquième. Par exemple, les sixième année travaillaient de vraies potions médicinales, comme la potion de régénération sanguine, et manipulaient des plantes dangereuses comme les Baies d'Epine Mortelle, avec lesquelles on pouvait fabriquer des pièges et de petites armes létales. Des sujets bien plus intéressants que...

 

- ... les magnifiques Orchidées Explosives ! claironnait la professeur, qui avait surgi avec une bonne humeur qui donna instantanément à Sasha l'envie d'aller dormir au soleil - alors il ferma les yeux. Ces magnifiques fleurs - je suis sûre que vous en avez déjà vu, on en décore la Grande Salle à Noël pour ceux qui voudront m'accompagner en décembre !

 

Quelques exclamations enthousiastes d'un petit duo de filles se firent entendre, vantant la beauté de ces fleurs multicolores et exotiques, qui hypnotisaient ceux qui en voyaient pour la première fois. Sasha se demanda juste si ces plantes mangeaient les mouches. (Auquel cas, ce serait pratique.)

 

- Pour l'instant, reprit la professeure, celles-ci sont à une étape de développement de leurs premiers boutons, que nous allons devoir faire grossir à l'aide d'un sort de chaleur dé-li-cat pour qu'elles puissent être prêtes exactement quand nous le souhaiterons. Il nous en faudra une première fournée pour Halloween, et nous garderons les fleurs les plus tardives pour les décorations de Noël. Evidemment, comme leur nom l'indique, tout le défi est de les faire grandir sans les brusquer. Sinon, elles explosent. Et que se passe-t-il si elles explosent ?

 

L'une des deux enthousiastes leva la main en se dandinant comme si elle avait très envie de faire pipi.
 

- Oui Jenny ?

- Les Orchidées Explosives rejettent des spores irritants dans un nuage coloré, et ces spores au contact de la peau créent des plaques irritantes !

- C'est exact. 2 points pour Serpentard pour ce bon travail de préparation. Les spores déclenchent une réaction d'allergomagie majeure, à laquelle la peau réagit en formant une couche d'écailles très urticantes et vertes qui mettent des jours à s'en aller. Bien sûr, nous pouvons concocter des baumes pour soulager l'inconfort, mais la tâche ne disparaît que par elle-même au bout de plusieurs semaines. Aussi, pour éviter qu'elle n'explose, vous allez devoir redoubler de douceur. Certains d'entre vous ont sûrement déjà vus leurs mères chanter des berceuses à leurs orchidées explosives quand elles font chauffer la cheminée, n'est-ce pas ? Hé bien c'est parce que les orchidées grandissent avec cette chaleur mais que trop d'un coup risque de déclencher l'explosion des boutons, alors il convient d'être apaisant avec eux. Aussi vous demanderai-je d'entrer dans le calme, histoire de ne pas commencer à les stresser inutilement. Vous êtes prêts ?
 

Au lieu d'une réponse uniforme, les élèves se lancèrent dans des discussions désordonnées, certains s'inquiétant de ce qu'ils pouvaient rater leur sort de chaleur tandis que d'autres inventaient déjà des versions égrillardes des chansons pour enfant qu'ils connaissaient.


 


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 26/11/2024 à 13:54

Sasha s'était pétrifié. Les yeux alertes, fixés sur le visage d'Anya - des traits doux devenus durs comme de la pierre - et les mains sur ses genoux, les doigts sertis dans son jean comme l'adrénaline était brusquement monté en lui, ses lèvres seules bougèrent, tentant le tout pour le tout.

 

- О чем ты говоришь ? il dit. (De quoi tu parles ?)

 

Il aurait voulu que le ton fût comme si de rien n'était, mais sa voix était blanche, même légèrement hostile malgré lui.

De toute façon, le crachat ne laissa aucune place à l'interprétation : il n'était pas des leurs, et elle l'avait découvert.

 

Sasha resta tranquillement assis. Ses yeux se posèrent seulement brièvement sur la tache sombre de salive qui avait percuté le sol. Elle avait eu l'élégance de ne pas lui cracher directement dessus. Le silence était de plomb, pesait sur le cachot comme si le château au-dessus soudain pesait plus lourd, menaçait de les ensevelir là, dans ce mutisme. Pour une fois, Sasha souhaita qu'ils fussent interrompus.

 

Lorsqu'il avait lu les numéros précédents, seul avec elle, il avait maintes fois tourné la tête vers la porte. Pas seulement parce que c'était la seule sortie ; mais aussi parce qu'il ne souhaitait pas qu'on découvrît l'instant suspendu - et interdit - auquel il se donnait accès. Il n'était pas question de partager les journaux d'Anya avec les autres élèves. Ce n'était pas pour Alison qu'il s'inquiétait, mais bien pour cet étrange sentiment jaloux, qu'il ne s'expliquait pas à lui-même.

 

Sauf qu'un tel cirque ne pouvait pas continuer, et Sasha le savait très bien.

 

Toujours immobile, il pinça les lèvres. Finit par hausser brièvement les épaules.

 

- Да. Я солгал. Но мне нужно знать. (Oui. J'ai menti. Mais j'ai besoin de savoir.)

 

Sasha serra les dents. Maintenant, la balle était dans son camp et elle le savait. Il ne se mettrait pas à genoux devant une Russe pour la supplier. Mais pourtant il était resté là plutôt que de partir immédiatement après avoir été découvert. C'était pourtant ce qu'il s'était dit : quand elle saurait, il disparaîtrait, se ferait oublier. Il n'y avait pas beaucoup - voire pas du tout - d'ukrainiens à Poudlard. S'il se faisait trop remarquer, il était assez certain qu'un petit groupe de russes avec un peu de ressentiment ne serait que trop heureux de le passer à tabac en bonne et due forme.

Mais donc, il était encore là. Il s'humecta les lèvres au terme d'une inspiration censée lui donner du courage.

 

- Только сегодня. Это последний номер. (Juste aujourd'hui. Ce dernier numéro.)

 

Il ne supplierait pas, se répétait-il en son for intérieur. Mais par Mokosh, que donnerait-il pour savoir ?

 

- В эти дни должно было произойти важное событие. Я просто хочу знать, говорят ли они об этом. Это для... Чтобы получать новости от меня. И после сегодняшнего дня я больше никогда не приду. Хорошо ? (Il aurait dû y avoir un évènement important ces jours-ci. Je veux juste savoir s'ils en parlent. C'est pour.. Pour avoir des nouvelles des miens. Et après aujourd'hui, je viens plus jamais. Ok ?)

 

Sasha serra un peu plus les doigts sur son jean. Il en avait mal à la peau en dessous, mais il fallait au moins ça pour l'empêcher de s'énerver.


Templum Maledictum

Message publié le 25/11/2024 à 21:50

Avec Mister Brooks, Sasha avait cru s'en tirer à bon compte en terminant avec succès le philtre de paix, sous les directives précautionneuses d'Alison ; mais c'était sans compter sur la fourberie d'un professeur qui savait garder dans ses poches quelques cartes joker. Aussi, quand à la fin du cours la Serpentard s'en était allée, plutôt satisfaite, le Gryffondor s'était éloigné, bougon, avec la promesse d'une retenue supplémentaire.

Car c'était là le cadeau qui lui avait été fait par Mister Brooks : une retenue avec un certain Mister Bartholomew Beckett (avait-on idée d'être affublé d'un tel prénom ?), avec lequel il avait rendez-vous l'après-midi suivant, dans la bibliothèque.

 

 

 

Lieu maudit.

 

Ce fut ce qu'il pensa en premier lieu. Sasha n'avait jamais mis les pieds dans la bibliothèque auparavant.

Ou plutôt : Sasha n'avait jamais mis les pieds dans une bibliothèque, aussi incroyable que cela pusse paraître. Et il avait repoussé le plus longtemps possible l'idée d'entrer dans celle-ci.

 

Il resta planté, d'abord, au milieu de l'entrée de celle-ci. C'était une grande allée intimidante, bordée de tables flanquées chacune d'une lampe à la lueur douce et bleutée. De chaque côté se dressaient de très hautes étagères alignées en rayonnages sombres et surchargés d'ouvrages : des vieux, des récents, flambants de couleurs ou taciturnes. Dans un angle, de grands casiers contenaient une multitude de gros parchemins soigneusement entassés, triés et annotés avec de petites étiquettes qui pendaient au-dessus du bureau de l'entrée comme les mobiles au-dessus d'un berceau. Quelques élèves parcouraient les rayonnages, d'autres grattaient sur un parchemin, assis à une table. Un silence respectueux n'était perturbé que par quelques discussions à voix basse, de temps à autre, tant et si bien que Sasha avait l'impression d'être dans une cathédrale peuplée de meubles venus prier. Une fille pouffa non loin de Sasha, et cela l'arracha à sa contemplation interdite. Sac sur l'épaule, il se décida à se rendre vers le bureau de l'entrée. Déjà, quelques groupes d'élèves commençaient à sortir car l'heure du dîner approchait. Sasha devrait se retenir, à son grand désespoir, d'aller dévorer les beignets de crevette que l'on servirait ce soir.

 

L'homme derrière le bureau avait un visage avenant. Un peu trop pour être innocent du goût de Sasha. De toute façon, un type qui vivait au milieu des livres ne pouvaient qu'être empli d'un savoir dont il ne pouvait qu'abuser, non ? Le Gryffondor tâcha de prendre une inspiration, comme pour chasser ses inquiétudes, et se remémora les recommandations d'Alison.

 

- Bonjour, mister Beckett, il dit soigneusement malgré son accent qui trahissait fortement ses origines slaves. Je suis Sasha Shevchen, sixième année à Gryffondor, sir.

 

Le soin de cette annonce tranchait dlleurs avec son apparence : sa cravate était nouée de travers, le bas de pantalon était tâché de poussière et ses cheveux en bataille comme ses cernes lui donnaient l'air de venir de sortir du lit. Mais avec une assurance rigide, il tendit un morceau de parchemin à l'homme aux cheveux gris.

 

- C'est un mot de Mister Brooks. Il m'a envoyé en retenue, hum...

 

Sasha jeta un coup d'oeil autour de lui, comme s'il avait oublié où il se trouvait et qu'il se rappelait soudain l'étrangeté de cet endroit où tout le monde s'efforçait de faire silence.

 

- ... ici, sir.

 


L'Ombrelangue

Message publié le 25/11/2024 à 18:50

Plus le jour se couchait tôt, plus vite la Forêt Interdite paraissait menaçante. Les voix des grillons qui chantaient dans la douceur de l'été s'éteignaient peu à peu, laissant place à de sinistres craquements et crépitements. Chaque bourrasque de vent décrochait par dizaines des feuilles qui après de longs jours avaient cessé de lutter pour survivre. Alors elles cédaient enfin, acceptaient d'être vouées à rejoindre le poussière. Elles frôlaient les troncs d'un chuintement léger avant de tomber au sol - alors chacune d'elle tapotait une fois la terre, comme si un animal avait fait un pas à cet endroit-là, et tout voyageur aventureux était pris d'un frisson, se retournant en craignant une présence inaperçue, sous l'oeil attentif de quelque rapace dont on devinait, vers les cimes, la forme distincte : une silhouette au bec sévère et aux yeux perçants, dont le plumage sombre se fondrait bientôt avec la nuit, une fois que celle-ci serait complète. Pour l'heure, on distinguait encore les buissons ardents qui bordaient de petits sentiers formés par la mousse, là où la végétation rampante n'avait pas parfaitement recouvert les sols humides. Dans cette jungle bucolique, quelques pattes avaient formé là des traces boueuses : l'empreinte ici d'un cerf, là, celle d'un félin aux dimensions inquiétantes...

 

Des gouttes, enfin. Irrégulières. L'Ecosse était toujours humide à cette période de l'année ; et les arbres semblaient n'en avoir jamais fini de s'ébrouer pour laisser tomber des perles qui s'accrochaient aux feuillages bas.

 

Dans l'horizon, emporté par la brume, Poudlard avait disparu. A mesure que celui-ci s'épaississait, la Forêt en tous sens paraissait la même ; comme un labyrinthe aux miroirs infinis.

 

 

 

Entre deux troncs dénudés, une fouine avait commencé à sortir le bout de son nez ratatiné. Son petit minois gris s'éleva vers le ciel, la truffe frémissante tandis qu'elle humait l'air - à la recherche d'indices quant à son dîner prochain, peut-être. D'un pas léger, elle emprunta le pont formé par une grosse racine au-dessus d'un petit cours d'eau, s'apprêta à sauter de l'autre côté - quand soudain elle s'immobilisa, figée comme la pierre.

Un coup d'oeil d'un côté, puis d'un autre.

 

Prédateur, semblait crier ses yeux silencieux, comme deux billes alertes qui peinaient à trouver, dans leur environnement, celui dont elle sentait la présence sans l'avoir vu.

 

Et puis, soudain, un vrai bruit. Un craquement grossier, si indiscret que la fouine avait déjà disparu. Sasha eut un grognement de dépit.

 

 

 

Au bout du chemin, une petite tête rousse : un instant, il avait cru qu'il s'agissait d'Alison. Mais la fille avait tourné sa tête un instant et il avait vu un autre profil. Plus jeune. Elle reprit son chemin. Le froid commençait à l'envelopper.

 

Sasha la suivit.

 

Sans un bruit. Comme une ombre. Il avait cette expérience-là : celle de disparaître presque tout à fait. Généralement, seuls les animaux sentaient sa présence, à cause de leur flair, mais il arrivait parfois à se camoufler suffisamment pour rester tapi sans qu'aucun d'eux ne le détectât plusieurs minutes durant.

 

Suivre une gamine était un bon exercice.

 

Parfois, l'enfant se retournait, prise d'un frisson. Il savait que c'était son instinct qui parlait, et son instinct avait raison. Elle n'avait rien à faire ici, elle était suivie, et nul ne savait les intentions des créatures qui observaient sa marche timide. Pas même lui : où le conduirait-elle ? Ca n'avait pas beaucoup d'importance.

 

Ici, d'ailleurs, rien n'avait beaucoup d'importance.

 

Ce n'était ni bien ni mal, c'était ainsi.

 

 

 

Tsssss... Tssss...

 

 

Sasha et la jeune fille eurent le même réflexe : l'immobilité totale, le temps d'un instant. Elle tourna la tête la première vers le lit de la rivière - il préféra détourner lentement les yeux vers la créature qui avait émis un bruit, un mouvement brusque étant trop perceptible.

 

Alors, ils virent le serpent.

 

Il avait une tête énorme, plus gros que le poing de Sasha, et ses deux yeux étaient brillants d'un vert fluorescent dans la nuit. Son corps était couvert d'écailles noire qui luisaient d'humidité - on en devinait les reflets suintants à mesure que son corps se dressait en ondulant en sortant de la rivière.

 

Trois mètres au moins.

 

Le serpent s'éleva, fort de ce tronc musculeux qui le soutenait. Il se dressa tant qu'il était à la hauteur d'une petite fille et avec lenteur, ouvrit sa gueule. Ses mâchoires se désolidarisèrent, laissant apparaître une langue noire fendue : comme prise d'une vie propre, celle-ci ne cessait de gesticuler, vive et légère. Elle brassait l'air, ses pointes frémissantes.

 

Et puis le serpent fondit sur elle. 

 

Ses crocs se plantèrent dans le tronc juste derrière. Il se redressa, émettant des sifflements furieux. Le serpent se retourna sur lui-même, son corps battant la rivière - mais nulle part, nulle part l'enfant n'était.

 

 

 

 

Chut, il dit avec ses doigts.

 

Ils étaient perchés. A près de cinq ou six mètres du sol. L'enfant n'avait pas dû apprécier le voyage : elle avait été happée par ses vêtements, par derrière, comme si la main de Sasha avait été la gueule d'un animal qui avait mordu ses vêtements et l'avait tractée avec brutalité. Secouée, les cheveux devant les yeux, elle avait fini par atterrir assise sur une branche.

Heureusement, la violence avec laquelle il l'avait emportée lui avait momentanément coupé le souffle ; Sasha tira sur sa capuche - dans l'autre sens, cette fois, et le visage de la petite rousse fut découvert : alors elle se découvrit assise sur une branche à califourchon. En face d'elle, pieds repliés sous lui et en équilibre contre le tronc, il y avait Sasha : son jean plein de boue, sa chemise mouillée, des feuilles emberlificotés dans la tignasse blonde qui faisait office de chevelure.

Et l'un de ses doigts marqués par une griffure noire était posé sur sa bouche.

 

Chut.

 

Il baissa les yeux avec lenteur. En bas, le serpent cherchait sa proie, encore. Il tournait entre les buissons. Et la nuit gagnait du terrain : le brouillard blanc devenait de plus en plus gris. Bientôt, il serait d'un noir aussi épais que le flot de la rivière, dans laquelle le Serpent disparaissait parfois.


A l'Est rien de nouveau

Message publié le 25/11/2024 à 13:39

C'était vite devenu un rituel.

 

Pour la troisième fois, depuis la rentrée, Sasha profitait de ce que la plupart des élèves fissent la grasse matinée pour se glisser dans les cachots après sa sortie matinale, et attendre qu'Anya Nikitovna sortît à son tour pour lui montrer les journaux qu'elle faisait venir de Russie. Il était encore trop tôt - en tout cas il l'espérait - pour qu'elle s'inquiétât de ce qu'il ne fût toujours pas en mesure de prendre lui-même un abonnement. Tant qu'il le pourrait, il profiterait de la situation pour avoir ces informations gratuitement, même si elles étaient tronquées, lui semblait-il.

Il trouvait bien sûr porte close en arrivant devant l'entrée de la salle commune des Serpentards. Ce matin-là, ses chaussures étaient encore mouillées ainsi que le bas de son pantalon, mais il n'en avait cure. A la place de la tenue réglementaire qu'il devait mettre la semaine, il avait enfilé un sweatshirt dont la capuche grise reposait en partie sur l'arrière de son crâne, laissant juste apparaître ses tempes presque rousses.

 

Il n'eut à attendre que quelques minutes, les mains dans les poches, adossés à la pierre, pour qu'enfin quelqu'un sortît. Il se détacha du mur aussitôt pour se retrouver face à...

 

... une grande blonde dont la bouche semblait indéfiniment faire une moue de dégoût.

 

Merde, un bout de brochette.

 

- Sasha ? Qu'est-ce tu fais là ?

- Tu veux pas aller chercher quelqu'un pour moi ? Please, ajouta-t-il avec lenteur, ainsi qu'une autre élève de cinquième année le lui avait appris.

 

Please Alison, il fallait dire quand il demandait un ustensile. Dans le cas de ce dimanche matin, l'astuce aurait mieux fonctionné s'il s'était souvenu du prénom de la fille ; malheureusement, si Alison l'avait prononcé devant lui, il n'en avait fichtrement aucun souvenir. Peut-être Maddie ? Ou Carolina. Ou aucune des deux. Dans le doute, s'abstenir.

 

- Tu veux voir Alison ?

- Nan, pas elle. Anya.

 

Blondasse ouvrit de grands yeux, appliqua une main sur sa poitrine. Quoi, au'est-ce qu'il avait dit, encore ?

 

- Anya Nikitovna. Tu la connais pas ? il la pressa avec un soupir agacé.

- Tu sors avec Anya ?! dit-elle, et sa bouche parut encore plus dégoûtée maintenant qu'elle s'était ouverte en un "O" de protestation.

- Hein ?! Mais nan ! J'ai besoin qu'elle m'apporte un truc, c'est tout !

 

Blondasse croisa les bras sur sa poitrine, l'air suspicieux.

 

- Qu'elle t'apporte quoi ?

 

Sasha pencha doucement la tête de côté, les lèvres pincées. Il s'efforça de ne pas répondre une obscénité.

 

- Des... De la lecture.

- De la lecture.

- C'est ça. En cyrillique, tu vois.

- En russe, quoi.

 

Sasha souffla par le nez un soupir dépité.

 

- Oui, si tu veux.

- Mais j'croyais que t'étais pas Russe.

- Oui, ben non, mais...

 

Blondasse haussa les sourcils, croyant enfin avoir coincé Sasha la main dans le sac. Ce dernier s'humecta les lèvres, et puis contre toute attente il déclara.

 

- Bon tu vas m'la chercher ou j'te plaque contre le mur et je gueule dans l'escalier qu't'essaies de m'embrasser dans le dos d'Alison ?

 

Cette fois, l'argument fit mouche. Blondasse recula d'un pas, interloquée, avant de faire demi-tour vers la porte de la salle commune, le nez froissé.

 

- C'serait même pas crédible, moi j'sortirai jamais avec une brute comme toi, elle rétorqua - mais, comme si elle avait pu avoir peur des conséquences d'avoir avoué une telle chose, elle descendit les escaliers quatre à quatre pour disparaître.

 

 

 

 

Au bout d'un moment qui parut interminable, la porte se rouvrit. Et cette fois, il vit immédiatement la silhouette d'Anya. Ses longs cheveux bouclés et sauvages, sa démarche chaloupée. Instinctivement, il carra les épaules, histoire de se tenir droit ; mais son visage resta fermé.

 

- J'espère je te réveille pas, il dit comme préambule.

 

Ce n'était pas comme s'il venait prendre des nouvelles d'elle, de toute façon. Elle savait parfaitement pourquoi il venait. Sasha se hâta de longer le couloir pour aller dans l'un des cachots voisins - celui où par deux fois déjà, ils s'étaient retrouvés pour qu'il pusse consulter le journal auquel elle était abonnée.

 

- Tu as le dernier numéro ? il demanda par dessus son épaule en entrant dans la salle d'un pas pressé.

 

Son impatience était visible : malgré ses mains dans ses poches, il se hâta de passer entre les tables pour aller s'asseoir au même endroit que la dernière fois, le souffle court. Et même assis, il ne cessait de gigoter. Seulement alors il fit apparaître ses mains, se les passa sur le visage. Ses lèvres, ses joues et son cou avaient rougi d'une drôle de façon.

 


Le Philtre de Paix

Message publié le 23/11/2024 à 14:48

Passée la surprise et le léger sursaut dû à l'assaut d'Alison dans sa poche, Sasha avait eu l'impression que la main de la Serpentard était minuscule dans la sienne. Il n'osait plus vraiment bouger. Avait-il toujours les doigts aussi moites ? Est-ce qu'elle tremblait ou il se faisait des films ? Tant d'émotion pour une simple retenue, vraiment, Sasha se demandait dans quel genre d'univers enchanté Alison avait pu grandir pour être autant bousculée pour si peu.

Devant les filles, il resta aussi silencieux et morne qu'une bûche de bois devant la cheminée, comme s'il n'avait d'autre possibilité que d'attendre son destin fatal. Sa seule réaction fut de décocher lentement un regard vers Alison après le mot sauvage.

 

Heureusement, cette dernière emporta le Gryffondor avant qu'il n'eût le temps de dire quoique ce fut, parce qu'enfin une émotion pouvait se lire sur son visage : malgré le baiser (hypocrite) qu'il venait de recevoir, une surprise catastrophée, ou quelque chose de ce goût, avait agrandi ses yeux et entrouvert ses lèvres. Comment ça, on n'a pas faim ?!

Bougon, Sasha suivit néanmoins la jeune fille, le coeur déchiré à chaque mètre qui s'ajoutait inéluctablement entre lui et les tranches de jambon grillé qu'il comptait empiler dans son assiette.

 

- Ben j'espère qu'il va en rester, maugréa-t-il.

 

Alison gardait sa main dans la sienne, un peu bizarrement. Et le silence qu'ils se traînèrent jusqu'à l'angle du couloir lui sembla inconfortable - tandis que son cerveau, lui, traitait avec lenteur les informations qu'Alison avait donné à ses amies. Quand elle lâcha sa main subitement, il fit disparaître la sienne rapidement pour la remettre à sa place : dans sa poche, où on ne pourrait plus la voir. Il haussa les épaules.

 

- Ben maintenant tu sais, il grommela, renfrogné. Pourquoi, ça change quelque chose ?

 

C'était correct de faire semblant de sortir avec un Russe, mais pas un Ukrainien ? semblèrent brûler d'ajouter ses prunelles susceptibles ; mais en face, Sasha rencontra surtout une parfaite indifférence. Savait-elle au moins ce qui existait en dehors de son Royaume ? Autant laisser tomber.

Elle était prête à partir, de toute façon. Pour sa part, il resta planté là, interdit.

 

Silence.

 

- Que vingt minutes ? Ca fait pas un peu...

 

Ses yeux allèrent de droite à gauche, comme si c'était évident. Visiblement, ça ne l'était pas. Il baissa la voix pour poursuivre.

 

- ... Un peu bâclé, quoi ?

 

Le crépitement des torches qui bordaient le couloir meublèrent le silence suivant. Une série de cavaliers et leurs cheveux trottaient dans un tableau au-dessus de leurs têtes, passant et repassant entre des champs jaunis par les blés, le cliquetis des armures lointaines couvrant ici la rumeur des élèves qui s'entassaient dans la Grande Salle pour dévorer les plats.

Le visage de Sasha s'illumina.

 

- Je vais aller directement aux cuisines, il dit comme s'il avait eu une révélation. On n'a qu'à manger là-bas, comme ça on peut prendre le temps, ça les laissera s'imaginer quelque chose d'un peu moins... un peu moins...

 

Merde, le mot lui venait pas. Le seul mot qui lui venait était celui qu'elle avait prononcé elle-même : sauvage. Mais ce n'était pas ça qu'il cherchait.

 

- Un peu moins... Tu vois quoi.

 

De toute évidence elle ne voyait pas, parce qu'Alison voyait des choses qui n'existaient pas dans son monde à lui, et inversement. Comme par exemple des choses pour lesquelles il était perpétuellement coupable et dont lui n'avait jamais entendu parler. Il perdit patience.

 

- Ben sale, quoi !

 

Le cliquetis des armures s'apaisa : le commandant en chef des armées avait décidé d'une halte. Les soldats attendaient dans le silence, leurs drapeaux flottant au vent, et le silence sembla incongru au Gryffondor qui fit claquer sa langue sur son palais. Leurs conversations de sourd ne lui semblaient qu'être une preuve supplémentaire, s'il en fallait une, qu'ils ne pouvaient pas se comprendre.

 

- Enfin moi j'm'en fous après tout, puis au pire ça entretiendra ta réputation exotique de te taper un sauvage, hein. Donc tu fais comme tu veux, moi j'vais chercher quelque chose à me mettre sous la dent.

 

Sans autre forme de procès, Sasha tourna les talons et s'éloigna dans une autre de ces longues galeries de Poudlard, au décor enchanteur. Poudlard était un drôle de labyrinthe dont il avait fini par comprendre le plan principal, mais où il subsistait tout un tas de recoins qui n'attendaient que d'être explorés. Il avait d'ailleurs entendu dire qu'on pouvait atteindre les cuisines par les deux entrées des cachots, de part et d'autre des couloirs qui encerclaient la Grande Salle. Même s'il ne trouvait pas de quoi manger tranquillement, cette exploration ne lui apporterait que des informations importantes pour le reste de l'année ici, et il n'aurait pas perdu son temps à risquer l'inanition pour la réputation d'une fille qui le traitait de sauvage.

Sasha s'enfonça dans le couloir d'un pas étrangement léger et rapide malgré sa carrure trapue. On aurait dit un chasseur longeant les murs, espérant être le seul à capter la proie qui se tapirait à l'angle du corridor suivant.


Le Philtre de Paix

Message publié le 20/11/2024 à 20:39

Devant le professeur, Sasha était plutôt serein. Les enseignants de Poudlard avaient les punitions légères à son goût. Certes, il n'aimait pas le regard des autres et les humiliations ; mais cette fois-ci, avoir emporté avec lui le nez d'un autre garçon compensait suffisamment pour qu'il se sentît plutôt tranquille face à Mister Brooks. Il jetait de temps à autre un coup d'oeil vers Alison. Elle avait le nez et le blanc des yeux rouges. Est-ce qu'elle avait vraiment pleuré pour une simple punition ?

Sasha évita de lever les yeux au ciel et se reconcentra sur le professeur. Il avait mis ses mains dans ses poches. Lui aussi avait mal aux bras, aux épaules en particulier, mais Veles irait tondre les nuages le jour où il l'admettrait.

 

- Ok, Sir, fut le seul commentaire de Sasha à l'attention de Brooks - et lorsque ce dernier leur indiqua la porte, il en prit la direction à la suite d'Alison d'un pas tranquille.

 

Le couloir froid qui courait entre les cachots les accueillit d'un silence lugubre. Les flammes qui ornaient régulièrement la pierre pour maintenir une luminosité tamisée ne parvenaient pas à chasser l'humidité et l'austérité des lieux. Alison avait le pas vif - à cause du froid ou d'autre chose, qu'en savait-il ?

Sasha pressa le pas pour ne pas se laisser distancer. Accéléra même jusqu'à la dépasser un peu, histoire de pouvoir lui parler tout en jetant des coups d'oeil vers son visage fermé - si c'était possible. Il ne savait pas pourquoi, mais ces rougeurs autour des traits juvéniles d'Alison attiraient son regard d'une manière insolite. Comme lorsqu'on voit, pour la première fois, une chenille aux couleurs fluorescentes : anormale, repoussant et fascinant à la fois. Sauf qu'il ne pouvait décemment pas la scruter de façon trop évidente. De toutes façons, les lueurs vacillantes des cachots ne lui permettaient pas, comme dans la salle de classe, d'apercevoir les détails qu'il avait entrevus plus tôt.

 

- T'as dit qu'il fallait que je m'assois pour manger avec toi des fois. Je fais ça maintenant ou il faut pas ?

 

Il avait toujours ses mains dans ses poches. Sasha ralentit soudain l'allure, fronçant le nez à la vue de ce qui les attendaient en haut d'une volée d'escaliers censée les ramener dans le hall : la brochette était là, attendant patiemment le dernier petit morceau au caramel qui la complèterait.

 

(Il faisait faim. Il fallait dire qu'au bout des cachots, à droite avant l'escalier, il y avait le chemin qui conduisait aux cuisines, et il remontait par le couloir une odeur de jambon grillé qui lui tordit l'estomac. Il en aurait jappé d'envie, mais ça n'aurait pas été correct.)

 

Sasha avait ralenti plus encore : les morceaux de viande s'étaient toutes retournées pour scruter leur arrivée avec force de chuchotements scandalisés, qu'elles cachaient mal derrière leurs petites mains délicates. Le Gryffondor ne put s'empêcher de glisser plus près d'Alison pour parler à voix basse.

 

- Tu devrais pas leur montrer que t'as pleuré, il gronda doucement, comme s'il n'avait pas eu besoin de bouger les lèvres pour s'exprimer, comme un ronronnement à peine perceptible dans l'allée des cachots.

 

Puis, comme on aurait refermé la visière d'une armure pour être mieux protégé, Sasha enfonça ses mains encore plus profondément dans ses poches et carra les épaules, y rentrant légèrement la tête, le visage fermé. La grande blonde le regardait avec une lèvre légèrement soulevée par la répugnance et pour lui signaler qu'il avait remarqué cette déformation disgracieuse de son visage, Sasha la fusilla du regard en s'arrêtant au bas des marches.

Il attendrait qu'Alison débutât l'ascension avant de suivre. Hors de question de s'approcher de ce chapelet-là de bonne volonté.

 

 

Liste des messages de Sasha Shevchen