Harry Potter RPG

Liste des messages de Sasha Shevchen

Sasha Shevchen

Homme

17 ans

Sang-mêlé

Ukrainien

Jusqu'où nos pas peuvent nous porter

Message publié le 10/05/2025 à 16:36

Pour détendre l'atmosphère, et inviter plus facilement les élèves à s'approprier la piste de danse, une musique de rock'n'roll aux sonorités magiques, pleine de clochettes et autres choeurs de Noël, emplissait maintenant la Grande Salle. Des élèves se massaient autour des buffets ; les plus téméraires se lançaient déjà au milieu pour se déhancher en gloussant comme autant de dindons paniqués, les plus timides frôlaient les murs et disparaissaient presque derrière les hauts sapins qui décoraient les quatre coins de l'immense pièce.

Sasha s'était posté près de l'un d'eux, un énième jus de citrouille à la main, maudissant intérieurement l'administration de Poudlard qu'ils n'eussent pas accès à de l'alcool : il en aurait eu bien besoin. Des filles passèrent devant lui en lui jetant quelques regards et il se tint raide, prêt à rétorquer à la moindre attaque ou moquerie, mais aucune ne vînt. Malgré tout, il capta un groupe de Serpentards discuter à voix basse, des sourires mauvais aux lèvres, et décida que c'étaient sûrement eux qui se moquaient le plus.

Aussi, quand une boule bleue et rousse apparut subitement devant lui, Sasha sursauta, manquant de s'étouffer avec son jus de citrouille, qu'il se hâta de reposer. La petite fille s'était faite aussi belle que les grandes, et les tissus vaporeux de sa robe rappelaient son caractère doux et rêveur. Sasha mit les poings sur les hanches pour mimer l'admiration surprise.

 

- Oh, wahou, ben t'es drôlement jolie toi, on dirait une fée !

 

Charlie parlait bien plus vite que lui. Elle avait déjà raconté tout un tas de choses quand il réussit à se sentir un peu moins brûlant et essouflé. Son coeur avait ralenti, et il acquiesçait en écoutant d'une oreille, intérieurement reconnaissant envers Charlie de lui donner l'occasion de ne pas avoir l'air du vilain petit canard qui ne faisait que se goinfrer seul à une table.

Il se laissa tomber sur une chaise en l'écoutant. Charlie s'était retournée vers la foule, prête à profiter de la soirée en bourdonnant d'un groupe à l'autre, tandis que Sasha s'occupait les mains en triturant une serviette en papier bleue pailletée entre ses doigts. La couleur lui faisait penser à celle arborée par Charlie.

 

Au commentaire concernant Alison, Sasha s'était contenté de grimacer un sourire gêné. Il avait essayé de ne plus penser à elle, ces dernières semaines : il estimait qu'il avait fait ce qu'il avait pu pour le deal ; être le petit ami parfait, ce n'était sûrement pas dans ses cordes pour les standards de la jeune Carter. Et pourtant, il avait du mal à abandonner et accepter la défaite : ce n'était pas tant pour la fille en question, se convainquait-il, que parce qu'il n'aimait pas ne pas parvenir à ses fins. Et puis, ses notes avaient plongé depuis qu'ils ne travaillaient plus ensemble, alors, il caressait encore de temps à autre l'idée d'avoir un binôme, une équipe, peu importe. Quelque chose qui lui permît de surmonter les épreuves. A la guerre, il avait appris quelque chose : face à un ennemi, seul, on ne vaut pas grand chose. Notre vie repose sur nos camarades. Ici, Alison était la forme la plus proche de cette sensation de faire partie d'une escouade qu'il avait pu connaître à Poudlard.

Alors, il décida, comme ça, sur un coup de tête : ce soir, il jouerait sa dernière carte pour tenter de sauver l'équipe. Et si ça ne fonctionnait pas... Il faudrait sûrement apprendre à faire cavalier seul, finalement.

 

Juste avant que Charlie ne disparût, Sasha lui tendit ce qui restait de sa serviette en papier : il l'avait plusieurs fois replié ; humidifié la base du pliage et déchiqueté les bouts de feuillets qui s'ouvraient désormais comme une fleur bleue et ronde, en forme de cloche.

 

- Tiens, c'est pour aller avec ta tenue. C'est une... Er, une dzvonyky, fit-il en haussant les épaules : je connais pas le nom en anglais. Mais elle porte chance chez moi.

 

Sur ce, Charlie disparut, et il se mit à scruter la salle. A l'autre bout, sur un banc, la brochette entière s'était constituée - le vert et l'argent l'emportaient de loin sur les couleurs favorites des Serpentards, et on voyait les filles s'échanger des messes basses. Il ne fallait pas qu'il se fît d'illusion : à Halloween, il avait attendu toute la soirée qu'elle fut seule, et finalement, il avait gaspillé son temps. Alison ne quitterait probablement pas sa brochette. Il prit la serviette suivante, pour faire une autre fleur, puis une autre. Il les aligna sur la table.

Trois, et Alison ne se levait toujours pas.

Quatre : aucun garçon pour l'inviter n'avait commencé à se battre.

Cinq : s'il tardait trop, le slow qui débutait pouvait peut-être la convaincre.

 

 

Sasha se leva, un peu raide, et délaissa la sixième fleur à demie fabriquée, qui se déplia sur le coin de la table, tâchée de jus de citrouille.

Les clochettes de Noël résonnaient dans la musique, mais il ne les entendait pas. Il avait décidé de traverser la salle sans tergiverser : qu'elle dît oui ou non, le résultat serait le même : il serait fixé, il pourrait décider s'il l'ignorerait ensuite, elle ne pourrait pas dire qu'il n'avait pas été galant, qu'il n'avait pas joué le jeu du deal. Et qu'importait les jugements de la brochette ? Il avait trop souvent affronté leurs regards pour savoir que les amies d'Alison ne lui étaient pas favorables de toute façon. Qu'elles se moquassent un peu plus ou un peu moins ne changerait rien.

 

Malheureusement, la Grande Salle n'était pas si grande : en quelques secondes à peine, il l'avait traversée, pour se retrouver planté devant la brochette, et il se maudit de ne pas avoir préparé exactement ce qu'il allait dire. Il se trouva subitement à l'étroit dans son costume, comme si de nouveau il était un ours en uniforme - une allure absurde, probablement hilarante. Trop tard, de toute façon.

 

- Tu veux danser, il dit à Alison.

 

Ca aurait dû être une question, mais ça ne sonnait pas vraiment comme tel ; c'était un genre de constat pas très assuré qu'il lançait, à mi-chemin entre un ordre et une hypothèse. Il tendit la main vers elle, le coeur battant, sentant sur sa nuque et ses joues les regards des élèves alentours qui observaient la scène, certains cachant derrière leurs mains leurs sourires goguenards.

 

You could be happy, s'était mise à chanter la voix dans la musique, et Sasha se prépara à recevoir le refus qui mettrait, enfin et définitivement, un terme à ce combat stupide qui consistait à sauver un deal qui n'avait pas de sens.


Jusqu'où nos pas peuvent nous porter

Message publié le 09/05/2025 à 19:04

Un mois et demi s'était écoulé plus vite que Sasha ne s'y était attendu : entre les cours de 5ème année qu'il essayait de rattraper - péniblement - et ceux qu'il devait suivre en sixième année, et des nuits écourtées par des escapades nocturnes qui étaient devenues incontournables, Sasha occupait ses rares temps libres en trois activités essentielles : manger, dormir et... danser.

Contre toute attente, être guidé par Bartholomew Beckett avait rendu la première épreuve plus facile qu'il ne s'y était attendu, et la perspective du bal de Noël avait rendu à Sasha le goût d'atteindre un objectif : s'il devait se retrouver habillé comme un pingouin pour danser en guise de punition infligée pour avoir quelques fois abimé les beaux visages des Serpentards, autant qu'il ne se ridiculisât pas et dansât correctement. Alors, il s'était investi. Bouger sans trop réfléchir, c'était finalement quelque chose d'accessible. Il avait bientôt découvert que les autres danseurs du groupe, pour certains, n'étaient pas bien plus assurés que lui - et même, qu'au beaucoup d'un certain temps, il appréciait certaines répétitions : les mouvements simultanés réussis, la légèreté de la musique qui faisait oublier certains soucis, et l'humour sans cesse renouvelé des deux aînés qui menaient le cours de danse faisaient finalement une expérience hors du temps, légère, comme si ni la guerre, ni Poudlard, ni ces élèves qui le trouvaient pauvres ou sauvages n'avaient existé.

 

Il n'en restait pas moins que le jour du bal, il s'était senti nerveux comme à son tout premier jour d'école quand sa mère avait dû le pousser en avant pour qu'il suivît le troupeau d'enfants. Howard et Bartholomew avaient fait en sorte qu'ils aient chacun un costume qui leur allât correctement - aussi, au lieu de se retrouver en robe de soirée - tenue qu'il ne possédait pas de toute façon - s'était-il retrouvé engoncé dans une chemise blanche et une veste noire, avec un noeud papillon qui lui serrait le cou. Sa tête avec ses joues rougies et ses cheveux en bataille qui sortaient de ce costume lui paraissaient, dans le miroir, tout à fait déplacés et inappropriés, aussi avait-il essayé de mettre de l'ordre avec ses doigts dans ses mèches - sans grand succès : des épis se redressaient toujours automatiquement sur son crâne.

 

 

A cause de l'ouverture du bal, à laquelle il participait avec la fameuse carioca, Sasha fut à l'avance dans la Grande Salle, et passa de longues minutes ébahi devant les décors grandioses de l'école : si Poudlard l'avait impressionné lors d'Halloween, les décorations de Noël étaient plus sensationnelles encore, et la variété des mets battaient tous les records de ce qu'il avait jamais pu rêver dans ses périodes les plus affamées. Pourtant, une fois n'était pas coutume : Sasha n'avait pas faim. Son estomac lui donnait l'impression d'avoir avalé un boule de bowling au déjeuner sans avoir pu la digérer depuis. Alors il restait planté là, un jus de citrouille à la main, à côté d'une certaine Lina - troisième année, dans le groupe de danse, qui n'arrêtait pas de tirer sur sa robe en demandant à sa voisine si elle n'était pas trop courte.

Les élèves affluaient peu à peu. Pour Sasha, les filles étaient toutes belles : c'était un arc-en-ciel de robes et de chevelures, de parfums et de peau dévoilée qui lui aurait donné l'envie de les renifler l'une après l'autre s'il en avait eu le loisir - plus que jamais il aurait voulu que son animal d'animagus fut un chat pour pouvoir se promener entre elles et recueillir les caresses des unes et des autres - mais la panthère aurait fait fuir tout le monde, aussi chassa-t-il cette drôle d'idée de son esprit.

De toute façon, Alison était arrivée : à peine aperçut-il sa chevelure flamboyante qu'il détourna le regard, comme si cela aurait pu trahir quelque chose de lui-même.

 

 

Quelques instants plus tard, les lumières de la Grande Salle changèrent. Les arbres de Noël s'assombrirent, et des projecteurs illuminèrent le centre de la pièce. Bartholomew, puis Howard, ouvrirent le bal sous des applaudissements tonitruants. Et puis, c'était au tour de Lina et d'Alicia de les rejoindre. Quentin, Erik et Miles suivirent. Et alors, ce fut au tour de Sasha.

 

 

Ne pas réfléchir. Le corps sait mieux que l'esprit. C'était vrai pour la panthère, c'était vrai aussi pour la danse.

 

 

Il ne vit pas la foule : ses repères étaient les autres danseurs, le poids de son pas, l'air qui filait entre ses doigts, ses muscles qui réagissaient d'eux-mêmes, en rythme - à peu près. Sasha ne serait jamais le danseur parfait et léger qu'étaient les deux hommes aux cheveux gris qui semblaient tant dans leur élément, mais il croisa le regard de Lina qu'il devait soulever à la fin de la danse : elle s'était retournée vers lui, le regard plein de détresse et d'espoir, alors pour la rassurer, il lui sourit. Elle répondit d'un sourire et courut se jeter dans ses bras, comme le firent les autres filles avec leur porteur, et il la souleva pour la figure finale.

 

 

Tonnerre d'applaudissements. Sueur qui dégoulinait sous la chemise. Lumières aveuglantes. La main de Lina dans la sienne tandis qu'il saluait la foule en se penchant en avant avec les autres.

 

 

Et puis la musique et les lumières changèrent de nouveau, enchanteresses, pour illuminer la salle. Sasha fuit du regard tous ces élèves qui le regardaient, pour battre en retraite au milieu des autres danseurs, dans le fond de la pièce. Il entendit à peine, le coeur battant, les félicitations des adultes, et rendit seulement une bourrade de Miles qui clamait qu'ils avaient fait leur meilleure prestation : Sasha sentait ses genoux sauter sous son pantalon, et prétexta avoir besoin de boire pour s'éclipser vers les grandes tables chargées de mets et de boissons.


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Message publié le 09/05/2025 à 14:51

Sasha mit un moment à réussir à sortir de la torpeur que le sortilège avait abattu sur lui. Il roula sur les fesses, les lueurs des bougies dansant dans ses cheveux châtains quand il secoua la tête pour essayer de reprendre conscience, après quoi il réserva à Gwen un regard mauvais pour toute réponse à la menace qu'elle proférait. Au moins, une chose était sûre : la Serpentard était finalement capable de passer à l'acte, et ragaillardie par le succès de son sortilège, et le fait qu'elle était désormais la seule qui pouvait physiquement tenir la route, elle avait pris une mine supérieure ; le menton haut, le regard couvant les uns et les autres tour à tour comme si elle était en contrôle de la situation. Sasha émit un sifflement entre ses dents en secouant la tête.

 

Pendant ce temps, Alison avait repris ses couleurs d'automne : son visage disparaissait à demi derrière de grosses mèches qui ondulaient de façon désordonnée - bien loin de la coupe raide et propre qu'elle arborait d'habitude. Sasha croisa son regard, mais il le fuit en même temps qu'elle. Lucian avait essayé d'attraper le bras de la jeune fille, ravivant subitement l'énergie du Gryffondor qui se remit sur ses pieds à son tour.

 

- Putain mais lâche-la, malenʹke layno ! s'énerva-t-il, non sans ressentir une pointe de satisfaction de voir qu'Alison ne faisait pas plus confiance à Lucian qu'à lui-même.

 

Ce dernier jeta un regard noir vers Sasha.

 

- Qu'est-ce t'as dit là ? Ca veut dire quoi ton truc ?

- Rien, éluda l'ukrainien, avant de désigner Alison du menton, à l'attention de Gwen. Il faut qu'tu la soutiennes, elle peut reperdre connaissance à tout moment.

- Parce que t'es médicomage maintenant ?

 

Gwen leva les yeux au ciel avant de lâcher un soupir en direction des deux garçons.

 

- Vous êtes chiants, là, les mecs. On va chacun rentrer à nos dortoirs. Ali tu viens avec nous, et toi là, tu retournes dans ta tour, t'avises pas de nous suivre.

- Non.

 

Gwen avait fait un pas vers Alison mais elle s'interrompit.

 

- Quoi, non ?

- J'la laisse pas rentrer avec ce porc.

- Parce que c'est moi l'animal ?

- Mais ta gueule avec ça !

 

Lucian allait pourtant rétorquer, mais sa bouche s'ouvrit sur un silence qui les glaça tous : un bruit était venu des couloirs - comme un cliquetis aigu. Ils se figèrent, les yeux ronds. Gwen et Lucian se consultèrent du regard, et la fille agita rapidement sa baguette avec un murmure : aussitôt toutes les bougies furent soufflées, et ils se retrouvèrent dans une obscurité chargée de l'odeur douceâtre du souffre.

 

- Ca doit être le concierge.

- Ou un fantôme.

- Anh la la, si jamais c'est... Une créature qui ne devrait pas être ici ?

- Arrête Gwen. C'est sûrement un préfet ou le concierge. S'il nous trouve on dit qu'on est venus chercher Alison et qu'on a eu peur de lui. Je vais pas perdre des points pour ce connard.

 

Sasha, lui, n'écoutait déjà plus. Il s'était glissé vers l'angle du couloir, pour jeter un coup d'oeil, mais il n'y vit goutte - la nuit était devenue trop épaisse. Sous sa forme animale, il aurait pu, mais... La proximité des Serpentard rendait l'opération trop risquée. Il s'engouffra de nouveau dans l'espace restreint qui accueillait les élèves - mais il percuta Gwen de plein fouet.

 

- Aouh ! Mais qu'est-ce tu f... Il essaie de m'agresser ! Lucian il es-saie... !

- Mais arrête putain, grogna Sasha en levant les paumes, pour montrer - inutilement vu qu'on ne le voyait pas - qu'il ne faisait rien du tout. J't'ai pas vue c'est tout !

- Chut ! les reprit Lucian. On avance !

 

Sasha s'écarta juste à temps pour les laisser passer. Gwen avait attrapé le poignet d'Alison et il la sentit passer devant lui plus qu'il ne la vit. Shampooing, sueur, parfum. Signature. Lucian leur emboîta le pas et Sasha suivit.

Après quelques pas dans le couloir, ils purent discerner les contours de quelques fenêtres, que la nuit éclairait pauvrement - et de nouveau, le cliquetis se fit entendre, plus proche. Ils se figèrent tous de nouveau : qui que ce fut, créature ou humain, quelqu'un se rapprochait, exactement dans cette direction. Il y eut des murmures confus comme Gwen faisait demi-tour, percutant Lucian et Sasha, emportant toujours Alison avec elle.

 

- Où tu vas ?! chuchota Sasha à Gwen. C'est bouché par là !

- On va trouver un autre chemin.

- Mais pas par là, tu vas nous foutre dans une impasse et...

- Shht !

 

Gwen, tremblante, s'élança dans un couloir voisin. Tandis que Lucian percutait maintenant Alison.

 

- Ali avance ! Ali ?

 

Pas de réponse. Sasha s'alarma - voyant vaguement la silhouette découpée dans l'obscurité de la Serpentard qui s'amollisait contre Lucian. Sasha la rattrapa brusquement pour l'arracher au garçon qui battit l'air des mains, ne comprenant pas ce qu'il se passait.

 

- Vous allez nous faire repérer ! s'énerva Gwen quelques pas plus loin. C'est encore Ali qui veut pas bouger ?

- Elle ... Elle a disparu, fit bêtement Lucian qui la cherchait en tendant les bras à l'aveugle autour de lui.

 

Sasha avait reculé de plusieurs pas, l'emportant avec lui. Elle était à demi-consciente, supposa-t-il, alors il la plaqua dos contre un mur.

 

- Fais-moi confiance. J't'en prie fais-moi confiance, lui chuchota-t-il avant de la lâcher.

 

Alison glissa contre le mur. Avec un réflexe à demi-inconscient, elle tendit les mains vers le sol - chuta sur une grosse masse velue qui s'ébranla aussitôt au petit trot.

Derrière eux, les Serpentard paniquaient avec force de murmures indignés.


Templum Maledictum

Message publié le 07/05/2025 à 20:42

Tu réfléchis trop.

 

Sasha fronça les sourcils, mais tâcha de balancer ses bras en rythme en refaisant les pas indiqués, l'esprit un peu perturbé.

 

Tu réfléchis trop, c'était ce qu'on lui disait lorsqu'il peinait à prendre sa forme animale. Avec le temps, le processus était devenu parfaitement naturel : il se remémorait les sensations d'être félin et aussitôt, son corps suivait son esprit pour prendre cette forme animale. Mais les premiers jours après avoir réussi tout le procédé pour devenir animagus, les transformations, en plus d'être douloureuses, n'étaient pas aussi fluides : il pensait à l'animal, serrait les poings et tendait son corps pour encaisser la soufffrance induite, mais rien ne se produisait la plupart du temps. Il lui avait fallu du temps avant d'accepter de ne pas contrôler parfaitement le processus, de laisser faire quelque chose en lui de plus spontané, plus instinctif.

Ce devait être pareil avec la musique, supposa-t-il donc, mais ce constat ne lui permit néanmoins pas de devenir instantanément un bon danseur. Il soupira, jeta un oeil circonspect vers le vieil homme que semblait être le bibliothécaire.

 

  • - Peut-être, admit Sasha du bout des lèvres, peu désireux de prendre un engagement ferme pour avoir d'autres leçons de danse - et en même temps, mieux valait s'infliger ça et ne pas ressembler à un épouvantail le fameux jour de la représentation.

 

Quelques pas supplémentaires, et la démarche de Sasha devenait plus naturelle. Pas encore le rythme dans la peau - ce serait sûrement difficile d'obtenir cela de lui, mais c'était au moins un peu plus acceptable. Le garçon accueillit avec soulagement la fin de l'exercice. Il opina positivement du chef pour accepter le jus de citrouille, se rendant compte qu'il avait soif, soudain. Il avait en effet transpiré - moins à cause de l'intensité de l'intensité de l'exercice qu'à cause de sa nervosité de réaliser des mouvements qui lui étaient si inconnus.

Sasha s'empara du verre pour le boire presque d'un trait, puis le reposa aussitôt en arrondissant soudain ses yeux devant le sourire malicieux du bibliothécaire. Le garçon eut un sourire gêné, pris de court, et passa d'un pied sur l'autre - comme s'il devait lui-même faire un effort pour passer d'une langue à l'autre. Il haussa les épaules, indécis.

 

  • - Як сказала б мені моя мама, "якщо у вас ще є чоботи, значить, ви не зовсім голі на снігу", il ironisa, avant de secouer la tête. Це вислів з нашої країни, це означає, що ми завжди могли скаржитися на гірше. (Comme ma mère m'aurait dit, "si t'as encore tes bottes, c'est que t'es pas tout nu dans la neige". C'est une expression de chez nous, ça veut dire qu'on pourrait toujours se plaindre de pire.)

 

Il reposa le verre près du pichet : celui-ci s'activa aussitôt pour lui servir un deuxième verre, que Sasha accueillait volontiers. Il fit tourner le liquide orange dans le contenant, comme pour en observer la surface mousseuse, pour s'occuper les mains plus qu'autre chose.

 

  • - Англійці рідко розмовляють моєю мовою, il reprit. Як ви про це дізналися ? (C'est rare les anglais qui parlent ma langue. Comment ça se fait que vous l'avez apprise ?)

 

Un instant, il se tendit, releva les yeux vivement vers le visage de Bartholomew, qui devenait pourtant peu à peu familier.

 

  • - У вас російська сім'я ? (Vous avez de la famille russe ?)


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Message publié le 07/05/2025 à 12:08

Ce message fait l'objet d'un avertissement de contenu :

Langage cru

- Mais j'ai rien fait ! rétorqua vertement le Gryffondor, même si plus il le martelait, plus il se sentait coupable. Et toi c'est les points qui t'inquiètent là maintenant, sérieusement ? MAIS NAN elle est pas morte !

 

Déjà qu'il n'avait pas une grande estime de certaines des filles de la Brochette, Sasha décréta cette fois intérieurement qu'il s'agissait de la pire sorte d'élèves du château - peut-être même après les russes, c'est pour dire.

 

- Je lui ai RIEN donné, gronda-t-il encore en se redressant, emportant avec lui le corps d'Alison dans un mouvement de recul - mais il décida bientôt d'ignorer la baguette de Gwen pointée sur lui.

 

Malgré tout, il décida d'obéir. Peut-être plus pour prouver aux deux autres que lui pouvait parfaitement la soulever, mince ou pas. Sasha eut quand même un grognement en se remettant sur ses jambes. Il avait passé un bras sous les genoux d'Alison pour la soulever et suivit sans un mot les deux Serpentards. Ils réussirent à dénicher une petite pièce qui, vu le décor, avait dû être plusieurs fois occupé par des élèves en vadrouille clandestine au vu des mégots et autres fioles qui traînaient au sol. Gwen avait utilisé un sortilège pour allumer quelques bougies, qui jetaient sur l'endroit des lueurs tremblotantes, vaguement inquiétantes. Sasha jeta un coup d'oeil derrière lui, mais les couloirs assombris restaient désespérément silencieux.

 

Sasha obéit une nouvelle fois ; mais au lieu de déposer Alison simplement, il s'assit avec, la gardant contre lui en laissant les jambes nues de la Serpentard reposer sur le reste de la banquette - il avait suffisamment connu des situations dangereuses pour savoir que garder un otage avec soi était toujours sage quand on n'avait pas l'avantage numérique. Gwen gardait tendue sa baguette vers lui, pas encore consciente qu'il lui serait difficile de lancer le moindre sortilège sans risquer de toucher Alison. Il régnait une odeur de tabac froid, peu agréable, et le Gryffondor regardait les deux Serpentards qui lui faisaient face, tour à tour. Le garçon sembla réfléchir un instant - ses yeux coulèrent sur les jambes d'Alison, dont les genoux blancs, sans conscience, gisaient vaguement écartés. Sasha les rassembla d'une main, sans quitter des yeux le Serpentard.

 

- Finis ce que t'avais commencé, il dit.

- Quoi donc ?

- Défais-lui la robe.

- Je vois pas trop à quoi...

- Il faut qu'on vérifie qu'il lui a rien fait, coupa le Serpentard vertement. Tu peux lui faire confiance toi ?!

- Nan, nan, minauda Gwen timidement.

 

Sasha refusa d'un mouvement de tête négatif gardant ses mains sur le corps d'Alison. Le silence se tendit. Le serpentard sourit.

 

- Regarde, il veut la garder pour lui. Dommage qu'on n'a pas de quoi faire une photo pour prouver à tout le monde.

- On a nos souvenirs ! fit Gwen. On pourra toujours les extraire. Ca se fait.

- Bien vu, fit le garçon, même s'il ne connaissait pas le sortilège pour récolter sa propre mémoire, et son sourire s'élargit. Soit tu la déshabilles, Shevchen, soit Gwen te raccompagne à ton dortoir. Dans les deux cas, on a des souvenirs de toi avec elle inconsciente sur les genoux, et on pourra les partager aux profs pour t'accuser si t'obéis pas. Tu pourras rien nier.

 

Sasha serra les poings et les mâchoires, un moment paralysé. Il tourna son regard vers Gwen.

 

- Le laisse pas faire, c'est lui qui veut en profiter !

- Moi ?! s'offusqua l'autre. J'suis de sa maison !

 

Mais Gwen avait tourné vers lui un regard incertain. Le serpentard afficha une moue dépitée en retour.

 

- Tu vas quand même pas croire ce qu'il dit ! Alison est le genre de fille qui suce sur demande, elle attend que ça, tous les mecs le disent et tu l'sais très bien, j'vois pas pourquoi j'aurais besoin de profiter d'elle quand elle est inconsciente s'il m'avait suffi de lui demander dans les toilettes !

- Quoi ?!

- Ben oui Shevchen, y'a des gens qu'ont pas besoin d'empoisonner les filles pour pouvoir les tripoter ! T'sais quand t'es un mec propre les filles sont naturellement d'accord pour s'laisser sauter !

- Connard !

 

Tout se passa très vite. Sasha s'était levé brutalement, laissant glisser Alison sur le sofa mollement tandis qu'il se jetait sur le Serpentard. Gwen s'était mise à émettre des petits bruits paniqués, n'osant d'abord pas intervenir.

 

- Ah ! A-Arrêtez ! fit-elle en agitant sa baguette sans sortilège, comme une menace inutile.

 

Les deux garçons ne la regardaient pas : Sasha avait fait basculer le Serpentard au sol dans un crissement de fioles écrasées, et celui-ci avait perdu sa baguette tombée par terre, insuffisamment réactif pour s'en servir. Il tâcha de se défendre avec ses pieds et poings, mais en vain - le poids du Gryffondor empêchait tout coup puissant tandis que Sasha écrasa son poing large sur la pommette du garçon, lui arrachant un cri de douleur - tirant Gwen hors de sa torpeur.

 

- Stupéfix ! cria-t-elle.

 

Le sort frappa le dos de l'ukrainien - il fut projeté contre le mur avec une grimace de colère et de confusion. Le Serpentard se hâta de se libérer en gémissant, et Gwen se précipita sur lui pour l'aider à se relever.

 

- Oh my God, Lucian, ça va ?! Tu as mal ?


L'Odyssée Nocturne

Message publié le 03/05/2025 à 11:52

 

Ils n'avaient ni été les meilleurs, ni les moins bons. Si Sasha était venu pour gagner, à mesure que la nuit s'était avancée, il avait un peu perdu de vue cet objectif-là, au profit d'une simple course dans les hautes herbes à traquer des runes avec Sam. Julian s'était comportée de façon plus détachée d'eux, intervenant de temps à autre, mais Sam avait vraiment fait équipe avec lui, et c'était peut-être ça qui lui avait fait oublier son combat amer contre le reste du monde, quelques instants.

 

Lorsqu'ils furent tous réunis devant le professeur Bramblethorn, Sasha avait beau être déçu de ne pas avoir rapporté les meilleurs scores, il était plutôt insensible aux critiques de l'adulte. Il était habitué à la dureté des instructeurs, et au fond, il donnait raison à l'enseignant : ils n'étaient clairement pas assez bons. Mais de son côté, son souffle était encore porté par la course dans un espace ouvert, frais et sauvage - un espace agréable, une échappatoire légère qui n'avait rien à voir avec les salles de cours dans lesquelles il se sentait en cage. Mais cette décontraction n'était pas partagée des autres élèves : beaucoup repartaient la tête basse d'avoir échoué, ou au contraire la tête haute pour regonfler un ego blessé. Le cortège d'étudiants s'avança dans la nuit, vers le château. Sasha enfonça les mains dans ses poches, suivant silencieusement Sam et Julian qui suivaient le cortège.

 

A quelques pas devant eux, la silhouette d'Alison Carter attira momentanément son attention : elle se penchait vers son désormais évident confident, et Sasha préféra baisser les yeux vers le bout de ses baskets.

 

  • - On a fait une bonne équipe quand même, il dit à Sam, à voix basse, pour lui remonter le moral, au cas où elle serait dans le même état que les autres.

 

Il haussa les épaules, se demandant si ce qu'il disait était vrai, et selon quels critères. Peut-être que ce n'était pas exactement ce qu'il avait voulu dire.

 

  • - En tout cas moi j'ai bien aimé faire équipe avec toi, corrigea-t-il à voix plus basse encore, presque comme pour lui-même.

 

Pour une fois que quelqu'un l'avait juste traité comme n'importe qui.


Caméléon

Message publié le 31/03/2025 à 21:50

 

Plus le temps passait, et plus il n'y avait qu'une seule chose qui permettait à Sasha de tromper les pensées désagréables qui menaçaient de l'engloutir, en particulier la nuit.

 

Poudlard aurait pu, aurait lui apporter des souvenirs nocturnes plus doux que ceux de la guerre, et il était vrai que vivre ici était moins difficile en pratique. Pourtant, pendant les heures où le Soleil prenait congé, de désagréables images l'assaillaient et pas seulement celles laissées par la guerre : aussi celles d'enfants armés de morceaux de métal, aux rires désincarnés, ou encore celles de créature comme des araignées géantes qui essayaient de l'enrouler dans sa toile. Ou bien, tout simplement, des armées d'élèves qui le prenaient pour ennemi. Bref, la nuit, tout prenait une autre couleur, un autre sens. Un sens qu'il ne voulait pas regarder en face.

 

Cette seule chose qui lui permettait d'échapper à toutes ces images, c'était tout simplement d'errer sous sa forme animale. Il y passait toujours de plus longues heures, parfois à ne pas rentrer du tout au dortoir. Un jour, il se doutait que ses camarades de dortoir le dénonceraient, mais c'était devenu plus fort que lui. Et pour l'instant, ses déboires l'opposaient principalement aux Serpentards, chez qui il passait pour un menteur, un sauvage, et un faible geignard, probablement, depuis la veille.

Sous sa forme animale, cette réalité s'effaçait pour être réduite à l'essentiel de ses sens. Les souvenirs étaient là, et sa raison aussi bien sûr, mais elle était comme mise de côté, parce qu'il pouvait se laisser porter par ses pulsions félines : l'envie de suivre une trace olfactive dans la forêt, de se rouler dans la neige pour nettoyer son pelage. Les nuits où il pleuvait trop abondamment, il se contentait de rester à l'intérieur du château, comme ce soir-là. Il en avait exploré bien des recoins à cette époque de l'année, et effectuait une espèce de ronde qui consistait à passer en revue les endroits les plus intéressants découverts.

 

Une odeur.

 

C'était comme cela qu'il l'avait trouvée. Certains passages récents laissaient une trace olfactive à laquelle il s'intéressait - ou non, c'était selon. S'il identifiait l'odeur du concierge, il prenait le chemin inverse.

Mais là, c'était autre chose. Une odeur qu'il avait déjà sentie. Qu'il avait haï. Qu'il avait... peut-être un peu désiré, aussi, étiré sous un buisson à regarder la silhouette d'une slave aux boucles généreuses.

Mais maintenant, il fallait surtout la haïr. Que faisait-elle hors de son lit si près de l'aube ? Sasha avait humé les effluves, avait longé un couloir, tourné à un angle. Ses pattes s'appuyaient sur le sol comme si cela avait été du velours : il s'appliquait à garder ses griffes les plus rétractes possibles, car il savait que sinon elles tintaient sur la pierre froide d'une manière qui pouvait le trahir.

Et quand il avait trouvé l'origine de l'odeur, il était seulement resté à observer dans l'entrebaîllement de la porte.

 

Anya s'entraînait. Elle était sage. Plus sage que lui : il aurait dû travailler plus dur et il le savait, plutôt que de vivre comme un désoeuvré. Mais plutôt que d'en tirer leçon, il resta là, à continuer à l'observer.

 

Après avoir transformé les objets, Anya se mit à travailler sur elle-même, sous les yeux curieux mais discrets de Sasha. Il s'était douté de sa métamorphomagie : les cheveux d'Anya changeaient parfois de couleur, assez subtilement, mais visible tout de même. Mais il ne la savait pas capable de... Changer de nez, de forme du visage, de couleur de peau. Il frissonna un bref instant. Ce genre de don était bien plus dangereux que le sien. Elle pouvait si facilement manipuler quelqu'un en prenant une apparence qui n'était pas la sienne, songeait-il - quand la transformation d'Anya se fit plus rapide, plus... Désordonnée.

 

Quand le mannequin éclata, Sasha fit un tel bond, qu'il se retrouva un mètre plus loin, dans le couloir, à détaler, le poil hérissé - mais encore deux mètres plus tard et il s'était retourné, le regard vissé sur la porte, le souffle court, les pattes tendues prêtes à repartir pour s'enfuir le plus vite possible.

Mais de l'autre côté de la porte, pas d'Anya qui débarquait pour l'attaquer. Elle avait juste dérapé avec sa magie, ça n'avait rien à voir avec lui.

 

C'était une opportunité pour faire quelque chose d'idiot et il le savait parfaitement. Sasha jeta un oeil d'un côté du couloir et puis de l'autre, vérifiant que ni créature vivante ni portrait ne pourrait le voir passer d'une forme à une autre.

 

L'instant suivant, il entrait dans la pièce, parfaitement humain.

En silence, il referma le panneau derrière lui pour les isoler, son regard interdit courant sur les débris qui gisaient au sol, un peu partout, puis sur la silhouette d'Anya, dans un état... Probablement proche de celui dans lequel elle l'avait trouvé lui-même, la veille. Il en portait toujours quelques traces au visage, d'ailleurs. Il n'était pas allé à l'infirmerie, s'était soigné lui-même et le résultat n'était pas vraiment parfait. L'une de ses lèvres et sa tempe droite portaient des marques bleuies. 

 

Il s'efforça de grimacer un sourire en s'approchant, à pas lents. Ce n'était pas un sourire rassurant : il fallait qu'elle comprît qu'il n'avait certainement pas oublié. Comme elle avait profité d'un moment de faiblesse pour l'humilier un peu plus. Alors même qu'il lui avait rendu ses photos, malgré la haine qu'il avait pour les Russes. Pourquoi avait-il fait ça ? Il s'en voulait maintenant. Il devait montrer qu'il était au moins aussi dur qu'elle. Non ? Il fallait s'en convaincre.

 

Sasha déglutit, tâcha de surmonter son malaise pour s'accroupir devant la silhouette échouée de la Russe. Il planta ses coudes sur ses genoux, tout en la toisant.

 

  • - Et pourquoi j'dégag'rais ? il demanda d'une voix rauque. Pourquoi j'profiterais pas de la faiblesse des autres ? Comme vous savez si bien faire, vous les Serpentards.

 

Ca ne pouvait pas être une coïncidence qu'autant des russes réfugiés avaient été envoyés dans la maison des serpents. La bouche de Sasha affichait une moue dégoûtée. Il pencha la tête un peu sur le côté, fronça les sourcils.

 

- T'as... vraiment pas la même allure que quand tu f'sais la fière hier, remarqua-t-il, et son étonnement n'était que partiellement artificiel. L'apparence d'Anya, de près, le laissait circonspect. 


Cache-cache

Message publié le 31/03/2025 à 21:36

Un instant, Sasha avait cru qu'Alison se laissait aller contre lui, qu'elle acceptait ce nouveau deal. Leurs lèvres s'étaient frôlées. Il n'avait pas rêvé : il avait senti la chaleur de son souffle et la texture légèrement suintante du rouge-à-lèvres. Il avait retenu le sien, un bref instant - juste avant que le corps de la jeune fille se mît à glisser doucement. Etait-ce une manière de s'abandonner ?

 

Non.

 

Avec un réflexe fébrile, Sasha tâcha de rattraper le corps d'Alison qui s'effondrait entre le mur et lui, un bref instant ahuri.

 

  • - Heu, Alison ?

 

Pas de réponse, sinon cette voix stridente qui avait subitement retenti. Les deux mains de Sasha s'aggripèrent aux épaules d'Alison pour tenter de la retenir, la secouait légèrement pour la réveiller - en vain. Il s'adressa à la nouvelle venue - il ne savait plus qui elle était dans la brochette, et encore moins si elle avait un prénom.

  •  

  • - Hein ?! Mais c'est pas moi ! Elle est tombée dans les pommes ! Va chercher l'infirmière !

 

La fille fit volte-face pour s'éloigner mais aussitôt, elle se retourna de nouveau vers Sasha, le regard accusateur.

 

  • - Et la laisser seule avec toi pour que tu en prof... HAAAN.

 

Elle pointa du doigt Sasha qui avait fini par accompagner Alison par terre. Il était agenouillé, occupé à desserrer les lacets du corset - peut-être un peu plus sauvagement que les rubans délicats l'auraient apprécié. Le corps d'Alison reposait sur son torse, le visage de la jeune fille enfoui sous ses cheveux dévalant l'épaule du garçon tandis qu'il la soutenait d'une main et de l'autre, s'acharnait à défaire ce ruban plus solide qu'il n'en avait l'air.

 

  • - Tu en profites pour de bon ! J'vais te dénoncer au directeur !

  • - Elle peut pas respirer correctement, idiote ! cria-t-il. Va chercher de l'aide à l'infirmerie je te dis !

 

C'était la seule explication qu'il avait. Ca, ou l'émotion ? Est-ce qu'il lui avait fait peur à ce point-là ? Non, ce n'était pas possible. Lorsqu'il l'avait suivie sous sa forme animale, il avait entendu le souffle irrégulier, trop court, plus court que d'ordinaire. Et maintenant tout se mettait en place : Alison qui picorait plus qu'elle ne mangeait, sa taille qui paraissait toujours plus étroite, pire encore serrée dans un tel vêtement. Quelle drôle d'idée prenait la rouquine, de se priver d'air et de nourriture ?

 

  • - Lâche-la ! répéta la fille d'une voix blanche. Ou je...

 

Et quand Sasha tourna la tête, il vit la baguette de la sorcière dressée en l'air, le visage blême. Elle avait reculé plutôt que de venir aider son amie. Pour Sasha, son comportement était incompréhensible.

Sauf si, réellement, elle le croyait dangereux.

Alison avait-elle raconté qu'il était une bête sauvage ? Ou bien était-ce seulement ainsi que tout le monde le voyait ?

 

  • - CASSE TOI A L'INFIRMERIE ! hurla-t-il brutalement, et son cri se répercuta comme un rugissement dans le couloir, si fort que la fille paniqua.

 

Elle fit demi-tour et détala dans l'obscurité. Le silence était brutalement revenu, comme si le reste du château, impressionné par ce rugissement d'outre-tombe, avait décidé de se taire entièrement. Et avec lui l'obscurité.

 

Sasha resta là, quelques instants, à ne savoir quoi faire.

 

  • - A-Alison ? il tenta pauvrement, mais elle ne se réveillait pas.

 

Il tira davantage sur le corset, faisant apparaître les bordures en dentelle noire d'un soutien-gorge. Il avait bien rêvassé de la déshabiller - mais pas exactement dans ces conditions-là.

 

Au loin, il entendit des pas précipités. Sasha s'humecta les lèvres, prêt à la redresser. A la porter s'il fallait. Il la secoua encore légèrement, la tête d'Alison bringuebalant contre son épaule.

 

  • - Alison, s't'euh plaît !

 

Sous ses doigts, la peau de la jeune fille était froide et moite. Sûrement que le couloir devait être glacial, pour quelqu'un qui n'était pas envahi de cette adrénaline qui battait aux tempes de Sasha. Maladroitement, il tâcha d'enrouler ses bras autour d'elle pour la réchauffer.

 

Faites que ce soit l'infirmière.


Les Epreuves des Courageux

Message publié le 31/03/2025 à 21:31

 

Finalement, cette soirée n'était pour le moment pas si désagréable. On l'avait collé avec une espèce de corsaire piqué à la cocaïne qui nécessitait probablement bien, vu son énergie débordante, qu'un élève plus âgé veillât sur lui. Impossible de savoir si c'était l'intention des préfets, bien sûr, mais Sasha avait décidé que ce serait donc sa mission pour la soirée.

 

  • - J't'ai pas entendu du tout, tu t'débrouilles comme un chef.

 

Bon, c'était pas tout à fait vrai, et puis de toute façon le gosse fonçait déjà devant à la recherche de la salle aux armures... Qu'ils finirent donc par trouver après plusieurs tentatives échouées.

 

En vrai, Sasha aussi avait eu un instant les yeux ronds comme des gallions. Il ne connaissait pas encore tous les recoins de Poudlard et il ne s'était pas attendu à ces silhouettes de métal dont certains, le casque probablement enchanté, tournaient la tête vers eux à leur arrivée, si bien que même lui eut un frisson dans le dos. Le grand Gryffondor continua à suivre le plus petit, non sans jeter des regards suspects vers les armures aux carrures massives.

 

  • - Si j'serai toi j'les touch'rai p...

 

Trop tard. Son mauvais pressentiment se dissipa toutefois : l'armure n'eût aucune réaction. Sasha haussa les épaules : Charli était déjà en train de chercher le Sud, avec un résultat plutôt correct pour son âge. Le gamin était sacrément débrouillard, à défaut d'être discret. Une tête au-dessus de lui, Sasha tendit le cou pour mieux apercevoir ce qu'il y avait de l'autre côté de la porte.

 

D'abord, ils ne virent rien. La pièce semblait juste plongée dans l'obscurité, alors au bout d'un bref instant, Sasha poussa le gosse à l'intérieur pour pouvoir entrer à sa suite. Derrière eux, la porte se referma lourdement avec un grincement sinistre, au moment où des torches illuminèrent la pièce. Par réflexe, Sasha jeta un regard derrière lui, prêt à ressortir si besoin, mais c'était impossible : de ce côté-là, la porte n'avait tout simplement pas de poignée. Sans avoir besoin de pousser pour vérifier, il le savait déjà : ils étaient enfermés. Alors, comme Charlie, il regarda devant lui.

 

C'était une salle de Poudlard ordinaire, qui ressemblait à une bibliothèque ancienne, ou plutôt une salle d'archives empoussiérée : des appliques soutenaient des bougies qui éclairaient le long des murs des rangées et des rangées de vieux ouvrages aux couvertures sombres, comme oubliées. C'était une pièce toute en longueur, avec un haut plafond et de l'autre côté, comme dans une symétrie parfaite, une autre porte semblable à celle qu'ils venaient de franchir se présentait dans le mur - celle-ci dotée d'une poignée dorée et brillante.

Une pièce parfaitement ordinaire, sauf que...

 

Un vent frais monta du sol et joua dans les vêtements des deux garçons, dérangeant leurs cheveux tandis qu'ils baissaient les yeux : une pièce parfaitement ordinaire, sauf qu'il n'y avait pas de parquet. Ou plutôt, celui-ci s'arrêtait abruptement un pas devant eux, et en-dessous, un gouffre qui plongeait à travers les étages : on discernait la pièce en-dessous, mais sans sol ni plafond, puis la suivante, puis la suivante... Et cela jusqu'aux cachots que l'on devinait à peine, à des dizaines de mètres en contrebas.

 

  • - Ca... ça doit être une illusion, souffla Sasha à voix basse, pour rassurer le gosse - ou lui-même peut-être.

 

Mais si c'en était une, elle était particulièrement bien faite. On avait le vertige rien qu'à sentir le courant d'air qui grondait entre les étages.

Sasha tendit un index par-dessus l'épaule de Charli.

 

  • - Y'a un fil !

 

Ou plutôt un câble épais de métal, tendu entre eux et l'autre côté de la pièce. Le fil traversait le vide, et même si rien n'était écrit, l'épreuve était claire : il fallait prendre son courage à deux mains et jouer au funambule.


Piège de Crotales

Message publié le 21/03/2025 à 18:46

Sasha fronçait les sourcils et pinçait les lèvres, comme pour sceller, s'empêcher de rétorquer par de nouvelles sottises qu'il regretterait. La vérité était qu'il ne savait pas très bien si, en évoquant ces gamins persuadés qu'en étant de bons soldats on leur rendrait ce qu'ils ont perdu, Anya parlait des petits Serpentards qui l'avaient torturés ou si elle parlait de lui.

 

Il n'était pas comme ça, se répétait-il en son for intérieur. La preuve, c'était que lui n'avait attaqué personne. Il aurait clairement pu s'en prendre à eux depuis le début de l'année : sous sa forme animale, si la Direction ne connaissait pas ses aptitudes comme il le soupçonnait, il aurait pu les faucher un à un, et on aurait jamais su. Oh, on l'aurait soupçonné, lui, le seul Ukrainien. Mais il n'aurait laissé aucune preuve derrière lui, il aurait effacé ses traces, on n'aurait peut-être même pas retrouvé leurs corps s'il s'était bien débrouillé. Seules ses absences dans le dortoir seraient certes suspectes. Mais encore maintenant, il pouvait le faire.

 

Mais il ne l'avait pas fait, et ne le ferait pas. Il savait qu'on ne lui rendrait jamais ce qu'il avait perdu. En revanche, il s'efforçait vraiment de les haïr de toutes ses forces, pour être ce bon soldat. C'était ce qu'on lui avait appris, après tout ; et s'il ne pouvait plus se raccrocher à cela pour savoir quoi penser, alors à quoi ?

 

Sasha porta ses mains à son visage pour les presser, comme si ce geste pouvait supprimer toutes ces pensées. Anya était Serpentard. Elle jouait avec sa tête, et sa tête à lui était pas vraiment son point fort. Il ne fallait pas qu'il écoutât. Mais les mots s'imprimaient malgré lui dans ses oreilles.

Elle n'était pas fière, elle n'avait pas pitié. Elle ne devait simplement avoir aucune émotion, tout simplement. Ce devait être ça.

 

Il voulait juste attendre qu'elle s'en allât, alors il gardait les mains sur son visage, les yeux dissimulés. Ils n'avaient plus rien à se dire et ils le savaient.

 

 

La décharge le prit par surprise : d'une impulsion brève dans les côtes, un sortilège éveilla ses douleurs et il émit malgré lui un couinement. Le temps de relever la tête, et Anya partait déjà après lui avoir infligé cette dernière humiliation.

 

Il regarda encore longuement la porte après qu'elle fut partie, les genoux serrés entre ses bras. Il ne trouvait pas l'énergie de s'en aller malgré le froid qui le faisait grelotter.

 

Il se demandait si elle avait pris plaisir à ce dernier acte, malgré ce qu'elle avait dit. Si elle avait voulu elle aussi assouvir une forme de vengeance brève, ou bien si c'était seulement pour le mettre en garde de ce qu'elle pouvait le faire. Il essayait de lui en vouloir, mais il ne parvenait pas à trouver en lui la haine nécessaire pour cela, comme s'il n'en avait plus à disposition.

Peut-être était-ce à cause de ce doute lancinant qui l'abattait plus que ses blessures : est-ce qu'il n'avait pas mérité ce dernier sortilège, au fond ?


Piège de Crotales

Message publié le 20/03/2025 à 21:16

 

Sasha avait dégluti. Le goût du sang avait la note métallique du sang humain, une amertume qu'il connaissait pour l'avoir déjà expérimentée ; mais il s'y mêlait peut-être autre chose tandis qu'il détournait le regard d'Anya.

Elle n'avait pas pitié. Ca ne lui convenait pas. Si elle avait eu pitié, ça ne lui aurait pas convenu non plus, il le savait. Rien ne pouvait convenir dans sa position : il n'avait pas seulement été battu, il se trouvait humilié à être si faible devant elle, à dépendre de l'ennemi pour être ainsi libéré de quelques gosses stupides.

 

  • - Ils sont parfaitement conscients de leurs actes, rétorqua-t-il à voix basse, dans un grommellement grondeur à peine partagé.

 

Il le savait parce que quand il était parti à la guerre, il avait leur âge. Alors certes, il n'avait aucun sens des réalités. Mais on savait parfaitement ce que l'on faisait, même à cet âge, estimait-il.

 

  • - Comme si j'allais avoir de la peine pour eux, ajouta-t-il - les imaginer morts ne lui faisait rien du tout.

 

Pour lui, ce n'étaient plus des gosses : c'étaient des ennemis, et cette détermination à les haïr se percevait peut-être dans son regard où flamboyait le reflet des torches qui les éclairaient tous les deux de leur lumière chaude, dansante, sauvage. Un long moment, il les garda dardés droit devant lui - toujours sur cette porte qui restait immobile, dans laquelle il semblait voir une menace incarnée par ce panneau de bois massif orné de gonds noirs, aussi durs que sa mâchoire serrée semblait l'être à cet instant.

Peut-être réfléchissait-il. Allait-il les dénoncer ? Sûrement pas. Il n'y avait aucun doute là-dessus : il n'y aurait même pas pensé si Anya n'avait pas évoqué le sujet elle-même. Mais maintenant qu'elle l'avait fait, la situation paraissait inversée : s'il ne le faisait pas, alors c'était comme s'il lui obéissait ; et cela même était si difficile à accepter qu'il sentait l'humiliation lui picorer les yeux comme autant d'aiguilles invisibles. Anya le touchait exactement là où il ne pouvait pas céder : son honneur. S'il avait une seule chose à prouver, c'était bien sur ce point-là. Il n'avait trouvé dans les murs de Poudlard aucun autre Ukrainien avec qui faire équipe pour montrer qu'ils étaient plus forts ou plus intelligents, ou plus téméraires : seul, il n'en menait pas large, et il n'avait aucune qualité particulière qui lui permettait de représenter sa nation avec fierté et le savait bien.

Alors son honneur, c'était tout ce qu'il restait.

 

  • - J'suis pas une balance, il gronda, la voix rauque, au bout d'un long moment. J'vais pas aller pleurer aux professeurs et j'l'aurais pas fait qu'importe ce qu't'aurais dit.

 

Pas plus qu'il n'irait à l'infirmerie. Dans la salle d'eau commune du dortoir des Gryffondor, il se rafistolerait avec les moyens du bord. Ce n'étaient que des égratignures et des bleus.

Il jeta un coup d'oeil de biais, comme pour vérifier qu'elle tenait toujours en main sa baguette - oui, Anya le dominait, et il ne s'était jamais senti aussi misérable. L'avait-elle sauvé ou était-elle venue l'enfoncer davantage, finalement ? Le torturer d'une autre manière ?

 

  • - Avoue qu't'es fière d'eux, il persifla, à peine audible.

 

Il tremblait toujours, malgré son esprit qui se calmait peu à peu. Il fallait dire que l'épisode l'avait fait abondamment transpirer, et que sa chemise humide lui collait à la peau désormais et des frissons de froid l'étreignaient.

Nouveau coup d'oeil vers Anya, vers son visage, cette fois. L'élégance dure de ses traits le gifla.


Les Epreuves des Courageux

Message publié le 20/03/2025 à 21:15

 

Le garçon qui avait manifesté son identité - Charli Blackburn, donc - était déjà beaucoup trop enthousiaste à son goût. Sasha coula vers lui un regard descendant - mais pas con - à la mention de ses redoublements.

 

  • - Huit, il répondit, juste pour l'embrouiller, lassé à l'avance de devoir encore expliquer sa situation une énième fois.

 

Le gosse a un petit sourire en coin insupportable, mais son jeune âge rend la situation plus attendrissante qu'autre chose. S'il avait été son petit frère, Sasha l'aurait sûrement pendu par les pieds, histoire de lui faire la leçon, mais il n'avait pas de petit frère et il n'était pas sûr que les fratries anglaises eussent le même genre de passe-temps que les fratries ukrainiennes.

 

  • - Va devant, grogna Sasha, et il emboîta le pas à Charli, les mains dans les poches, le pas traînant.

 

Les portraits les voyaient passer dans les couloirs comme un duo incongru : devant, comme un conquérant, le pas enthousiaste d'un petit garçon ; à sa suite, les épaules lasses et le pas lourd, un mi-garçon mi-homme dont les baskets semblaient flotter passivement sur la pierre - comme s'il était là juste pour ne pas perdre le corsaire-en-chef de vue, juste au cas où.

Charli essayait d'être furtif - mais Sasha n'essayait vraiment pas. En même temps, les efforts du garçon pour être discrets étaient un peu inutiles. Il se surprit à penser que s'il l'avait chassé, il l'aurait trouvé et abattu en moins de temps qu'il n'en faut pour dire Merlin.

 

  • - Ben au sixième, apparemment, répondit-il passivement au moment où ils arrivaient au pied des escaliers. J'crois pas qu'on soit suivi, mais si tu veux être un peu plus discret, commence par faire attention au bruit de tes pas. Reste sur l'avant des pieds pour être plus léger. Comme ça.

 

Cette fois, Sasha s'engagea le premier dans les escaliers en colimaçon, et il les grimpa quatre à quatre, le pas complètement silencieux : malgré ses baskets, il paraissait effleurer la pierre plutôt que d'y prendre appui. Bientôt, il disparut aux yeux du plus jeune.

Le château enveloppa Charli dans le noir et le silence. Dans les escaliers, les rares ouvertures vers l'extérieur étaient de minces meurtrières qui ne filtrait presque rien dans la nuit, et il fallait principalement se fier au toucher. On devinait à l'oeil nu seulement les paliers des étages suivants, où l'on devinait les longs couloirs dans lesquels brûlaient au loin deux ou trois torches. Puis c'était l'obscurité de nouveau jusqu'à l'étage suivant.

 

  • - Bouh, fit Sasha dans le dos de Charli quand celui-ci émergea à son tour au sixième étage.

 

Le sixième année était posté, une épaule contre le mur de pierre, les bras croisés.


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Message publié le 20/03/2025 à 21:13

Le bruit de la lanterne qui tomba au sol avait sonné pour Sasha comme un gong révélateur. Elle avait peur.

 

Il ne savait pas pourquoi, cette révélation l'excitait autant qu'elle le consternait. Si elle avait peur, c'était un argument contre le deal. Mais il y avait aussi cette drôle d'impression de domination, cette drôle de certitude d'être le chasseur et non le chassé.

Sasha ne l'accula pas davantage. Il s'était immobilisé, et se mordit la lèvre dans l'obscurité, troublé par ses propres dilemmes intérieurs autant que par la vulnérabilité de la situation dans laquelle Alison se trouvait. Ne l'avait-elle pas humilié, en l'ignorant devant ses amies ? En lui demandant s'il était pauvre ? En le faisant languir avec son corps pour mieux se refuser à lui ? Et maintenant, elle était là, sans défense, comme une proie à saisir.

Mais les propos d'Alison le glacèrent plus sûrement que toute la fraîcheur des couloirs abandonnés de Poudlard.

 

Sasha resta un moment silencieux, les mâchoires serrées. Sans avancer. Sans reculer. Lui n'avait pas peur d'elle. Pas peur de son venin. Il eut une pulsion de la gifler pour ce qu'elle lui infligeait avec ses mots : mais à la place, il leva une main. D'un index qu'il posa sur la joue d'Alison, il redressa son visage vers lui puisqu'elle refusait de le regarder - dans la pénombre, il devinait les contours de son maquillage blanc et de sa chevelure atypique, dont la clarté était le seul repère dans l'obscurité. Il y avait peut-être un éclat discret au fond des pupilles d'Alison, mais il n'en était pas sûr. Il devinait le contour de ses lèvres aussi sûrement que celui de la brûlure qu'elle lui infligeait, quelque part dans sa poitrine.

 

  • - J'ai jamais manipulé les filles et encore moins ri sur les morts, ni en Ukraine ni ici, dit-il d'une voix grave. Tu me prends pour un sauvage.

 

Ce n'était pas dit sur le ton du reproche. C'était juste un constat, neutre et réel. Alison avait peut-être de bonnes raisons : il lui en avait donné.

Il avança d'un nouveau pas - avec une lenteur extrême, supprimant entre eux quelques centimètres supplémentaires, jusqu'à ce que leur visage ne fusse plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, que leurs vêtements se frôlassent, que le bout de l'une des baskets touchasse l'une des bottines d'Alison. A cette distance, il humait de nouveau toutes les odeurs qu'il avait capté sous son autre forme. Shampooing, fluides, maquillage, signature corporelle.

Il ne se pencha pas pour l'embrasser malgré la proximité : il expérimentait juste d'être si près d'elle, et son index était resté doucement contre la joue blanche.

 

  • - Laisse-moi te prouver qu'c'est faux, il souffla, dans un murmure si bas qu'il était à peine audible. Que j'suis pas un sauvage.

 

Ils étaient si proches que leurs souffles se mélangeaient.


Templum Maledictum

Message publié le 20/03/2025 à 21:10

  • - Han-han, approuva-t-il, vaguement anxieux.

 

Il n'avait aucune idée de qui était Horace, en réalité, mais il s'imaginait volontiers un autre vieillard sautillant plein d'enthousiasme. Visiblement, c'était comme ça que les anglais occupaient leur troisième âge. Au moins ces vieux-là ne causaient pas trop de problème. Même, ils restaient actifs physiquement, pas comme les pépés qu'on laissait décrépir sur leurs bancs en Ukraine.

Instinctivement, Sasha repoussa vivement cette pensée dans sa tête. L'Ukraine était mieux que l'Angleterre et que tout autre pays d'ailleurs, il n'y avait pas à penser autrement. Son trouble fronça ses sourcils, mais il se reconcentra aussitôt sur ses pieds. Il avait détourné le regard à la tape sympathique dont l'avait gratifié Bartholomew, comme si le geste l'avait vaguement gêné, pudique qu'il était.

 

  • - La carioca, il répéta bêtement. Jamais entendu parler.

 

Le garçon releva les yeux vers le bibliothécaire qui s'était mis à chanter et Sasha arrondit ses yeux comme des soucoupes. Il ne put empêcher un soupir, et avant de reprendre l'entraînement, se passa une main sur le visage.

You-pi, songea-t-il, morne.

 

Puis avec les pas. You. Pi. Dan-sons la ca-ri-o-ca. Bien. Fai-sez tous com-me moi. You. Pi.

Pas si compliqué. Il jeta de nouveau un oeil sur le bibliothécaire, qui le suivait attentivement, re-mimait les pas avec lui, les mains et les doigts perchés comme sur un nuage - ce n'était pas un geste naturel pour lui.

 

  • - J'fais quoi avec mes bras ?

 

-son la ca-ri-o-ca.

 

  • - Si les autres ont eu plus de temps que moi pour s'entraîner, j'pourrais être derrière ?

 

Tous com-me moi.

 

  • - C'est qui les autres élèves ? Pas des premières années hein ?

 

Il s'imagina avec horreur, sa tête dépassant de tous les autres sous le feu de projecteurs magiques, à danser un spectacle pour enfant, déguisé en fleur géante. Ses traits blêmirent d'effroi et il interrompit les pas.


L'Odyssée Nocturne

Message publié le 19/03/2025 à 08:16

Tout n'est pas ce qu'il semble être.

 

Ca, c'était toujours vrai. Lui-même, par exemple, était-il vraiment un garçon ? Probablement pas. Probablement plus.

Une fois de plus, Sasha n'avait qu'envie de se transformer. Sous sa forme animale, rien ne trompait jamais son odorat : tout ce qui ne semblerait pas être serait ainsi démasqué. Mais il ne pouvait tout simplement pas révéler aux autres sa carte maîtresse. C'était mieux ainsi, se convainquit-il, les pas portés par la voix de Sam qui, après que Sasha les eût à tort amenés sur une butte où aucune balise ne se trouvait.

 

  • - Wahou, t'as l'oeil, souffla le Gryffondor en emboitant le pas à la Poufsouffle.

 

En effet, ils s'enfoncèrent entre quelques buissons pour découvrir un pieu. Il s'accroupit silencieusement aux côtés de Sam, les mains sur les genoux. Sowilo, il n'avait aucune idée de ce dont il s'agissait, mais il approuva comme si elle maîtrisait parfaitement le sujet.

En réalité, il n'était pas mécontent d'avoir la Poufsouffle dans leur équipe. De tous les élèves avec qui il avait partagé un cours, c'était bien la seule et l'unique dont il se souvenait avoir reçu un vrai mot de gentillesse. Sam était fidèle à ce que l'on disait des Poufsouffles : une vraie bonté, sans arrière pensée apparente. Le monde des blaireaux paraissait plus simple que celui des autres, faits de moins d'apparences et faux semblants.

 

  • - Hum...

 

Sasha leva le nez au ciel après avoir longuement observé la rune. Ils n'étaient pas censés directement trouver la constellation au-dessus de leurs têtes, certainement ; ils devaient puiser dans leurs connaissances de l'astronomie, mais enfin, cela l'aidait à se concentrer sur l'objet de leur quête : les étoiles.

Sasha aimait les étoiles. En fait, il aimait souvent tout ce qui se rapportait à la nuit : c'était un univers dans lequel il était à l'aise. Mais il avait beau avoir passé de longues à contempler a voûte céleste, à l'autre bout de l'Europe, l'Ecosse permettait rarement une observation tout à fait sans nuage. Cette fois, pour autant, ils avaient la chance d'avoir une belle nuit. Sasha laissait son regard parcourir les enchaînements lumineux qu'il redessinait de mémoire, dans sa tête.

Ici, le Cygne. Là, Pégase. Un peu plus loin, Cassiopée, et en-dessous, la Ceinture d'Orion, qu'il voyait souvent les soirs d'été, de la fenêtre de sa chambre, là-bas, même s'il n'en avait appris le nom que des années plus tard. Ses yeux remontèrent vers la constellation précédente et il pointa un index au-dessus de lui. Finalement, les avoir sous les yeux avait tout à fait du bon.

 

  • - Je pense que ça pourrait être Cassiopée, il énonça avec une certaine assurance.

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