Homme
17 ans
Sang-mêlé
Ukrainien
Identité
-
- Septième année
- Surnoms : Sashou
- Nationalité : Ukrainien
Capacités & Statuts
Groupes
Message publié le 19/06/2025 à 12:16
La surprise l'avait raidi, mais Sasha avait vite accepté l'étreinte de Charlie, l'enveloppant à son tour de ses bras sûrs - et le malaise étrange fit place à la même sensation de soulagement intense et profond : finalement, on n'oubliait jamais comment serrer quelqu'un dans ses bras, même quand on ne le faisait pas pendant longtemps. Après un moment d'inadéquation, les gestes revenaient avec un certain naturel, comme si le corps avait sa propre mémoire, son propre instinct tribal qui lui donnait cette capacité à se pelotonner contre les autres humains quand l'insécurité venait. Alors il serra Charlie bien fort, comme pour lui montrer que c'était pas grave de pleurer soudain, parce que c'étaient ce que faisaient les petites filles et peut-être même des femmes plus grandes, et alors on les prenait dans nos bras et on les serrait contre soi et au bout d'un moment, ça allait mieux.
Il le savait parce qu'on lui avait collé Kalina très tôt dans les mains : la famille n'était pas nombreuse, mais ses deux parents devaient travailler beaucoup pour faire subsister la famille, alors on responsabilisait vite les enfants. Berezhy svoyu sestru, "occupe-toi de ta soeur", était l'une des premières choses que Sasha avait dû apprendre pour aider sa mère lorsqu'elle s'était retrouvée débordée avec un deuxième enfant qu'il faudrait nourrir et habiller.
Mais tout cela était loin, maintenant.
C'était Charlie qui avait un gros chagrin aujourd'hui, et ses larmes chaudes qui tâchaient la chemise de Sasha devaient prendre source depuis un sacré paquet d'années passées à se poser des questions. Sasha se demanda ce que ça pouvait faire de se dire que ses propres parents n'étaient plus dans sa vie depuis ses deux ans, sans pouvoir se souvenir exactement des circonstances de leur départ. On devait se dire qu'on n'avait pas tant d'importance, puisque les deux avaient disparu sans vraiment prendre de nouvelles et s'intéresser à elle tout au long de sa vie. Si on pouvait mettre l'absence de Kate sur un accident ou un malheur, en rassurant Charlie sur le fait qu'elle comptait toujours autant, Freya et Alison n'avaient certainement pu en dire autant d'Owen. Sasha sentit de nouveau cette colère qu'il avait contre ce père absent - ce père qui n'était pourtant pas le sien. Si ç'avait été son père à lui qui avait abandonné Kalina, il lui aurait cassé la figure, parenté ou pas.
- T'as raison qu'il y a pas grand chose qui tourne rond, dit-il à voix basse, repensant à tout ce que Charlie avait pu écrire dans son journal. Mais si on se serre les coudes ça va aller, tu vas voir.
Si on se serre tout court, presque. La peur intense qu'il avait pu ressentir dans certaines situations passées n'avait été surmontée parce qu'ils s'étaient serrés les uns contre les autres, très littéralement. C'était absurde et il le savait : ce n'était pas ça qui l'avait sauvé. Mais ça avait sûrement sauvé son âme, ou du moins c'était comme ça qu'il s'en souvenait.
Parfois, de drôles de bruits émanaient du souterrain. Des cliquetis, des gouttes, des bruissements. Autant d'insectes et de petits rongeurs ou reptiles qui, après avoir été en alerte parce que dérangés par de grosses créatures indélicates, se remettaient à vivre leur vie, avec des instincts peut-être similaires aux leurs. Au-dessus d'eux, le vent bruissait dans les branches du Saule Cogneur, et Sasha avait l'impression qu'ils étaient isolés du reste d'un monde hostile. Si ce monde lui semblait regorger de dangers prêts à les engloutir chaque nuit, comment Kalina et Charlie étaient-elles censées ne pas avoir peur ?
Il resserra son étreinte.
- Ca va aller, il répéta.
Peut-être pour se rassurer lui-même.
Message publié le 18/06/2025 à 17:34
Sam était vraiment masculine. Même ses blagues l'étaient. Sasha eut un sourire en coin, lui décocha un regard curieux. Sam n'avait pas besoin de beaucoup pour se mettre à parler, le contact lui semblait facile, tant et si bien que le Gryffondor avait l'impression que c'était pour elle complètement naturel d'échanger avec le premier venu, quand lui percevait toujours chaque conversation comme un défi désagréable et risqué. Elle faisait déjà la conversation, enchaînant sur le Quidditch, l'annulation de la coupe et les évènements qui y avaient conduits, tandis que Sasha haussait les sourcils.
- J'étais pas au courant de tout ça, fit-il.
Dans sa tête, son esprit avait sauté en conclusion : un sabotage ? C'étaient les russes ! Mais il tâcha de se raisonner lui-même. Quel intérêt avait ce pays à saboter le Quidditch dans un pays voisin ? Quoique dans la diplomatie, on ne savait jamais. Lui, il n'y comprenait goutte, mais d'autres auraient parlé de stratagèmes alambiqués visant à les incriminer. Ces automatismes étaient évidemment plus rares en Angleterre, si bien qu'ils se demandaient s'ils avaient aucun fondement. Ils en avaient sûrement. Peut-être que les russes n'y étaient pour rien dans ce sabotage, mais comme ils auraient pu en être capables, autant les considérer coupables.
Sasha se passa une main sur le visage, comme si le soleil était trop fort pour lui, et reprit sa route. Il haussa les épaules.
- Si j'suis encore là, sûrement que j'y participerai.
S'il avait bien appris quelque chose à la guerre, c'était qu'on ne se battait pas toujours pour gagner - sinon, la moindre défaite et on était complètement démotivé - mais qu'il était important de montrer qu'on avait un certain honneur, et que donc on se battrait pour sa cause, quitte à affronter la défaite. Ou pire. Et s'il n'y avait personne d'autre pour défendre l'honneur de son pays à Poudlard, il le ferait lui-même.
- Je sais que j'ai pas vraiment mes chances, en vrai. Y'en a qui s'entraînent depuis qu'ils sont arrivés à Poudlard, on dirait. Et certains qui ont des très bonnes notes.
Ce qui n'était certes pas son cas.
- Et toi, tu vas participer ? Toi et tes copains, vous donnez l'impression de venir aux cours de soutien pour vous amuser. Mais Ambrose et toi, vous pourriez vraiment concourir, j'suis sûr.
Inutile d'expliquer pourquoi Ferguson ne faisait pas vraiment figure de candidat idéal pour les Poufsouffles. Les arches des fenêtres dessinaient sur le sol des arcs de lumière qui illuminaient leur silhouette avant de les replonger dans l'ombre, successivement.
- Si je peux pas retourner me battre pour chez moi l'année prochaine, je m'entraînerai dur pour au moins montrer qu'on n'est pas vaincus partout, grommela-t-il à voix basse.
Ces derniers temps, les journaux rapportaient de plus en plus de mauvaises nouvelles de son pays. Avec le temps, et des décennies de conflit plus ou moins actifs, le reste du monde s'était peu à peu désintéressé du sujet : c'était normal, de savoir que des gens, si loin, se battaient continuellement. Sasha avait l'impression d'être dans un pays ankylosé. S'il avait rêvé de le réveiller lorsqu'il avait rejoint Poudlard, désormais il savait qu'il ne pourrait plus que montrer qu'il avait la tête haute, même en venant de là où il venait, et ce serait le souvenir qu'il voudrait laisser avant de repartir. Sasha secoua la tête.
- Désolé, c'est pas un sujet. J'sais qu'il faut qu'j'arrête d'évoquer ça.
Laisser la guerre là-bas, avait dit Freya.
- Si vous avez envie de participer, on pourrait s'entraîner ensemble. On s'rait plus forts si on travaille... Genre en collectif, même si à la fin la compétition sera individuelle.
Message publié le 17/06/2025 à 20:12
Les mots d'Alison n'arrangeaient rien. Sasha eut un bref regard dépité vers elle, mais la haine qu'il ressentait envers Anya était plus forte, et il revint à la fusiller du regard avec toute la méticulosité dont il était capable - le souffle court, les dents serrés, prêt à intervenir de nouveau s'il le fallait. La chaleur avait empourpré ses joues et sa nuque, et il serrait toujours les poings.
Son aspect intimidant était suffisamment dissuasif - comme c'était généralement le cas face à ces couards de russes de Poudlard, et Anya ne faisait pas exception : déjà, elle battait en retraite sous sa menace devenue silencieuse.
Comme deux adultes étaient apparus un peu plus loin, cette fois la plupart des élèves se hâtèrent de se disperser, ne souhaitant surtout pas être associés à l'altercation qui avait lieu, mais Sasha n'y prenait garde. Il regardait la russe s'éloigner et à ses derniers mots, bien que déjà plusieurs mètres les séparaient, il fit quelques pas dans sa direction.
- - Заткнись, Никитовна! Не забудь заткнуться! (Ta gueule Nikitovna ! N'oublie pas de la fermer !) cria-t-il, rageur, mais tout à fait conscient de profiter de la terreur qu'il avait vu dans les yeux et l'attitude d'Anya pour lui rappeler le bon comportement qu'elle devait avoir.
Il s'était toutefois immobilisé, la laissant s'enfuir, avec l'envie de cracher derrière elle, mais il se retint. Sasha fit volte-face : Alison était toujours là, près du mur, avec son éternel air offusqué. Il secoua la tête - dans son champ de vision les deux adultes s'approchaient de la scène avec un air blasé. Il se hâta de s'adresser à Alison avant qu'il ne fut trop tard.
- - C'est des conneries, dit-il avec aplomb, comme si on lui avait demandé des comptes. Jamais je toucherai une fille de son espèce et tu le sais très bien.
La colère faisait encore vibrer sa voix, même s'il s'était efforcé de baisser largement d'un ton, à cause des adultes qui cette fois, étaient à portée de les entendre. C'était une femme vêtue d'une blouse blanche, avec des grosses lunettes et une queue de cheval châtain qui atteindrait certainement l'âge de la retraite - l'homme qui l'accompagnait, grand aux cheveux blancs posa sur Alison un regard que Sasha jugea condescendant.
- - Jeune fille, est-ce que ça va ? demanda-t-il, et sa collègue s'adressait déjà à Sasha avec les poings sur les hanches.
- - Monsieur, vous devriez vous expliquer calmement si vous avez un problème à résoudre.
- - Je sais, rétorqua Sasha. Mais c'est cette fille qui a commencé !
Il avait pointé un index en direction de l'escalier par lequel Anya avait disparu, mais la femme - probablement un personnel temporaire, comme une examinatrice de transplanage - fit claquer plusieurs fois sa langue sur son palais en guise de désapprobation.
- - Allons, c'est une attitude très immature, répliqua-t-elle avec un petit air supérieur en rajustant ses lunettes.
- - Elle a insulté ma copine en russe ! se justifia Sasha en élevant la voix de nouveau. J'étais censé la laisser faire ?!
- - Monsieur, je suis au regret de vous dire que je vais demander à ce qu'un professeur enlève 10 points à Gryffondor pour comportement inapproprié.
- - Mais -
- - Faites en sorte que je n'aggrave pas cette décision, trancha la femme.
Sasha s'humecta les lèvres. Serra les dents, regarda ailleurs. C'était sûr, il avait suffisamment eu de retenues comme ça pour des violences au sein de Poudlard. Il devait la fermer.
Son silence parut satisfaire la professeure, qui sourit.
- - Allez, retournez vaquer à vos occupations. Il fait un beau soleil dehors, profitez-en ! claironna-t-elle avant de s'éloigner tranquillement.
Sasha resta planté là, raide. Il regarda les carreaux qui pavaient le couloir, puis Alison.
Message publié le 16/06/2025 à 21:56
Dimanche 4 mars.
Sasha n'avait rien trouvé à la volière qui indiquât que son hibou était arrivé à destination. Il était monté vérifié deux fois par jour depuis deux semaines. Une fois le matin, et une fois le soir.
Puis il s'était dit que c'était ridicule : s'il avait du courrier, le hibou devrait le lui apporter directement sans passer par la volière - et puis, il effrayait systématiquement la nuée d'oiseaux qui vivaient là et qui arrêtaient de piailler dès qu'il entrait dans la volière. Certains le regardaient de haut, méfiants, et d'autres s'envolaient. A croire que ces bestioles avaient un sixième sens. Il n'avait jamais aimé les piafs de toute façon.
Donc, il avait décidé que désormais il résisterait à l'envie d'aller vérifier. Sa journée de travail chez OCQ l'avait suffisamment occupé pour y parvenir. Mais depuis ce matin, il avait lutté : il s'était levé, était allé prendre son petit déjeuner, puis était passé par la bibliothèque pour essayer de faire ses devoirs, sans grand succès. Puis c'était l'heure du déjeuner. Et après quoi ?
Après, il était monté à la volière.
Il en redescendait les mains dans les poches, la mine renfrognée, se maudissant de n'avoir pas su résister à la tentation. Il avait peut-être assez de courage pour être un Gryffondor, mais jamais assez de volonté, se morigénait-il, quand une voix l'interpela, comme sortie de nulle part.
Sasha se retourna pour voir arriver la Poufsouffle qu'il avait déjà rencontré dans les cours de préparation au Tournoi - le vague souvenir de l'épisode de la coupe de cheveux lui revint en mémoire, mais Chadwick n'était pas du genre à revenir se moquer de lui. Elle avait même été plutôt une chouette camarade pendant le cours d'astronomie.
- - Salut, croassa-t-il en réponse, enfonçant ses mains dans les poches de son jean, avisant les mèches humides de Sam avant de se remettre en marche, une fois qu'elle l'eût rejoint pour cheminer à ses côtés. Ca va. Et toi ?
Simple formule de politesse : il n'avait même pas réfléchi à sa réponse. Sasha avait des cernes sous les yeux, mais à part ça, il avait le même air que d'habitude. Un peu boudeur, un peu rustre. C'était peut-être juste son visage au repos. L'allure décontractée de Sam, toutefois, le mettait suffisamment à l'aise pour déambuler à ses côtés. Un beau soleil illuminait les premiers jours de mars, et beaucoup d'élèves en avaient profité pour aller dans le parc. Lui traînait comme on aurait fait une ronde dans un château insuffisamment gardé. : sans destination, seul le chemin semblait compter.
Soudain il eut un mouvement pour regarder derrière eux, mais il n'y avait personne.
- - T'es toute seule ?
C'était plus une exclamation surprise, en réalité, qu'une véritable question. C'était juste qu'il ne voyait jamais Sam sans le reste de la bande. En réalité, surtout à partir de la cinquième année, les élèves se déplaçaient majoritairement par groupes à Poudlard - comme la Brochette - ou au moins par deux. Les rares qui comme lui déambulaient seuls entre les classes avaient tendance à raser les murs, comme s'ils étaient fautifs de quelque chose de fondamental. Lui semblait moins s'inquiéter de ce qu'on le jugeât d'être seul : il ne faisait pas d'efforts pour disparaître, se contentait simplement de jeter des regards hostiles les élèves qui semblaient remarquer sa solitude, comme pour les défier de faire un commentaire. Les garçons l'ignoraient, sauf quelques Serpentards. Les filles se tenaient distantes, en particulier les Serpentards.
Mais avec Sam, c'était différent. Peut-être parce qu'il n'avait pas ce sentiment de rivalité, puisque ce n'était pas un garçon. Peut-être parce qu'il n'avait pas non plus ce sentiment d'être jugé, puisque ce... n'était pas non plus tout à fait une fille.
Sam était juste Sam.
C'était bien comme ça.
Il haussa les épaules, poursuivit sa route. Ce n'était pas à lui que Ferguson et Ambrose allaient manquer. On entendit au loin un coup de sifflet - une équipe profitait du week-end pour s'entraîner sur le terrain de Quidditch. Sasha porta un instant son regard dans cette direction, vers la fenêtre, comme on flânerait devant une vitrine, vaguement intéressé mais sans aucune intention d'acheter quoique ce soit.
- - J'ai entendu que t'étais une sacrée batteuse. C'est dommage qu'il n'y ait plus de Tournoi de Quidditch, j'aurais bien aimé voir quelques cognards se perdre dans l'équipe des Serpentards.
Rien que pour la perspective d'avoir le droit d'envoyer des projectiles sur cette maison hostile, il aurait été prêt à apprendre vraiment à jouer au Quidditch.
Message publié le 16/06/2025 à 18:02
La vie à Poudlard était une spirale qui ne cessait de vouloir plonger vers les méandres d'une réalité dure à laquelle il se sentait toujours plus étranger. Depuis sa conversation avec Freya, Sasha s'était appliqué à prendre ses distances avec les Carter : éviter Charlie dans les couloirs ou le parc, rester le plus professionnel et détaché possible à la boutique avec Freya, se concentrer sur ses potions et ses rempotages pendant les cours qu'il partageait avec les cinquième années de Serpentard. Non seulement c'était pénible, mais en plus il vivait désormais dans la crainte constante d'être soudain convoqué par la Direction de Poudlard.
Mais Anya Nikitovna n'avait pas parlé.
Il ne savait s'il devait cette chance à la crainte qu'il inspirait à la russe, à une forme de compassion ou si elle gardait tout simplement cette carte pour le faire chanter un peu plus tard. Sasha avait découvert que ce qu'il pensait savoir à son égard, à savoir ses transformations étranges et non contrôlées, n'étaient pas tout à fait inconnues des autres : il avait entendu dire qu'elle était métamorphe, et c'était probablement ce qu'il avait vu d'elle le mois dernier. Donc, il ne disposait même pas d'une information avec laquelle il pouvait la faire chanter en retour.
Il n'y avait plus une nuit où Sasha ne pensait pas à cette possibilité.
Que lui arriverait-il si la Direction savait ?
Les autorités seraient informées. Il s'imaginait toutes sortes de scénarios : d'un enfermement à Azkaban pour avoir menti sur sa nature dangereuse, au renvoi de Poudlard vers une institution spécialisée, en passant par un sceau ou autre dispositif magique qui l'empêcherait de se transformer à nouveau. Et il ne savait pas quel scénario était le pire.
Il ne lui restait donc qu'une option : serrer les dents jusqu'à la fin de l'année, renvoyer à Anya ses regards noirs sans davantage l'intimider, s'obstiner à s'isoler pour éviter d'être considéré comme une menace.
Le cours de transplanage était toutefois une opportunité qu'il ne pouvait ignorer. S'il parvenait à repartir de Poudlard un jour, avoir cette capacité serait un grand avantage. Il avait beau ne pas être le meilleur des étudiants, Sasha s'attachait à s'investir là où il voyait des opportunités pratiques de s'en sortir.
La première séance n'avait pas exactement été facile. Par chance, il ne s'était pas désartibulé, mais il n'atterrissait jamais à l'endroit où il l'avait prévu. Pire : il s'était retrouvé nez à nez avec Anya, qui l'avait sèchement remis à sa place, alors même qu'elle n'aurait pas dû se trouver là non plus. Impossible de rien rétorquer : l'intervenante mettait fin au cours et Sasha se contenta d'un soupir méprisant avant d'aller chercher ses affaires déposées au fond de la classe.
Celle-ci s'était rapidement vidée, avec un flot de conversations enthousiastes, et il ferma la marche, traînant derrière les autres pour ne pas avoir à se mélanger à eux.
A la sortie, bouchon.
La première chose qu'il vit fut qu'Alison était encore accompagnée d'un nouveau garçon, avec qui elle semblait plaisanter, passant un bon moment. Il eut envie de prendre la direction opposée du couloir, mais il n'avait vraiment rien à faire dans l'aile ouest. Il faudrait réellement passer devant ce nouvel amant potentiel.
Il avait serré les dents, braqué ses yeux sur le fond du couloir, bien décidé à ne pas prêter la moindre attention à...
- De quoi tu parles ?
L'altercation eut lieu si rapidement qu'elle surprit plusieurs élèves autour d'eux, dont Sasha, qui s'immobilisèrent. Le sang du Gryffondor ne fit qu'un tour. Il attrapa Anya par l'épaule pour la repousser un peu plus loin.
- Кем вы себя возомнили ?! (Pour qui tu te prends ?!) cracha-t-il, le regard brûlant, en lui faisant face. Не трогай ее, ты же знаешь, мне не составит труда за нее отомстить, маленькая девочка! (Ne la touche pas, tu sais qu'j'aurais aucun mal à la venger, pauvre fillette !)
Sasha sentait un feu intérieur lui embraser la poitrine et les poings qu'il serra contre ses hanches pour éviter de s'en servir. Il ne savait pas ce qui avait déclenché cette rage soudaine : qu'elle eût brutalisé Alison, l'insulte odieuse qu'elle avait prononcé à son égard en russe ou tout simplement le mépris avec lequel elle l'avait balayé du tableau comme s'il n'existait pas.
Il savait pourtant qu'il faisait une erreur. Sa voix tonnante risquait d'attirer un professeur, ou un préfet qui passait par là. Comme plusieurs élèves se tenaient coi à les observer, Sasha jeta un coup d'oeil circulaire autour de lui - évitant soigneusement Alison, mais s'arrêtant sur le plus proche des observateurs, dont la mine interdite fixait le Gryffondor avec circonspection.
- Tu m'étudies pour tes ASPIC toi ? Dégage ! Les autres aussi !
Quelques élèves s'éparpillèrent et s'éloignèrent, non sans commentaire méprisant sur le manque de tact avec lesquels on les virait de la scène, mais ils jetaient malgré tout des coups d'oeil par-dessus leur épaule, curieux.
Message publié le 14/06/2025 à 21:36
- Ok ok ok, assura Sasha de l'autre côté du gouffre. C'était p't'être trop ambitieux comme idée !
Charli était trop jeune pour maîtriser ce genre de sortilège, effectivement. Probablement que l'objectif de l'épreuve était vraiment de les faire marcher façon funambule. Maintenant qu'il était de l'autre côté, l'épreuve ne lui semblait pas si difficile : on pouvait sûrement bien se suspendre au câble pour traverser, ce n'était pas trop compliqué. Mais pas vraiment du goût de son binôme.
Sasha se remit sur ses pieds en pouffant.
- On va bien trouver une solution, t'inquiète.
Une fois debout, ses yeux parcoururent leur environnement : mais rien n'avait été laissé dans la pièce, à part quelques tableaux ici et là...
- Ah, j'ai une idée !
Sasha alla décrocher un gros cadre. Au milieu, une femme qui versait du lait dans une marmite, habillée comme une domestique d'une époque datant d'au moins deux siècles avant la leur, se mit à pester à voix haute face à un tel traitement. Mais le vent qui remontait du gouffre étouffait suffisamment sa voix pour que l'élève put tranquillement l'ignorer, et il posa le tableau à ses pieds, bien à plat, avant de se redresser.
- J'vais te l'envoyer comme une plateforme, tu montes dessus, et je le fais revenir. Ok ?
Finalement, cette course d'obstacles était plutôt drôle : Sasha n'avait pas prévu de vraiment s'amuser ce soir, mais c'était une bonne surprise. Et puis, un peu d'entraînement ne faisait jamais de mal.
Il leva sa baguette une nouvelle fois, visant le tableau, effectuant un nouveau geste du poignet.
- Locomotor ! s'exclama Sasha.
Aussitôt, le tableau se souleva de quelques centimètres au-dessus du parquet vieilli et, suivant la direction indiquée par la baguette du garçon, traversa le gouffre en flottant tel un radeau instable vers Charli.
- Voilà, ça devrait être assez solide, monte !
- Vous allez me marcher dessus, maintenant ? Petits sauvages ! Incultes !
- Mets tes pieds et tes mains sur le cadre.
- C'est la moindre des choses !
Sasha haussa les épaules. Il disait ça pour la solidité, pas vraiment pour préserver la peinture.
Sasha Shevchen a lancé un sortilège !
- Sortilège
- Sortilège de Locomotion
- Difficulté
- 4
- Résultat D20
- 6
- Interprétation
- Réussite
- XP gagnée
- 3
- Locomotor ! s'exclama Sasha.
Aussitôt, le tableau se souleva de quelques centimètres au-dessus du parquet vieilli et, suivant la direction indiquée par la baguette du garçon, traversa le gouffre en flottant tel un radeau instable vers Charli.
- Voilà, ça devrait être assez solide, monte !
- Vous allez me marcher dessus, maintenant ? Petits sauvages ! Incultes !
- Mets tes pieds et tes mains sur le cadre.
- C'est la moindre des choses !
Sasha haussa les épaules. Il disait ça pour la solidité, pas vraiment pour préserver la peinture.
Autres résultats possibles
Aussitôt, le tableau se souleva de quelques centimètres au-dessus du parquet vieilli et, suivant la direction indiquée par la baguette du garçon, traversa le gouffre avec une stabilité telle qu'on eût cru à un mécanisme rigide.
- Tu vois ? C'est solide, monte !
- Vous allez me marcher dessus, maintenant ? Petits sauvages ! Incultes !
- Mets tes pieds et tes mains sur le cadre.
- C'est la moindre des choses !
Sasha haussa les épaules. Il disait ça pour la solidité, pas vraiment pour préserver la peinture.
Aussitôt, le tableau se souleva de quelques centimètres au-dessus du parquet vieilli et, suivant la direction indiquée par la baguette du garçon, alla en direction du gouffre pour rejoindre Charli, flottant avec fébrilité...
... mais le sortilège n'était pas assez puissant et le tableau, trop lourd, tomba subitement dans le vide. Charli et Sasha le regardèrent chuter, la laitière poussant un hurlement d'horreur qui s'effaça quand le tableau s'écrasa au sol avec fracas, plusieurs étages plus bas.
- Oups, fit Sasha. Elle est vachement réaliste, cette illusion...
Le tableau ne bougea pas d'un pouce : de la pointe de la baguette du Gryffondor avait jailli une nuée d'étincelles qui, en s'abattant sur la toile, la fit s'embraser brusquement.
- Dermo ! jura Sasha dans sa langue d'origine.
Sans réfléchir, il se mit à piétiner le tableau pour essayer d'éteindre le feu, détruisant plus encore la toile dans le processus.
Si avec ça Gryffondor ne perdait pas de points...
Message publié le 14/06/2025 à 14:42
Sasha avait cessé de martyriser ces pauvres morceaux de bois au contact de Charlie. C'était un contact fugace, suffisant pour lui donner un frisson malgré tout - un mélange de malaise et de surprise, d'une soif ardente et de pudeur. Au moins, les paroles de la petite fille le maintenaient à l'instant présent, plutôt que de se remettre à penser, pour la millième fois, à ce qu'on devait penser de lui là-bas. Mais il peinait à donner du sens à tout ce que disait Charlie. On pouvait aimer quelqu'un et savoir que cette personne était mieux sans soi. Freya avait confirmé ça, et Charlie était peut-être tout simplement trop jeune pour comprendre. Mais il n'allait pas la contredire : il savait qu'elle parlait de son père, et lui non plus n'approuvait pas cette absence, qui le mettait dans une colère envers le célèbre Owen qu'il ne s'expliquait guère. Pendant qu'il était par monts et par vaux, il ne les protégeait pas.
Leurs yeux se rencontrèrent : malgré ses larmes qui avaient rendu ses joues humides, Charlie avait le regard déterminé, probablement bien plus que lui. On avait beau dire que c'étaient les hommes qui partaient prioritairement à la guerre, il avait toujours trouvé les filles plus courageuses. D'ailleurs, les quelques femmes qu'il avait vu se battre avaient quelque chose en elle d'inflexible, une abnégation capable de laisser l'émotion de côté qu'il ne s'expliquait pas. Sasha la contempla longuement, le visage interdit, essayant de mettre du sens sur les propos qui venaient de la psychomage - mais si c'était utile à Charlie, Sasha lui ne les comprenait pas beaucoup. Est-ce que sa tête à lui posait des questions pour combler les vides ? Il avait l'impression que c'étaient plutôt des réponses à des questions qu'il aurait préféré ignorer qui ne cessait de l'assaillir.
Il s'humecta les lèvres, baissa les yeux sur le morceau de bois que Charlie avait rassemblé tel un puzzle bien organisé, et qu'il n'osait plus briser désormais.
Que dire, que ne pas dire ? Il avait encore en tête le regard dur de Freya, bien campée sur ses deux pieds, quand elle l'avait mis en garde.
- Evidemment que je m'en rappelle. Et est-ce que je voulais, c'est plus compliqué que ça.
Des fois il voulait pas, des fois il voulait pour faire comme les autres, faire partie de l'équipe, qu'on soit fier d'avoir Sasha pardus amurskyi à ses côtés. Des fois il avait regretté d'avoir voulu. Des fois il avait regretté d'avoir fui pour ne pas avoir à faire face. Il secoua la tête avec un soupir, perdu lui-même pour répondre à cette question.
- Des fois y'a des choses que t'aimes pas faire mais que t'es obligé de faire, résuma-t-il avec un haussement d'épaules.
Il pinça ses lèvres pour la regarder de nouveau. Charlie avait changé depuis le début de l'année : son visage devenait moins rond même s'il était toujours enfantin. La lueur de la lanterne faisait briller ses joues humides parsemées de tâches de rousseur - semblable à celles qu'Alison essayait toujours de dissimuler.
- Tes soeurs voudraient pas que je te parle de ça, il finit par dire, serrant les dents. Si tu veux savoir si je suis coupable de très mauvaises choses, la réponse est sûrement oui.
Car il devinait bien où allaient les questions de Charlie. Elle essayait, comme les autres, de savoir si ce qu'on pouvait dire de lui était vrai. Alors que depuis le début de l'année, il mettait tout sur le dos des russes et de leur propagande, à mesure que les semaines passaient sa confiance en la justesse de ses actes s'amenuisait. Il avait ensuite essayé de se convaincre que c'était seulement l'approche pudique et naïve de Poudlard qui dérivait vers lui ce jugement négatif, mais sa conversation avec Freya l'avait brutalement mis face à cette réalité : coupable, il l'était. Peut-être pas autant que les russes. Sûrement pas autant que les russes. Il fallait que les russes fussent plus coupables que lui. Il avait l'impression que sinon, il se désintègrerait.
- Mais je peux pas en dire plus. Tout ce que je peux te dire, c'est que quoi que j'aie fait là-bas, à toi je ferai jamais de mal. C'est promis. Ni à toi ni à Alison ni à Freya. Ici c'est pas la guerre, et ça je le sais. Et...
Il s'interrompit pour détourner le regard. Ses yeux se perdirent dans la direction où le tunnel s'enfonçait vers Pré-au-Lard. Les parois de terre et de racines entremêlées disparaissaient dans l'obscurité. La suite n'était pas raisonnable et il le savait parfaitement. Il fit un effort pour garder un visage neutre, malgré la chaleur qui envahissaient sa poitrine, ses joues, qui lui picotait les yeux.
- J'm'étais juste dit que j'pouvais p't'être un peu combler les vides, il laissa tomber à voix basse, comme une confidence déçue, avant de regarder Charlie de nouveau. Que si ton père pouvait pas défendre Freya et la boutique, j'pourrais l'faire. Que si ton père pouvait pas emmener Alison danser, j'pourrais l'faire. Que si ton père pouvait pas te serrer dans ses bras quand t'as du chagrin... J'pourrais l'faire.
Il eut un sourire triste, un peu amer.
- Faire des trucs de gens qui ont une famille, quoi. Mais j'crois qu'tes soeurs sont vraiment pas fan de mes idées.
Message publié le 14/06/2025 à 12:56
Les couloirs n'avaient jamais paru si longs à parcourir à Sasha. Il avait pourtant déjà porté un être humain - et peut-être, même, sous le choc, un corps plus lourd que celui d'Anya, sans s'en rendre compte. Mais à cet instant, il avait une conscience aiguë de tout ce qui n'allait pas : il était hors du dortoir à des heures interdites, à transporter une jeune femme russe inconsciente, le chemisier ouvert même s'il avait rabattu sur elle ce qui restait de sa veste. Si on le surprenait ainsi, qui pourrait croire qu'il ne voulait que la ramener saine et sauve ?
Les rixes entre ukrainiens et russes, ou tout simplement les bagarres déclenchées autour des réfugiés de Poudlard n'étaient pas tout à fait inconnues du personnel de l'Ecole. Et d'intuition, Sasha se doutait que peu de professeurs avaient eu quoique ce fut à redire du comportement d'Anya, alors que ce n'était pas son cas. Il serait jugé coupable avant même d'avoir pu ouvrir la bouche.
Il avait beau accélérer le pas, il avait l'impression que les couloirs s'étiraient devant lui à mesure qu'il les parcourait. Sous sa forme animale, les distances paraissaient beaucoup plus courtes.
Sasha espérait arriver au bout de ses peines, mais c'était sans compter le réveil brutal de la jeune fille. Elle lui échappa des mains, et il ne put même pas accompagner sa chute : Anya s'était dégagée brusquement pour le rejeter, et malgré l'impact au sol, elle s'écartait déjà en le fusillant du regard. L'ukrainien déglutit en jetant quelques coups d'oeil autour de lui.
- Shht ! lui intima-t-il alors qu'elle jurait.
Ils étaient dans une partie du château fréquentée : pas si loin de la salle commune des Serpentards.
Sasha jeta un regard à ses pieds : la veste gisait à côté de la baguette. Le Gryffondor se hâta de se baisser pour les ramasser et se rapprocher d'Anya pour les lui tendre - il se pencha en avant pour lui parler d'un peu plus près, en un chuchotement qu'il espérait, nul ne pourrait entendre, comme s'il commettait un crime.
- Si tu t'sens mieux rentre vite, ordonna-t-il. Et si...
Des gloussements retentirent à l'angle du couloir. Sasha tourna la tête avec vivacité - il capta instantanément une odeur alcoolisée tandis que deux silhouettes apparaissaient et s'immobilisèrent quand ils se rendirent compte, eux aussi, qu'ils n'étaient pas seuls. C'était une jeune fille aux cheveux blonds dont les jambes semblaient flageoler comme des spaghettis - elle se retenait heureusement au bras d'un garçon à la moue défensive et qui toisait déjà Sasha.
- Qu'est-ce que vous faites là, siffla le Gryffondor, qui avait reconnu le duo - la blonde avait plaqué une main sur sa bouche, comme si elle venait de retenir une exclamation, mais ses yeux écarquillés riaient encore d'une ivresse légère.
- Et toi, t'as encore réussi à attirer une Serpentard dehors, fit Lucian, goguenard.
Sasha émit un sifflement mécontent entre ses lèvres.
- Si vous rentrez à votre salle commune, raccompagnez-la, elle se sent pas bien, gronda-t-il, non sans pousser doucement, d'une pression de l'épaule, Anya vers les deux plus jeunes Serpentards.
Le visage de Lucian se troubla.
- Attends, tu veux dire qu'une autre fille t'est bizarrement tombée inconsciente dans les bras ?
- Oh. My. God.
- Mais tu les drogues ou quoi ?
- C'est un hasard, protesta Sasha.
Ses yeux furibonds allèrent de Gwen et Lucian à Anya.
- Dis-leur, je t'ai juste ramenée !
Message publié le 02/06/2025 à 20:24
Le nez à demi dans la terre, Sasha écoutait la lecture qu'elle lui faisait. Il aurait aimé qu'elle lui contât une histoire, ou tout autre chose : sa voix enfantine était berçante, et mêlée aux odeurs qu'elle dégageait, il trouvait dans cette proximité avec la petite fille une forme de sérénité, douce et tranquille.
Mais son esprit humain interprétait bien les mots qui tombaient dans ses oreilles les yeux fermés.
La voix était tremblante, et racontait les terribles angoisses d'une petite fille, qui dégoulinaient dans son sommeil - maintenant, elle rêvait de lui sous la forme de cauchemars sanglants. Il s'y mélangeait la guerre et l'absence du père, les informations sensationnelles des journaux qui cherchaient à vendre et les injonctions d'une soeur qui voulait la protéger.
Ça va pas du tout Sasha.
Je sais, il aurait voulu répondre.
La panthère roula sur le dos en rouvrant les yeux. Son torse se gonfla et un souffle puissant s'échappa de sa gueule - malgré toute l'animalité détendue de la posture, le souffle avait eu l'air d'un gros soupir.
Et puis, les poils changèrent de couleur, la tête prit un peu moins de place, et à la place des oreilles, une tignasse emmêlée se retrouva au sol.
Sasha avait repris forme humaine, mais il resta étendu, les mains sur le ventre, à regarder la voûte qui leur servait de plafond protecteur.
Il resta un moment silencieux, parce qu'il savait qu'il fallait dire quelque chose, mais il ne savait toujours pas quoi.
Sasha s'était toujours dit qu'il devrait réfléchir à ce qu'il raconterait, notamment à sa petite soeur. Qu'il devrait anticiper quels mots emprunter, quelles anecdotes raconter et lesquelles passer sous silence. Qu'il devrait être le plus honnête possible, parce que Kalina n'était pas idiote, et qu'il devait être le plus précautionneux aussi, parce que Kalina ne méritait pas de faire des cauchemars la nuit en rêvant que son frère déchiquetait des gens.
A cet instant, il se rendait compte de la difficulté d'une telle tâche.
Il déglutit.
- Charlie, il dit soudain.
Et il se redressa. Son dos et ses cheveux étaient parsemés de débris de feuilles et de branches mortes, mais il n'y fit pas attention. Il s'assit à côté de la Serdaigle, et s'humecta les lèvres le temps de se lancer.
- Quand je suis parti, je savais pas ce que c'était la guerre. Je croyais partir pour le bien, parce que je savais pas ce qui allait se passer.
Ou plutôt, il en avait une vision déformée. Il savait sans l'avoir vu que lorsqu'il avait quitté son foyer, Kalina avait dû pleurer des nuits entières, parce que c'était dans son lit qu'elle venait se réfugier quand ils entendaient trop d'histoires qui faisaient peur ou le bruit des bombes dans le lointain. Il savait aussi que sa mère et son père avaient dû violemment se disputer. Il entendait presque la voix de sa mère crier que c'était son père qui lui avait mis ces idées d'honneur dans la tête, à cause de toutes les fois où il parlait des russes à table en commentant l'actualité alors que ça n'aurait pas dû être évoqué devant les enfants - et son père aurait rétorqué qu'on ne pouvait pas leur cacher une vérité aussi brutale parce qu'ils en entendraient de toute façon parler par d'autres familles, à l'école, chez les copains, dans les gazettes.
Mais il était là, maintenant, auprès d'une jeune fille que son histoire avait contaminé jusque dans son sommeil, et il n'était plus possible de revenir en arrière.
- L'Angleterre va pas faire la guerre. T'es dans un pays sûr, Charlie. Ici tout va bien, tu as beaucoup de chance d'être née ici. L'Ukraine et la guerre, c'est très, très, très loin.
Sa gorge s'était noué un peu, et il ramena ses jambes pour se mettre en tailleur et se pencher en avant, absent quelques secondes, ses doigts cherchant quelque brin d'herbe à triturer. Il contempla, ce faisant, le dos de ses mains striées de cicatrices noires et épaisses, disgracieuses.
- J'ai pas eu le choix de devenir Animagus, et surtout, j'ai pas eu le choix de cet animal-là, précisa-t-il, avant de secouer la tête. Mais c'est pas vrai que les Veilleurs torturent des enfants. Les journaux écrivent des trucs pour vendre.
Enfin, je crois pas. De drôles de doutes s'étaient parfois insinués en lui depuis qu'il avait consulté les journaux d'Anya, dans lesquels des faits odieux étaient relatés. Il s'était convaincu que ce n'était qu'un tissu de mensonges. Mais il savait aussi que certaines brigades avaient dérapé, comme il avait entendu quelques grands discuter. Il n'avait pas vraiment compris, alors. Il avait cru que c'étaient des sorciers qui avaient raté des missions. Maintenant, avec l'âge, il se demandait à quel genre de dérapage les aînés faisaient à l'époque référence. Ce qu'il avait vu de ses propres yeux lui suffisait déjà largement, et il s'efforça de mettre cela de côté. Il soupira - un soupir semblable à celle de la panthère - avant de relever les yeux vers Charlie.
- Je suis désolé de t'avoir évitée. J'en ai pas envie, pas envie du tout, mais regarde : à peine tu connais un peu mon histoire que ça t'empêche de dormir. Si je suis pas la panthère qui te protège de tes cauchemars, il vaut probablement mieux que je sois pas là du tout, tu crois pas ? En tout cas moi, je veux pas t'en apporter de nouveaux.
Il y eut un silence qui le fit se sentir misérable. Est-ce qu'il y arriverait ? Il ne songeait pas à reprocher à Charlie son escapade à l'extérieur - ç'aurait été Sainte-Mangouste qui se moquerait de la charité - mais si elle se promenait dehors la nuit, il aurait dû mal à ne pas la suivre. Sasha haussa les épaules, reporta son attention sur la petite branche qu'il réduisait petit à petit en morceaux, avec application.
Freya avait raison : il pouvait profondément affecter Charlie, et pas vraiment dans un sens positif.
Sa respiration s'accéléra subitement, et il dût cligner des yeux plusieurs fois pour digérer l'émotion étrange qui l'envahissait. Soudain il comprenait pourquoi il s'était évertué à se rapprocher d'elles. Alison, Charlie, puis Freya : elles étaient des tests. Avec systématiquement le même résultat. Elles étaient la preuve. Il déglutit de nouveau.
- Tu sais, il dit subitement au bout de longues secondes, et sa voix comme ses mains tremblaient un peu, peut-être que si ton père rentre pas, c'est parce qu'il veut vous protéger. Peut-être qu'il vous aime très, très fort, mais qu'il pense que c'est mieux pour vous s'il rentre pas.
Message publié le 02/06/2025 à 18:49
Assis sur la pierre fraîche, aussi immobile que les tableaux encore endormis, Sasha avait l'air de s'être fondu dans le décor du couloir. Il était pâle et il lui semblait qu'une brique du château avait été déposée au fond de son estomac.
Après des mois d'efforts pour se protéger, il avait dévoilé son animagie par pure imprudence. Anya n'était qu'une fille ; et une fille qui avait peur de lui, qui plus était. Il aurait facilement pu se défendre sans se transformer. Il ne comprenait pas ce qui lui avait pris, sinon que de vieux réflexes avaient pris le dessus : sous l'adrénaline du danger, il était redevenu un bref instant le combattant qui devait se défendre, crocs et griffes, face à l'ennemi. Son coeur en avait longuement battu la chamade avant de se calmer, et il se sentait désormais vidé de toute énergie, à contempler devant lui le rideau épais qui protégeait une fenêtre d'où traversait déjà des lueurs grises du matin.
La pièce où Anya se trouvait restait silencieuse.
Il tourna la tête dans cette direction. Elle aurait dû sortir au bout de quelques minutes. Quand il l'avait quittée, elle avait l'air si chancelante et si blême qu'il avait cru qu'elle allait tourner de l'oeil : c'était bien l'une des raisons pour lesquelles il n'était pas parti. Il avait appris ça de sa propre expérience : sous l'effet d'un choc, quand on se blessait, on avait l'impression qu'on allait juste pouvoir se relever et poursuivre le fil de nos activités, avant que nos jambes se dérobassent sous nos pieds.
Avec précaution, pour ne faire aucun bruit, Sasha se releva. Arrivé à la porte, il l'entrouvrit avec lenteur, juste pour pouvoir passer un oeil... Et la voir au sol.
- Blin, chuchota-t-il pour lui-même avant de se faufiler à l'intérieur.
Il se hâta de venir s'accroupir à côté d'elle - vérifia pouls et respiration. Elle s'était seulement évanouie, un bras serré par un garrot. Il se hâta de le défaire en marmonnant - est-ce qu'elle voulait perdre un bras ?! - et aussitôt un filet de sang apparut, gouttant lentement. Sasha récupéra le tissu pour le rouler en boule et appuyer sur la plaie. De sa main libre, et il tira sur les vêtements pour dévoiler l'autre épaule - blyad, cela faisait deux fois qu'il déshabillait une Serpentard inconsciente. Ne le laissait-on jamais déshabiller des filles pour des raisons plus excitantes ? - mais heureusement, de l'autre côté les griffes s'étaient plantées moins profondément, et les plaies avaient déjà cessé de couler.
Au bout de quelques minutes, il put retirer le tissu ensanglanté : la plaie avait cessé de couleur. Il se demanda s'il devait cautériser la plaie, mais la douleur aurait pu brutalement éveiller Anya, et ça ne lui paraissait pas très pertinent. Il se décida de se contenter d'un soin léger - au moins, il serait à peu près sûr de le réussir, même la main tremblante. Avant de s'exécuter, il essuya l'épaule d'Anya du mieux qu'il pût.
- Episkey, prononça-t-il dans un chuchotement en levant sa baguette. Sous ses yeux, la peau autour de la plaie sembla se mouvoir, s'étirer pour se refermer. La cicatrice formée était plutôt disgracieuse : elle tiraillait la peau, épaisse et boursouflée, mais au moins Anya ne risquait-elle plus rien à cet endroit. Pour le reste, Sasha ne savait pas si l'évanouissement d'Anya était dû au choc de la chute, à l'émotion, ou à ce qui se passait en elle juste avant qu'il entrât la toute première fois dans la pièce. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne pouvait décemment pas la laisser ici. Alors il rangea sa baguette et glissa un bras sous les genoux d'Anya, et l'autre sous ses épaules pour la soulever. Il songea à la déposer devant l'infirmerie, mais c'était trop risqué. On lui poserait des questions. Non, tant pis : il la déposerait devant l'entrée des quartiers des Serpentards, où il essaierait de l'éveiller. Que pouvait-il faire de mieux ?
Sasha Shevchen a lancé un sortilège !
- Sortilège
- Sortilège du Bisou Magique
- Difficulté
- 7
- Résultat D20
- 13
- Interprétation
- Réussite
- XP gagnée
- 3
- Episkey, prononça-t-il dans un chuchotement en levant sa baguette.
Sous ses yeux, la peau autour de la plaie sembla se mouvoir, s'étirer pour se refermer. La cicatrice formée était plutôt disgracieuse : elle tiraillait la peau, épaisse et boursouflée, mais au moins Anya ne risquait-elle plus rien à cet endroit.
Pour le reste, Sasha ne savait pas si l'évanouissement d'Anya était dû au choc de la chute, à l'émotion, ou à ce qui se passait en elle juste avant qu'il entrât la toute première fois dans la pièce. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne pouvait décemment pas la laisser ici. Alors il rangea sa baguette et glissa un bras sous les genoux d'Anya, et l'autre sous ses épaules pour la soulever.
Il songea à la déposer devant l'infirmerie, mais c'était trop risqué. On lui poserait des questions. Non, tant pis : il la déposerait devant l'entrée des quartiers des Serpentards, où il essaierait de l'éveiller. Que pouvait-il faire de mieux ?
Autres résultats possibles
La plaie se mût sous ses yeux, se refermant proprement. Elle en garderait une cicatrice, bien sûr - ses compétences étaient celles des premiers soins, sûrement pas d'un médicomage. Mais au moins ne risquait-elle plus rien.
Pour le reste, Sasha ne savait pas si l'évanouissement d'Anya était dû au choc de la chute, à l'émotion, ou à ce qui se passait en elle juste avant qu'il entrât la toute première fois dans la pièce. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne pouvait décemment pas la laisser ici. Alors il rangea sa baguette et glissa un bras sous les genoux d'Anya, et l'autre sous ses épaules pour la soulever.
Il songea à la déposer devant l'infirmerie, mais c'était trop risqué. On lui poserait des questions. Non, tant pis : il la déposerait devant l'entrée des quartiers des Serpentards, où il essaierait de l'éveiller. Que pouvait-il faire de mieux ?
Sous ses yeux, la peau se mût doucement, mais la plaie ne se referma pas. Il jura de nouveau à voix haute, dans sa langue. A la hâte, il retira sa chemise et l'étendit au mieux, puis il tacha d'en faire un bandage bien serré autour de l'épaule d'Anya.
Pour le reste, Sasha ne savait pas si l'évanouissement de la jeune fille était dû au choc de la chute, à l'émotion, ou à ce qui se passait en elle juste avant qu'il entrât la toute première fois dans la pièce. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne pouvait décemment pas la laisser ici. Alors il rangea sa baguette et glissa un bras sous les genoux d'Anya, et l'autre sous ses épaules pour la soulever.
Il songea à la déposer devant l'infirmerie, mais c'était trop risqué. On lui poserait des questions. Non, tant pis : il la déposerait devant l'entrée des quartiers des Serpentards, où il essaierait de l'éveiller. Que pouvait-il faire de mieux ?
Sous ses yeux, la peau se mût doucement, mais la plaie ne se referma pas. Pire, le sang se remit à couler en gouttes lentes et régulières, et Sasha jura entre ses dents. A la hâte, il jeta le tissu imbibé de sang pour retirer sa chemise et la rouler en boule. Il appuya de nouveau sur la plaie.
Message publié le 01/06/2025 à 16:18
Elle refusait, et refusait encore. Sasha secouait la tête négativement, refusant d'y croire. Soudain Anya n'avait plus rien à voir avec la créature étrange et effrayante qu'il avait vue un peu plus tôt : elle était une jeune femme sans défense, avec des larmes plein les yeux et rassemblant son courage pour combattre un ennemi qu'elle savait trop puissant pour elle. Elle résistait, et plus elle résistait, plus Sasha avait l'impression qu'elle était une chose à protéger et non à détruire. C'était injuste. Il devait détester les russes. Et elle, depuis le premier jour, s'acharnait à être jolie, sérieuse et brave, à se comporter noblement - sauf quand elle avait compris qu'ils étaient dans deux camps séparés, bien sûr.
Les traits de Sasha se déformèrent. Maintenant, elle ne le rejetait pas uniquement par principe des origines, mais parce qu'elle avait vu ce qu'il était vraiment.
Il allait d'échec en échec, ici.
Il serra les dents et lentement, baissa les bras. Il se pencha pour récupérer sa baguette, précautionneusement pour ne pas déclencher de la peur chez Anya qui pourrait la faire attaquer de nouveau, puis il se leva. Il ne prit pas la peine d'épousseter son jean qui avait traîné dans la poussière : il recula d'un pas, les bras le long de son corps, vers la porte. Il s'humecta les lèvres, s'efforça de prendre un ton dur.
- Très bien. Tu as raison. Personne saura. Sinon je me débrouillerai pour venir finir le travail.
Sasha espéra que la menace sonnait suffisamment intimidante. Maintenant qu'Anya avait peur de lui, elle ferait son effet, se persuada-t-il. Il n'avait pas besoin qu'Anya restât silencieuse à vie : seulement quelques mois. Il saurait la maintenir silencieuse, se répéta-t-il en quittant la pièce, mais tous ses membres tremblaient.
Il repoussa la porte derrière lui, sans la refermer totalement pour produire le moins de bruit possible. Le couloir l'accueillit avec une lumière douce de fin de nuit : le soleil bientôt allait reprendre tous ses droits sur le château, illuminant chacun des recoins, les terrassant de réalité crue et froide.
Sasha ne fit que quelques pas avant de ranger sa baguette. Il s'adossa contre un mur et se laissa choir lentement le long de celui-ci. Le sol froid et dur l'accueillit en silence, et il fit reposer lourdement son crâne contre la pierre, l'oreille à l'affût, un oeil tourné vers la porte.
Message publié le 01/06/2025 à 15:33
Il y a un rire, dans sa tête. Le rire d'une fille qu'il n'a jamais connue, et pour laquelle il éprouve pourtant un sentiment de familiarité douce.
Ce n'est pas son amie à lui, réaliste-t-il. C'est celle d'Anya.
Il la relâcha brusquement, avec un mouvement de recul, confus. Des bribes de souvenirs étaient encore éparpillés ça et là - On lui montre un cerf. - quand il se laissa tomber sur son séant, sur la pierre froide, à côté de la russe. Il la libéra en retirant la jambe qui restait en travers d'elle, plus préoccupé en réalité par la volonté de retrouver ses propres souvenirs que par l'envie de la laisser vraiment tranquille. Ses propres souvenirs avaient fui vers elle, en partie. Il le savait, sans savoir comment ni pourquoi.
Le ton d'Anya le tira toutefois de sa torpeur, et il la contempla : elle avait retrouvé sa forme habituelle : son visage doux, ses cheveux bouclés. Même sa voix élégante, quand bien même elle était blanche, aussi pâle que sa peau blême à cet instant.
- J'ai... C'est...
Quoi, une erreur ?
- Un accident, il balbutia, le souffle court, sans y croire lui-même. C'était un accident.
Il ne savait plus ce qu'Anya savait. C'était pire que de savoir qu'elle connaissait son secret. Pourquoi n'avait-il pas proprement terminé le travail, comme on le lui avait appris en cas de compromission ? Sasha secoua la tête en un signe négatif. Elle avait peur, très visiblement. Il n'était plus question de le provoquer. La baguette d'Anya tremblait, pointée sur lui dans un geste faible, et il déglutit. Ses yeux se posèrent au sol, puis sur Anya de nouveau. Il crut voir encore son amie, son père, son frère. La coupure de journal qu'il identifiait désormais comme celle qu'il avait vu dans les documents rassemblés de la russe. Il secoua la tête encore.
- J'peux pas. Tu saignes.
Il désigna la tâche sombre au sol. Pas trop importante pour que sa vie fut en danger, jugea-t-il. Suffisamment pour qu'elle dût être emmenée à l'infirmerie, normalement. Mais qu'est-ce qu'il dirait alors ?
- J'vais t'soigner, il dit.
Il leva les paumes pour marquer son innocence : elles étaient marquées de striures noires, semblant vouloir dire le contraire, mais il l'avait oublié.
- J'te jure. Laisse-moi faire. J'partirai pas. Ok ?
Autour d'eux, le château les enveloppait d'un silence de plomb. Il n'avait aucune idée de l'heure qu'il pouvait être. Du temps qui leur restait de tranquillité. Mais il savait qu'il fallait agir vite.
Alors il déposa sa baguette au sol, comme une preuve de sa bonne volonté. Il avait basculé à genoux. Voilà, il était à la merci de la baguette d'Anya.
- Tu peux pas rester comme ça. C'est trop risqué pour nous deux, insista-t-il, se persuadant intérieurement qu'avec ce qu'il avait vu, si elle détenait un secret sur lui, il détenait en retour un secret sur elle également. Laisse-moi faire. Je sais faire. J'ai été formé à ça.
Ainsi qu'à d'autres choses, certes. Mais était-on toujours obligé de retenir les pires de ses qualités ?
Message publié le 01/06/2025 à 14:38
Sasha avait pu respirer l'espace d'un instant, quand Anya s'était détournée. Il observa sa démarche douloureuse, toujours perturbé par le désordre visible qui animait la Serpentard et auquel il ne pouvait donner aucun nom. Sa seule hypothèse était celle d'une expérience - parce qu'on disait que les Russes faisaient des expériences même sur les femmes pour les rendre utiles à la guerre, et parce que les Veilleurs aussi tentaient leurs propres manipulations de la magie pour obtenir des avantages stratégiques. Est-ce qu'Anya avait menti sur son passé ? Quand ils étaient pseudo-amis, elle avait vaguement évoqué une vie de famille, mais pas être investie elle-même dans quoi que ce fût lié à la guerre. Mais il ne voyait pas d'autre explication.
Sasha s'humecta les lèvres, cherchant quoi dire : il avait vu ses larmes, et même s'il ne voulait en concevoir aucune compassion, il voulait aussi mettre un terme à cet affrontement dans lequel elle ne pouvait pas se mesurer à lui - encore moins dans son état de souffrance visible.
Mais elle n'était pas de cet avis.
Elle fit volte-face d'une manière si brutale et haineuse que Sasha lâcha sa baguette.
L'instinct prit le dessus.
Pris d'un réflexe pour se défendre, le corps de Sasha se mua brusquement : son visage s'allongea vers l'avant ses bras raccourcirent, comme absorbé par un torse trapu et ses vêtements se changèrent en un poil dru marqué de tâches rondes et noires.
L'instant d'après, la panthère était là. Les griffes de Sasha renversèrent la jeune femme avec brutalité pour la faire tomber au sol. Il était bien plus lourd sous cette forme - au moins vingt kilos de plus, et c'était une masse dont le cuir ne souffrirait pas de la pression médiocre des mains d'Anya. Sa gueule énorme se retrouva, grondante au-dessus du visage de la russe, les oreilles rabattues en arrière et les crocs dehors - mais ses yeux, ses prunelles étaient humaines, et leurs regards se confrontèrent, tous les deux figés dans la haine et l'horreur.
Que diable avait-il fait.
Sasha la relâcha et bondit sur la porte. La poignée céda facilement et il se faufila hors de la pièce, détalant à toute allure.
Que diable avait-il fait.
Il détala ventre à terre, tourna à l'angle du couloir, à gauche. Gauche encore.
Quel putain d'imbécile. Il ne pouvait pas la laisser savoir. Ce n'était pas un témoin en qui il pouvait faire confiance.
Gauche, et gauche encore.
Sasha réapparut dans la pièce à la vitesse de course. Anya n'avait eu le temps que de se redresser sur les coudes - visiblement sonnée par la chute et la tournure des évènements - et il bondit sur elle. Ses griffes se plantèrent dans ses épaules pour la plaquer de nouveau au sol et un grondement menaçant acheva de la tenir là, prisonnière et immobile.
Un coup de crocs et c'en était fini d'elle.
Pourtant, il retrouva immédiatement forme humaine - les mains appuyées sur les épaules d'Anya, à califourchon sur elle, la respiration haletante et le front en sueur. Il saisit sa baguette et la pointa immédiatement sur le visage de la jeune femme.
- Zabuty, prononça-t-il, le souffle court. (Oubliettes.)
De la baguette de Sasha jaillit une pauvre lumière qui percuta le front d'Anya. Elle parut confuse, et un instant le Gryffondor lui-même fut connecté à un mélange de ses souvenirs - comme probablement, elle le vivait aussi. La situation ne dura qu'une poignée de secondes, mais il vit une famille, un foyer, une coupure de journal et un torrent d'émotions qui lui nouèrent la gorge. Simultanément, il savait qu'il avait malencontreusement déversé des souvenirs en elle - mais lesquels ?
Et se souvenait-elle qu'il venait de l'attaquer sous la forme d'une panthère ? Avec un peu de chance, toute la confusion générée serait un écran contre la vérité qu'il essayait de protéger.
Mais il haletait, perturbé, toujours à califourchon sur elle. Ses yeux allaient du visage d'Anya à sa baguette dressée - il ne la pointait plus sur Anya, comme s'il avait lui-même oublié pourquoi il était là.
Sasha Shevchen a lancé un sortilège !
- Sortilège
- Sortilège d'Amnésie
- Difficulté
- 14
- Résultat D20
- 12
- Interprétation
- Échec
- XP gagnée
- 3
De la baguette de Sasha jaillit une pauvre lumière qui percuta le frond d'Anya. Elle parut confuse, et un instant le Gryffondor lui-même fut connecté à un mélange de ses souvenirs - comme probablement, elle le vivait aussi. La situation ne dura qu'une poignée de secondes, mais il vit une famille, un foyer, une coupure de journal et un torrent d'émotions qui lui nouèrent la gorge. Simultanément, il savait qu'il avait malencontreusement déversé des souvenirs en elle - mais lesquels ?
Et se souvenait-elle qu'il venait de l'attaquer sous la forme d'une panthère ? Avec un peu de chance, toute la confusion générée serait un écran contre la vérité qu'il essayait de protéger.
Mais il haletait, perturbé, toujours à califourchon sur elle. Ses yeux allaient du visage d'Anya à sa baguette dressée - il ne la pointait plus sur Anya, comme s'il avait lui-même oublié pourquoi il était là.
Autres résultats possibles
L'instant suivant, elle paraissait redécouvrir son environnement. Sasha se retrouvait à califourchon sur une fille, et dans une position menaçante.
Mais au moins, elle aurait oublié la panthère.
L'instant suivant, elle paraissait redécouvrir son environnement. Sasha se retrouvait à califourchon sur une fille, et dans une position menaçante, mais si elle se souvenait d'une panthère, ses souvenirs demeureraient trop flous pour pouvoir les associer à Sasha.
Enfin, il fallait l'espérer.
- A... Anya ?
Il la secoua par l'épaule. Quelque chose n'allait pas.
Quelque chose n'allait pas du tout.
[Proposition de résultats possibles, je te laisse choisir :
Inversion temporelle : Au lieu d'effacer les dernières minutes, le sort efface des souvenirs plus anciens, laissant intact le souvenir de la transformation de Sasha
Transfert de mémoire : Les souvenirs d'Anya se mélangent encore plus avec ceux de Sasha, créant une confusion identitaire
Cascades d'oubli : Le sort continue à effacer de manière incontrôlée, détruisant progressivement toute sa mémoire récente à chaque fois qu'elle essaie de former de nouveaux souvenirs
Démence magique : Sa magie devient instable et imprévisible, se déclenchant selon ses émotions fragmentées, de façon durable ou temporaire]
Message publié le 31/05/2025 à 22:28
Depuis le dîner chez les Carter, Sasha ne s'était plus ouvert auprès d'aucune des trois filles. Ni sur son passé, ni sur son intégration difficile à Poudlard. Il saluait Charlie, faisait son travail en écoutant les consignes de Freya, essayait de ne pas épier Alison qui jouait toujours à attirer les regards. Et une seule chose permettait de supporter ce quotidien vide de sens : la perspective de s'en échapper chaque nuit.
Toujours un peu plus longtemps.
Sous sa forme animale, il avait arpenté l'entièreté de la lisière de la Forêt Interdite qui entourait Poudlard, en connaissait parfaitement les contours, les recoins, sans s'aventurer beaucoup plus loin de peur d'oublier de revenir au château - et si cela arrivait, il attirerait trop l'attention. Il fallait qu'il fût présent au cours du lendemain, même les paupières lourdes, même l'esprit embrumé de sommeil. Les journées étaient longues et la fatigue marquait ses traits, mais étrangement, dès qu'il avait repris sa forme de panthère à la tombée de la nuit, il se sentait plein d'énergie.
La pénombre du crépuscule éveillait autour de lui mille sons, mille odeurs, et en lui, autant d'excitation à traquer, à humer, à contrôler des passages pourtant déjà examinés cent fois.
Les nuits où les nuages étaient suffisamment épais et la visibilité presque nulle pour les humains, il passait plus de temps dans le parc, à tourner autour des Sombrals qui lui jetaient des regards méfiants, ou bien à provoquer le Saule Cogneur en s'asseyant sur un talus, à quelques centimètres à peine de la portée de la dernière branche qui fouettait l'air rageusement sans pouvoir l'atteindre. De temps à autre, il profitait de cet arbre aux propriétés si étranges pour s'entraîner durement : il s'élançait dans le territoire du Saule et s'efforçait d'en éviter les coups sauvages ; il contre-attaquait en lacérant l'une ou l'autre branche de longues et profondes griffures qui enrageaient l'arbre plus encore ; et le jeu violent se répétait jusqu'à épuisement.
Alors, Sasha déclarait forfait, et partait se réfugier sous un bosquet ou dans un arbre de la Forêt, pour y reprendre son souffle, se tasser dans une posture de repos où il somnolerait quelques heures, les yeux mi-clos, à surveiller ce qui était visible, jusqu'à l'heure où il s'efforcerait de rentrer.
Cette nuit-là, c'était un programme similaire qui l'attendait. Sasha s'était approché du Saule Cogneur, dont les branches restaient immobiles encore. Il n'osait déclencher trop tôt sa fureur ; certains professeurs et élèves veillaient tard, et auraient pu apercevoir l'arbre de leur fenêtre malgré la brume qui flottait sur l'herbe et engloutissait largement les reflets de sa propre fourrure. Tapi dans la verdure, son poil se mêlait aux nuances d'ombre d'un sol inégal, le rendant invisible pour un observateur du château, et sa démarche lente, louvoyante, disparaissait dans les vagues formées sur l'herbe qui se pliait à chaque souffle de vent. Une brise qui charriait une odeur d'écorce humide, de feuilles mortes en décomposition, et de cire chaude qui consumait.
La panthère s'immobilisa en chemin. Le saule cogneur paraissait sur ses gardes. Sasha respira de nouveau : l'odeur avait disparu. Une odeur de bougie. Inhabituel à cet endroit. Il resta longuement immobile : au bout d'un moment, très fugace, l'odeur revint de nouveau - avant de la perdre, il avança - il la perdit tout de même. Ses oreilles et ses yeux apparurent au-dessus de la verdure tandis qu'il cherchait tout autour de lui - un signe visuel, ou auditif, mais le chuintement du vent masquait cette partie de ses perceptions. En revanche, sous le Saule Cogneur, une faible lueur, que ses yeux perçants uniquement étaient en mesure de deviner - quelqu'un se cachait là-bas.
Il hésita.
Si c'était un groupe d'élèves qui bravaient le règlement pour aller fumer discrètement, il valait mieux ne pas croiser leur route.
Son coeur se mit à battre.
Et si c'était Alison ? Qui avait suivi un garçon ?
Ca ne le regardait pas, si c'était le cas. Et puis, les chances étaient si maigres.
Il fallait qu'il vérifiât tout de même.
Sasha traversa le territoire du Saule en quelques bonds rapides et silencieux - pour la forme, le Saule Cogneur cingla les herbes hautes, sans succès : l'instant suivant, la panthère louvoyait déjà entre les racines, pour se tapir derrière l'une d'elles, près de la lumière.
Un passage dissimulé. De toutes les fois qu'il avait approché l'arbre, il n'avait jamais songé à fureter si près des racines. Il aurait pu se morigéner d'avoir manqué une telle opportunité d'exploration - mais cette fois les odeurs l'avaient détourné vers une autre préoccupation : aux senteurs diffusées par la lanterne se mêlaient les résidus d'encre et de papier humide, de cire Polish d'OCQ, de vêtements de Carter. Et une signature familière.
Charlie.
Sans attendre, la panthère descendit dans le passage.
Charlie l'entendit - malgré son agilité, son poids et le humus qui couvrait le sol provoquèrent des craquements sous ses pattes, et il s'immobilisa quand il la vit en pleine lumière : recroquevillée là, avec des larmes sur les joues qui luisaient sous l'effet de la lanterne. Sasha la contempla sans bouger un poil quelques instants - le temps, en réalité, qu'elle put le reconnaître à son tour. Il hésita à se transformer en humain.
C'était la meilleure chose à faire. Mais pour lui dire quoi ?
Charlie était triste.
Sous sa forme humaine, il la comprendrait mieux.
Mais sous sa forme humaine, il la comprendrait trop.
Et il ne fallait pas qu'elle le fréquentât vraiment, n'était-ce pas ce que Freya voulait ?
- Roâ.
Un feulement rauque, mais non menaçant. Sasha observa un moment les alentours - aucune autre odeur non naturelle, aucun autre bruit suspect. Ils étaient seuls.
Alors tranquillement, il vint laisser choir son corps massif à côté d'elle. Avoir le ventre dans la terre ne le gênait pas. Il rassembla ses pattes sous lui, posa son museau de côté, sur le sol, mais le dessus de sa tête contre la hanche de Charlie.
Moi non plus, je sais pas, il aurait voulu dire, mais il se contenta de fixer une feuille morte à demi déchirée devant ses yeux verts - la seule chose qui semblait encore vaguement humaine en lui sous cette forme.
Message publié le 31/05/2025 à 21:38
Le sourire de Sasha s'était effacé. Il s'efforçait de se concentrer. Il avait serré les poings, les jointures de ses mains devenant blanches malgré les striures noires qui les parcouraient inélégamment. Ses lèvres se pincèrent et se tordirent tandis qu'il serrait les mâchoires, résistant à la pulsion de l'attraper par le cou pour y resserrer ses doigts et la faire taire.
Etait-ce la raison qui le retenait, ou la stupéfaction de ce qui se passait sur ce corps, habituellement si parfait, désormais en proie au chaos ? Anya donnait en vérité un spectacle qui l'effrayait au-delà de ce qu'il l'aurait admis : sa peau miroitait de couleurs et de textures changeantes, jusque sur son visage aux traits pourtant relativement intacts ; ses cheveux s'allongaient et se défrisaient, gigotaient telles mille queues de lézard abandonnées dans la fuite. L'expérience était troublante, et Sasha respirait fort, sans s'en rendre compte, juste parce que c'était nécessaire pour encaisser tout ce qui se passait tant visuellement que dans les mots d'Anya. Ses paroles étaient autant de flèches qui le clouaient à la réalité, lui rappelant l'identité de celle qu'il regardait à terre.
Quand elle se redressa, il se leva aussi mais pour avoir un mouvement de recul, incertain. Il la scrutait toujours, les yeux écarquillés de stupéfaction. Bientôt il prit un air mauvais.
- Zatknysya ! (Ta gueule !) rétorqua-t-il aussi vertement qu'il le pouvait, dans une expression bien ukrainienne, et probablement haïe des russes. Parle pas de c'que tu connais pas !
Elle fit un pas en avant en avant, Sasha fit un pas en arrière. Ses doigts s'étaient resserrés sur sa baguette, mais en cas de danger véritable, ce n'était pas sous cette forme qu'il se défendrait. Mais comment justifierait-on d'avoir retrouvé le cadavre d'une élève lacérée de griffes et de crocs ?
Le pas suivant, et Sasha se retrouva contre le mur, le souffle court. Anya était si proche, avec son teint de fantôme, et il sentait son sang vivant battre follement dans ses veines. Il en avait vu, des choses, sur le champ de bataille, mais cela était encore inédit.
Mais il n'était pas question qu'il s'en allât. Il serra les lèvres de nouveau, rassemblant de l'oxygène, du courage, et tout ce qui pouvait traîner en lui avec.
- Qu'est-ce que t'as ?
Il avait demandé ça froidement. Comme s'il exigeait de savoir, si elle exigeait qu'il partît.
- Qu'est-ce que t'es ?
Une vague moue de dégoût s'était peinte sur son visage. Ses mains étaient moites et ses doigts tripotaient sa baguette, mais il l'avait gardée baissée. Elle n'avait pas fait la guerre. Si elle l'attaquait, il aurait tôt fait de répliquer. Il maîtrisait la situation, se convainquait-il intérieurement. Il maîtrisait.
- T'es le résultat de quel genre d'expérience ratée ? persifla-t-il.