



14 ans Sang-Mêlé·e Française Notoriété
Adam garde les yeux sur le serpent, même quand elle parle. Il écoute sans l’interrompre, l'air absorbé. Il ne comprend pas tout, mais il sent que c’est important. Chaque mot semble poser quelque chose qu’il n’avait jamais pensé à nommer. Il penche un peu la tête quand elle dit don. Ça ne lui semble pas juste. Ce n’est pas un cadeau, ce n’est pas une chose brillante qu’on montre. C’est juste là. En lui. Comme un battement. Une présence. Une évidence. Quand elle lui demande s’il connaît quelqu’un d’autre comme lui, il fronce les sourcils légèrement. Tente de se remémorer une conversation. N'importe quoi.
- Je sais pas… non. Peut-être ? Ça me dit rien.
Il gratte doucement la pierre du bout des doigts. Réfléchit. Loin de l’idée d’un secret, c’est juste qu’il ne s’est jamais vraiment posé la question. Il croit que sa sœur Mabel pourrait comprendre, si elle essayait. Mais elle ne l’a jamais fait. Et Dylan, elle, dit souvent que les serpents sont flippants. Elle ne les approche pas. Adam lève un peu les yeux vers la femme, hésite, puis demande :
- C’est si rare ?
Il ne sonne pas inquiet, mais plutôt intrigué. Il voudrait de classer l'information dans sa tête. Adam n’a pas peur d’être différent. Mabel et lui sont différents. Ils l'ont toujours été. Mais il n’aime pas ne pas savoir, ne pas comprendre. Il y a quelques secondes, il pensait encore que tout le monde pouvait entendre les serpents. Il tourne enfin complètement la tête vers l'inconnue. Maman ne veut pas qu'il parle aux inconnues, mais Adam obéit rarement à cette règle particulière.
- C’est pas comme une langue. C’est pas des mots. C’est… quelque chose entre. Tu vois ?
Il baisse à nouveau les yeux sur le serpent, qui a bougé d’un centimètre, peut-être deux. Pas plus.
- J’ai pas l’impression que c’est un don, il dit doucement. C’est plus… comme une vieille chanson qu’on connaît déjà. Même si personne me l’a apprise.
Un silence. Puis :
- Vous pensez que c’est grave ?
Devrait-il garder ça secret ? Il ne pourrait jamais cacher ça à Mabel. À Dylan sans doute. À Maman... il n'en est pas certain. Maman trouve toujours. Même les choses qu’il pensait bien enfouies. Elle les déterre. Comme si leurs secrets poussaient directement dans son jardin.